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Les bouquinistes pourraient fermer pendant les JO de 2024.
Les bouquinistes pourraient fermer pendant les JO de 2024.
©BERTRAND GUAY / AFP

Tribune

La Préfecture et la Mairie de Paris souhaitent retirer les "boites" des bouquinistes lors des Jeux Olympiques de 2024.

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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De mémoire de bouquiniste, y compris de ceux qui sont là depuis un demi-siècle et plus, on n’avait jamais été confrontés à pareille situation dictatoriale. Au nom des jeux Olympiques, la Préfecture en concertation avec la Mairie de Paris a considéré sans réelle concertation avec les intéressés, qu’il était « indispensable » de faire disparaître les fameuses « boîtes » des bouquinistes, au prétexte (spécieux) d’une sécurité maximale !

Après plusieurs tentatives et propositions dont celle de maintenir les boîtes des bouquinistes en place - fussent-elles inactives et cadenassées durant quelques jours à l’occasion- de la cérémonie de l’ouverture des jeux olympiques de 2024 - Avant même de connaître la réponse massive des bouquinistes en faveur du maintien des boîtes en place sur les parapets !

Rappelons que les bouquinistes parisiens sont un véritable atout de notre capitale, indissociables de la vie littéraire et culturelle du quartier Latin et de Paris, ils sont inscrits au patrimoine culturel immatériel français, jouissant d’une formidable reconnaissance internationale …séculaire. C’est d’ailleurs sous cet aspect qu’ils aspirent légitimement à devenir un patrimoine mondial immuable inscrit à l’Unesco, une demande approuvée, célébrée et soutenue par la Mairie de Paris, celle même qui entend les effacer de cet événement mondial que sont les Jeux.

Que le souci de sécuriser les lieux là où se déroulent l’événement est une préoccupation légitime et nécessaire, c'est un fait, mais aller jusqu’à démonter les boîtes historiques des bouquinistes relève d’une décision arbitraire. Priver les bouquinistes de leur activité et les empêcher de participer par leur présence même symbolique, à l’événement est inadmissible.  C’est Paris qui est amputée. En fait, le motif sous-jacent dans l’esprit des organisateurs serait le fait que quelques boîtes fussent-elles fermées, ne permettraient pas à la foule massée au long des parapets sur les berges de Seine, d’assister au défilé nautique. Certes certaines « boîtes vertes » cacheraient par endroits la vue sur la Seine comme tellement d’autres endroits où l'accès visuel  est rendu difficile du fait de la distance même qui séparent les parapets des berges de la Seine ! sans parler des autres obstacles comme les arbres, ( on va les couper ?!) ,  et les  structures imposantes  des ponts ? ou même certaines constructions comme celle de la Navigation  fluviale et celle des pompiers de Paris ? 

Voilà ce que nous pouvons « bouquiner » sur la page officielle de la Ville de Paris : « À Paris, plus de 200 petites librairies à ciel ouvert installées sur les quais de Seine sont désormais au patrimoine culturel immatériel français. Un premier pas vers la reconnaissance au patrimoine mondial de l’Unesco. Les bouquinistes rejoignent ainsi un patrimoine prestigieux où figurent, entre autres, la gastronomie, les métiers d’art, ou bien encore les métiers d'autrefois… » Il y a donc un véritable mensonge culturel puisque la priorité est ailleurs ?  Au nom de quelles hiérarchisations des valeurs culturelles ? En quoi une athlète excellant dans sa discipline olympique est -il prioritaire au point de faire disparaître ce qui fait l’âme de Paris et le délice des touristes du monde entier ? 

Vider sa boite n’est pas un acte anodin, c’est aussi avoir le courage moral et physique de le faire. Vider ses boîtes du millier de livres et d’objets qu’elle contient, c’est vider une partie de soi. C’est défaire des heures et des heures de travail de classement et de rangement. La boîte du bouquiniste est un véritable outil de travail fait sur mesure, aménagé, souvent fragile, et non juste une caisse pour livres.

Assurance, démontage, stockage des boîtes, des marchandises, assurance, transport, détériorations, remontage… qui va aider les bouquinistes souvent âgés et précaires ? qui va payer, transporter, stocker, dédommager ? dans quelles conditions ? en combien de temps ?!

Sans compter le préjudice d’image causé par cette disparition momentanée justement au moment où les télévisions du monde entier auraient fait un focus sur ce marqueur du charme parisien. Et bien sûr, sur l’atteinte à la liberté d’entreprendre et de commercer ... 

« Paris est une fête » affirmait Ernest Hemingway, mais tout le monde ne sera pas à la fête, ainsi en a décidé la maire de Paris. Mobilisons-nous !

Signataires : Collectif des bouquinistes en colère, Albert Abid, bouquiniste de Paris, Alexia Delrieu, artiste et bouquiniste et Sophie de Menthon, présidente du mouvement ETHIC

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