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La Corne de l’Afrique est l’une des régions les plus vulnérables au changement climatique
La Corne de l’Afrique est l’une des régions les plus vulnérables au changement climatique
©TONY KARUMBA / AFP

Loin du cœur et loin des yeux

Selon l'ONU, 129 000 personnes ont atteint le niveau maximal d'insécurité alimentaire dans la région de la Grande Corne de l'Afrique, en proie depuis plusieurs années à une terrible sécheresse

Marc Lavergne

Marc Lavergne

Spécialiste de l'Afrique et de l'action humanitaire, membre du GREMMO, groupe de recherche sur la Méditerranée et le Moyen-Orient.

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Atlantico : Une terrible famine ravage la Corne de l'Afrique. Quels sont les pays qui sont touchés ? Quelles sont les conséquences ? 

Marc Lavergne : Ce sont, essentiellement, les pays qui entourent l'Ethiopie, c’est à dire l'Erythrée au nord, Djibouti, la Somalie et le Kenya. Le problème de la Corne de l'Afrique, ce sont les pluies qui proviennent du sud de l'océan Indien. Ce sont des pluies d’été qui viennent arroser ces régions désertiques et qui ne suffisent pas. Les sécheresses sont des phénomènes climatiques récurrents dans la Corne de l’Afrique. La Somalie, par exemple, est un pays qui n'est pas cultivé. C’est un désert. S'il y a des cultures, c'est uniquement là où se trouvent les fleuves. La survie des troupeaux est en jeu en Somalie et dans le nord-est du Kenya. Ce sont les troupeaux qui comptent pour lutter contre la famine. Tous les éleveurs sont armés. S’ils n’ont plus de troupeaux, alors ils attaquent des convois pour trouver de la nourriture ou ils deviennent pirates. On l’a vu au début des années 2000. En Somalie, les pirates ne sont pas des marins. Ce sont des bergers qui ont perdu leurs troupeaux et qui doivent manger. 

La sécheresse pousse aussi de plus en plus de gens à se réfugier dans le camp de Dadaab. Il est à cheval sur la frontière entre le Kenya et la Somalie. 500 000 personnes vivent dans ce camp, en plein désert. Depuis vingt ans, ce camp est ravitaillé par l’ONU et les organisations humanitaires. Les populations présentes sont victimes de la sécheresse, de la famine, mais surtout des guerres.  

En Somalie, il n'a pas plu depuis cinq ans. Certains experts disent que c'est la pire crise depuis 1945. Vous qui connaissez bien l'histoire de ce pays, vous confirmez ?

Oui. L'ampleur de ces crises est aussi à mettre en corrélation avec la population. Il y a beaucoup plus de population aujourd'hui qu'en 1945. C’est beaucoup plus difficile de trouver un certain équilibre alimentaire. Les gens sont plus nombreux mais les récoltes restent les mêmes. C'est un paramètre qui joue beaucoup. 

Les changements climatiques se font également ressentir. Les pluies ne sont pas tombées depuis cinq ans et provoquent une terrible famine. Cette situation va encore durer puisque les pluies d’automne qui devaient commencer fin août ne sont pas arrivées. Le risque de mortalité a considérablement augmenté dans la Corne de l’Afrique. 

1,4 million de Somaliens ont dû fuir leurs foyers à cause des aléas climatiques et des conflits armés. Quelles vont être les conséquences géopolitiques de cette sécheresse ? Une nouvelle crise migratoire ?  

Ce ne sont pas des gens qui viennent jusqu’en Europe, ils n’ont pas les moyens financiers de le faire Pour trouver du travail, ils traversent la mer par le golfe d’Aden et passent par le Yémen pour se rendre en Arabie Saoudite ou aux Emirats Arabes Unis. Ce flux migratoire classique risque d’augmenter.

Certains vont aller à Nairobi au Kenya, chez les paysans, les sédentaires ou dans les faubourgs et les bidonvilles où ils vont essayer de trouver de l'aide. D’autres vont tenter de trouver refuge en Ethiopie sur les hauts plateaux où il pleut. Mais il y a des conflits dans cette zone. Il y a eu la guerre du Tigré qui a fait des centaines de milliers de morts, des civils principalement. L’Ethiopie, avec 110 millions d’habitants, est fragile. Le pays est désorganisé et n'a pas de réserves alimentaires

Ces flux de population peuvent provoquer des tensions au niveau régional. La Corne de l’Afrique est une région compliquée. Ce ne sont pas les gouvernements qui dirigent mais plutôt les chefs des tribus et les clans. Le pouvoir des gouvernants est fragile. 

Cela fait cinq ans que c’est la famine et personne n’a bougé. L’Europe va sans doute donner un chèque de quelques millions. L’aide va venir de la Chine qui a de gros intérêts à Djibouti notamment et des pays arabes comme la Turquie ou l’Iran. Il y a toute une solidarité islamique qui se met en place. 

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