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Référendum sur l'immigration en Hongrie : (même) l'Europe de l'Est s'irrite contre Viktor Orban
©Reuters

Stratégie de la rupture

Ce dimanche 2 octobre a lieu un référendum important en Hongrie, sur le sujet des migrants. C'est l'occasion pour Viktor Orban de jouer une stratégie de la rupture avec Bruxelles, qui pourrait pourtant générer des divisions internes au bloc de l'Est.

Lukáš Macek

Lukáš Macek

Lukáš Macek est le directeur du campus Centre et Est-européen de Sciences-Po. Politologue spécialiste des problématiques d'Europe centrale et orientale, Lukáš Macek a mené la liste du parti des Démocrates européens (SNK-ED) aux élections européennes de 2009 en tant que leader du parti.  


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Atlantico : Les Hongrois se rendront aujourd'hui dimanche aux urnes pour déterminer si "l'UE peut décréter une relocalisation obligatoire de citoyens non hongrois en Hongrie sans l'approbation du Parlement". Selon les dernières enquêtes d'opinion, le "non" devrait largement l'emporter. Quel message Viktor Orban, Premier ministre de Hongrie, souhaite-t-il adresser à Bruxelles ? 

Lukas Macek : Vu la campagne menée par le gouvernement, son discours sur le sujet des migrants depuis le début de la crise et même la façon dont la question est posée, tout résultat autre qu’un "non" massif serait une surprise et un sérieux camouflet pour Viktor Orbán. Ce dernier souhaite sans doute opposer à ses adversaires au niveau européen l’argument de la volonté du peuple hongrois, mais c’est assez curieux et d’une certaine manière même contre-productif : si le gouvernement hongrois a besoin, pour se sentir légitime, d’un référendum et qui plus est d’un référendum organisé d’une manière aussi caricaturale, cela pourrait passer plutôt pour un signe de faiblesse... L’hypothèse la plus plausible est donc plutôt celle d’une finalité essentiellement domestique : une démonstration de force, une façon de mobiliser ses soutiens, de réduire l’espace à l’opposition extrémiste (le parti Jobbik) et de diviser et affaiblir encore un peu plus l’opposition modérée.

Qu'est-ce que ce "non" pourrait avoir comme impact sur l'Europe ? Peut-on imaginer qu'au-delà de l'atmosphère négative qu'il pourrait nourrir, ce non resserrerait les liens du bloc est de l'UE ?

Je pense que l’impact sera limité, précisément parce que la ficelle est trop grosse. Prenons l’exemple du référendum britannique : il y avait là une vraie question, un vrai débat, de vrais enjeux et donc aussi un vrai suspense… Rien de tel dans ce référendum hongrois. Par ailleurs, les excès qui l’accompagnent et le principe même qui le sous-tend – un gouvernement qui dresse délibérément son peuple contre "Bruxelles" – sont susceptibles de diviser le groupe de Visegrad plutôt que de resserrer les liens entre ses quatre membres, avec notamment la République tchèque et la Slovaquie qui risquent d’avoir de plus en plus du mal à suivre la stratégie de rupture portée par la Hongrie et la Pologne.

Par ailleurs, dans quelle position les institutions européennes pourraient-elles se retrouver ? Ne sera-t-il pas délicat pour elles, alors que le procès en non-respect de la souveraineté des pays membres leur est régulièrement fait ?

Tout le monde connaît depuis longtemps la position très nette de M. Orbán sur la question des réfugiés et autres migrants. Personne, à ma connaissance, n’a jamais questionné le soutien dont ses positions bénéficieraient auprès de ses concitoyens ni mis en doute sa légitimité. Donc je ne vois pas ce que ce référendum devrait changer dans la perception de la position hongroise par ses partenaires, à moins qu’il se termine par un échec pour le gouvernement. Ce référendum confirme juste que Viktor Orbán tourne le dos à la recherche de compromis et de solutions constructives avec ceux qui au sein de l’UE ne partagent pas ses avis, qu’il préfère exciter son opinion publique plutôt que chercher à l’amener vers un débat rationnel. Bref, qu’il joue la carte de la confrontation et de la surenchère, paradoxalement au moment même où ses adversaires sont en train d’évoluer vers ce qui pourrait être un point de convergence entre les positions tranchées et inconciliables de départ. Nous sommes loin de ce qu’il serait légitime d’attendre d’un ancien vice-président du Parti populaire européen ou d’un homme qui prétend avoir Helmut Kohl pour modèle. Néanmoins, si toute cette affaire ne manquera pas de contribuer à l’ambiance délétère au sein de l’Union, elle ne risque pas de faire évoluer fondamentalement les rapports de force ou les données du problème.

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