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Dans un couple, d’aucuns mettent une croix sur la sexualité car la libido est placée dans la parentalité, le sport ou encore le travail.
Dans un couple, d’aucuns mettent une croix sur la sexualité car la libido est placée dans la parentalité, le sport ou encore le travail.
©Pixabay / Free-Photos

Paradoxe

Il y a aujourd’hui une recrudescence de patients chez les sexologues et les sexothérapeutes, qui viennent pour des problèmes d’absence de désir.

Alain Héril

Alain Héril

Alain Héril est psychothérapeute et sexothérapeute depuis 25 ans.

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Atlantico : Les Américains, en pleine épidémie de solitude, ne font pas assez l'amour. Dans presque tous les groupes démographiques, les adultes américains, jeunes ou vieux, célibataires ou en couple, riches ou pauvres, n'ont jamais eu aussi peu de relations sexuelles depuis au moins trois décennies. Est-ce la même situation en France ?

Alain Héril : Oui, la sexualité devient quelque chose de plus problématique qu’autrefois.

Il faut tout de même bien faire la différence entre une asexualité heureuse et tranquille et une asexualité non choisie, qui va engendrer des souffrances. C’est quelque chose qui existe depuis un certain temps mais dont on parle davantage aujourd’hui. Cela prend des formes nouvelles et cela touche toutes les catégories de la société, autant les pauvres que les riches, les femmes que les hommes.

Dans un couple, d’aucuns mettent une croix sur la sexualité car la libido est placée dans la parentalité, le sport ou encore le travail. Ce que l’on peut souligner, c’est qu’il y a beaucoup de personnes qui sont concernés, comme on le dit dans la psychanalyse, par un déplacement libidinal.

Quelles sont les conséquences à cela, à la fois sur la santé et le tissu social ?

La sexualité a plusieurs fonctions, notamment celle de réguler l’agressivité et la colère. Dans la sexualité, il y a une forme de tension qui va se défaire pendant l’acte et cela va créer moins de stress ou encore d’agressivité sociale par la suite. Cela va jouer également sur les insomnies, les douleurs articulaires ou les maux de tête. La sexualité va être un régulateur de santé. Précisons que dans la sexualité, le système sanguin est très engagé, puisque l’érection est un phénomène vasculaire, la montée du désir également. Plus le sang va circuler, plus il y aura une régulation.

Sans sexualité, on peut supposer qu’on va avoir de personnes de plus en plus tendus ou frustrés, et cela influera à terme sur le tissu social.

N’y a-t-il pas un contraste avec l’hypersexualisation de la société ?

L’hypersexualisation est dans le discours, pas dans les actes. Elle se trouve dans les médias, les réseaux sociaux, la publicité. Entre le discours hypersexualisé et la réalité dans l’intimité des personnes et des couples, il y a un paradoxe. Il y a aujourd’hui une recrudescence de patients chez les sexologues et les sexothérapeutes, qui viennent pour des problèmes d’absence de désir.

Comment peut-on l’expliquer ?

Dans les années 60 et 70, la sexualité était au cœur des comportements. Aujourd’hui, la sexualité est davantage dans les discours, donc il y a peut-être une saturation dans le discours sexuel, entrainant chez beaucoup de personnes des états de culpabilité. Dans le discours, on entend qu’il faut être performant, qu’il faut savoir jouir, etc. Les personnes pensant ne pas pouvoir répondre aux exigences baissent les bras.

Il faudrait affiner cette analyse parce qu’il existe d’autres raisons mais qui restent floues pour le moment. On peut penser aussi que la situation dans le monde (inflation, guerre en Ukraine, etc.) va créer du stress et jouer sur la sexualité.

 A ce titre, on peut faire un parallèle entre ceux qui sont atteints d’éco-anxiété et les problèmes de sexualité ?

En effet, on retrouve beaucoup d’individus entre 25 et 35 ans qui sont très anxieux et demandent à quoi cela servirait d’avoir des enfants ou d’être en couple dans un monde « qui est en train de disparaitre » selon eux.

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