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Y a-t-il encore une place 
pour le centre dans une France 
qui bascule vers les populismes ?
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Balle au centre

Après la déconvenue de François Bayrou au 1er tour, quelle place reste-t-il pour le Centre dans l'échiquier politique ? Interview d'Hervé Morin, président du Nouveau Centre, et Marc Fesneau, Secrétaire général du Modem.

Hervé Morin et Marc Fesneau

Hervé Morin et Marc Fesneau

Hervé Morin est président du Nouveau Centre depuis 2008.

Ancien Ministre de la Défense (2007-2010), il a souhaité être candidat à l'élection présidentielle de 2012 avant de se rallier à Nicolas Sarkozy.

Marc Fesneau est secrétaire général du MoDem. 

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Atlantico : Dans une France où les populismes les plus extrêmes ont obtenu des scores impressionnants, quelle place reste-t-il pour le centrisme ?

Hervé Morin : Quelle place pour le centre ? Le centre a toute sa place dans la vie politique française. Les sujets et les valeurs que nous portons sont fondamentaux pour l'avenir du pays. La question de la lutte contre les déficits, la construction d’une Europe politique, le retour à l’équilibre de nos régimes sociaux, un système éducatif performant … tous ces sujets sont majeurs. Les centristes les défendent plus que jamais.

Nous représentons donc des millions d'électeurs qui souhaitent que ces sujets restent dans le débat politique. C'est ce que nous faisons en étant un contributeur majeur dans la construction de projets politiques. Notamment dans celui de Nicolas Sarkozy.

Marc Fesneau : Il y a le besoin d’avoir une force politique qui puisse faire face à cette montée des populismes. Plus de trois millions de Français ont soutenu la candidature de François Bayrou en s’exprimant sur une position extrêmement centrale. Ils ont montré que face à la démagogie, ils souhaitaient des positions et des propositions raisonnables.

Le faible score du seul parti centriste parvenu à participer à l’élection présidentielle ne montre-t-il pas un désaveu des Français pour une politique centriste ?

HM :Absolument pas. Il y a la politique centriste d'un côté, et la campagne de François Bayrou de l'autre. Son score illustre d'abord une sanction de son manque de clarté:  les français attendent de leursresponsables politiques des choix politiques clairs, ils veulent savoir avant le premier tour ce que leur candidat fera au second. Disons-le aussi : il a fait une campagne au sein de laquelle il n’a pas su se renouveler. Enfin, ce score est aussi le résultat de cinq ans d’isolement.

MF : Le Parti radical est dépendant de l’UMP. Même chose pour le Nouveau centre. Ils ne sont pas allés au bout de leurs candidatures parce que personne ne les reconnaissait comme des porteurs crédibles du message du centre. Ce n’est pas un grief, c’est un simple constat : leurs parcours font qu’ils se sont retrouvés dans cette position.

Pour le centre, il y a toujours une difficulté à se rassembler et à s’assurer de sa force. Il faut toujours s’assurer que le centre représente quelque chose au sein de la vie politique française pour éviter de se disperser à la fois chez les uns et les autres.

Le score de François Bayrou est effectivement décevant. Il est aussi le fruit de cette dispersion des efforts. Il faut enfin comprendre que la situation s’est séparée entre deux bipolarisations : le duel Sarkozy/Hollande et l’opposition entre populisme de droite et populisme de gauche. Dans ce contexte, l’espace que nous avons cherché à occuper était plus difficile à occuper.

Entre les élus du Modem qui se dispersent déjà entre les deux candidats et un manque d’unanimité du Parti radical et du Nouveau centre dans l’aile de Nicolas Sarkozy, quel avenir y-a-t-il pour les centristes après la présidentielle ?

HM :Il faut d’abord nous concentrer sur la présidentielle. Le temps de la reconstruction viendra ensuite. Elle dépend de très nombreuxparamètres qui restent pour l’instant inconnus : la position de François Bayrou, ceux des uns et des autres, qui sera  député au soir du 17 juin, qui sera élu président de la République … Tout cela conditionnera beaucoup la recomposition du centre.

MF : Les gens qui ont soutenu la candidature de François Bayrou étaient d’horizons politiques divers. Il faut donc assumer le fait qu’ils puissent faire un choix personnel. C’est regrettable dans la mesure où, lorsque nous essayons d’adopter une position collective, certains se positionnent individuellement. Malgré cela, il faut tout de même dire que l’immense majorité des militants et des élus ont tendance à appeler de leurs vœux une position commune.

Il n’est jamais agréable de constater qu’il y a des initiatives individuelles. Mais tout de même, tous ont pris part au comité stratégique et ont montré qu’ils souhaitaient un effort concerté. Cette dispersion est une conséquence de la manière dont nous avons construit notre projet pour la présidentielle.

Après la présidentielle, il faut que nous mettions en place une force centrale qui ne soit inféodée ni aux uns ni aux autres. Cela doit se faire dans le respect des parcours de chacun. Il faut, enfin, que cessent les défenses de chapelles : le centre n’a aucun intérêt à être dispersé. La volonté doit aller dans le sens du rassemblement et dans la recherche d’une formation commune que nous appelons de nos vœux.

Cette force centrale, nous l’espérons, en particulier lorsque l’on voit que le chef de l’Etat sortant cherche des soutiens plus sur sa droite que sur le centre. Il peut y avoir une envie de la part des centristes qui l’ont rejoint d’espérer une force politique plus proche de ce qui motive leurs propres efforts.

Justement, que pensez-vous de ces appels du pied en direction des électeurs du Front national ?

HM : Lorsque François Hollande s’adresse aux électeurs du Front national à la Une de Libération, cela ne choque personne. Lorsque c’est Nicolas Sarkozy, tout le monde s’insurge. Je me permets de vous faire remarquer que les thèmes abordés par Nicolas Sarkozy avant le premier tour et avant le second tour restent rigoureusement les mêmes.

Je suis contre le droit de vote aux étrangers dans les élections locales. Je suis pour un contrôle des flux migratoires et une politique européenne plus efficace. Je n’ai aucun souci avec ces sujets. Pas plus d’ailleurs que François Bayrou qui a adopté de telles positions.

MF : Il faut prendre en considération tous les électeurs et tous les citoyens, car certains se réfugient aussi dans l’abstention. Il ne s’agit pas pour autant de leur courir après en clamant soutenir les mêmes idées. Il s’agit plutôt de montrer aux gens pourquoi certaines positions qu’ils défendent peuvent les mener vers une impasse.

Nous constatons les positions prises par l’un et l’autre des candidats depuis dimanche. Il faut attendre de voir comment cela va évoluer. Nous sommes mercredi, écoutons ce qui se dira jeudi. Quoi qu’il arrive, nous resterons fermes sur nos positions et nos principes.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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