La croissance économique rapide est le meilleur moyen de réduire la pauvreté. Et la dernière preuve en date nous arrive d’Inde<!-- --> | Atlantico.fr
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L'Inde ne serait plus un pays pauvre.
L'Inde ne serait plus un pays pauvre.
©ARUN SANKAR / AFP

Le développement de l'Inde

Avec un revenu par habitant de 2 600 dollars, l'Inde fait désormais partie des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.

Pierre Bentata

Pierre Bentata

Pierre Bentata est Maître de conférences à la Faculté de Droit et Science Politique d'Aix Marseille Université. 

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Atlantico : L'Inde n'est plus un pays pauvre. Avec un revenu par habitant de 2 600 dollars, elle fait désormais partie des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. Néanmoins, de nombreux lecteurs seront étonnés par un document de travail du FMI suggérant que moins d'un pour cent des Indiens se situent désormais sous le seuil de pauvreté de la Banque mondiale, à savoir 1,90 dollar de consommation par personne et par jour. Dans quelle mesure cela a été rendu possible ?

Pierre Bentata : Pour baisser le taux de pauvreté, il n’y a pas beaucoup de solutions. Soit la population s’effondre, brièvement, ce qui fait que la richesse est redistribuée à un plus petit nombre de gens. Mais ce n’est pas le cas en Inde, car la démographie augmente. Donc c’est que les Indiens ont créé plus de richesses et que cette dernière n’a pas été seulement captée par les personnes déjà aisées. Il faut donc de la croissance, mais qui profite vraiment à l’ensemble de la population, et notamment des plus pauvres.

L’Inde est un pays rural qui a encore les moyens d’opérer une transition vers l’industrie. Et l’Inde est aussi le seul cas au monde où la croissance a été tirée par les services avant l’industrie. Ils n’ont pas suivi les trois grandes étapes classiques : agriculture, industrie, innovation. Et leurs cycles sont un peu calés sur les cycles américains. Notamment car ils concentrent une part non négligeable de l’externalisation de certains services américains, comme la comptabilité.

Selon les projections les plus optimistes du FMI, la pauvreté passerait de 5,1 % en 2014, lorsque Modi est arrivé au pouvoir, à 0,76 % en 2019. Le FMI affirme également que les subventions alimentaires n’ont pas eu un grand impact sur la réduction de la pauvreté. Devons-nous en tirer des enseignements ?

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Ces chiffres sont plutôt optimistes, et il faut les prendre avec des pincettes. Ce qu’on observe dans le cas de l’Inde c’est que les mesures contracycliques d’accompagnement pendant la crise Covid ont fonctionné, mais quand on essaie de regarder les différentes composantes de la richesse des plus pauvres, on se rend compte que ce ne sont pas ces mesures là qui sont les principales vecteurs de la sortie de la pauvreté. Les mesures d’aides ont permis d’éviter un accroissement trop fort de la pauvreté, mais la sortie durable de la pauvreté, elle, est due à la croissance. Pour avoir une politique durable de sortie de la pauvreté et d’enrichissement, il faut de la croissance. Ce que le cas de l’Inde nous confirme, c’est qu’il a été possible de poursuivre les mesures d'accompagnement parce que, justement, il y a eu des rentrées fiscales liées à une plus forte croissance.

Quels sont les mécanismes qui permettent de réduire la pauvreté en ayant de la croissance économique ?

C’est assez simple, plus de croissance, c’est plus de valeur ajoutée, donc plus de production utile. Si cette production est consommée, il y a un effet d’enrichissement car la hausse de la production demande des embauches, de la main d’œuvre. Cela fait que des personnes qui étaient soient peu rémunérées soit sans emploi se mettent à mieux gagner leur vie.  Le phénomène s’auto-entretient ensuite.

Il y a aussi un effet indirect, car davantage de croissance, c’est davantage de rentrées fiscales. Tous les profits faits sur les cotisations sociales vont augmenter en même temps que la main d’œuvre. Si l’on ne grève pas la croissance, on se retrouve avec plus de moyens pour investir.

Le troisième effet, c’est que pour maintenir la croissance, les entreprises vont avoir à innover, et plus d’argent pour investir en R&D et augmenter leur croissance.

Y a-t-il des limites à ce raisonnement ?

Il peut y avoir des cas dans lesquels cela n’a pas lieu. Si par exemple, la croissance est artificielle, comme dans le cas d’une relance keynésienne. Si la croissance est tirée par l’argent facile, cela peut faire que des investissements, qui au départ créent de l’emploi, se révèlent ne pas être rentables. En Chine, on le voit avec l’immobilier. La très forte croissance chinoise est tirée par l’immobilier mais il est tellement subventionné que quand il arrive sur le marché, personne n’en veut, ce qui entraîne des licenciements, etc.

L’autre cas c’est quand une innovation technique crée de la valeur ajoutée mais remplace du capital par du travail. Historiquement, cela entraîne de la croissance à long terme, mais sur le court terme, cela peut ne pas produire de croissance ou d’emplois.

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