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Quand la rose d’Inde fusionne ses ors et quand le bronze éclate les compteurs : c’est l’actualité octobrale des montres
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Atlantic Tac

Mais aussi l’horloge complètement folle du temps qu’il fait, le rhinocéros de la bonne cause, l’emphase de la lune et les trois couleurs du courageux dévouement…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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DE BETHUNE : Le bouquet de la danse macabre…

Autant aller tout de suite à l’essentiel et commencer cette chronique par la montre la plus spectaculaire de la semaine, en regrettant que cette pièce unique – baptisée DW5 Cempasúchil – ne soit probablement jamais présentée aux amateurs européens. Son nom dit l’essentiel : DW pour Dream Watch [elle laisse effectivement rêveur]. 5 parce que c’est la cinquième Dream Watch créée par la manufacture indépendante suisse De Bethune – une série qui nous a habitué à un niveau ultime de créativité. Cempasúchil parce que cette DW5 est dédié à la culture populaire mexicaine telle qu’elle s’exprime le Jour des Morts (Dia de Muertos) : c’est l’équivalent local de notre Fête des morts (2 novembre). Ce Dia de Muertos syncrétique fusionne une part de l’héritage culturel aztèque, comme le culte des crânes (calaveras) et les roses d’Inde (une sorte d’œillet, désigné comme cempasúchil en langue nahuatl et des traditions chrétiennes (la croix, le culte des morts) mêlées à des usages pagano-mystiques plus récents (la consommation ostentatoire, la fête dans les cimetières, dans le goût des danses macabres du Moyen-Âge, le pique-nique sur les tombes, etc.). Au Mexique, ce Dia de Muertos est quasiment une fête nationale et c’est donc aux amateurs mexicains que De Bethune a dédié cette montre, qui cumule une puissante expression esthétique de ces codes macabres et une vision avant-gardiste des codes horlogers (heures sautantes, minutes « glissantes », lune sphérique) – qu’on songe ici, pour situer le niveau presque extra-terrestre de l’exigence horlogère, que cet affichage des phases de la lune ne présentera qu’un jour lunaire de décalage tous les onze siècles ! L’exploit est également esthétique, avec une maîtrise du titane bleui (la couleur change à une poignée de degrés près) qu’on nourrit d’inserts en alliages d’or de différentes couleurs (or gris, or jaune, or rose, or vert et même or veiné) – une technique exclusive mise au point par De Bethune, qui accentue l’effet dimensionnel des gravures du boîtier et de son bouquet de cempasúchil. Cet hommage suisse à la culture populaire mexicaine va se négocier au prix fort en pesos (quelque chose dans les 270 000 euros, mais le liquide est abondant dans ce pays), mais il témoigne surtout d’une maîtrise souvent imitée mais jamais égalée des beaux-arts de la montre…

LIP : Le courage et le dévouement en trois couleurs…

Revenons à des altitudes moins stratosphériques avec les nouvelles propositions d’une marque indépendante bien française, qui a eu la bonne idée de développer une montre Lip Courage avec la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Quand les uns caillassent les sauveteurs, les horlogers tricolores les honorent : chacun ses valeurs ! Cette montre est d’autant plus intéressante que ses fonctions ont une utilité toute particulière pour nos pompiers, dont la devise (« Courage et dévouement » se retrouve sur le cadran : à droite de ce cadran, une échelle en rouge pour décompter les pulsations cardiaques en déclenchant le chronographe (aiguille rouge). À gauche du cadran, une échelle en bleu pour mesurer la fréquence respiratoire (aiguille bleue). De quoi permettre un contrôle rapide des fonctions vitales et un premier diagnostic pour aider à la prise en charge du patient. Merci à la maison Lip d’avoir réinventé ces fonctions sur une montre-bracelet tricolore, fièrement sourcée à Besançon (capitale horlogère de la France) et très accessible, puisqu’elle ne dépassera pas les 280 euros (mouvement électronique)…

YEMA : La plongeuse qui met les amateurs en transe…

Restons dans une forme de génie horloger français avec la maison Yema, aujourd’hui en pleine renaissance : à peine proposée en souscription sur Kickstarter, la nouvelle montre Superman en bronze et acier s’est littéralement arrachée ! Dès les premières heures de la souscription (dont l’objectif était déjà ambitieux : 200 000 euros), plus de 2 150 amateurs se sont précipités pour rafler cette Superman, en s’engageant au-delà de 1,65 million d’euros. Il faut dire que, pour 545 euros (la moitié du futur prix public), l’offre est très consistante : c’est une vraie plongeuse étanche à 300 m et dotée d’un dispositif original de blocage de la lunette tournante en bronze, un boîtier en acier proposé en deux tailles (41 mm et 38 mm) un cadran à l’esthétique irréprochable, tant par ses couleurs que par ses aiguilles ou ses index, une séduisante touche vintage dans le goût des années 1970, deux bracelets offerts et, surtout, un nouveau mouvement automatique « manufacture » Yema2000, dont les performances s’annoncent satisfaisantes. Il y avait longtemps qu’une montre française n’avait pas suscité un tel enthousiasme : le succès de cette Superman prouve que l’horlogerie tricolore – dont cette chronique Atlantic-Tac est un des plus ardents propagandistes – a tout son avenir devant elle si elle sait rester pertinente, créative, accessible et séduisante face à des propositions suisses tellement plus insipides à ces niveaux de prix. Un bon conseil : pressez-vous, il n’y en aura pas pour tout le monde, chaque série ayant été limitée à 1 948 pièces (1948 pour l’année de naissance de Yema)…

SPEAKE-MARIN : De quoi le rhino est-il le nom ?

C’est inattendu, c’est pour la bonne cause et c’est même un peu français : même si la marque Speake-Marin (du nom d’un célèbre horloger britannique contemporain) est officiellement Swiss Made et logée en Suisse, ses actionnaires sont français ! La bonne cause est celle de la survie des rhinocéros, entre autres espèces menacées : Speake-Marin reversera une partie des revenus de cette montre Art-Serie Rhinocéros (environ 3 000 francs suisses par pièce vendue) à l’association Save the Rhino International (Londres). Sur le cadran, le rhinocéros a été sculpté et patiné à la main. Le mouvement automatique (micro-rotor pour assurer le remontage) est exclusif pour la marque, qui propose pour cette montre un bracelet écologique en bois de tilleul doublé de liège, le tout provenant de forêts gérées de façon responsable. Que demander de plus, sinon un supplément culturel : comme on aimerait que cette montre incite à relire Rhinocéros, la pièce d’Eugène Ionesco, pièce de théâtre qui nous raconte une société victime de la rhinocérite, maladie qui transforme tous les humains en rhinocéros. Relecture qui serait une excellente occasion de réfléchir à la résistance à tous les totalitarismes – y compris le totalitarisme sanitaire – et au conformisme panurgique de nos contemporains !

FRANCK MULLER : L’emphase de la Lune…

Un peu de couleur et de douceur féminine dans cette chronique horlogère trépidante de valeurs viriles : une lune ouverte dans un bouquet de diamants et de chiffres dont les couleurs rehaussent le cadran guilloché. Le boîtier « tonneau » apporte sa touche sportive chic au style précieux de cette Vanguard Lady Moonphase (32 mm de diamètre pour 42 mm de hauteur), qui peut, selon les versions, pousser sa qualité joaillière jusqu’à un total de 454 diamants (4,63 carats). On appréciera l’aspect classique mais légèrement décalé de cette Vanguard, qui illustre avec originalité ce que pourrait être le luxe post-covid, pas moins coûteux mais plus modeste, moins ostentatoire mais néanmoins original…

CRAZY CLOCK : La folie mécanique du temps qu’il fait…

C’est sous l’immense et magnifique verrière du Grand palais (Paris) qu’on a pu découvrir cette Crazy Clock, imaginée par l’artiste contemporain Philippe Parreno et développée avec le créatif suisse Xavier Dietlin, considéré comme le « vitriniste-le-plus-déjanté-de-sa-génération ». Philippe Parreno est le spécialiste des œuvres évolutives qui obéissent à des paramètres aléatoires. Son horloge complètement folle n’a plus qu’un lointain rapport avec le temps, hormis quelques analogies fonctionnelles : il y a bien un cadran et des aiguilles, mais elles ne servent à rien (« Le temps est déjà là, à quoi bon se soucier de son passage ? », avoue l’artiste. Ses aiguilles courent aussi après le temps, mais il s’agit du temps qu’il fait [elles obéissent à des capteurs – thermomètre, cellule solaire, hygromètre, anémomètre, etc. – disposés sur le toit du Grand-Palais] plus que du temps qui passe : dès que la météo s’agite, la folie horlogère se déchaîne, selon des algorithmes très précis mais quasiment imprévisibles. Une autre de ces horloges folles est actuellement exposée à Berlin, avec des paramètres interactifs différents. Il s’en prépare d’autres qui seraient affolées par leurs propres spectateurs (à partir de leur téléphone mobile) : chaque visiteur ferait ainsi ce qu’il veut de son temps. Évidemment, il devrait y avoir bientôt une boutique horlogère, véritable temple de la précision, dotée d’une Crazy Clock encore plus originale. Cette horlogerie déterritorialisée est un œuvre d’art mécanico-philosophique…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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