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Edouard Philippe en clôture des journées parlementaires de son parti Horizons, à Fontainebleau, le 16 septembre 2022
Edouard Philippe en clôture des journées parlementaires de son parti Horizons, à Fontainebleau, le 16 septembre 2022
©BERTRAND GUAY / AFP

Journées parlementaires

Horizons a organisé ses journées parlementaires les 15 et 16 septembre à Fontainebleau. L'occasion pour le parti d'Edouard Philippe de travailler à la structuration du mouvement, notamment en misant sur les élus locaux

Jean Petaux

Jean Petaux

Jean Petaux, docteur habilité à diriger des recherches en science politique, a enseigné et a été pendant 31 ans membre de l’équipe de direction de Sciences Po Bordeaux, jusqu’au 1er janvier 2022, établissement dont il est lui-même diplômé (1978).

Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, son dernier livre, en librairie le 9 septembre 2022, est intitulé : « L’Appel du 18 juin 1940. Usages politiques d’un mythe ». Il est publié aux éditions Le Bord de l’Eau dans la collection « Territoires du politique » qu’il dirige.

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Atlantico : Horizons a organisé ses journées parlementaires les 15 et 16 septembre à Fontainebleau. L’occasion de travailler à la structuration du mouvement. A quel point le parti mise-t-il sur les élus locaux ? 

Jean Petaux : Les observateurs ont estimé à 200 le nombre d’élus locaux présents au premier rassemblement du parti Horizon à Fontainebleau le 15 septembre dernier. Héritier d’une partie de LR et, antérieurement de l’UMP, Horizons a aussi, génétiquement, la marque d’un parti de cadres élus dans les territoires et qui, pour une bonne part, étaient des soutiens d’Alain Juppé lors de la primaire de l’UMP en 2016, il y a déjà six ans. De nouvelles têtes et une nouvelle génération sont apparues dans le sillage d’Edouard Philippe et à la sa suite quand il était premier ministre. Ce parti et son chef ont tout intérêt à jouer la carte de l’ancrage territorial. D’une part parce qu’il se démarque ainsi de l’ex-LREM devenue ce week-end Renaissance qui souffre cruellement d’un manque d’élus locaux, et il peut aussi tisser un réseau d’élus qui sera mobilisé, et saura l’être, l’heure (présidentielle) venue. En termes de parrainages d’abord (encore que cela ne devrait pas être un obstacle élevé sur le chemin du candidat Philippe) mais aussi en potentielles candidatures à des élections territoriales et sénatoriales. Cette stratégie « bottom-up » vient, en quelque sorte, en complément de la démarche « top-down » qui a présidé au lancement d’Horizon pour servir, en tant que de besoin, l’ambition élyséenne de son fondateur.


En cela, dans quelle mesure s’inscrit-il dans la tradition des grands partis centristes, UDF, UDI, etc ?

Ce n’est pas la seule tradition des grands partis centristes, c’est celle des partis dits « de gouvernement », à droite, au centre et à gauche. Finalement ce sont plutôt les formations qui ont choisi l’appellation « mouvement » et son mode de (non) organisation (le FN au début de sa création, LFI et LREM) qui sont décalées par rapport à la définition traditionnelle des partis politiques, celles des Américains La Palombara et Wiener. Je la rappelle en substance : « un regroupement d’adhérents en vue de conquérir le pouvoir central, présent à tous les niveaux politico-administratifs d’un Etat et sur la totalité de son territoire sans exception et qui  présente des candidats à toutes les élections dans l’intention de les gagner ».

Miser sur la construction d’un parti de cadres et d’élus locaux peut-il encore être une stratégie gagnante aujourd’hui ?

Bien plus que celle consistant à espérer faire un parti de masse dans la mesure où le militantisme sous sa forme classique n’existe plus. Désormais il est préférable d’avoir des élus bien répartis sur l’ensemble du territoire national, dotés de staffs efficaces qui savent utiliser intelligemment les réseaux sociaux et ainsi mettre en scène le travail et l’action des cadres locaux plutôt que d’avoir une masse militante… Même si celle-ci ne nuit pas, elle peut aussi être compliquée à « manager ».

Jusqu’à présent, on observait une coalition entre des partis de cadre et des partis populaires (UDF-RPR). On voit mal quel pourrait être le parti populaire auquel s’adosserait Horizons. Cela va-t-il lui nuire ?

Plus que « populaire » il est de tradition de parle de « parti de masse » en comparaison des « partis de cadre » selon la classique dichotomie effectuée il y a environ 70 ans par le professeur Maurice Duverger. Vous avez raison d’évoquer ce type d’alliance entre les formations qui composaient l’UDF et le RPR. Les partis confédérés au sein de l’UDF étaient plutôt effectivement des partis politiques sans une cohorte importante d’adhérents/militants à même de coller les affiches à profusion sur un territoire donné ou de « tracter » et « boiter » en faisant aussi les cages d’escalier pour le porte-à-porte et les marchés du week-end. En face, le RPR, héritier des différents partis gaullistes, à commencer par le RPF fondé en avril 1947, se singularisait par la masse de ses adhérents qui étaient surtout des militants très actifs, recrutés pour une part dans des classes sociales populaires ou assimilées à la classe moyenne. L’alliance entre RPR et UDF a été souvent placée sous le signe de « l’amour-vache » ou de la communauté d’intérêts stratégiquement partagés. Mais dès qu’il pouvait y avoir concurrence entre ces deux composantes, elle n’était pas encadrée et s’avérait souvent très sévère. L’épisode, par exemple, de l’élection municipale de Paris en 1977 avec la rivalité Chirac (RPR) vs d’Ornano (RI – UDF) est dans toutes les mémoires.

Je ne crois pas que le fait qu’Horizons ne trouve plus de parti de masse avec qui s’allier lui nuise en quoi que ce soit. D’une part parce que justement ce parti Horizons, compte tenu de son « code génétique » politique, a récupéré une partie des adhérents de LR et de l’ex-UMP, ce qui lui permet d’avoir son propre « matériau militant » mais aussi, et d’autre part, encore une fois parce que la quantité physique de supporters adhérents n’est plus la condition sine qua non de la réussite électorale.

En misant sur les élus locaux, est-ce les élections sénatoriales de septembre 2023 que vise le parti d’Edouard Philippe ?

Je l’ai suggéré dans une de mes réponses précédentes : c’est sans doute, au milieu d’autres élections « intermédiaires » (départementales, régionales et, évidemment municipales) un des objectifs premiers d’Edouard Philippe : venir perturber le jeu des groupes parlementaires de la droite et du centre dans la Haute assemblée et, plus directement encore, prendre le dessus sur Renaissance dans la compétition que vont se livrer les formations de l’actuelle majorité présidentielle, dans la perspective de l’après-Macron qui a commencé dès le soir de sa réélection à l’Elysée : la compétition-émulation-rivalité entre Renaissance, entre le MODEM, entre AGIR, entre Territoires de progrès et donc, bien entendu , Horizons qui, avec le MODEM, est la formation qui peut le plus faire figure de caillou dans la chaussure de Stéphane Séjourné, le nouveau leader du parti présidentiel, Renaissance.

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