Journée mondiale de lutte contre Alzheimer : de réelles opportunités de progrès <!-- --> | Atlantico.fr
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La maladie d’Alzheimer coûte plus de 20 milliards d’euros par an.
La maladie d’Alzheimer coûte plus de 20 milliards d’euros par an.
©Reuters

Des avancées et des coûts

En France, d'après l'OMS, près d'un million de personnes seraient touchées par Alzheimer et les maladies apparentées. D'après un comité de l'Institut de technologie du Massachusetts (MIT), des avancées considérables pourraient être réalisées autour de cette maladie.

France Alzheimer

France Alzheimer

France Alzheimer est la seule association nationale de familles reconnue d'utilité publique dans le domaine de la maladie d'Alzheimer et maladies apparentées.

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Atlantico : Ce 21 septembre, c'est la Journée de lutte contre Alzheimer. Selon le comité du MIT, cette maladie présente de "réelles opportunités de progrès", en quoi ? Où en sont les recherches ?

France Alzheimer : Malheureusement, toute pathologie, par la mobilisation scientifique qu'elle suscite, reste paradoxalement à l'origine de "réelles opportunités de progrès". Par ailleurs, par sa logique transversale, la maladie mobilise de nombreuses disciplines scientifiques. Les innovations sont possibles. Elles sont même prévisibles. Les questions qui se posent aujourd'hui sont plurielles et, par conséquent, les réponses à apporter sont autant d'innovations et de progrès envisageables. Pour y répondre, chacun doit faire preuve d'esprit d'innovations (chercheurs, soignants, aidants, industriels etc.).
Pour illustrer cet engagement nécessaire pluriel :
- la nécessité de pouvoir détecter les lésions cérébrales dans la maladie a fortement poussé l'innovation en imagerie cérébrale (marqueurs amyloides et Tau aujourd'hui encore réservés à la recherche)
- le champs des nouvelles technologies tente d'apporter des aides adaptées aux familles et aux personnes malades avec en ligne de mire, la préservation de l'autonomie et de la qualité de vie des personnes.
Cette liste est, bien entendu, loin d'être exhaustive.
Les axes de recherches sont aujourd'hui multiples. En ce qui concerne la recherche fondamentale, l'attention de la communauté scientifique se porte notamment sur la compréhension des mécanismes de développement de la maladie d'Alzheimer.
Quant à la recherche clinique, un travail particulier est actuellement mené sur les patients asymptomatiques mais jugés à risques. Les chercheurs espèrent ainsi agir au plus tôt et pouvoir apporter une réponse scientifique efficace.
Cela démontre également qu'à l'heure actuelle, aucune piste de recherche ne doit être écartée.  D'ailleurs en parallèle à la recherche en sciences médicales, la recherche en sciences humaines et sociales est très active. Elle vise, pour sa part, à mieux accompagner les personnes malades mais aussi leur entourage. Cela constitue clairement un enjeu majeur. Il est donc important de mener les recherches sur ces deux plans.

Selon un rapport, la maladie d’Alzheimer coûte plus de 20 milliards d’euros par an. Quelle est la prise en charge financière des 850.000 personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer en France? Comment aide-t-on leurs familles ?

Une fois la maladie d'Alzheimer diagnostiquée, la personne malade peut bénéficier de la reconnaissance en affection longue durée (ALD 15) par la Sécurité sociale. Cette reconnaissance ouvre droit au remboursement à hauteur de 100% des frais médicaux liés à la maladie. Néanmoins, la maladie d'Alzheimer a ceci de particulier que la majorité des dépenses engagées relèvent du médico-social et ne sont donc pas prises en charge par l'Assurance maladie.
Pour palier cette lacune, et sous l'impulsion de nombreux acteurs au premier rang desquels France Alzheimer et maladies apparentées, les pouvoirs publics ont instauré en 2001 la mise en place de l'allocation personnalisée à l'autonomie, prestation de compensation de la perte d'autonomie pour les personnes âgées. Alloué par le Conseil général, le montant de cette prestation sociale est fonction du degré d'autonomie de la personne malade (grille AGGIR) d'une part, et du montant total de ses ressources d'autre part.
Des inégalités subsistent néanmoins en matière de prise en charge financière de la perte d'autonomie. Selon l'âge du bénéficiaire au moment de la demande, les aides allouées ne sont pas les mêmes: alors que les personnes de moins de 60 ans sont reconnus comme relevant du champ du handicap et bénéficient de la prestation de compensation du handicap, les personnes âgées de plus de 60 ans bénéficient quant à elle de l'allocation personnalisée à l'autonomie, au titre de la dépendance. Or, ces deux prestations sociales n'ouvrent pas pas droit aux mêmes bénéfices, la PCH étant plus avantageuse que l'APA. Le critère de l'âge qui subsiste encore malgré une suppression légalement votée mais jamais appliquée (loi du 11 février 2005), génère de nombreux cas de discriminations.
Par ailleurs, les personnes malades ainsi que leurs aidants peuvent bénéficier dans certains cas de certains avantages fiscaux : la réduction ou l’exonération de la taxe foncière, l’exonération de la taxe d’habitation, l’exonération de la redevance audiovisuelle.
Néanmoins toutes ces aides ne suffisent malheureusement pas à soulager la charge financière extrêmement lourde supportée par les familles. On estime à près de 10 milliards d'euros la contribution annuelle des personnes malades et des aidants au financement de la perte d'autonomie. Le dispositif APA présente de nombreuses lacunes et près de la moitié des plans d'aides sont saturés. Cela signifie que les montants alloués ne suffisent pas à couvrir l'ensemble des besoins. Une étude réalisée en 2011 par l'association France Alzheimer et maladies apparentées, en partenariat avec le cabinet Métis Partners a permis d'estimer à 1 000 euros en moyenne le montant mensuel restant à la charge des familles, une fois toutes les aides déduites. 

Y' a-t-il un investissement suffisant en France ? Quelles sont les difficultés majeures rencontrées pour avancer dans les recherches sur Alzheimer ?

Face à l'enjeu de santé publique que représente aujourd'hui la recherche sur la maladie, les investissements ne seront jamais suffisants. Plus les pistes de recherche sont nombreuses, plus les crédits à allouer sont importants. Les besoins sont immenses et l'argent reste le nerf de la guerre face à Alzheimer. Les investissements financeront les avancées pour alléger le fardeau des aidants, faire progresser le diagnostic, développer le matériel spécialisé...
Pour faire avancer, il s'agit aujourd'hui de travailler autour 4 axes :
- renforcer la communauté scientifique Alzheimer
- structurer la recherche au niveau national et européen 
- poursuivre le développement de centres experts pluridisciplinaires et les plateformes technologiques
- faciliter la mise en œuvre des travaux de recherche (financement, accès aux données pour la recherche clinique...)

Le bénévolat est donc précieux pour réduire le coût de la prise en charge par la collectivité. Plutôt que de réduire l’aide informelle, les auteurs de l’étude préconisent d’en atténuer les conséquences négatives pour les aidants. Par exemple, en défiscalisant ou en augmentant l’allocation personnalisée d’autonomie, quand la part de l’aide informelle croît. Qu'en pensez-vous ?

La maladie d'Alzheimer a ceci de particulier qu'elle mobilise fortement l'entourage de la personne malade. Une fois le diagnostic posé, c'est l'ensemble de la cellule familiale qui s'en trouve affectée. Ainsi, nombreux sont les aidants dont la vie se trouve totalement dédiée à leur proche malade. Mobilisés 6,5 heures par jour en moyenne, ces aidants assument le rôle d'un quasi service public, informel et gratuit. Rôle que la puissance publique serait bien en mal d'assumer étant donné la contrainte budgétaire qui pèse actuellement sur les finances publiques.
Ainsi, les responsables politiques s'appuient de plus en plus sur l'aide informelle assurée par les familles. En témoigne le récent projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement qui fait du maintien au domicile l'une de ses grandes priorités. Or, donner priorité au domicile c'est indirectement faire l'hypothèse d'une aide informelle toujours plus disponible.
Aussi, les aidants, véritable variable d'ajustement des politiques publiques, méritent plus que jamais que leur contribution soit reconnue et compensée. Malheureusement, l'heure n'est pas encore à la satisfaction sur ce sujet: aides financières insuffisantes, temps de répit trop rares, mesures de conciliation entre vie professionnelle et rôle d'aidant trop anecdotiques...de nombreux progrès restent à faire. Les pistes que vous évoquez pourraient constituer des réponses encourageantes aux besoins des aidants. L'augmentation de l'APA est d'ailleurs une solution actuellement à l'étude dans le projet de loi vieillissement précédemment évoqué. Malheureusement là encore, la réforme est trop timide et les moyens financiers trop limités. En conséquence, la revalorisation ne bénéficiera malheureusement qu'à un nombre très restreint de personnes malades.
Au regard des transformations sociales actuelles, des modifications des liens familiaux et de proximité, l'aide aux aidants devient une véritable question sociétale. Chaque citoyen doit être partie prenante et prendre conscience de la responsabilité qu'il a vis à vis de ces millions de personnes qui rendent un service non négligeable à l'ensemble de la société : responsables politiques, acteurs économiques et sociaux, secteur associatif, nous avons tous un rôle à jouer. Mobilisons nous pour faire advenir enfin une véritable politique de soutien aux aidants ! 

Le nombre de malades devrait augmenter de 60% d'ici 2040. Cela est-il dû seulement au vieillissement de la population ?

Certes, le principal facteur de risque reste l'âge. Par conséquent, le nombre croissant de cas de maladie d'Alzheimer est intimement lié au vieillissement global de la population. Pour autant, cette logique ne peut être généralisée.

Face aux projections sanitaires (augmentation du nombre de personnes malades) et démographiques (vieillissement de la population), il existe aujourd'hui plusieurs études de santé publique qui soulignent un fléchissement du nombre de nouveaux de cas de maladie d'Alzheimer. Ces résultats soulignent notamment les premiers signes d'une meilleure prise en charge de facteurs de risques modifiables telles que celle concernant les maladies cardio-vasculaires, l'hypertension et le diabète.

Quoi qu 'il en soit, ces observations ne doivent pas inciter au relâchement mais doivent plutôt apparaître comme des sources de motivation. Les 850 000 personnes malades en France et les 600 nouvelles personnes diagnostiquées chaque jour sont bien réelles. Les familles comme la communauté scientifique a besoin de nous.

A voir également : Clémentine Lévy est l'auteur de ce très joli "Carnet de Coloriages", publié aux éditions Cherche-Midi. La parution est destinée à soutenir France Alzheimer qui fête cette année ses 30 ans.

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