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Le scénario d'une récession globale pourrait être évité.
Le scénario d'une récession globale pourrait être évité.
©JOEL SAGET / AFP

Secteur par secteur

Alors que les prévisions de croissance sont contrastées, certains estiment que le scénario noir de récession globale pourrait être évité. Des économistes penchent en effet pour un scénario de récession par roulements, ou perlée, soit un ensemble de récession successives dans différents secteurs d’activité.

Michel Ruimy

Michel Ruimy

Michel Ruimy est professeur affilié à l’ESCP, où il enseigne les principes de l’économie monétaire et les caractéristiques fondamentales des marchés de capitaux.

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Atlantico : Alors que les prévisions de croissance sont contrastées, certains estiment que le scénario noir de récession pourrait être évité. En effet, certains économistes penchent plutôt pour un scénario de récession par roulements, ou perlée, soit un ensemble de récession successives dans différents secteurs d’activité. A quel point ce scénario se profile-t-il ?

Michel Ruimy : Dans le contexte inflationniste actuel, une nouvelle rationalité des consommateurs semble être en train de s’installer. Est-elle conjoncturelle ? structurelle ? Il n’en demeure pas moins que le comportement de consommation évolue avec une réallocation du budget. Les ménages privilégient, dans une certaine mesure, pour les dépenses de loisirs (vacances, spectacles - Cf. concert de Taylor Swift, double film : « Barbenheimer » - …) au détriment, par exemple, d’achats de produits de marque alimentaires, de biens manufacturés… 

Même si le montant total des bénéfices des entreprises est en baisse - mais reste toujours à un bon niveau -, les indices économiques des services restent relativement bien orientés tandis que les indicateurs manufacturiers font état, dans le même temps, des difficultés présentes et futures.

Dès lors, l’environnement économique actuel tend, aujourd’hui, au plan mondial vers une « récession perlée » c’est-à-dire une situation dans laquelle l’activité de divers pans de l’économie se contracte à des différentes périodes. On pourrait assister au passage progressif, de manière non séquentielle, d’une série de petites récessions sectorielles à l’ensemble de l’économie.

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Quels secteurs sont actuellement touchés par la récession ou ce qui pourrait le devenir au niveau global ? Quels sont leurs points communs ?

Au vu des conditions économiques actuelles, trois types d’entreprises sont, d’une manière générale, en difficulté : celles produisant des biens durables (ainsi que leurs intrants et le transport), les secteurs sensibles aux fluctuations des taux d’intérêt et les sociétés, parfois sous-traitantes ou de services, dont l’activité est plus ou moins fortement corrélée à celle d’autres entreprises partenaires.

Ainsi, la chimie, l’emballage - notamment en carton -, le fret, l’électronique, l’immobilier résidentiel et commercial, les fusions et acquisitions, la publicité… sont autant de secteurs, différents, qui affichent des résultats erratiques / en « dents de scie ». Or, ces industries durement touchées ne fonctionnent pas de manière isolée. Les volumes de transport maritime et routier fléchissent car les fabricants ne produisent plus autant qu’auparavant.

En France en particulier, quels sont les secteurs qui pourraient être les plus touchés par des phénomènes de récession ?

Face à une situation complexe, le recensement des secteurs les plus susceptibles d’être touchés par une récession n’est pas chose aisée. Cependant, dans une perspective historique, certaines activités ont montré une sensibilité accrue aux ralentissements économiques, et qui pourraient être particulièrement vulnérables en cas de récession.

L’industrie manufacturière, un pilier important de l’économie française, pourrait être touchée par une réduction de la demande mondiale pour ses produits et donc pour les exportations. Par exemple, les ventes de véhicules neufs et/ou d’occasion peuvent diminuer et avoir des répercussions sur les fabricants, les concessionnaires et les industries connexes de l’industrie automobile. Dans cette optique, les services aux entreprises (publicité, conseils…) peuvent être également touchés. 

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Les secteurs du tourisme, de l’hôtellerie-restauration et du divertissement sont sensibles aux fluctuations économiques dans la mesure où les personnes ont tendance à réduire leurs dépenses de voyage et de loisirs pendant les périodes de ralentissement économique. 

Les récessions peuvent également influencer le marché immobilier en réduisant la demande de logements. Les investissements dans les projets immobiliers peuvent également ralentir en raison de l’incertitude économique.

Les institutions financières peuvent aussi être touchées avec la hausse des prêts non-performants, en particulier si la récession est accompagnée de crises financières.

Toutefois, il est important de noter que l’impact peut varier en fonction de la gravité de la récession et des mesures prises par les gouvernements (fiscales, monétaires, de relance économique…) pour atténuer ses effets, qui peuvent jouer un rôle crucial dans la minimisation des conséquences négatives.

A quel point cela peut-il entraîner des situations hétéroclites selon les pays ?

De nombreux facteurs peuvent contribuer à la variabilité de la transmission des conséquences d’une récession d’un pays à l’autre. 

En effet, même si une récession mondiale peut avoir des éléments communs, les circonstances particulières de chaque pays (diversité du système productif, insertion plus ou moins grande dans le commerce mondial et niveau de dépendance extérieure en lien avec la volatilité du cours des matières premières, pertinence des politiques économiques menées par les gouvernements, stabilité financière, niveaux d’endettement public et privé, système de protection sociale…) déterminent la manière dont ils ressentiront les effets économiques et sociaux.

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Quel est le risque que la « récession perlée » se transforme en « récession globale » ?

La transformation d’une « récession perlée » en « récession globale » dépend d’une multitude de facteurs complexes et interdépendants. En effet, les économies sont aujourd’hui très interconnectées tant au plan commercial que financier, ce qui signifie qu’une « récession perlée » a potentiellement un impact plus large (« effet domino »). Cependant, il n’y a pas de processus simple pour prédire, avec certitude, l’ensemble des conséquences dans une situation spécifique. Toutefois, il convient de surveiller certains éléments.

La confiance des entreprises et des consommateurs c’est-à-dire le sentiment global des affaires joue un rôle crucial dans la propagation des récessions. La détérioration des perspectives économiques peut entraîner une baisse des dépenses de consommation et d’investissement, augmentant par là-même, les conditions d’une récession globale. 

De même, la concomitance avec une crise financière peut conduire à des perturbations sur les marchés financiers nationaux voire mondiaux. Les crises bancaires, les défauts de paiement de la dette et autres problèmes financiers peuvent se propager rapidement, affectant la confiance des investisseurs et déclenchant des réactions en chaîne.

Enfin, il convient de ne pas négliger les politiques économiques et monétaires des gouvernements et des banques centrales qui peuvent, dans certains cas, influencer la trajectoire économique. Des politiques coordonnées ou incohérentes peuvent soit atténuer les effets des récessions perlées, soit les amplifier et les transformer en une récession plus globale.

Aujourd’hui, nous sommes dans un « nœud gordien ».

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