Vers une union Mélenchon : nouvelle gauche ou grande illusion ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Luc Mélenchon lors de la campagne présidentielle de 2022.
Jean-Luc Mélenchon lors de la campagne présidentielle de 2022.
©GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Sauve qui peut

Mardi soir, Jean-Luc Mélenchon a demandé aux Français de l’élire Premier ministre grâce à une majorité de députés insoumis et d'union populaire, mais l'histoire nous a appris que l'union de la gauche ne se fait pas d'un claquement de doigts.

Gérard Grunberg

Gérard Grunberg

Gérard Grunberg est directeur de recherche émérite CNRS au CEE, Centre d'études européennes de Sciences Po. 

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Atlantico : Arrivé en troisième position de l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon ne s’est pas qualifié pour le second tour du scrutin, mais l’ancien sénateur socialiste n’a pas abandonné la bataille. Il souhaite désormais réussir un autre scrutin où son parti La France Insoumise n’a jamais réussi à briller : les législatives. Mardi soir, il a même demandé aux Français de l’élire Premier ministre grâce à une majorité de députés insoumis et d'union populaire. Les différents courants de gauche devenus irréconciliables pourraient-ils se réunir autour de ce candidat ou n’est-ce qu’une nouvelle illusion ? Quelles sont les raisons qui pourraient expliquer l’échec ?  

Gerard Grunberg : Je n'exclue pas le fait que la gauche puisse se réunir autour de LFI. Non par un accord commun, mais parce que les écologistes et les socialistes sont aux abois et très divisés. On ne sait pas si EELV va se scinder avant les élections car la gauche du parti avec Sandrine Rousseau veut un accord avec Mélenchon. Pour les législatives, les écologistes n’ont qu’un député sortant et il est compliqué pour eux d’en avoir plus en s’alliant avec les socialistes aujourd’hui. Ils vont donc essayer d’en avoir plus en se scindant et en se rapprochant de LFI. 

Pour le PS la situation est différente tant les désaccords sont importants avec Mélenchon. La candidate socialiste a d’ailleurs attaqué de front le candidat sur des thèmes fondamentaux. Les socialistes avec pourtant 24 députés sortants savent qu’ils auront du mal à conserver un groupe de 15 élus à l’assemblée. Pour eux la discussion est simple, il n’y a aucune tactique gagnante tant leur score à la présidentielle s’est avéré bas. Y aller seul sans alliance les expose à une « berezina », mais s’ils acceptent de s’allier avec Mélenchon il n’est pas certain que Mélenchon soutiendra leur 24 députés. 

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Le parti est divisé, mais aucune stratégie n’est porteuse… Il s’agit en quelque sorte de voir comment le Parti socialiste va mourir. Certains veulent le refonder comme Cambadélis ou Hollande, mais Olivier Faure veut le sauver avec son siège. La renaissance semble lointaine et quoi qu’ils choisissent cela semble de mauvaise augure… 

Les courants de gauche ne sont pas exactement devenus conciliables avec LFI, mais depuis dimanche dernier EELV et le PS ne sont plus en état de tenir un quelconque rapport de force. Ou bien ils restent de leur côté en s’exposant à une certaine marginalisation ou bien ils essaient de survivre à l’intérieur du mouvement mélenchoniste. 

Est-ce que cela pourrait tout de même créer une dynamique de nouvelle gauche forte ? 

Une telle alliance n’aurait rien de nouveau. LFI et les idées de Mélenchon sont des choses connues et surtout cette « nouvelle gauche » ne serait pas aussi puissante qu’on ne le croit. La moitié des électeurs qui ont voté LFI ont beaucoup hésité et ont choisi le parti pour qu’un candidat de gauche fasse des voix et on verra que cela ne rebondira pas aux législatives. 

La stratégie de rupture de LFI entre-t-elle en contradiction avec toute idée d’alliance avec des anciens partis de gouvernements ? 

Le problème est que le seul parti de gouvernement de gauche est en train de disparaître. LFI pourrait avoir un succès comme des partis d’extrême-gauche espagnol ou allemand c'est-à dire isolée au bout d’un certain temps. Podemos a accepté une alliance avec le parti socialiste, mais en France le parti socialiste n’existe plus et ils sont donc seuls. Si l’on analyse la situation, le principal clivage en France se situe entre un projet Le Pen et un projet macroniste avec LFI hors du duel. Le parti annonce d’ailleurs qu’il ne faut pas voter Le Pen, mais n’appelle pas à voter Macron. Ils manquent de force pour jouer important dans la vie politique française. 

Le parti est-il capable de prendre ses responsabilités de vaisseau amiral de la gauche ? 

LFI sera le vaisseau amiral d’une flotte qui n’a qu’un bateau. Le PS et EELV ont absolument besoin de Mélenchon pour naviguer, c’est une question de survie. Tous les partis qui n’ont pas fait au-dessus de 20% sont promis à un avenir complexe. 

Les exigences de LFI sur un programme commun pourraient-elles réunir un électorat de gauche aux élections législatives ? L’électorat est-il prêt ? 

Les électeurs de gauche ne sont plus très nombreux et je ne crois pas qu’ils puissent les récupérer. Ceux qui ont vraiment voulu voter socialiste et ceux qui ont vraiment voulu voter EELV ne seront pas convaincus par un vote LFI. La gauche a fait aux dernières élections 30 %, ce qui n’est pas un chiffre important. 

Mélenchon ne voudra pas ouvrir son programme. Il a toujours été contre la 5e République, contre les Américains, plutôt pour les Russes et admirateur de Chavez. Ce n’est pas une ligne qui attire énormément de monde en France. Il ne peut pas être au centre d’un parti qui pourrait devenir un parti de gouvernement. Surtout LFI est largement dominé par sa propre figure. Le jour où Jean-Luc Mélenchon disparaît, que va devenir le parti ? Peut-être un parti à 10 % où une partie de l’électorat rejoindra Le Pen sur des positions que l’on connait. 

Propos recueillis par Vincent Pons

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