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Fraude sociale :
Lutter contre le travail 
au noir paye plus
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Lutter contre la fraude sociale ? La gauche est pour. Mais elle considère que la lutte contre les entreprises qui ne payent pas leurs cotisations sociales rapporte plus que la chasse aux petits allocataires fraudeurs.

Jean Mallot

Jean Mallot

 Jean Mallot est député PS et co-président de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale.

 

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ATLANTICO : Que vous inspire la proposition de Thierry Mariani de regrouper tous les allocataires de prestations sociales dans un même fichier ?

Jean Mallot : Je ne suis pas surpris car il y a déjà eu il y a quelques mois la sortie de Laurent Wauquiez qui parlait du "cancer de la société" pour parler des bénéficiaires du RSA. A présent, Thierry Mariani assimile les allocataires sociaux à des fraudeurs. On voit bien l'amalgame. Ce qui est scandaleux, ce n'est pas qu'il veuille lutter contre la fraude sociale - tout le monde est contre, nous les premiers - mais qu'il jette l'opprobre sur tous les allocataires de prestations sociales. Ils sont à la chasse à l'électorat d'extrême droite.

Ensuite, la création du fameux RNCPS (Répertoire National Commun de la Protection Sociale ), le fichier auquel Thierry Mariani fait allusion sans le nommer, a déjà été décidée en décembre 2006 par une loi de financement de la Sécurité sociale. Ils font du recyclage !

Ce fichier, le RNCPS, est-il consensuel ?

Le sujet n'est pas le fichier. S'il sert à lutter contre la fraude, on ne peut pas être contre. Simplement, il faut rappeler ce qu'est la fraude sociale, qui se définit par trois critères. D'abord, il faut une infraction. Ensuite, cette infraction doit créer un préjudice pour les finances publiques. Enfin, cette démarche doit être intentionnelle. Il faut donc distinguer la fraude des abus. Sinon, on amalgame tout, de la personne qui oublie de remplir une ligne à celle qui se trompe sur la déclaration de ses ressources. C'est bien pour cela que la branche Famille récupère 90 % des indus constatés.

Quelles est l’ampleur de la fraude sociale ?

Il faut faire la différence entre la fraude estimée et la fraude constatée. Il faut aussi distinguer les prestations et les prélèvements. Sur les environ 400 milliards d'euros que pèsent chaque année les trois principales branches de la Sécurité sociale, la Famille, la Maladie et la Vieillesse, on estime que la fraude s'élève à 2 ou 3 milliards d'euros sur les prestations. La fraude réellement détectée en 2010 était de 266 millions d'euros. Là dedans, une part a été recouvrée. Il faut raison garder.

A l'inverse, si on s'intéresse à la fraude sociale aux prélèvements, c'est à dire principalement les cotisations Urssaf qui ne sont pas versées, notamment du fait du travail au noir, là, le montant global du manque à gagner se situe entre 13,5 et 15,5 milliards. Or, pour cette partie là, la fraude détectée n'est que de 455 millions d'euros. Le gisement le plus important pour lutter contre la fraude sociale est d'aller agir contre la fraude aux prélèvements. C'est à dire lutter contre le travail au noir. Mais là, vous allez vous attaquer aux chefs d'entreprises...

Un des arguments de Thierry Mariani contre l'opposition est que la gauche est mal à l'aise avec la lutte contre la fraude sociale…

En disant cela, il baisse le masque. Il assume le fait de ne pas lutter contre la fraude mais contre la gauche. La fraude, qu'elle soit sociale ou fiscale, n'est pas acceptable. S'il y a un gouvernement en échec face à la fraude sociale, c'est bien celui de monsieur Mariani. Je rappelle que la gauche n'est plus au pouvoir depuis neuf ans.

Nous proposons d'augmenter les effectifs de l'inspection du travail pour mieux contrôler les irrégularités en matière de travail clandestin. Nous n'avons aucun problème avec la lutte contre la fraude, mais nous refusons les amalgames.

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