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DSK donne des leçons à François Hollande en oubliant vite ses erreurs à la tête du FMI
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Mal placé

Si Dominique Strauss-Kahn n'est pas tendre avec François Hollande, l'ancien directeur du FMI a aussi son lot de détracteurs qui n'hésitent pas à critiquer ouvertement son action lors de la tourmente de la crise économique.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Dominique Strauss-Kahn est de retour. L’hebdomadaire L’Express consacre sa couverture à l’ancien directeur du FMI et cite l’intéressé à propos de François Hollande : "un petit arrangeur " "sans vision" et "impuissant".  Bien que ces critiques puissent apparaître fondées au regard des résultats économiques obtenus par le président français, certains doutes subsistent sur l’opportunité d’endosser le costume du donneur de leçon pour l’ancien directeur du FMI.

En effet, le rôle du Fonds monétaire international sous la présidence de l’ancien ministre des finances n’est pas toujours considéré comme ayant été des plus efficaces. Desmond Lachman, ancien du FMI et économiste au sein du puissant think tank américain American Enterprise Institute publiait en 2011 une tribune dans le Financial Time, et accusait directement l’ancien président du FMI :

"Beaucoup ont écrit sur l’influence majeure de Dominique Strauss-Kahn au cours des récentes négociations (relatives à la crise des dettes européennes). L’histoire, elle, sera plus à même de se souvenir de lui comme l’homme qui a mis le FMI sur la route du déclin, par son approche erronée de la crise de la dette européenne."

"La décision de Monsieur Strauss-Kahn de traiter la crise par la voie de la liquidité plutôt que de la solvabilité a exclu toute possibilité de restructuration de la dette par le FMI, ou de sortie de l’euro, comme solutions aux problèmes de déséquilibres extérieurs et du secteur public. En fait, il a opté pour la restriction budgétaire et des réformes structurelles radicales en guise de cure pour la Grèce, l’Irlande et le Portugal"

Ces déclarations sont évidemment à mettre en perspective avec les déclarations de DSK le 15 novembre 2010 sur France Inter :

"Ce que je constate moi quand même, avec honnêtement pas mal de plaisir, c'est que dans les pays dans lesquels il a fallu couper les dépenses durement, et c'est toujours les pays les plus démunis, les plus pauvres, qui en souffrent dans ces cas-là, les nouveaux programmes du FMI et je pense à la Grèce en particulier ont été construits de telle manière que l'on revienne à l’équilibre mais que cela se fasse en protégeant les plus démunis, les plus vulnérables."

Pourtant, la recette magique permettant le retour "à l’équilibre" en protégeant les plus vulnérables semble avoir mal tournée. L’année 2010 indique tristement l’accélération de la crise grecque, suite à la mise en place du "programme" au mois de mai de cette même année. Un désaveu.

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Un désaveu qui va atteindre le FMI lui-même. En juin 2013, sous la présidence de Christine Lagarde, le Fonds monétaire international publie un rapport ne pouvant être interprété autrement que comme un mea culpa :

"Pourtant, il y a eu de notables échecs. La confiance dans le marché ne fut pas restaurée, le système bancaire a perdu 30% de ses dépôts, et l’économie a dû faire face à une récession bien plus forte que prévue avec un niveau de chômage exceptionnel."  Niveau de chômage exceptionnel qui atteint aujourd’hui 26,7% de la population active, et 56,8% de la jeunesse.

"La récession économique fut bien plus sévère que les prévisions. La révision des données a  compliqué les comparaisons, mais le PIB réel en 2012 était en baisse de 17% par rapport à 2009, comparé à des prévisions de baisse de 5,5%." Soit un écart de plus de 10 points par rapport aux anticipations. L’erreur est colossale.

Le graphique suivant reprend les prévisions successives du FMI, et la réalité. Malgré 5 révisions, celles-ci n’ont jamais permis d’approcher cette réalité.

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Les premières prévisions anticipaient un retour du PIB à son niveau de 2008, et ce dès 2014. L’écart est aujourd’hui de plus de 20 points.

Dans sa tribune contestant les choix de Dominique Strauss-Kahn, Desmond Lachman, enfonce le clou : "Pourtant, il est difficile de comprendre pourquoi, malgré les faibles performances économiques de la Grèce, le FMI a choisi de répéter les mêmes erreurs conceptuelles dans ses programmes d’ajustements."

La réponse est claire. Le 10 avril 2010, le Président du FMI répondait à l’hebdomadaire autrichien  Profil  et déclarait alors : "le seul remède efficace qui reste à la Grèce c’est la déflation. Cela sera douloureux.  Cela signifie des salaires en baisse et des prix en baisse. Il n’y a pas d’autre chemin pour que la Grèce redevienne compétitive." Nous y sommes, la déflation, le chômage, la contrainte forcée qui mettra le pays sur la voie du "rebond" économique. Quatre ans plus tard, le remède ne fonctionne toujours pas.

Finalement, Il semblerait que François Hollande s’inspire bien plus des prescriptions de Dominique Strauss-Kahn que celui-ci ne semble le croire. Bizarrement, pour la France et François Hollande, et toujours selon l’Express, DSK déclare "J’avais une idée ou deux quand nous étions à la margelle du puits, pour éviter d’y tomber. Mais maintenant qu’on est au fond …" La Grèce aussi, est au fond, avec une idée ou deux.

Pour lire le Hors-Série Atlantico, c'est ici : "France, encéphalogramme plat : Chronique d'une débâcle économique et politique"

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