Le Covid « moyen » pourrait être le plus dangereux des Covid <!-- --> | Atlantico.fr
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Une personne se fait tester lors de la pandémie de Covid-19.
Une personne se fait tester lors de la pandémie de Covid-19.
©DENIS CHARLET / AFP

Symptômes

Alors que le Covid long handicape de plus en plus de patients, les syndromes persistants du Covid peuvent être les plus dangereux à moyen terme, selon une publication du Professeur Benjamin Mazer.

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : On parle de plus en plus du Covid long, même si la reconnaissance du phénomène est plus complexe. Dans the Atlantic, Benjamin Mazer, Professeur adjoint de pathologie, pathologiste chirurgical et écrivain estime qu’il faudrait aussi parler de « Covid moyen ».  Est-ce effectivement à moyen terme que les syndromes persistants du Covid sont les plus dangereux ?

Antoine Flahault : L’une des grandes difficultés du Covid long réside dans sa définition. Aujourd’hui il s’agit, en vrac, de tous les symptômes post-infectieux survenant plus de 4 semaines après un diagnostic de Covid, et non explicables autrement que par le SARS-CoV-2. Il faut reconnaître que c’est une définition très vague. On y retrouve la fatigue, les difficultés de concentration, l’essoufflement, les douleurs musculaires parmi les symptômes les plus fréquemment rapportés, qui parfois sont signalés comme fortement invalidants. Mais on y regroupe aussi des manifestations menaçant le pronostic vital, comme des embolies pulmonaires, infarctus du myocarde ou accidents vasculaires cérébraux. Pour ne prendre que ces trois dernières complications, la plupart survient dans les toutes premières semaines après le diagnostic de Covid-19, et le sur-risque qui leur est associé initialement disparaît rapidement avec le temps. L’appellation « Covid long » pour désigner tous symptômes post-Covid a le mérite de la simplicité, en termes de communication vers le grand public.  Les cliniciens et les épidémiologistes aimeraient cependant pouvoir distinguer ce qui relève d’une complication sub-aigüe, c’est-à-dire survenant dans les jours ou semaines après un diagnostic de COVID-19, de symptômes plus retardés et chroniques. Nous nous retrouvons aujourd’hui devant un « panier » rempli de diagnostics disparates, et il nous faudrait mettre un peu d’ordre dans tout cela. Commencer par les trier selon leur chronologie de survenue semble donc une approche raisonnable.

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Quels sont les dangers en question ? Que savons-nous à l’heure actuelle de l’évolution dans le temps des symptômes liés aux cas de Covid long ? A partir de quelle période de temps observe-t-on une amélioration ?

L’embolie pulmonaire est une maladie thrombo-embolique qui projette des caillots de sang dans les poumons. Elle peut être gravissime et conduire au décès. Eh bien, elle survient 32 fois plus fréquemment dans le mois qui suit le diagnostic d’infection à SARS-CoV-2. Stricto sensu, on est à la limite même de la définition du Covid long et pourtant, il ne s’agit probablement pas d’une complication directe du virus lui-même, mais bien d’une complication post-infectieuse précoce. Le risque d’embolie pulmonaire diminue rapidement par la suite, puisque deux mois après le COVID-19 il n’est plus que de deux fois supérieur au risque de base qu’il rejoint après seulement trois ou quatre mois.

L’infarctus du myocarde, la fibrillation auriculaire et les accidents vasculaires cérébraux ischémiques surviennent entre cinq et huit fois plus fréquemment en phase aigüe de l’infection par le coronavirus, puis le risque décroit après quelques semaines seulement.

Le risque de diabète double, également dans les quatre premières semaines, puis diminue à son tour et revient au risque de base dès la 13ème semaine après l’infection.

Quelles sont les zones d’ombres qui persistent encore sur les symptômes persistants du Covid à moyen et long terme ?

On a beaucoup tendance à minimiser les conséquences du COVID-19 aujourd’hui. Tant du côté du public qui veut tourner la page, que du côté du corps médical qui ne rapporte pas toujours les effets à leurs causes premières. Les Britanniques, les Nord-Américains et les Nordiques, dont la culture épidémiologique est solide, commencent à mieux cerner l’infection par le SARS-CoV-2 et ses conséquences. Certes les signes de l’infection respiratoire chez les personnes bien vaccinées qui ne souffrent pas d’immunodépression apparaissent pour la plupart bénins aujourd’hui. Il est beaucoup plus rare désormais de se retrouver ventilé, en réanimation, pour une infection par le SARS-CoV-2. Développer un accident vasculaire cérébral ou un infarctus du myocarde au décours d’un COVID-19 bénin n’est alors pas toujours repéré par les patients voire par leur médecin comme une conséquence du COVID-19, qui lui-même est de moins en moins souvent diagnostiqué, et pourtant l’on sait aujourd’hui que ces complications sont beaucoup plus fréquentes dans ces circonstances. On hospitalisera alors la personne pour son infarctus, et l’on dira même peut-être qu’il s’agit d’une hospitalisation « avec Covid » et non pas « pour Covid ». Voire on omettra le diagnostic récent de Covid. Bon nombre de ces complications post-infectieuses ne seront pas repérées comme telles et passeront alors sous les radars de la veille sanitaire. Par ailleurs, diabète, fibrillation auriculaire, infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux phlébites ou embolies pulmonaires, restent des maladies relativement rares. Même si l’on multiplie leur risque par 5 ou 30, cela ne les rend toujours pas très fréquentes pour autant, et ne contribue pas à aggraver la perception que l’on a du COVID-19. A la Renaissance, les Italiens avaient appelé la grippe « influenza », pour parler d’une maladie « à la mode », tellement la perception que l’on en avait était sa grande bénignité. La grippe était pourtant déjà une faucheuse insidieuse. Le COVID-19 tue trois ou quatre fois plus que la grippe saisonnière, mais conserve aussi pour beaucoup cette réputation favorable et trompeuse. Le COVID-19 fauche des vies directement visibles sur les statistiques quotidiennes, en particulier chez les non-vaccinés, les personnes très âgées frappées d’immunosénescence ou immunodéprimées. Et puis, le COVID-19 provoque de très lourdes pathologies, invalidantes et parfois mortifères, dès les premières semaines qui suivent l’infection. Le Covid long handicape aussi la santé d’un bon nombre sur de nombreux mois.

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