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Les comportements et la prévention ont évolué depuis le Covid, note François Baumann.
Les comportements et la prévention ont évolué depuis le Covid, note François Baumann.
©ludovic MARIN / AFP / POOL

Inquiétude latente

Le stress lié au Covid n'aurait pas disparu après la fin de la pandémie. La dernière évaluation annuelle du stress réalisée par l'American Psychological Association aux États-Unis révèle que la population continue à se sentir dans une situation pire qu'avant la pandémie.

François Baumann

François Baumann

François Baumann est médecin généraliste, fondateur de la Société de Formation Thérapeutique du médecin Généraliste (SFTG). Intéressé par toutes les dimensions des Sciences Humaines et Sociales qui participent à une meilleure santé des hommes, il a publié de nombreux ouvrages sur ces thèmes. Il est également enseignant à l'Université Paris V et membre du comité Scientifique International de l'UNESCO (département de Bioéthique).

Il est auteur de Burn Out : quand le travail rend malade, L'après burn-out et Le Bore-out, quand l'ennui au travail rend malade aux éditions Josette Lyon. 

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Atlantico : Le stress lié au Covid n'aurait pas disparu après la fin de la pandémie. La dernière évaluation annuelle du stress réalisée par l'American Psychological Association aux États-Unis révèle que la population continue à se sentir dans une situation pire qu'avant la pandémie. De plus en plus d'Américains évaluent désormais leur angoisse à au moins huit sur dix. Est-ce que l’on observe le même genre de phénomène en France ?

François Baumann : On observe effectivement le même phénomène en France. Il y a une espèce de sensibilité exacerbée. Les gens ont peur. La campagne de prévention menée lors de la pandémie a été efficace mais la crainte concerne maintenant la peur de récidiver. Certaines prédictions évoquent aussi des possibilités d’aggravations malgré les vaccins. Beaucoup de personnes ont vu autour d'eux d'autres personnes atteintes malgré le vaccin. Cette situation provoque donc de l’angoisse et une certaine peur. Cela renforce et nourrit une espèce d'angoisse existentielle autour de cela.

Est-ce que cette angoisse ne concerne que le Covid ou est-ce qu'elle concerne aussi d'autres sujets de la vie quotidienne ? Est-ce que la pandémie a exacerbé l'angoisse de façon générale ou seulement celle de la maladie ?

Cela a effectivement exacerbé l'inquiétude. L’angoisse, c'est peut-être un peu fort. Il y a une espèce d'inquiétude latente comme beaucoup de choses dans notre société actuellement quoi. On peut parler de la guerre un peu de la même façon. Les gens sont inquiets mais cela ne veut pas dire que ça va leur arriver. Ils sont confrontés à des inquiétudes.

L'American Psychological Association parle plutôt de stress d'ailleurs que d'angoisse. Est-ce une réalité ?

Le stress est effectivement bien là et a été accru suite à la pandémie. Je suis spécialisé dans le stress et c'est vrai que je vois beaucoup de patients qui ont peur.

La santé mentale des jeunes était au cœur des préoccupations pendant la pandémie au détriment de celle des adultes. Pourtant aujourd'hui, on constate que la tranche 18-45 ans est la plus impactée au final par le Covid et ses conséquences sur la santé mentale. Les adultes ont dû gérer la plupart du temps les complications, quelles que soient des difficultés économiques ou même mentales. Est-ce que les parents aujourd'hui sont à bout ?

Il y a une inquiétude généralisée chez les adultes. Les jeunes avaient moins tendance à être impactés par ce genre de choses. Mais maintenant, on a l'impression que tout le monde est concerné quand même. Les comportements et la prévention ont néanmoins évolué face au Covid. Même si l'inquiétude ou le stress sont importants, lorsque vous sortez dans les grandes villes, les gens ne mettent pas de masques ou très peu (dans les transports en commun). L’inquiétude a diminué.

Il y a eu une espèce d'accoutumance à la peur et au danger. Même si le danger est toujours là.

Concrètement, quelle est l’évolution et la réalité de la confrontation entre la peur et l’accoutumance ?

L’accoutumance est liée à un phénomène de banalisation. Même si l’on apprend qu’il y a encore des cas graves, la banalisation s’est installée. Le vaccin peut rassurer les patients et protège contre les formes graves. Tous les patients contaminés ne meurent pas du Covid également.

Comment est-ce que ce stress se matérialise ? Cela se manifeste-t-il par de l’anxiété, une dépression ? Certains évoquent des pensées d'automutilation.

Cela se manifeste par une espèce de sensation de malaise qui persiste. La personne en question aura tendance à ne pas s'approcher des gens, à ne plus serrer les mains, à faire attention où on porte le masque. Il y a une espèce de latence.

Ce sentiment d’angoisse et de peur va pousser les personnes à se prémunir et à se protéger au maximum. Trop de conseils et de précautions peuvent aussi banaliser la situation. L’angoisse du Covid transparaît le plus dans les transports en commun.

L'angoisse qui persiste est-elle uniquement sanitaire ou est-ce que les défenses des Français face au stress ont-elles été fragilisées ?

Ce phénomène est très contagieux en réalité, notamment lorsqu’il y a un stress fort comme lors de la pandémie où l’on se dit qu'on risque sa vie peut-être, ou qu'il y a un grand danger. En tout cas, dans certaines situations, la plupart des gens ont tendance à apporter du crédit à cela et donc cela rend la vie un peu plus anxieuse. Cela génère une anxiété qui n'existait pas.

Le stress est donc générateur de stress lui-même ?

Tout à fait. Le stress s'auto-entretient. Quand on n’en parle plus, il y a des périodes de rémission et les gens sont alors plus détendus.

Comment est-il possible de se prémunir contre davantage de stress, qu’il soit lié à la crise sanitaire ou à l'éreintement de nos défenses ?

Il est possible de trouver des recours pour lutter efficacement contre le stress en fait. La pandémie de Covid a effectivement aggravé la situation. Mais en ce moment, il n'y a pas que ça, il y a les guerres aussi. Un grand nombre de choses participent en ce moment à l'angoisse générale.

Le mieux est d'essayer d'éviter d’avoir des pensées trop négatives ou qui pourraient aggraver la situation.

La meilleure solution est l'activité physique. Cela va permettre d’évacuer. Dans les cas les plus aigus, il est possible de recourir à des médicaments. Ce stress peut se manifester à travers une espèce de sensibilité à l'idée de la maladie. Cela rend presque hypocondriaque. La moindre chose prend des proportions démesurées. Cela peut aussi conduire à des insomnies et à des troubles nerveux.

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