Voilà ce que le puissant rebond du Bitcoin nous apprend sur les cryptomonnaies comme sur l’état de l’économie <!-- --> | Atlantico.fr
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"Aujourd’hui avec l’idée que les taux d’intérêt vont baisser, plus celle que la récession américaine tant redoutée pourrait ne pas avoir lieu ou être très modérée, le bitcoin retrouve de la vigueur", affirme Jean-Paul Betbeze.
"Aujourd’hui avec l’idée que les taux d’intérêt vont baisser, plus celle que la récession américaine tant redoutée pourrait ne pas avoir lieu ou être très modérée, le bitcoin retrouve de la vigueur", affirme Jean-Paul Betbeze.
©Robyn Beck / AFP

Tendance à la hausse

La première des cryptomonnaies vient de franchir le cap des 40 000 dollars, montant qu’elle n’avait pas atteint depuis avril 2022.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Atlantico : Le bitcoin connaît actuellement un fort rebond, sa valeur ayant grimpé de 147% sur l’année et les prédictions concernant le prix d’achat comme de revente enflamment une fois de plus la communauté des crypto-monnaies. Comment expliquer une telle hausse ?

Jean-Paul Betbeze : D’abord répétons-le, il ne s’agit pas là d’une monnaie, mais d’un « actif spéculatif ». Cette élégante expression veut dire le Bitcoin ne repose ni sur de l’or ni sur des bons du trésor en dollar (ou en euros), bref sur rien, sauf sur l’idée qu’il va monter. Le Bitcoin, tout comme le groupe de cryptomonnaies qu’il pilote (Ether, Binance…), est donc entièrement mû par des anticipations, des rumeurs, plus un bon lot de scandales de vols et de fakenews plus, dit-on, un ou deux crimes…

Cette atmosphère sulfureuse n’est pas pour le tuer : il renaît au contraire après une crise, telle une salamandre qui résiste au feu. Aujourd’hui, après nombre de faillites et de disparitions, le Bitcoin est toujours là, à 43000 dollars : oubliés les 16000 dollars de janvier, les 25000 d’octobre. Tous les regards se portent sur les 64000 dollars de novembre 2021, nouvel Everest.

Il y a en fait une alchimie du Bitcoin, mélange d’informatique, d’algorithmes sophistiqués et d’ordinateurs en batterie, plus un soupçon de complots, plus surtout une idée de génie : annoncer qu’il n’y en aurait pas plus de 21 millions. La rareté : c’est le secret, rareté annoncée bien sûr… A vérifier, c’est une autre chose.

Cependant, avec le temps et l’appât du gain, le Bitcoin devient fréquentable : de grands noms de Wall Street acceptent d’en traiter, un peu. De plus en plus, on en trouve, un peu, dans des fonds (ETF : Exchange Traded Fund ou traker) autrement dit dilués dans un univers indiciel, qui reproduit un indice, tel le Cac40, coté en continu,  c’est-à-dire largement popularisés et accessibles,  avec des frais moins élevés que les fonds actions, gérés activement. Le Bitcoin entre en bourse, chez les meilleures maisons. 

Que dit cette situation de la santé des crypto-monnaies, selon vous ? Est-ce le bon moment pour investir ?

Les crypto-monnaies ont beaucoup souffert comme toute innovation et beaucoup en sont mortes, en particulier celles qui rêvaient de faire une monnaie valable pour la terre entière, sous la houlette de Facebook ou de dupliquer le dollar, avec un business plan incompréhensible. Les autorités monétaires américaines, également ont tôt fait de tuer tout ce qui pourrait concurrencer de près ou de loin le dollar. Restent donc en fait les crypto-monnaies dans leur forme originelle c’est-à-dire entièrement spéculatives. 

Aujourd’hui avec l’idée que les taux d’intérêt vont baisser, plus celle que la récession américaine tant redoutée pourrait ne pas avoir lieu ou être très modérée, le bitcoin retrouve de la vigueur. Il est perçu comme moins dangereux qu’avant, quand la crise américaine était supposée menacer. On peut ajouter aussi, même si c’est moins vraisemblable, que certains spéculateurs anticipent qu’une victoire Trump lui serait favorable, dans le contexte de difficultés de l’euro et du yuan.

Bref, acheter du bitcoin aujourd’hui serait faire le pari que sa tendance haussière va se poursuivre : n’oublions jamais que le bitcoin monte parce qu’il a monté et qu’on pense que ça va continuer.

Quel pourrait être, selon vous, l’impact d’un tel phénomène sur l’économie mondiale ? Que dit-il, au demeurant, de la bonne ou de la mauvaise santé de celle-ci ? 

Les crypto-monnaies sont toujours un reflet accentué de ce que pensent les marchés. Ils sont un peu plus confiants donc, le bitcoin se réveille. En revanche, l’effet retour de l’amélioration de ces crypto-monnaies qui sont sans doute ultra marginales est très faible. Il s’agit donc de ne pas tirer de conséquences trop directes : ce qui joue aujourd’hui c’est l’idée que la Banque Centrale américaine est au plus haut de ses taux d’intérêt et qu’elle se prépare dans quelques mois à les baisser.

Ceci donnera un coup de fouet à l’économie américaine et poussera la Banque Centrale européenne à faire de même. Le vrai risque est, comme toujours, l’emballement par exemple que certains pays en difficulté accrochent leur change au bitcoin et que les lobbies influencent les autorités monétaires pour permettre aux ménages à détenir plus de bitcoins dans leur épargne et aux banques de faire des crédits dans cet ‘’actif spéculatif’’.

On peut risquer le proverbe : quand le bitcoin va tout va (au risque du paradoxe que les spéculateurs se disent que le système financier sera assez résitant), et quand le bitcoin ne va pas, rien ne va !

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