La France respecte ses objectifs de réduction des émissions de Co2 en 2022… mais grâce à quoi ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Capteur de CO2
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©Capture d'écran France Info

Vertu et/ou aubaine

Selon les chiffres provisoires publiés lundi soir par le Citepa, les émissions de gaz à effet de serre ont respecté l'an dernier les objectifs de la stratégie nationale bas carbone de la France.

Myriam Maestroni

Myriam Maestroni

Myriam Maestroni est présidente du fonds de dotation E5T. Elle est l'ex présidente d'Economie d’Energie et Primagaz. 

Elle est l'auteure de plusieurs ouvrages majeurs: Intelligence émotionnelle (2008, Maxima), Mutations énergétiques (Gallimard, 2008) ou Comprendre le nouveau monde de l'énergie (Maxima, 2013), Understanding the new energy World 2.0 (Dow éditions). 

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Atlantico - Les chiffres officiels provisoires sur la réduction de gaz à effet de serre de la France en 2022 ont été publiés, que nous disent-ils ?

Myriam Maestroni - Dans la globalité, la France a, en 2022, diminué ses émissions de 2,5 % en France pour atteindre un niveau estimé à 408 millions de tonnes équivalent CO2 en fin d’année.

Si on regarde un peu plus dans le détail, on constate que là où la réduction des émissions de gaz à effet de serre a été la plus efficace, c’est le secteur résidentiel qui enregistre une diminution de 15% sur l’année 2022.

Autre chiffre d’importance, on observe qu’il y a eu -8% de réduction des émissions sur le secteur de l'industrie manufacturière et de la construction.

Il faut souligner que ces chiffres sont provisoires et ne tiennent pas compte de nombreux facteurs déterminants dans le calcul.

Les émissions de gaz à effet de serre ont respecté l'an dernier les objectifs de la stratégie nationale bas carbone de la France. Comment la France a-t-elle tenu ses objectifs ?

La baisse des émissions de CO2 de la France est surtout liée à des réductions de consommation plus qu’à de réelles stratégies en la matière. Et si les particuliers ou les commerçants ont moins consommé, c’est surtout parce qu’ils ont eu des factures d’électricité très élevées qui les ont « forcés » à réduire leur consommation.

Il y a aussi eu des températures plus clémentes par rapport aux prévisions qui ont été faites. Au pic de l’hiver nous craignions un manque de gaz en raison de la baisse importante des températures, par chance, ça n’a pas été le cas.

La France a donc incité, encouragé et interpellé tous les consommateurs pour qu’ils réduisent les consommations parce que on risquait cruellement de manquer d'énergie. Et effectivement, si l'hiver avait été un peu plus rigoureux, ça aurait certainement été le cas.

Ces chiffres sont-ils critiquables dans une certaine mesure ? Quelle est la part de trompe l’œil ?

Les échanges sur les biens ont enregistré en 2022 un déficit historique de 163,6 milliards d'euros pour notre pays ce qui représente une dégradation de 80 milliards d'euros sur un an. Cela s’explique par le fait que nos industries n’ont pas produit et par extension n’ont pas consommé d’énergie et donc n’ont pas émis de CO2. Pour combler ce manque de production nous avons donc dû importer. Mais si l’on importe, ça ne veut pas dire que l’on ne consomme pas de CO2 mais plutôt qu’il est consommé ailleurs. Et ce dernier aspect n’est pas chiffré dans ce bilan qui n’est que provisoire.

Il faudrait tout de même que nous puissions à la fois mettre en équation la balance commerciale avec la baisse d'utilisation de l'énergie dans le secteur manufacturier.

Force est de constater que la France, est vue historiquement comme LE pays où on a une électricité nucléaire décarbonée. Le problème, c'est que dans la pratique, on a eu des centrales qui ont fonctionné au ralenti et qui ont produit moins que ce qu’on aurait aimé.

En théorie, on a donc une électricité décarbonée. Mais comme les centrales nucléaires ont tourné au ralenti ces dernières années à cause de problèmes techniques, d’entretien et autres, on a aussi dû importer de l’énergie. Mais cette énergie n’est pas forcément produite par d’autres centrales nucléaires et consomme donc plus de CO2. Comme pour l’industrie, le taux d’émission de ces importations d’énergie n’est pas pris en compte dans les calculs.

À la vue de ces chiffres, qu’elles prévisions pouvons-nous faire pour l’avenir, la France s’inscrit-elle dans une démarche d’amélioration à ce niveau ?

Je ne suis pas devin mais si la France, comme elle l'affirme, souhaite éviter de désindustrialiser davantage -sachant que c'est des pays européens qui se désindustrialise le plus aujourd'hui en Europe- et amorcer une réindustrialisation, dont on a besoin, on va devoir garantir une sécurité, des densité des approvisionnements dans des conditions de compétitivité de prix et de prise en compte de CO2 qui pourront détériorer les niveaux actuels. Je pense que la France a aussi intérêt à développer toutes les énergies renouvelables.

Il y a aussi des efforts à faire dans l’investissement. Cela fait 15 ans maintenant que l'on a eu accès à l'information d'efficacité énergétique des logements en France, sachant qu'au niveau européen, elle représente entre 1/4 et 1/3 des émissions de CO 2.

Je fais une différence entre la sobriété énergétique et l'efficacité énergétique. La sobriété énergétique représente tout ce qui ne suppose pas d'investissements (réductions de la consommations) et l’efficacité énergétique suppose réellement des investissements -par exemple les travaux pour relever l'étiquette énergie du parc immobilier. Il y a aujourd’hui des choses qui sont faites à ce niveau-là avec les interdictions de location/vente de certains logements pour leur mauvais DPE mais il faut accompagner cette transition car ça ne va pas suffire.

Il est évident qu’il faut accélérer en matière de rénovation énergétique, isoler les maisons, avoir des dispositifs de chauffage, des émetteurs, et cetera, beaucoup efficaces. Et là-dessus, il y a encore énormément de chemin à parcourir et il n'y a pas encore d'accord de consensus sur les meilleures façons d'y accéder. 

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