Guerre en Ukraine : cette cause majeure des difficultés de l’armée russe passée relativement inaperçue <!-- --> | Atlantico.fr
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Des militaires russes patrouillent dans une rue à bord de véhicules près du port maritime de Berdyansk, le 30 avril 2022.
Des militaires russes patrouillent dans une rue à bord de véhicules près du port maritime de Berdyansk, le 30 avril 2022.
©ANDREY BORODULIN / AFP

Difficultés russes

Au 77ème jour de l'invasion russe en Ukraine, force est de constater que Moscou ne parvient toujours pas à atteindre ses objectifs. Outre la logistique, l'armée russe fait face à un problème majeur qu'elle n'arrive pas à résoudre

Jérôme Pellistrandi

Jérôme Pellistrandi

Le Général Jérôme Pellistrandi est Rédacteur en chef de la Revue Défense nationale.

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Atlantico : Dans quelle mesure la non-maîtrise de l’espace aérien ukrainien est une cause majeure de difficulté pour l’armée russe ? 

Jérôme Pellistrandi : 48 heures après l’offensive du 24 février, les Russes ont affirmé avoir détruit la quasi-totalité de l’armée de l’air ukrainienne, et donc avoir pris le contrôle de l’espace aérien ukrainien. Pourtant, on remarque bien, 77 jours après le début du conflit, que ce n’est pas du tout le cas. L’armée russe a effectivement une certaine supériorité dans le ciel mais ne peut pas prétendre contrôler l’ensemble de l’espace aérien. 

Pour les Russes, cette situation est problématique pour deux raisons : 

- L’Ukraine est un territoire très vaste, plus que la France. Surveiller son espace aérien demande donc des moyens très importants, ce que la Russie n’est pas en mesure de faire, malgré des aéronefs modernes et efficaces. Assurer une couverture 24h sur 24 est très compliqué, surtout avec un manque d’avions. Ce que les Russes avaient affirmé se retourne donc contre eux. 

- L’armée ukrainienne a réussi à conserver une petite partie de son potentiel aéronautique. Elle dispose aussi de missiles antiaériens qui lui ont permis de détruire un certain nombre d'appareils russes et donc d’exercer une très forte contrainte sur les activités aériennes de Moscou. 

Ces points font de la non-maîtrise du ciel ukrainien le principal échec de l’armée russe en Ukraine. 

Si la Russie avait réussi à contrôler l’espace aérien ukrainien, l’issue du conflit aurait-il pu être différent ? 

De toute évidence, oui. On le voit bien lors des campagnes menées par les États-Unis et leurs alliés lors de la guerre du Golfe. Le contrôle de l’espace aérien par la coalition permettait à ses nombreux avions de détruire des cibles programmées, ou des cibles d’opportunité. Le schéma est le même dans le cadre de l’opération Barkhane au Sahel. Comme l’armée française ne fait pas face à une véritable menace aérienne, elle peut patrouiller et effectuer des frappes dans des délais très brefs. 

Cette incapacité à contrôler l’espace aérien ukrainien s’inscrit dans une surestimation des capacités de l’armée russe et également une sous-estimation de l’adversaire. Poutine pensait que l’armée de l’air russe pourrait contrôler facilement l’espace aérien ukrainien tout en détruisant des cibles importantes. De l’autre côté, l’armée ukrainienne a réussi à occasionner des pertes très importantes à l’armée russe. Les pertes de cette dernière seraient de plus de 120 aéronefs, ce qui comprend des avions de combat, des hélicoptères et des drones. Les Russes ont d’ailleurs perdu un Soukhoï-35, qui est un appareil de dernière génération. Il faut bien savoir que la Russie a uniquement mené des guerres contre des adversaires qui lui étaient bien inférieurs. C’est le cas de la Géorgie en 2008, de l’intervention en Ukraine en 2014, ou de la Syrie qui n’avait aucun moyens lourds de défense antiaérienne. L’armée russe n’a donc pas une réelle expérience en la matière. 

Comment l’Ukraine a-t-elle réussi à résister à l’invasion Russe ? 

Les principes de base sont de disperser, de camoufler et de protéger ses forces, ce que les Ukrainiens ont parfaitement compris. Ils ont également tiré des leçons de la défaite de 2014. Surtout, ils ont bénéficié de livraisons massives de missiles antiaériens, comme les Stinger américains ou les Mistral français. Grâce à cela, ils ont pu abattre de nombreuses cibles russes, les obligeant à limiter leurs sorties aériennes. Le soutien occidental a été absolument déterminant, au moins dans les premières phases de la guerre, en permettant de ralentir l’invasion russe et aux soldats ukrainiens de se défendre. La stratégie russe a d’ailleurs évolué avec la récente offensive terrestre dans le Donbass et l’utilisation d’armes aériennes pour bombarder les premières lignes ukrainiennes. Les Ukrainiens sont dans l’obligation de renforcer leurs défenses antiaériennes pour se protéger de ces bombardements, ce qui complique la reprise des territoires occupés. 

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