"Le joueur d'échecs" de Stefan Zweig<!-- --> | Atlantico.fr
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"Le joueur d'échecs" de Stefan Zweig est à retrouver au théâtre Essaïon.
"Le joueur d'échecs" de Stefan Zweig est à retrouver au théâtre Essaïon.
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Superbe performance d’acteur.

Anne-Marie Joire-Noulens pour Culture-Tops

Anne-Marie Joire-Noulens pour Culture-Tops

Anne-Marie Joire Noulens est chroniqueuse pour Culture-Tops. Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam.

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THÈME

  • Sur un paquebot, au cours d’un voyage transatlantique vers l’Argentine, un mystérieux Autrichien rencontre un joueur d’échecs remarquablement doué, mais qui, dans la vie quotidienne, se révèle être un fabuleux crétin. 
  • Ces deux personnages vont s’affronter indirectement sur l’échiquier, et ce personnage étrange, qui n’est autre que l’auteur, va en profiter pour relater une période particulièrement dramatique de son existence, lui qui a vécu le nazisme de l’intérieur.

POINTS FORTS

  • Le texte est remarquable : du Stefan Zweig dans toute sa splendeur. Le langage est recherché, affiné et les phrases s’enchaînent avec aisance, l’histoire est prenante.
  • Le comédien Gilbert Ponté est un magnifique conteur, un passeur d’histoires. Il raconte l’arrestation, le maintien en détention et les interrogatoires des nazis subis par l’auteur avec un sentiment de vérité incontestable. On vit à travers lui le défi que s’est lancé ce prisonnier de ne pas devenir fou, grâce au jeu d’échecs qu’il réalise dans son esprit.
  • Le champion d’échecs est un personnage extrêmement antipathique, méprisant, un imbécile imbuvable, dont le seul talent réside dans sa qualité aux échecs. Il y a un gouffre entre ce stupide paysan bas de plafond mais libre, et l’intellectuel prisonnier des Allemands, en butte aux tortures mentales, mais libre dans sa tête.
  • L’éclairage de la scène est une réussite. Le jeu d‘échecs qui apparaît sur les murs en vieilles pierres de ce théâtre, en bougeant de plus en plus vite l’échiquier et les pions se renversant, rend bien le caractère aliénant de ce jeu lorsqu’il est pratiqué de la sorte par le prisonnier.

QUELQUES RÉSERVES

Il n’y a rien à redire, c’est un spectacle complet par le texte, par le jeu, par les lumières.

ENCORE UN MOT...

  • L’auteur profite de ce voyage pour nous raconter sa descente aux enfers et les moyens salvateurs utilisés, c’est-à-dire son cerveau, pour ne pas devenir fou. Mais, par là-même, il est tombé dans une addiction à ce jeu, ce qu’il appelle « monomanie » et qui, mentalement, est proche de la démence. 
  • Le voyage vers son pays d’exil, l’Argentine, est un moyen de se remémorer des passages terribles de son existence, et les ravages causés par les nazis, « maîtres dans l’art de la torture et de la déconstruction de l’être humain ».
  • L’interprétation du comédien seul en scène est toute en finesse et fait ressortir par son jeu et ses expressions la qualité des propos de Stefan Zweig.

UNE PHRASE

  • Dans sa cellule plus que monacale, essayant de ne pas sombrer dans la folie, le prisonnier nous prévient que  « la Gestapo utilisait des moyens dont elle connaissait les excellents résultats », notamment en privilégiant le « néant total ». Or, nous dit le joueur, « les pensées ne supportent pas le néant ».
  • Il expliquait les difficultés qu’il rencontrait lorsqu’il s’affrontait à lui-même : « Le même cerveau doit à la fois savoir et ne pas savoir lorsque que l’on joue avec soi-même. »
  • Et la dernière phrase du spectacle qui résume l’ensemble : « J’étais le seul à savoir pourquoi cet homme ne jouerait plus jamais aux échecs. »

L'AUTEUR

  • Stefan Zweig (Vienne/Autriche 1881, Petropolis / Brésil 1942), fils d’une riche famille juive, étudie la philosophie et l’histoire de la littérature. Il voyage énormément, visite les capitales européennes, puis les Etats-Unis et l’Inde. 
  • Zweig se rapproche d’autres intellectuels, et prône l’unification de l’Europe et le pacifisme. Dès l’arrivée d’Hitler au pouvoir, il part pour l’Angleterre où il se fera naturaliser (1940), puis rejoint le Brésil l’année suivante. Mais devant l’effondrement de ses rêves humanistes, il se donne la mort en s’empoisonnant. 
  • Parmi ses ouvrages, relevons La peur (1920), La confusion des sentiments (1927), Vingt-quatre heures de la vie d’une femme (1927), La pitié dangereuse (1938), Le joueur d’échecs (posthume en 1943). 
  • Zweig a également écrit des biographies - Marie-Antoinette (1932) et Marie Stuart (1935), - et quelques essais, comme Trois maîtres (1921) et Trois poètes de leur vie (1928).

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