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La pandémie telle que vue et prévue par les marchés financiers
©SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Économie

Tout se tient : face au virus, encore quelques mois à résister, à produire des masques et des tests, à chercher le médicament, encore des milliards d’euros et de dollars de crédit pour faire face, le dollar étant la garantie ultime.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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700 000 emplois perdus aux États-Unis en mars, contre une perte de 100 000 attendue, par rapport aux 250 000 en moyenne les mois précédents. La réaction des entreprises américaines a été encore plus vive qu’attendue. Le virus tue bien plus les emplois que les humains : la demande s’arrête, les entrepreneurs ne voient plus rien, ils réduisent donc au plus vite leurs frais, notamment salariaux. Le chômage est "la solution" de chacun, mais il devient "le problème » de tous, tant il alimente les peurs.  Les marchés financiers, comme nous tous, regardons l’évolution de la pandémie selon les nombres de malades, d’hospitalisés, guéris et décédés et « réagissent ».

« Réagissent » ou plutôt poursuivent les courbes. Ils comparent les chiffres, doutent bien sûr des données chinoises, essaient d’expliquer les écarts en Europe (pyramides des âges, famille réduite du Nord ou large du Sud, qualité des équipements sanitaires, respect des normes de confinement, niveaux de tests…). Surtout, ils se projettent dans le futur, avec des modélisations, selon deux projections – faisant encore l’impasse sur une troisième.

Les trois projections

La première, évidemment théorique, est celle où rien ne serait fait. Le nombre de cas (personnes infectées) monterait donc en flèche, avec une chute violente de l’activité : moins de PIB, explosion du chômage, effondrement des bourses. Evidemment, ce n’est pas possible : l’État doit agir, et derrière lui les entreprises, les associations, chaque famille, chaque personne. Chacun va se préserver et les pouvoirs publics décréter des mesures de protection (distance barrière, quarantaine, confinement, tests…). Nous en venons donc à la deuxième projection. 

La deuxième projection, c’est « l’aplatissement de la courbe » (flatenning of the curve), avec le confinement. Il stoppe la montée de la pandémie, mais l’étale dans le temps, avec deux types de coûts : ceux des pertes d’activité, plus ceux pour l’amortir (chômage partiel, différés d’impôts…) qui permettent de mieux repartir. Bien sûr, « repartir », autrement dit : sortir des mesures de confinement est dangereux, d’où le gradualisme, avec ses coûts et ses avantages. Il s’agit d’éviter une dépression-déflation qui emporterait les ménages, les entreprises et les États les plus fragiles et, ce faisant, empêcherait tout redémarrage. 

La troisième projection est le « risque de résurgence ». Il viendrait des modalités de déconfinement, évidemment par étapes (guéris, puis les « asymptomatiques, en faisant «rester » les 70 ans et plus). Mais ceci suppose que l’on dispose des tests et que l’on puisse traiter les cas qui apparaissent, sachant que ceci fera sortir des « porteurs sains ». Donc les marchés vont commencer à y penser, ce qui implique des informations et des hypothèses techniques, plus des tests et des médicaments, pour qu’il n’y ait pas de rechute ! Peut-être est-ce l’idée de Donald Trump d’un programme de relance « grands travaux » : résorber au plus vite le chômage et atténuer les effets de la résurgence.

Les marchés boursiers

Ils ont évidemment dévissé, sous l’effet des chiffres du chômage, mais attendent les conditions de « sortie » et les modalités de soutien qui suivront.

Les marchés des bons d’état 

Ils ont bien compris que les Banques centrales « avaleraient » tout le papier qu’il faut pour éviter une panique sur un risque de panique : quoi, on aurait peur d’acheter des bons du Trésor américain ! C’est évidemment le cas pour la Banque Centrale américaine et tout autant pour l’européenne, notamment vis-à-vis de l’Italie.

L’or et le pétrole

L’or est toujours le refuge, et les marchés se disent que l’effondrement du prix de pétrole ne peut durer : il ne fait que des perdants. Donald Trump aurait joint le Prince Mohammed ben Salmane à cet effet. Les lobbies pétroliers américains, notamment de pétrole de schiste auraient dit qu’il ne serait pas mauvais de faire savoir que les états-Unis pourraient ne plus raffiner le pétrole saoudien si le pays persistait dans sa guerre avec les Russes ! Donc le prix du baril se met à remonter ! 

Le dollar toujours superstar

Bien sûr. Même si l’activité y plonge, les marchés se disent que les États-Unis remonteront les premiers, notamment avec les plans de soutien en cours, plus ceux annoncés. 

Les derniers jours ont vu des pays émergents (leur nom n’a pas été dit) vendre des bons américains pour répondre à la demande de dollars. Alors, pour ne pas faire remonter les rendements américains et inquiéter… tout le monde, la Fed a ouvert un guichet spécial où elle avance des dollars contre ces bons américains. 

Tout se tient : face au virus, encore quelques mois à résister, à produire des masques et des tests, à chercher le médicament, encore des milliards d’euros et de dollars de crédit pour faire face, le dollar étant la garantie ultime.

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