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Fédération Française de football contre Ligue de Footbal professionnelle : la bataille des modèles économique et politique
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Le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction française, doit arbitrer le conflit entre la Fédération Française de football et la Ligue professionnelle sur le projet de réduire le nombre de montées/descentes entre la Ligue 1 et la Ligue 2. Le système actuel est de trois clubs relégués, trois clubs promus.

Pascal PERRI

Pascal PERRI

Consultant économique de RMC Sport. Auteur de « Ne tirez pas sur le foot », Editions Jean Claude Lattès. 

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C’est une partie importante pour l’avenir du football professionnel français qui se joue en ce moment dans les bureaux du Conseil d’Etat. La plus haute juridiction française est appelée à arbitrer le conflit entre la Fédération Française de football et la Ligue professionnelle sur le projet de réduire le nombre de montées/descentes entre la Ligue 1 et la Ligue 2. Le système actuel est de trois clubs relégués, trois clubs promus. Il s’applique aux trois premières divisions du football français. L’enjeu est de ramener le nombre de clubs dans l’ascenseur à deux pour éviter les accidents industriels trop nombreux dans ce sport. Par le passé, l’actuel président de la Fédération, l’ancien maire socialiste de Guingamp, M. Noël Le Graët trouvait que trois montées par an de National en Ligue 2, c’était trop ! Comment expliquer un tel changement de pieds ? Les dirigeants de Ligue 2 qui vivent déjà sous perfusion des droits TV générés très majoritairement par l’élite ne veulent surtout pas changer de modèle. Les droits audiovisuels fonctionnent comme un système de Sécurité sociale pour ces clubs souvent incapables d‘attirer un large public dans leurs stades.

Pour renforcer la compétitivité du foot  français, il faut tirer tout le monde vers le haut et rompre avec un système de mutualisation des revenus au fond très pénalisant pour les meilleurs. La récompense est un puissant levier de progrès alors que la dilution du mérite conduit en général à l’appauvrissement collectif. Mais dans un univers électif comme celui de la Fédération, toutes les armes sont utilisées à commencer par celle de la démagogie. La vieille inclination française à l’égalitarisme n’épargne pas le football. Qu’importe les intérêts de long terme pourvu que les décisions prises assurent la réélection des sortants ! Et pourtant, dans un contexte européen très concurrentiel, la Ligue doit absolument conserver son pouvoir normatif. La réforme des deux montées-deux descentes doit aller à son terme.

Dans certains cercles du football, on n’aime pas entendre toutes les vérités. La première d’entre elles est toutefois incontestable. Il n’y a pas de place pour 43 clubs professionnels viables en France. Beaucoup survivent avec les seuls droits TV des meilleurs clubs de l’élite. Il conviendrait au contraire de resserrer les rangs pour produire de l’attractivité. Dans des ligues ouvertes comme c’est le cas en France, le sport professionnel est une activité marquée par l’incertitude du résultat. Plus les compétitions sont équilibrées, plus l’intensité du suspense est élevée. Au cours des dernières années, on a vu passer des équipes de type "météorites" dans le panthéon du foot français. Une année en Ligue 1 et puis…plus rien. Pensons à Grenoble, Arles Avignon, Le Mans, piégés par des montées mal préparées. Ces clubs ont disparu du monde professionnel et les équipements construits à la hâte sont aujourd’hui à la charge des collectivités et donc des contribuables. Le monde sportif professionnel est exigeant. Le football mobilise des capitaux importants et sauf à vouloir abandonner toute ambition dans ce domaine, il convient de protéger les investisseurs. La réforme envisagée - réduire le nombre de relégations - a pour vocation de réduire la part du risque.

Nous sommes les premiers à souhaiter que nos champions accèdent aux phases finales des compétitions européennes. Sur ce terrain exigeant, ils doivent rivaliser avec les meilleurs espagnols, allemands, anglais ou italiens. Pour y parvenir, nous devrons passer d’un système administré de caractère socialiste à une gouvernance plus audacieuse. Il faut accepter que le monde professionnel soit géré à part, selon les règles d’un marché ouvert. Il y a deux versions disponibles du sport professionnel en France. Une version napoléonienne, de caractère égalitariste, une autre favorable à la professionnalisation assumée de l’élite. Le point de vue du rapporteur du Conseil d’Etat fait la part belle à la fédération dont la fonction n’est pas de gérer les championnats professionnels. Le foot amateur n’a d’ailleurs pas à se plaindre du sort qui lui est réservé. Chaque année, les professionnels versent plus de 30 millions d’euros au football amateur et aux équipes de jeunes. Le rapporteur privilégie l’intérêt général qui est une notion fourre-tout, mal définie. Il prend le risque d’introduire le fait du prince dans les relations entre la Fédération et la Ligue. Le football professionnel aurait tout à craindre de ce pouvoir exorbitant. 

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