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Bruno Le Maire prépare 2027 en proposant ce que la Droite et le Centre n’ont pas osé : une véritable réforme de l'État providence
©BERTRAND GUAY / AFP

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Le livre secret de Bruno Le Maire prouve qu'il a compris que la famille politique à laquelle il appartient avait pris le risque de perdre la partie face au RN, parce qu’elle n’a jamais osé entreprendre des réformes véritablement libérales et notamment parce que l’État Providence a asphyxié les ressorts de la croissance

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Bruno Le Maire a donc confirmé la sortie de son troisième livre depuis qu’il est ministre... Alors passons sur tous ceux qui, sans l'avoir lu, vont déjà se demander comment un ministre aussi occupé peut faire pour écrire un livre. Passons parce que la critique vient le plus souvent de ceux qui n’ont jamais écrit ou reposté plus qu'un tweet de 4 lignes et qui n’ont donc pas compris que l'écriture permettait de fertiliser des idées et de les rendre accessibles... 

Passons aussi si tous ceux qui voient là une déclaration de candidature pour 2027... Le moment n’est pas venu. Mais Bruno Le Maire pense évidemment à cette perspective, surtout quand il voit ses collègues, Édouard Philippe et Gérard Darmanin, manifester très clairement leur ambition.

"La voie Française" est le titre du livre qui sortira en librairie mercredi prochain. Ce n'est pas une déclaration de candidature mais plutôt un acte de foi dans la capacité du pays d'inventer un chemin qui nous éviterait le déclin... C’est donc un diagnostic de la situation de la France et une stratégie de politique économique qui trace une route bien différente de celle que nous avons empruntée jusqu’à maintenant et qui mène tout droit à l'échec et à la victoire politique du RN, le parti de Marine Le Pen.

Ce qui est intéressant dans le propos de Bruno Le Maire, c’est qu’il considère que si l’extrême droite répond à des inquiétudes partagées par beaucoup de Français à propos de la sécurité publique, de l’immigration excessive, des dysfonctionnements de la justice, du mauvais état des services publics, il est convaincu que l’extrême droite est incapable d’apporter des réponses efficaces. Pourquoi ? Parce que l'extrême droite est restée sur des logiciels anciens qui refusent de considérer que l'Union européenne est indispensable, que l'État Providence n’est pas encore assez généreux, que les services publics ne marchent pas bien parce qu'ils manquent de moyens, etc., etc.

Mais en fait, Bruno Le Maire ne le dit pas explicitement, mais il n’est pas loin de penser que la droite classique à laquelle il appartient, tout comme les autres composantes de la majorité présidentielle, n’ont jamais osé modifier le logiciel très "keynésien" qui consiste à penser que l'État peut tout décider et tout payer. Or, comme le dit l'économiste libéral du 19e siècle, Frédéric Bastiat : "Les Français sont addicts à l'État, ils pensent que tout dépend de l'État en oubliant que l'État dépend du peuple". Tout se passe comme si Bruno Le Maire avait vraiment relu Bastiat en secret ces derniers mois.

Sur le diagnostic, il n’a jamais été aussi clair et cash. La France est dans une situation compliquée et difficile à redresser. Trop de dépenses publiques et sociales, pas assez de croissance donc pas assez de recettes fiscales pour satisfaire tous les besoins et toutes les demandes. Avec des depenses publiques qui approchent les 65% de la richesse nationale cree , la France est plus proche d’un Etat communiste que d’un pays géré sous la démocratie libérale.

Sur les recommandations et les réformes, il est tout aussi clair et cash... Ce qui coûte cher, c’est l'État providence qui doit intervenir tout le temps et partout. D’où la nécessité de réduire une partie importante de ses interventions, subventions, allocations, etc., etc. Sonnez la fin de la gratuité universelle. Quant au niveau des impôts, il ne faut pas y toucher sauf au niveau des profits internationaux. Bruno Le Maire ne veut pas faire d'idéologie, mais ce qui est important, c’est qu'il est convaincu que le redressement ne viendra que par le renforcement de la responsabilité individuelle. L'État est régalien et pour le reste, il doit être régulateur et protecteur sans que cette protection en arrive à asphyxier les capacités d’innovation ou d’imagination. Concernant les services publics, ils ne marchent pas en dépit de leur coût. Là encore, c’est une affaire de management et d’organisation plus que de moyens.

En prônant une lecture libérale du système social, Bruno Le Maire fait preuve de courage, parce que cette lecture-là de la vie économique et sociale n’a jamais été portée par la classe politique, pas même l'extrême droite. Mais c’est la chance de la droite française, parce que l'opinion attend des résultats concrets d'amélioration de la maison France. Les Français sont actionnaires de ce pays, ils savent très bien que Marine Le Pen est sans doute capable d’accroître les effectifs de policiers, de prendre un certain nombre de décisions d’autorité... mais elle est incapable de relancer la machine à créer de la richesse, donc arrivée aux affaires, elle conduit le pays directement à la faillite. Et tous ceux qui perplexes, nous rappellent qu'en Italie Giorgia Meloni n’a pas bouleversé le pays... Ils oublient simplement de préciser que l'Italie est en réalité gouvernée par Mario Draghi, c’est lui qui a la confiance des chancelleries étrangères, c’est lui qui a la confiance des dirigeants européens, c’est qui négocie avec les banquiers et surveille la trésorerie. Marine Le Pen a à ses côtés Jordan Bardella. Autant dire qu'il ne court pas dans la même catégorie que l'ancien président de la Banque centrale européenne.

L'incompétence de Marine Le Pen est une chance à condition que la droite française comprenne qu'il lui faut engager des réformes libérales sur le terrain de l'économie. C’est un peu la croisade que Bruno Le Maire, semble vouloir mener en France. Après tout, l'extrême droite n’a jamais suggéré de politique alternative aux mesures socio-démocrates qui ont hissé le montant des dépenses sociales à un niveau record. Encore aujourd'hui, elle n’a pas de solutions pour réduire les dettes, les déficits et surtout les dépenses.

Cela dit, le ministre de l'économie prend un risque, le risque qu'on lui reproche d'avoir conduit pendant sept années la politique économique de la France qui est menacée aujourd'hui par les déficits et l'ampleur des dettes. Bruno Le Maire assume, rappelant les incertitudes et les crises importées de l'extérieur (covid, guerre en Ukraine...), rappelant les pesanteurs culturelles et historiques de la France jacobine, rappelant aussi l’absence de politiques alternatives. Bruno Le Maire ne fait pas acte de candidature, mais il publie une profession de foi très claire si on veut échapper au déclin.

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