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Les costumes d’été, ces grands oubliés…
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Atlantico chic

Hugo Jacomet, éditeur de Parisian Gentleman, continue son étude des fondamentaux de l’élégance masculine. Sujet estival cette semaine : il nous parle du costume d'été, indispensable à toutes les garde-robes des élégants.

Hugo Jacomet

Hugo Jacomet

Fondateur et éditeur de "Parisian Gentleman", Hugo Jacomet est une plume reconnue dans le domaine du style masculin.

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Lin, mohair, coton, soie, Fresco (laine froide), tropical, solaro, seersucker, popeline, drill, madras, shantung. Ocre, taupe, beige, crème, blanc cassé, gris perle, gris éléphant, gris bleu, bleu Air Force. Respectivement des matières et des couleurs que certains hommes avaient l’habitude de porter fréquemment. Des hommes de goût. Des hommes professionnels. Des hommes comme les Américains du sud qui, dans les années 70 et entre le Memorial Day et le Labour Day, ne portaient du bleu navy ou du gris que dans des occasions climatiques exceptionnelles (un printemps moins chaud que d’habitude) ou parce qu’ils y étaient contraints (pour une réunion business). Le reste du temps, ils ne portaient que des costumes d’été variés. Le costume d’été était une pierre angulaire du style masculin que l’on trouvait dans toutes les garde-robes des élégants. Mais l’époque a changé.


©Cifonelli

Aujourd’hui, pourtant un jour de juillet très chaud dans les rues de Paris, le seul costume d’été à l’horizon semble bien être celui que je porte. Les concessions des autres hommes à la chaleur ambiante semblent donc se résumer à simplement enlever leur veste en laine, si toutefois ils en portent une. Ou alors ils tentent de se sentir bien dans des costumes en laine bleu foncé ou gris qu’on leur a vendu comme des costumes « demi-saison » ou des costumes « 10 mois ». Vous voyez de quoi je veux parler : quelque chose de léger. Quelque chose qu’ils sont supposés pouvoir porter n’importe où, n’importe quand sauf, peut-être, en Sibérie au mois de Janvier… Grâce aux progrès récents des manufactures de tissus et à leurs méthodes de fabrication ultra modernes, ces costumes sont effectivement plus versatiles et utiles qu’ils ne pouvaient l’être auparavant. Mais en matière de style, ils sont particulièrement inintéressants.


©Marc Guyot

Ce n’est pas mon cas. Avec les jours qui s’allongent, les horaires de travail qui se rétrécissent et la considération acceptée par tous que les choses importantes devront désormais attendre le lendemain du 15 août, j’ai toujours profité des mois chauds pour, au contraire, laisser mes costumes bleus ou gris au repos et faire en sorte d’éclaircir mes tenues.

Et comme ces tenues vous permettent de sortir du lot tout en transpirant beaucoup moins que n’importe qui d’autre, je pense que vous devriez les essayer vous aussi.

Comme beaucoup de choses que nous portons, les costumes d’été sont issus d’un vieille et auguste tradition britannique. Les Anglais avaient l’habitude de les porter, mais pas en Angleterre et pas nécessairement en été non plus. Ils étaient plutôt utilisés par les classes sociales supérieures lors des voyages en Italie, des safaris au Kenya ou des longues vacances dans le sud de la France. Ils étaient également un outil essentiel pour les Britanniques qui – portant le fardeau impérial – vivaient dans des fournaises comme Delhi ou des bains de vapeur comme Rangoon. Etant Anglais, ces hommes ne pouvaient pas imaginer sortir sans costume. Mais étant sains d’esprits aussi (pour la plupart), ils ne pouvaient pas non plus imaginer porter sous ces climats extrêmes leurs trois-pièces en flanelle sombre cousus à Savile Row.


©Marc Guyot

Alors ils décidèrent – chose rare – de faire un compromis : des costumes oui, et même des trois pièces, mais dans des tissus qui « respirent » comme le lin et dans des couleurs qui reflètent la lumière. Ils se sont même autorisés à utiliser au début le tissu des anciens Indiens (le seersucker) avant de se lancer eux mêmes dans la fabrication de tissus pour climats chauds. L’industrie du tissage basée autour de la ville de Huddersfield dans le Yorkshire, s’est alors lancée dans la mise au point de tels tissus comme le Fresco (la laine froide) qui permet une meilleure circulation de l’air dans la matière. Le Solaro, autre tissu « colonial » Britannique, est un tissu de couleur ocre incrusté de fils rouges qui reflètent les rayons du soleil. Sans oublier le bien-nommé magasin « Tropicadilly » (aujourd’hui disparu) dirigé par les tailleurs du Row Airey and Wheeler, célèbres pour leurs vêtements Bespoke en tissus coloniaux.

Les Américains ne furent pas longs à adopter le look britannique, particulièrement dans les Etats du Sud. La popularité du seersucker s’est maintenue tout au long du siècle, même chose pour le madras. Le lin, la matière d’été préférée des Italiens, n’a en revanche jamais eu beaucoup de succès Outre Atlantique – l’aspect froissé faisant ressembler beaucoup d’hommes à des vagabonds – alors que la popeline a connu beaucoup de succès, notamment à Washington DC, malgré le fait qu’elle aussi se froisse facilement et qu’elle peut vite paraître un peu « cheap ».


DR

Les tailleurs en grande mesure ont d’ailleurs tendance à déconseiller l’utilisation du coton à leurs clients, pas seulement parce que cette matière est difficile à travailler pour un tailleur, mais surtout parce que selon eux il est ridicule d’investir "un travail qui vaut 3000 $ dans un tissu qui vaut à peine 50 cents".

Donc où en sommes nous aujourd’hui ?

Les tailleurs et les vendeurs en boutique ont tendance à pousser la grande majorité de leurs clients à faire des choix "sûrs" et à investir dans des costumes "toutes saisons". Pourtant tout élégant avisé vous dira qu’un bon costume d’été est un excellent investissement à long terme et que vous en retirerez des dividendes certains en termes de style et de confort à chaque saison chaude.

Aujourd’hui, dans les rues de Paris, j’attire un rayon de lumière au milieu de tous ces costumes sombres. Et pour un instant, je me sens bien moins seul…

Cheers, HUGO

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