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La médecine et la science sont-elles en train d’abandonner les malades atteints de Covid long ?
©STR/AFP

On ne les oublie pas

De nombreuses personnes atteintes d'un Covid long ont le sentiment que la science les laisse tomber.

Corinne Depagne

Corinne Depagne

La Docteure Corinne Depagne est médecin pneumologue et membre du Collectif Du Côté de la Science.

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Plus d’un an et demi après la pandémie, les cas de Covid longs semblent un peu mieux connus. A-t-on progressé sur les facteurs qui mènent au Covid long ? 

On ne comprend pas tout mais cela s’éclaircit petit à petit. Cliniquement il s’agit de symptômes persistants 12 semaines après l’infection initiale qui s’étalent selon un spectre très large. On peut évoquer deux pistes principales. D’une part des anomalies de la réponse immunitaire, d’autre part la persistance du virus du virus dans certaines cellules, notamment celles du tube digestif avec d’éventuelles résurgences cycliques. Le mécanisme n’est probablement pas uniciste. EN tout cas, on a retrouvé des traces du virus sous la forme d’ARN ou d’antigènes  du virus dans des biopsies digestives, et d’autres réservoirs peuvent aussi exister sans qu’on en ait eu encore la preuve histologique. Certaines études montrent des anomalies du taux de certains anticorps, des anomalies de la balance des cytokines, la persistance de cellules inflammatoires chez certains patients long covid. 

Qu’en est-il de la reconnaissance officielle de cette pathologie ?

La Haute autorité de santé a confié aux médecins la charge d’évaluer les patients qui se plaignaient de symptômes persistants. Les fiches de prise en charge sont très claires. Cela nous incite à écouter les patients et à demander des examens en fonction des symptômes. C’est complexe car il n’y a pas une atteinte mono organique. Les patients présentent des symptômes divers et variés atteignant plusieurs organes, ce qui les conduit vers des spécialistes d’organe. 

Par ailleurs, il n’est actuellement pas envisagé de considérer le Covid long comme une affection  de longue durée. Cela rend parfois le parcours de recours aux soins des patients assez onéreux. 

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Qu’en est-il des Covids longs pédiatriques ? 

Cela fait encore moins longtemps que l’on connaît les symptômes persistants chez les enfants et on commence juste à s’intéresser à cela. Pendant longtemps, les enfants n’étaient pas du tout testés donc on ne savait pas « officiellement » qu’ils étaient infectés . Un certain nombre de symptômes peuvent être rattachés à l’infection initiale. Ils sont rarement très graves mais demeurent handicapants. JE rappelle cependant que je ne suis pas pédiatre. 

Il m’apparait important  de ne pas non plus se focaliser seulement sur l’infection à SARS COV 2 chez les enfants et bien penser aux diagnostics différentiels pour ne pas passer, comme chez les adultes à côté d’une autre pathologie. 

Ce qui est sur, c’est que les enfants peuvent être infectés, et qu’il est indispensable  de leur appliquer à eux aussi des mesures de protection contre le virus (aération des écoles, port du masque universel !)

Fait-on médicalement et scientifiquement ce qu’il faut pour les Covids longs ? 

Les patients vous diront non, pas toujours. Par contre, les médecins sont  de plus en plus sollicités : Je suis moi-même en relation avec plusieurs patients qui trouvent qu’on n’avance pas assez vite dans la compréhension de leurs symptômes, et la proposition d’un « traitement »  qui les soulage. Il faut comprendre que justement on ne comprend pas tout.

C’est la raison pour laquelle des cohortes de patients sont enregistrées, suivies au long des mois, pour connaitre leur devenir, les anomalies biologiques ou radiologiques qu’ils présentent, et leur évolution.

Mais c’est difficile pour les patients. D’autant plus qu’on a peu de référents. En tant que pneumologue je peux agir sur les symptômes  respiratoires, pas tellement sur  le reste. Cela requiert que je connaisse d’autres professionnels pour les autres symptômes, par exemple cardiologiques. Et les patients ont l’impression d’être « trimbalés ». Il faut donc coopérer. Certaines cliniques multidisciplinaires existent, il faudrait absolument pouvoir les déployer sur le territoire.  Il faudrait qu’un effort soit fait sur ce sujet. Certaines ARS, donnent des conseils pour que les services hospitaliers s’organisent pour le suivi des patients. C’est cependant très difficile à organiser puisque  vous le savez les consultations médicales hospitalières  sont déjà sont submergées.

Quelles doivent être les priorités sur le front du Covid long ? 

Les études de suivi sont publiées au fil de l’eau, et on a de plus en plus de données qui montrent d’une part que la plupart des anomalies s’améliorent voire disparaissent au bout de 3-6-9 mois, même si ce n’est pas 100%. 

Il faut mettre à jour régulièrement la formation des médecins sur ce sujet. Il faut aussi écouter les patients qui en souffrent car c’est une maladie nouvelle et on apprend tous ensemble. 

Il faut s’inspirer des équipes qui s’y connaissent (par exemple le Dr. Larché à Montpellier, le Pr Salmon-Ceron à Paris, le dr GABOREAU à Grenoble et d’autres bien sûr) pour organiser des consultations de référence.

Il faut  aussi évaluer le niveau d’efficacité de la vaccination vis-à-vis des symptômes de Covid Long, et sur sa prévention éventuelle.En 4 mots : évaluer, coordonner, diffuser les connaissances

Et continuer les mesures barrière bien sûr selon le modèle du « swiss cheese » !

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