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Guerre sanitaire : notre modèle économique et social devra se refonder
©LIONEL BONAVENTURE / AFP

Tribune

Une tribune de Frédéric Lefebvre.

Notre système pyramidal va-t-il nous sauver du Chaos sanitaire ?

Notre modèle économique et social, avec en son sein notre modèle sanitaire, pourront-ils continuer comme avant?
Un DGS rassurant car l’on sent bien qu’il s’est préparé à affronter cette pandémie.
Des syndicats professionnels représentant les personnels hospitalier et la médecine de ville, angoissés et donc oppressants malgré eux, remontés contre l’administration de la santé, celle-là même que nos soignants subissent quotidiennement au travers d’une exigence réglementaire sans borne. Comment les blâmer.
Des soignants qui prennent tous les risques sur le terrain et assument admirablement leur vocation pour sauver des vies, sous les applaudissements d’une population reconnaissante.
Un président, chef des armées sanitaires, qui n’hésite pas à prendre les décisions qui s’imposent en suivant scrupuleusement l’avis d’un conseil scientifique d’hommes et de femmes d’expérience pour s’adapter en temps réel à ce virus invisible et évolutif .
Un ministre de la santé qui fait courageusement face, comme ses prédécesseurs, avec une connaissance mouvante de la situation et en s’appuyant sur les moyens dont il dispose pour affronter au mieux la situation, en n’hésitant pas à faire évoluer la stratégie.
De grâce, cessons en pleine guerre de mettre en cause notre état-major, nos officiers, notre armée, au risque de détériorer notre réponse au Covid-19.
Nos responsables ne doivent pas être détournés de l’essentiel.
Pourquoi, dans la sûreté du confinement au regard de la dureté des conditions des soignants, passer son temps à chercher de manière indécente des responsables comme certains s’y emploient, alors que nous sommes tous collectivement responsables de
notre modèle de société.
Observons le sens de l’intérêt général de tous ceux dont la mission, le sacerdoce, est de nous protéger : pompiers, policiers et gendarmes, infirmiers, brancardiers, soignants,...
Dans l’action au service des autres, ils nous donnent une leçon de comportement.
 « Sang contaminé », « Tchernobyl »,...
Quelles expressions disproportionnées pour décrire aujourd’hui un pouvoir accusé de savoir et qui aurait donc délibérément sacrifié son peuple!
Quelle mise en cause obscène,  de tel ou tel pouvoir d’aujourd’hui ou d’hier, qui serait rendu seul responsable!
Un peu de sang froid que diable!
La responsabilité est collective. Point ne sert de se focaliser sur tel ou tel, en passant à côté des dérives de notre modèle.
Ce modèle dans lequel nombreux se débattent,
un capitalisme social qui s’est financiarisé, où la sur-administration et la sur-réglementation ont pris le pas sur l’humain et la solidarité, passés au second plan.
Plutôt que de pister le responsable hypothétique de tout cela, notre jus de crâne collectif devrait être mis à profit pour identifier les dysfonctionnements de notre société.
Nous sommes nombreux à avoir dénoncé la désorganisation et la déshumanisation de l’hôpital au fil des décennies.
De la réforme de son organisation, éloignée des préoccupations du terrain. Le maire disait les attentes de la population, le corps soignant les besoins et l’administration tranchait, dans une forme de cogestion rendue injustement coupable des dérapages financiers et laissant place à une armada de fonctionnaires, directeurs et directeurs adjoints ne rendant des comptes qu’à une administration régionale, elle même sous l’autorité de l’administration nationale.
L’application des 35 heures a finit de déstabiliser un système hospitalier contraint par endroit de s’appuyer, oh crime de lèse majesté, tant cela contrevient au dogme, sur les cliniques privés pour assumer les urgences!
Et l’on a vu le système se déliter au fil des années.
Chercher un responsable politique a tout ça est peine perdue, les majorités successives, quelles que soient leur couleur politique, ont accentué ou simplement assumé, ce triste virage français.
Et pour ce qui concerne la pandémie mondiale.
Quoi de plus difficile que l’anticipation d’une catastrophe.
Chaque pays se débat. Avec ses moyens. Avec son lot d’erreurs. Avec ses forces.
Certes nous devrons adapter notre réponse à une pandémie future en corrigeant nos faiblesses.
Certes l’Union Européenne devra sans doute mutualiser la réponse des pays membres sur du matériel qui s’est avéré essentiel et en pénurie. Par des stocks. Des productions européennes stratégiques.
Certes la Corée du Sud qui est montrée en exemple, devra certainement nourrir nos réflexions futures.
Mais n’occultons pas la réalité de ce que ce modèle représente. Des caméras partout pour surveiller, identifier les citoyens et en l’occurrence les malades potentiels dans un pays où les virus du type de celui que nous affrontons sont légions. Et où le pays a dû adapter sa réponse à un risque permanent. Risque qui jusqu’alors nous a partiellement épargné.
Ce serait un peu comme, face à une tempête de neige inhabituelle et meurtrière, de reprocher au maire de Nice la désorganisation de la ville par rapport à l’efficacité des équipes de déneigement de Chamonix...
Comment ne pas comprendre les hésitations sur la doctrine de protection des individus, dans une société où l’on reproche systématiquement aux décideurs d’en faire trop ou pas assez?
Le juste milieu est-il possible en matière de réponse sanitaire ?
Le président a tranché ce débat en sonnant une mobilisation générale sanitaire et économique « quel qu'en soit le coût ».  
Le débat sur l’insuffisance en masques et gel hydro-alcoolique d’aujourd’hui, rappelle le débat inverse en surnombre de vaccins en 2009 au moment de la crise de la grippe AH1N1.
Pour le passé, les ministres de la santé de trois présidents successifs sont concernés. Faut-il les blâmer des choix opérés ? C’est si facile de désigner aujourd’hui et donc hors contexte, un coupable et de le traduire devant le tribunal médiatique.
Les cibles sont mouvantes et le vrai coupable est à chercher dans la  continuité de l’Etat incarnée par la suprématie d’une administration qui enjambe les majorités sorties des urnes et dont les choix ne sont pas suffisamment débattus. 
Qu’en 2009, après la polémique sur les sur-stocks on en arrive 11 ans après à une polémique sur les sous-stocks, montrent simplement que la stratégie dont sont collectivement responsables les gouvernements successifs n’étaient peut être pas la bonne.
L’économie de la santé cherche en permanence un rapport coût efficacité que tous les citoyens, surchargés d’impôts, cautionnent.
Qu’en 2011 le pouvoir politique saisisse le HCSP ( Haut Conseil de la Santé Publique) de la question de la meilleure voie pour protéger et que se dessine alors une stratégie de réserver les fameux masques FFP2 aux professionnels de santé et les masques chirurgicaux aux personnels en contact par nécessité avec le public, par un avis de juillet 2011. Et donc de mécaniquement réduire le stock stratégique de masques, préalablement destiné à toute la population.
Qu’en 2013, une nouvelle doctrine de décentralisation du stockage des masques vers les entreprises pour être plus opérationnel et à nul doute pour leur transférer le coût de cette protection, s’appuie sur l’avis de juillet 2011, pour poursuivre la réduction du stock stratégique national.
Que depuis cette date, la nouvelle stratégie n’ait été remise en cause par quiconque. Mais sans pandémie pourquoi l’aurait elle été ?
Ces vérités soulignent que chacun des pouvoirs en place a une forme de responsabilité. Nul ne peut sérieusement penser que ces choix qui ont nécessairement été validés par les pouvoirs successifs ont été portés par quelqu’un d’autre que notre administration de santé, avec l’assentiment des politiques.
Des erreurs ont pu être commises. Mais à chaque étape, gageons que nul n’a délibérément entraîné notre pays dans une voie chaotique.
C’est tout un système qu’il faut aujourd’hui évaluer.
Se focaliser sur un point précis ou sur un responsable identifié, permettrait au système d’échapper à une remise en cause nécessaire. C’est précisément ce que nous devons éviter.
Ce petit jeu qui fleurit, de porter plainte contre les uns ou les autres, de désigner tel ou tel, est bien dérisoire par rapport à la gravité des moments que nous vivons.
Plutôt que de chercher un coupable, oserais-je dire, une victime expiatoire, interrogeons nos consciences individuelles comme notre conscience collective.
Observons les phénomènes de dépollution rapide des zones en confinement, de l’air pur à Pékin ou Delhi, à l’eau claire et poissonneuse des canaux de Venise, la nature reprend ses droits quand l’homme cesse sa fuite en avant.
Le télétravail que j’ai défendu contre tous en 2008, doit plus que jamais devenir le modèle de travail économe en énergie, protecteur de l’environnement et source du maintien de nos villages...
Généralisons le, quand la tâche a accomplir le permet.
Le Revenu Universel dont nous sommes de plus en plus nombreux à défendre l’expérimentation, doit passer des tests in vitro aux tests cliniques...
Expérimentons le au plus vite.
Permettons à chacun d’évoluer et adaptons nous à la nouvelle société en désintermédiant un modèle social devenu injuste, sûr-administré et sûr-réglementé.
Le panier des essentiels, la nourriture cruciale pour notre équilibre, avec, à prix accessible, des produits de qualité, de saison et provenant de circuits courts, dans chaque catégorie : légume, viande, poisson, un produit laitier, une boisson.
Revenons à l’essentiel.
Le « Housing first », un toit pour chacun, modélisé dans l’UTAH doit être rendu possible par le redéploiement des financements de toutes les politiques curatives, coûts indirects de la non prise en charge des SDF, vers une politique de prévention efficace et humaine.
Agissons en urgence.
Travail, nourriture, logement,..
mieux vaut prévenir que guérir!
Plutôt que d’essayer de trouver la victime expiatoire de cette tragédie sanitaire, une aiguille dans une botte de foin, mettons à profit le confinement pour réfléchir au modèle du jour d’après.

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