2023 : l’effondrement probable des dictatures. C’est le pari osé et risqué des milieux d’affaires<!-- --> | Atlantico.fr
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Le président russe Vladimir Poutine rencontre son homologue Chinois Xi Jinping à Pékin
Le président russe Vladimir Poutine rencontre son homologue Chinois Xi Jinping à Pékin
©WANG ZHAO / AFP

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Entre la Russie, l’Iran, la Chine, les grands régimes autoritaires sont désormais en proie à de graves difficultés. Les milieux d’affaires occidentaux ont de bonnes raisons de penser que la modernité technologique et la logique des marchés vont finir par abattre les dictatures.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Depuis trois ans, la planète toute entière traverse des crises qui bouleversent les grands équilibres géopolitiques mais les milieux financiers n’ont pas été très affectés. Le Covid a servi de catalyseur et permis de mesurer la capacité de résilience des organisations. Les pays libéraux et démocratiques ont mieux résisté que les pays autoritaires. 

Les pays occidentaux ont assumé les poussées populistes, aux Etats-Unis, en Amérique du Sud, en Europe, et même en Grande Bretagne, le mur des réalités a un peu partout servi de remparts aux tentations radicales. 

En revanche, les pays gérés de façons autoritaire sont confrontés à des mouvements systémiques qui remettent en cause les gouvernances. La Russie est embourbée dans une guerre en Ukraine sans en expliquer les fondements. Le pouvoir chinois est en proie à une résistance interne contre la politique du zéro covid qui a révélé un besoin de changement tres fort. Idem en Iran, où le pouvoir religieux est menacé par une population qui ose désormais réclamer plus de liberté…

Les pays occidentaux ne sont évidemment pas indifférents à cette cascade de révoltes et de violences. Les répercussions économiques sont douloureuses pour toutes les populations, ne serait-ce que par l’inflation, les risques de pénuries en énergie et en matières premières et surtout par les risques d’une récession mais les milieux financiers qui sont en général d’excellentes boussoles pour prédire et anticiper des évolutions, ne se sont jamais affolés depuis la sortie de la grande crise financière de 2009/10, les boursiers spéculent, tout changement est une occasion d’arbitrer pour réaliser une marge mais c’est un peu leur métier. Sur le moyen et long terme, on n’assiste pas à un affolement généralisé et systémique comme parfois dans le passé.

Plus important encore, beaucoup d’observateurs et d’analystes considèrent que la planète a peut-être amorcé un processus d’éliminationdes organisations autoritaires, même s’ils considèrent que le mouvement de transition sera long et compliqué partout dans le monde. 

 - En Russie, l’inquiétude est moins la guerre que le système qui sera mis en place pour remplacer Vladimir Poutine qui parait condamné.  

- En Chine, le pouvoir est coincé. La mise en place de la politique zéro covid est évidement un échec qui a affaibli l’économie chinoise et la population qui n’a acquis aucune immunité contre le virus, puisque les vaccins sont inefficaces et les populations ont été enfermées. Quant à l’Iran, le pouvoir des religieux est d’une violence qu’on ne soupçonne pas encore. 

Donc le monde entier serait entré dans une phase de mutation (qui sera lente) mais qui parait inéluctable tant les facteurs d’évolution sont puissants : 

- La mondialisation a, quoi qu’on dise, sorti de la misère plusieurs milliards d’êtres humains (en Inde et en Chine plus particulièrement). Alors cette mondialisation a des effets pervers et des couts à supporter mais qui paraissent dérisoires par rapport à ses avantages. 

- L’économie de marché a apporté la preuve de son efficacité pour créer de la richesse et stimuler les capacités d’innovation. 

- Enfin, les techniques de communication et notamment l’internet ont mis à la disposition de tous, la connaissance et le savoir international à un prix très abordable. En dépit de la diversité de ses identités, le monde est devenu un village où tout se sait. 

En bref, tous ces facteurs ont fait de la prospérité économique et sociale une valeur partagée dans le monde entier. Partout, l’objectif des humains est de vivre mieux. 

Le problème, c’est que dans les pays occidentaux, la prospérité economique n’est pas théorique. Elle n’est pas distribuée de façon égalitaire, mais on peut imaginer qu’elle le soit. Dans les pays autoritaires, cette prospérité économique promise n’existe pas. Elle parait même interdite au plus grand nombre qui n’a pas les moyens, ni la liberté de chercher à optimiser son intérêt individuel. 

Plus grave encore, la corruption généralisée, le travail noir, le quasi esclavage, la non-prise en compte des problèmes environnementaux sont devenus insupportable à vivre au quotidien.

Comme ils ne peuvent pas être corrigés ou régulés, les disfonctionnements alimentent la colère. La force des dictatures est d’avoir éliminé tous les contre-pouvoirs, mais aujourd’hui, l’absence de contrepouvoir est une faiblesse. On peut très bien imaginer que les élites, qui tiennent le pouvoir dans les pays autoritaires, soient au courant du moral des populations, mais ils n’ont aucun moyen alternatif autre que de nier ou de repriser par la force les mouvements d’opposition. 

Un régime démocratique peut toujours se trouver des solutions alternatives sur le terrain politique. Un régime autoritaire n’a pas d’autres solutions que de faire disparaitre le chef et se choisir un autre leader, mais qui et comment ? 

A la fin des années 1980, l’union soviétique s’est effondrée, des élections libres ont été organisées, mais la culture, la désinformation, le manque de cadre compétents, la confiscation des pouvoirs par une caste a fait que la Fédération de Russie est retombée dans l'autoritarisme conduit par Vladimir Poutine. En Chine, les premières révoltes contre le régime communiste date de 1986 (Tienanmen), la gouvernance a vacillé quelques mois. Elle a mis en place un système de semi-liberté individuelle pour le commerce et les affaires qui a permis à la Chine de rentrer dans l’OMC, et de profiter de la mondialisation, donc du développement. La Chine a vu une classe moyenne se constituer (entre 15 et 20 % de sa population) qui ne réclamait rien d’autre que la liberté de faire du commerce et de s’enrichir. Depuis 3 ans, avec le Covid, les Chinois qui habitent les grandes villes ont été obligés de s’enfermer. Cette classe moyenne, déjà privée de liberté d’expression, s’est retrouvée interdite de travailler et de consommer. 

En Iran, le système est identique. La nouvelle génération ne supporte plus les oukases religieux. 

Donc les mécanismes de transition démocratique sont toujours très difficiles à actionner pour accoucher d’un régime moralement acceptable, mais la transition sera inéluctable

Il n’y a pas d’exemple, dans l’Histoire, d’un dictateur qui aurait survécu très longtemps à l’inflation ou à la pénurie. La promesse d’une prospérité économique et sociale qui n’est pas tenue finit toujours comme ferment d’une révolution. De palais ou dans la rue.

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