Comment réagir lorsque l’on vous diagnostique une déficience cognitive légère<!-- --> | Atlantico.fr
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Une image d'un cerveau humain prise par un scanner à émission de positons, également appelé PET scan, est vue sur un écran le 9 janvier 2019, au Centre Hospitalier Régional et Universitaire de Brest (CRHU), dans l'ouest de la France.
Une image d'un cerveau humain prise par un scanner à émission de positons, également appelé PET scan, est vue sur un écran le 9 janvier 2019, au Centre Hospitalier Régional et Universitaire de Brest (CRHU), dans l'ouest de la France.
©Fred TANNEAU / AFP

Ce qui n'est pas synonyme de démence

Le diagnostic de déficience cognitive légère est toujours vecteur d’anxiété, voire de panique chez les patients.

Christophe de Jaeger

Christophe de Jaeger

Le docteur Christophe de Jaeger est chargé d’enseignement à la faculté de médecine de Paris, directeur de l’Institut de médecine et physiologie de la longévité (Paris), directeur de la Chaire de la longévité (John Naisbitt University – Belgrade), et président de la Société Française de Médecine et Physiologie de la Longévité.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, notamment de "Bien vieillir sans médicaments" aux éditions du Cherche Midi, "Nous ne sommes plus faits pour vieillir"  chez Grasset, et "Longue vie", aux éditions Telemaque

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Atlantico : Les diagnostics de déficience cognitive légère peuvent susciter une vive inquiétude. Ce diagnostic ne devrait pourtant pas trop alarmer les patients, des solutions existent pour y faire face. Quelles sont-elles ? Est-il possible de ralentir la déficience cognitive légère ? Par quel processus ? Des adaptations, liées au mode de vie, en particulier l’exercice et l’alimentation, peuvent-elles participer au ralentissement du déclin cognitif ?

Christophe De Jaeger : Le point important et que nos contemporains doivent bien intégrer est qu’il est possible d’agir sur une déficience cognitive légère qui n’est pas synonyme de démence.

Il va falloir, bien sûr, faire un bilan neuro cognitif, une biologie adaptée, une IRM cérébrale, mais aussi rechercher en fonction des éléments cliniques une dépression, une perte de l’acuité auditive, une apnée du sommeil, des carences vitaminiques ou autres, etc. qui peuvent être autant de possibilités de guérison.

Comme le rappelle utilement le Dr Halima Amjad, professeur assistant en gériatrie à la faculté de médecine John Hopkins, il faut éliminer les médicaments qui peuvent altérer le fonctionnement cérébral ou dépister des troubles de l’audition. Ce sont de petites choses qui peuvent changer la vie des patients et l’évolution d’une pathologie cérébrale.

De nombreuses publications montrent également que des changements dans notre mode de vie peuvent être utiles et retarder le déclin cognitif. Le docteur Fredericks a raison sur une diète de type méditerranéen et d’insister sur le cardiotraining qui sont utile sur la cognition, mais également sur la qualité de vie. En termes d’exercice, on recommande 150 minutes d’exercice modéré ou 90 minutes d’exercices plus vigoureux, par semaine, auxquels il faut rajouter deux heures d’exercices en résistance par semaine (musculation).

Quels sont les principaux moyens pour gérer les symptômes ?

Le diagnostic de déficience cognitive légère ou MCI en anglais est toujours vecteur d’anxiété, voire de panique chez les patients. On le comprend aisément quand on sait que ce type de déficience risque de s’aggraver et mener à une démence. En effet, de 10 à 15 % des personnes souffrant d’une déficience cognitive légère développeront une vraie maladie cognitive. C’est d’ailleurs, une des raisons qui malheureusement conduit un trop grand nombre de personnes victimes de déficience cognitive légère à négliger leurs symptômes et ne pas en parler à leur médecin.

Un trouble cognitif léger est une défaillance de la mémoire ou des autres fonctions cognitives (ce sont les fonctions qui dépendent du cerveau) qui sont plus marquées que ne le voudrait l’âge de la personne. Cela concerne la mémoire en général (oublis des rendez-vous, de conversations, d’évènements récents…), mais également les troubles du langage (avoir des difficultés à trouver le mot juste), de la pensée (perdre le fil de ses idées), du jugement (s’habiller trop chaudement en été), de l’orientation dans le temps et l’espace (se perdre dans un lieu familier), avec des difficultés d’organisation, de planification, de raisonnement, d’apprentissage....

Je suis certain que beaucoup de lecteurs vont se sentir concernés. On peut tous oublier un évènement ou ne plus retrouver le mot juste sans avoir une déficience cognitive légère. C’est la répétition qui doit faire consulter un centre mémoire qui permettra à travers quelques tests cognitifs de savoir si vous devez bénéficier d’examens complémentaires ou non.

Car c’est bien cela le point essentiel : ne jamais passer à côté d’un diagnostic précoce qui va permettre d’agir sur la symptomatologie ou la maladie. Plus on intervient tôt, plus les chances d’intervenir sur le cours de la maladie augmentent. Cela permet également à la personne de devenir un acteur de la lutte contre sa symptomatologie ou sa maladie.

Parfois comme l’évoque le Dr. Carolyn Fredericks, professeur assistante de neurologie à l’école de médecine de Yale aux USA, ce type de diagnostic est nécessaire pour les patients qui peuvent prendre des mesures anticipées pour régler leur avenir et pour les familles en les aidant à évoquer certaines mesures de protections juridiques (mesure de protection future, curatelle, tutelle).

La détection à un stade précoce permet-elle de mieux se prémunir contre la déficience cognitive légère ?

La détection précoce ou le dépistage est un élément majeur de la prise en charge. Plus on intervient tôt, meilleurs seront les résultats, quel qu’en soit les causes. Traiter une déficience cognitive légère peut permettre de retarder l’échéance de plusieurs années. Comme le rappelle utilement Andrew Kiselica, neuropsychologue à l’Université du Missouri, spécialisée dans le diagnostic des démences, rien ne garantit qu’une déficience cognitive légère évolue vers une démence.

Existe-t-il des traitements pour mieux surmonter la déficience cognitive légère ?

Tout va dépendre du type de déficience cognitive modérée dont il s’agit. D’où l’importance du bilan évoqué plus haut. Rien ne peut être sérieusement mis en place sans avoir consulté en centre mémoire.

Corriger une déficience auditive, une carence biologique, une dépression, un stress, des troubles du sommeil… sont autant de moyens très efficaces à condition de les diagnostiquer. Ne pas les diagnostiquer conduit à leur dégradation, voire à l’apparition d’une vraie pathologie cérébrale par manque de dépistage.

Certains ont évoqué, dans les déficiences cognitives modérées d’origine dégénérative, l’intérêt d’une catégorie de médicaments appelés anticholinestérasiques qui bloquent la dégradation de l’acétylcholine, neuromédiateur indispensable au bon fonctionnement de la mémoire. Ces médicaments ne traitent pas la maladie, mais peuvent ralentir l’évolution des symptômes. Ceci étant dit, ils n’ont pas fait preuve de leur efficacité dans la déficience cognitive modérée. Certains médecins les prescrivent pourtant hors indications aux USA. D’autres médicaments sont susceptibles de détruire les plaques amyloïdes de la maladie d’Alzheimer dans le cerveau. Mais ces médicaments ne sont pas sans risques majeurs et ne sont pas disponibles en France.

De façon générale, il faut retenir que les déficiences cognitives modérées sont des symptômes qu’il ne faut jamais négliger. Il ne faut pas en avoir peur, mais les considérer comme un symptôme d’un éventuel problème qu’il faut diagnostiquer et traiter. Au moindre doute, il faut consulter.

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