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Benoît Rayski.
Benoît Rayski.
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Hommage

C’est avec une immense tristesse que nous avons appris par la voix de son fils Lucas la mort paisible de Benoît Rayski à l’âge de 86 ans.

Jean-Sébastien Ferjou

Jean-Sébastien Ferjou

Jean-Sébastien Ferjou est l'un des fondateurs d'Atlantico dont il est aussi le directeur de la publication. Il a notamment travaillé à LCI, pour TF1 et fait de la production télévisuelle.

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Benoît a tellement fait partie de l’histoire d’Atlantico que je ne me souviens même plus du moment ni des circonstances de notre rencontre. 

Je me souviens en revanche parfaitement de nos centaines de conversations, souvent animées, jamais ennuyeuses, toujours instructives tant il savait jongler de références en anecdotes. Qui d’autre que Benoît pouvait bien avoir l’idée d’appeler un dimanche matin à 7h30 juste pour évoquer une idée d’article ou une suggestion éditoriale ?

Benoît était un essayiste prolixe avec un goût prononcé pour l’histoire comme pour le pamphlet. Mais pas que le pamphlet. C’était aussi un journaliste passionné, soucieux de mettre en lumière les noeuds et pièges idéologiques qui structurent si souvent nos débats publics. Il avait notamment été chef du service étranger de France-Soir, rédacteur en chef au Matin de Paris et rédacteur en chef de Globe. 

Venu de la gauche, il ne reconnaissait plus cette famille politique qui lui était pourtant si chère tout comme l’était la Pologne de ses ancêtres malgré l’exil de ses parents et l’antisémitisme auquel ils y avaient été confrontés. Enfant caché en France pendant l’Occupation, rien ne lui était plus étranger que l’idée de s’enfermer dans un statut de victime, encore moins celle de l’instrumentaliser face à des adversaires idéologiques, comme tant d’autres le font de leurs histoires personnelles. 

Son père, Adam Rayski, décoré de la médaille de la Résistance et de la croix de guerre, co-fondateur du CRIF et lui-même journaliste avait rompu avec le Parti communiste, jamais avec ses idéaux. 

Benoît était aussi l’un des soldats les plus déterminés de nos guerres culturelles, ces guerres qui le désolaient mais dont il était convaincu qu’il n’y a pas d’autre choix que d’accepter de s’y engager et d’y combattre lorsqu’on nous les impose, quel qu’en soit le coût social et les accusations infamantes qu’elles valent à ceux qui les mènent au nom de l’honnêteté intellectuelle, de la liberté et de l’amour de l’héritage français.

Car il était avant toute autre considération un amoureux de la France, de sa langue, de son histoire en plaies et bosses, de ses valeurs qu’il refusait de voir réduites à une litanie d’accusations alors même que ce sont notre liberté, notre folle passion nationale pour la politique, nos grands auteurs ou grands Hommes qui ont permis d’exister à ceux qui n’y voient que crimes, discriminations et systèmes de domination. 

L’un de nos sujets d’opposition portait sur l’emploi du terme islamophobe, qu’il revendiquait et que pour ma part je ne voulais pas voir dans les colonnes d’Atlantico tant il s’agit d’un mot piège que beaucoup traduisent par musulmanophobie même s’il désigne la critique d’un système de pensée et pas le rejet des personnes qui s’y référent. Il avait l’élégance d’écouter mes objections comme de ne me pas me traiter de lâche ou de « dictateur » comme d’autres n’ont jamais hésité à le faire lorsque il m’arrive de leur demander de baisser d’un cran x ou x argumentaire dans leurs articles. 

Autre sujet beaucoup plus récurrent d’échanges entre nous, son emploi de l’ironie et du second ou même dixième degré et dont je ne cessais de devoir lui rappeler -à regret- qu’ils sont devenus quasi impossibles dans un univers numérique et médiatique où les chasseurs de sorcières traquent le moindre faux pas supposé à grand coups de bêtise, d’inculture et de mauvaise foi. 

Son histoire personnelle comme la lecture attentive de ses articles suffisaient pourtant à démentir quiconque doutait de son attachement aux valeurs de la République et au respect de la dignité humaine quelles que soient les origines, les confessions, les convictions. Et c’est exactement la raison pour laquelle il était si présent dans les colonnes d’Atlantico même si certains se faisaient une joie mauvaise à le lire « de travers ».

Un coup d’œil à sa notice Wikipedia suffit du reste à convaincre de la saloperie -et le mot est pesé- du « camp » d’en face qui ne respecte ni les morts -et notamment ceux de Benoît- ni les vivants pourvu que la disqualification par la reductio ad fascistum leur permette d’échapper au débat et aux argumentaires.

Pour autant, il ne baissait jamais les bras, ne se laissait jamais intimider. Sa santé ou son équilibre qui lui jouait des tours ne le détournaient pas plus de la lecture de la presse. Écrire lui était aussi naturel que de respirer. Lutter pour ses valeurs, pour nos valeurs, par quelques mots ou références était l’une de ses raisons de vivre. Cette passion l’a porté jusqu’à son dernier jour. 

À ses enfants et ses proches, la rédaction d’Atlantico présente toutes ses condoléances.

Cher Benoît, vous allez nous manquer.

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