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Comment Huawei pourrait diviser profondément le monde
©JASON REDMOND / AFP

Chine

Les Etats-Unis ont arrêté Meng Wanzhou, numéro 2 du géant chinois Huawei. Pékin ne décolère pas.

Antoine Brunet

Antoine Brunet

Antoine Brunet est économiste et président d’AB Marchés.

Il est l'auteur de La visée hégémonique de la Chine (avec Jean-Paul Guichard, L’Harmattan, 2011).

 

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Atlantico : En quoi la détention de la directrice de Huawei s'inscrit dans le contexte de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine ?


Antoine Brunet : On sait maintenant que c’est depuis 1978 que le Parti Communiste Chinois s’est fixé deux objectifs jumeaux et complémentaires, sauvegarder le totalitarisme en Chine et vaincre les Etats Unis. 
A cette date, pour ce faire, Deng Xiao Ping décide d’abord de passer d’un « totalitarisme flamboyant » dans laquelle le chef charismatique, Mao, se maintenait au pouvoir en mobilisant et en surexcitant des foules populaires, au risque de mettre en péril le statut et même la survie du PCC comme cela fut le cas sous la Révolution Culturelle. Deng fit basculer la Chine de ce « totalitarisme flamboyant » à un « totalitarisme sobre », beaucoup plus efficace et beaucoup moins vulnérable : il rétablit le Parti Communiste sur selle, le rétablit comme le Parti-Etat au au-dessus de la société chinoise et au-dessus même de l’armée chinoise ; le Parti se présente à la population comme « un gouvernement d’experts au service de la nation », à la façon des gouvernements impériaux entourés par leurs collèges de mandarins ; il promet à la population chinoise, comme autrefois Hitler à la population allemande, de lui délivrer « un emploi, un logement, une voiture » à la simple condition qu’elle renonce durablement à l’exercice de ses libertés.
A cette même date de 1978, Deng décide aussi d’abandonner le collectivisme (administration directe de l’économie par des fonctionnaires) pour basculer dans un capitalisme d’Etat (organisation de l’économie par des entreprises individualisées qui cherchent le profit mais qui se soumettent le cas échéant aux directives de l’Etat-Parti). Cette mutation, au cours des années 1980, provoque alors d’ailleurs un chômage massif qui fait chuter lourdement le pouvoir d’achat des ouvriers et des travailleurs chinois et qui réduit considérablement la part de la consommation dans le PIB chinois.
Muni désormais de la combinaison « capitariste » (Capitalisme + Totalitarisme) qui avait fait le succès de la puissance allemande et de la puissance japonaise dans les années 30, le Parti Communiste peut alors se lancer, autour de 1989, dans une offensive stratégique de grande envergure ayant pour objectif avoué de vaincre les Etats Unis, le pays triplement dangereux pour le PCC, un pays alors beaucoup plus puissant que la Chine, un pays protecteur de Taïwan, un pays porteur d’un régime démocratique à l’opposé des régimes totalitaires. 
Le PCC s’emploie à développer une stratégie qui s’est avérée historiquement pertinente pour les pays visant l’hégémonie, la stratégie mercantiliste. Il ouvre ses frontières aux échanges internationaux mais maintient une énorme sur-compétitivité salariale ouvrière qui ajoute aux très bas coûts salariaux ouvriers horaires chinois, une sous-évaluation considérable du yuan contre dollar et euro (65% en 2001, 50% encore aujourd’hui). Puis il se fait admettre en 2001 à l’organisation Mondiale du Commerce (OMC) en sorte que les autres pays ne puissent même plus se protéger de la sur-compétitivité salariale ouvrière chinoise par des droits de douane sur le « made in China ». 
Cette stratégie lui permet de récolter, année après année, des excédents commerciaux considérables sur le reste du monde, excédents qui dopent la croissance et la puissance de la Chine tandis que, symétriquement, la plupart des autres pays abonnés aux déficits voient leur croissance s’affaiblir et leur puissance décliner. Cela aboutit à la crise de 2008-2012 qui vient porter gravement atteinte, à court et à long terme, aux Etats Unis et aux autres pays occidentaux tandis que la Chine, elle, surmonte très bien l’épreuve grâce à ses excédents commerciaux quasi-intacts. Avec cette crise, la Chine marque un point géopolitique majeur et améliore très sensiblement son rapport de puissance avec les Etats Unis.
C’est précisément en 2011, au cœur de cette crise occidentale, que le PCC se devait de renouveler sa nouvelle équipe dirigeante. Se sentant en supériorité virtuelle face à l’adversaire américain, il estime qu’il peut désormais se dispenser du conseil de Deng qui recommandait au PCC de « maintenir profil bas » tant que le rapport de forces n’était pas présent. C’est donc une équipe « portant profil haut » autour de Xi Jinping qu’a alors désignée le PCC en son sein (Xi dauphin désigné de Hu dès 2011 avant d’être officiellement intronisé fin 2012 à l’issue du 18ème Congrès). Le PCC levait brusquement le voile sur son objectif et sur sa stratégie et n’hésitait plus à se montrer entreprenant, exigeant, arrogant. 
C’est ce tournant de 2011 qui a complètement bouleversé les relations internationales au cours des dernières années. Sans tarder, Xi Jinping n'a cessé alors de durcir encore les positions du PCC sur tous les fronts, intérieurs et extérieurs.
En matière d'idéologie, le Comité Central a rédigé en 2012 une résolution interne, "le Document N°9", qui, une fois dévoilée en 2013, révélait, pour la première fois, que le PCC concluait officiellement (ce que l'URSS elle-même n'avait jamais osé stipuler officiellement) que  la démocratie était un danger et un poison pour le peuple chinois et plus généralement pour les peuples qui y recourent : cela venait enterrer, brutalement et définitivement, les espoirs d'adoucissement du régime chinois qu'avait pu faire naître la communication antérieure du premier ministre sortant, Wen Jiabao. 
Sur le plan institutionnel, par un vote à la quasi-unanimité à son 19ème Congrès, le PCC autorisait Xi Jinping, s'il le désirait, à se reconduire à vie comme Secrétaire général du PCC et comme Président de la Chine. En même temps, le PCC lui remettait le titre de grand leader ("lingxiu"), un titre qu'il était le seul à venir partager avec Mao Tsé Toung. Depuis lors, on observe un retour à la fois au culte de Mao et à un début de culte de la personnalité de Xi.
Sur le plan des minorités, la répression est venue frapper très durement la population ouïghoure du Sinkiang, plus durement encore que celle qu'a subie et que subit encore la population tibétaine au Tibet : un million de ouïghours (sur une population de 11 millions) sont internés dans "des camps de rééducation" ("laogai").  Quant à Hong Kong, en dépit des engagements pris en 1997 par la Chine ("Un pays, deux régimes"), la mise au pas de la population et la répression de ses aspirations démocratiques se poursuivent et s'amplifient. 
Sur le plan policier, le PCC organise depuis 2017 pour l'ensemble de la population chinoise un redoutable contrôle social qui est permanent. Chaque personne voit son comportement quotidien enregistré en permanence (que ce soit par le flicage de son téléphone mobile, par le flicage de son internet, par le réseau omniprésent de caméras dans tous les lieux publics qui s'articule avec un contrôle facial obligatoire et généralisé). 

Par ailleurs, le PCC a instauré un système dit de "score social". De quoi s'agit-il ? Chaque personne s'est vu attribuer initialement par l’Etat-Parti chinois une même note, une sorte de capital intitulé "score social". Mais son score social est appelé à être modifié en permanence par les observations effectuées sur elle : positivement si la personne affiche sa conformité au régime ou mieux encore son adhésion ; négativement si la personne s'avère "déviante socialement" ou pire encore si elle montre une tendance à la dissidence politique. Et le régime communiste récompense ensuite les personnes à score social élevé et inflige des punitions très pénalisantes aux personnes à score social faible : interdiction d'accès aux postes à responsabilité, interdiction de voyages à l'étranger, interdiction d'inscrire leurs enfants aux meilleures écoles, interdiction d'accès aux vols aériens intérieurs...Même George Orwell n'avait pas imaginé un système policier aussi envahissant, aussi discriminatoire et aussi punitif.
En matière de politique extérieure, on a assisté à l’invasion de la Mer de Chine du sud par l’armée chinoise, une invasion comparable à l’invasion des Sudètes en 1938 : entre 2013 et 2018, malgré un vote plénier de l'ONU qui reconnaissait non à la Chine mais aux Philippines  la souveraineté sur  les îles Paracels, l’armée chinoise s'est permise de s'emparer unilatéralement de sept îlots, à peine émergés et inhabités, pour les transformer rapidement en bases aéronavales complètes qui lui donnent pratiquement le contrôle militaire de toute la Mer de Chine du Sud. 
Cette Mer de Chine du Sud est l’homologue en Asie de ce qu’est la Mer Méditerranée. Elle couvre 3.500.000 km2, soit davantage que cette dernière (2.500.000 km2). Elle est encore plus stratégique que la Méditerranée. Ainsi, en se donnant les moyens de bloquer cette voie maritime essentielle, la Chine entend refouler la marine américaine loin de sa frontière sud, elle entend aussi pouvoir perturber et même interrompre les échanges maritimes du Vietnam à l’ouest, de Taïwan, du Japon et de la Corée du sud à l’est, elle pourra surtout plus aisément sortir ses sous-marins nucléaires basés dans la presqu'île de Hainan (située à l’extrémité nord de la Mer de Chine du sud) pour venir menacer la flotte américaine du Pacifique et la côte californienne.
En matière d’armements, la Chine ne cesse de s’équiper davantage que ce soit en matière de porte-avions, de sous-marins en eau profonde, de missiles anti-porte-avions, de missiles intercontinentaux hypersoniques, de cyberguerre ou encore de guerre militato-spatiale….
Sur le plan diplomatique, la Chine, sans attendre l'invasion de la Crimée en 2014, n'a cessé de renforcer son alliance avec la Russie de Poutine, organisant des manoeuvres militaires communes de plus en plus fréquentes et de plus en plus significatives et s’alignant systématiquement l'une sur l'autre au Conseil de Sécurité. La Chine et la Russie ont réussi à élargir leur alliance à l'Iran et s'emploient maintenant à l'élargir à la Turquie.
Par ailleurs, à partir de 2013, Xi Jinping a lancé son initiative stratégique "Belt and Road Initiative" au prétexte de développer les voies de communication terrestres et maritimes entre la Chine, le reste de l'Asie, l'Europe et l’Afrique orientale. Outre que Pékin en a retiré un avantage diplomatique important, cette initiative s'est traduite par de nouveaux gains géopolitiques pour la Chine : de nombreux Etats souverains (Malaisie, Birmanie, Sri Lanka, Pakistan en particulier) se sont lourdement endettés auprès de la Chine pour que ses entreprises viennent construire des infrastructures sur leurs territoires. 
Incapables de faire face aux échéances, ces pays sont maintenant contraints soit à se délivrer de leurs engagements initiaux (cas de la Malaisie), soit à s'enfoncer dans la subordination à la Chine (c'est le cas en particulier de Sri Lanka qui, après s'être lourdement endetté (6 milliards de dollars) auprès de la Chine pour que des entreprises chinoises viennent reconstruire le port de Hambantota, a été contraint pour se désendetter partiellement (pour 1,2 milliard de dollars seulement), à céder à la Chine 70% du capital  de la société portuaire et une concession de 99 ans sur les activités du port. Transaction léonine au terme de laquelle la Chine pourra ultérieurement établir encore une autre base navale chinoise à l'extérieur de ses frontières. 
Avec les cas du Pakistan et de Sri Lanka, la stratégie cachée de la Chine se révèle ainsi à tous : la route de la soie a pour prétexte d'améliorer les infrastructures de pays étrangers mais en réalité elle vise à se subordonner des pays souverains par le biais d'un endettement massif contracté auprès de la Chine et elle aboutit sans tarder à des concessions de bases navales pour la Chine (Djibouti aujourd'hui, Hambantota demain, Gwadar au Pakistan après-demain, Le Pirée après-après-demain ?). A l'évidence ces réseaux de transports et de bases militaires sont conçus non pas tant pour acheminer les marchandises chinoises que pour acheminer le jour venu des troupes chinoises d'est en ouest.
Ce qui est en réalité surprenant, c'est la passivité qu'aura maintenue le Président Obama au cours de son deuxième mandat (2012-2016) à la fois face au durcissement du régime totalitaire chinois et face aux agressions géopolitiques de la Chine. Il aura fallu la défaite d'Hillary Clinton face à Donald Trump pour que les Etats Unis entreprennent enfin de se ressaisir face aux énormes ambitions affichées par la Chine. 
Des ambitions que Xi Jinping a d'ailleurs confirmées sans ambages au cours des dernières années : en 2015, annonce d'un plan "Made in China 2025" dans lequel la Chine affirme son intention de dominer mondialement, d'ici 2025, les dix secteurs de technologie avancée, tous secteurs potentiellement porteurs d'innovations majeures en matière d'armements et de systèmes d'armes ; en 2017, Xi préside une parade militaire jamais vue de l'Armée Populaire de Libération, dévoile en les faisant défiler de nouveaux missiles très performants et appelle publiquement à ce qu'elle devienne une "armée de classe mondiale" ; cette année 2018, il affirme publiquement qu'en 2049, la Chine sera devenue le pays central de la planète (un euphémisme pour indiquer que l'objectif final de la stratégie de Pékin consiste à étouffer ou à vaincre militairement les Etats Unis pour installer leur propre hégémonie) ;  en septembre 2018, Xi Jinping s'adresse publiquement à l'Armée Populaire de Libération pour qu'"elle accentue ses efforts pour renforcer de manière globale l'entraînement militaire et l'état de préparation à la guerre des forces armées et améliorer leurs capacités de remporter les guerres", un discours d'une tonalité belliciste jamais vue.
De ce point de vue, ce n’est sans doute pas un hasard si la Corée du Nord commence en février 2017 ses tirs de missiles à portée de plus en plus longue, juste après l’intronisation de Trump à la Maison-Blanche. La Corée du Nord n’aurait pas pu prendre des initiatives aussi graves et aussi provocatrices si elle ne s’était pas préalablement adoubée par la Chine et à la Russie. Cette initiative nord-coréenne permettait en réalité à la Chine de prendre la mesure de la combativité des nouveaux dirigeants américains ; la Chine concevait sans doute aussi de pouvoir échanger l’influence calmante qu’elle était en mesure d’exercer sur la Corée du Nord, contre une renonciation de Trump à la guerre commerciale qu’il avait annoncée au cours de sa campagne électorale.
Face à cette stratégie multidimensionnelle de la Chine, on comprend bien que la contre-attaque amorcée enfin par les Etats Unis ne peut être que multidimensionnelle. La contre-attaque sur le plan commercial à compter de février 2018 était indispensable et logique : son objectif principal consiste à limiter le flux de dollars que la Chine s'approprie chaque année à travers ses excédents commerciaux faramineux, flux de dollars que la Chine utilise ensuite pour développer sa diplomatie, sa technologie, ses prises de contrôle de gisements et d'entreprises à l'étranger, ses réseaux d'espionnage et ses réseaux d'influence à l'étranger, ses bases militaires à l'extérieur, ses armements, son armée.... 
Très vite, les Etats Unis ont d'ailleurs pu réaliser combien était anti-coopérative l'attitude de la Chine : alors que, pour rééquilibrer les échanges commerciaux, les Etats Unis instauraient une taxe de seulement 10% sur la moitié de leurs importations en provenance de Chine, Pékin dévaluait, lui, sans délai le yuan de 10% contre dollar, contre euro et contre yen, ce qui surcompensait largement l'impact de la mesure américaine en sorte que  l’excédent commercial de la Chine s'accroît encore vis-à-vis des Etats Unis et du reste du monde. 
Cela démontre bien le refus délibéré du PCC de négocier un grand accord de rééquilibrage commercial mondial. Cela démontre son refus absolu de se priver de l'atout qui est essentiel à sa stratégie de domination : le renouvellement d'excédents commerciaux géants (qui par ailleurs déstabilisent industriellement et financièrement, socialement et politiquement, la plupart des autres pays du monde, en particulier l’Amérique latine, l’Europe de l’est, l'Europe du sud et la France).
Très logiquement, les Etats Unis sont alors amenés à ouvrir d'autres fronts face à la Chine, le front des relations que la Chine entretient avec l'Iran, le front de la technologie, le front de l'espionnage industriel et militaire,....Et ce d'autant qu'après sa victoire aux élections mid-term, le Parti Démocrate, par la voix de Madame Nancy Pelosi, a affirmé publiquement qu'il n'avait pas de divergences de principe avec la contre-offensive que Trump a engagée contre la Chine.


La Chine est plutôt coutumière de l'arrestation de ressortissants étrangers comme arme diplomatique. Que marque la riposte américaine en la matière ? 


La Chine est effectivement coutumière d'arrestations purement arbitraires de ressortissants étrangers. Une des plus arbitraires eut lieu en juillet 2009 : la Chine, sous prétexte d'espionnage, arrêtait en Chine et condamnait à de lourdes peines de prison quatre salariés de Rio Tinto (une très grande entreprise minière australienne), le cadre australien écopant de dix ans et ses collaborateurs chinois écopant de sept à quatorze ans. Ces quatre salariés étaient pourtant probablement innocents. Mais leur entreprise, elle, présentait, aux yeux de Pékin, l'immense tort d'avoir réussi à trouver les moyens financiers pour échapper à l'achat qu'il avait programmé. Pékin avait cru saisir cette proie à bon compte à l'occasion de l'effondrement des matières premières intervenu en 2008. L'emprisonnement, arbitraire et sans fondement, des quatre salariés était en réalité déjà alors une manière pour le Parti Communiste Chinois de manifester son dépit et d'indiquer sa capacité de représailles à l'encontre d'entreprises occidentales qui se refusent à son jeu et à son emprise.
Concernant l'arrestation récente de Madame Meng, deux choses sont à considérer : 
Première chose : l'arrestation de Madame Meng a une légitimité : Huawei est une entreprise qui, bien que très présente aux Etats Unis, n'a pas respecté les règles concernant les relations avec l'Iran. Il y a une légitimité à ce que la Justice américaine procède à une arrestation en vue de procéder à des interrogations et à des investigations sur ce sujet (après tout, le Japon n'a pas hésité à arrêter M.Ghosn pour des soupçons de faits sans doute beaucoup  moins graves). Par ailleurs, de forts soupçons s'attachent à ce que Huawei ait participé à des manoeuvres d'espionnage dans de nombreux pays occidentaux. Il ne faut donc pas écarter que Madame Meng ait à répondre d'autres sujets susceptibles de justifier son interpellation.
Deuxième chose : il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une première dans les relations sino-américaines. Jusqu'à présent en effet, les autorités américaines, dans des épisodes analogues avaient encore jugé bon de faire le gros dos et de ne pas réagir. Mais le contexte évoqué ci-dessus de l'escalade multidimensionnelle amorcée depuis que Xi Jinping a pris le pouvoir amène maintenant les autorités américaines à se montrer enfin plus vigilantes, plus résolues, plus exigeantes et plus réactives.

Quelles peuvent être les conséquences de cette escalade dans l'affrontement entre Chine et Etats-Unis ?


De multiples conséquences défavorables sont à redouter à court terme. On peut déjà envisager une limitation des déplacements d'hommes d'affaires entre les deux pays, un freinage important du tourisme occidental en Chine et du tourisme chinois aux Etats Unis. On peut déjà constater aussi de premières ruptures dans les coopérations universitaires entre la Chine et le reste du monde. On peut apercevoir aussi une limitation des visas pour les ressortissants des deux pays et une politique de limitation de l'immigration chinoise aux Etats Unis (les nouveaux migrants chinois étant trop souvent "tenus" directement ou indirectement par le PCC). On peut enfin et surtout apercevoir la remise en cause de l'accès des entreprises étrangères au marché chinois et de l'accès aux marchés occidentaux des entreprises chinoises, avec toutes les conséquences que cela implique.
Mais il faut bien mesurer que, à condition de prendre du recul comme nous le faisons, c'est bien la Chine qui, brusquement à compter de 2011, a amorcé puis entretenu l'escalade. Maintenant, le choix pour les pays attachés à la démocratie, c'est de savoir s’ils résistent ou s’ils capitulent face à la stratégie conquérante du Parti Communiste Chinois - une stratégie qui vise à prendre le contrôle, direct ou indirect, des territoires du reste du monde et à instaurer sous sa direction un monde où la plupart des pays seraient dotés de régimes totalitaires à l'image du sien. 
En réalité, le projet du Parti Communiste Chinois est mondial : il est à la fois impérialiste et totalitariste. S'il s'agit de résister valablement au défi que nous adresse le Parti Communiste Chinois (un défi qui s’avère plus considérable encore que celui que nous adressait l'URSS dans les années 1970 et 1980), l'unité et la mobilisation des populations des pays démocratiques seront indispensables.

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