Quand deux stars font mourir les secondes et quand le bronzage intégral laisse des traces : c’est l’actualité des montres en veille de solstice<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
Quand deux stars font mourir les secondes et quand le bronzage intégral laisse des traces : c’est l’actualité des montres en veille de solstice
©

Atlantic Tac

Mais aussi une fusée dont l’astronaute joue les grenouilles, une néo-classique en acier qui va devenir introuvable, une reconquête graphique du temps et une relève générationnelle sur fond d’effondrement…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

Voir la bio »

PATEK PHILIPPE : Une réussite graphique…

Toute nouvelle Patek Philippe est un événement, surtout quand elle s’annonce relativement accessible [tout est relatif puisqu’on parle d’une montre qui va chercher dans les 25 000 euros !]. Il s’agit cette fois d’une Calatrava, la collection relativement simple de Patek Philippe – c’est-à-dire sans complication mécanique. Heures, minutes et secondes (centrales) dans un boîtier en acier de 40 mm, avec un mouvement automatique aux finitions « Poinçon Patek Philippe » : cette Calatrava 6007A se fait remarquer par ses agréables rondes de chiffres arabes (secondes à l’extérieur, heures à l’intérieur) et d’index très géométriques. Les formes sont simples, la « lunette » qui encercle le cadran soigneusement bombé : le centre très texturé de ce cadran ajoute à l’originalité graphique de cette montre. Réussite esthétique, distinction mécanique, prestige de la marque, emballement passionné des collectionneurs : tout indique ici que nous avons affaire à une future icône horlogère. Ceci posé, ne rêvez pas : comme l’acier est toujours le matériau le plus recherché par les amateurs de Patek Philippe et que cette maison ne mettra en circulation qu’un petit millier de Calatrava 6007A, dites-vous que cette montre, lancée pour célébrer l’achèvement des nouveaux bâtiments de Patek Philippe dans la périphérie de Genève, est déjà à peu près introuvable, mais vous pouvez toujours vous inscrire sur une liste d’attente. Ce qu’il y a de bien avec les grandes manufactures comme Patek Philippe, c’est qu’on a peu de chances de se tromper…

PETERMANN BÉDAT : Une extravagance dans l’exigence…

C’est la belle histoire de deux copains horlogers, qui pérégrinent de marque en marque avant de se décider à fonder leur propre atelier et à se battre sous la marque qui porte leur nom. Gaël Petermann et Florian Bédat – on peut retenir leur nom – n’ont pour eux que leur expérience, leur savoir-faire et leur envie de bien faire, mais, formés à bonne école, ils ne sont pas loin d’être imbattables sur ces terrains que désertent les horlogers plus commerciaux. Leur première vraie montre personnelle est avant tout un boîtier (conçu avec finesse et intelligence par le designer suisse Barth Nussbaumer) conçu pour abriter un mouvement mécanique ultra-traditionnel, c’est-à-dire révolutionnaire pour une horlogerie suisse de plus en plus industriel. Le nom de ce calibre – 1967 – est une provocation malicieuse, ce millésime étant celui du lancement en Suisse du premier prototype d’une montre à quartz ! Dans ce boîtier néo-classique de 39 mm, la première montre de Petermann Bédat propose un mouvement à « seconde morte » : au lieu de glisser dignement autour du cadran, l’aiguille des secondes s’arrête à chaque seconde pour repartir, avec un rythme saccadé qui rappelle, précisément, celui des montres à quartz – ce rythme saccadé était autrefois, pour les horlogers très exigeants, une façon de contrôler la précision extrême d’un mouvement. C’est aujourd’hui un exercice de haut vol pour les amateurs de haute horlogerie. Les finitions sont tout aussi exceptionnelles que la mécanique. Il ya une certaine extravagance dans cette volonté d’excellence. On l’aura compris, Petermann Bédat donne dans le superlatif pour collectionneurs très avisés : il faudra compter une grosse cinquantaine de milliers d’euros pour décrocher le privilège de posséder une des vingt montres à seconde morte qui seront réalisées dans l’année qui vient. On veut bien prendre les paris que cette série sera pré-vendue avant la fin de l’été. Le marché des amateurs très exigeants de pièces artisanales exceptionnelles se cherchait des nouvelles stars : il vient d’en trouver deux…

L’ÉPÉE 1839 x MB&F : Une destination onirique…

C’est une fusée, c’est un jouet de garçon, c’est une horloge mécanique, c’est un Meccano qui fait réfléchir, c’est une invitation au voyage intérieur, c’est une exploration onirique des espaces interplanétaires, c’est tout ça à la fois ! Destination Moon est un objet du temps qui se pose sur une table et qui nous transporte dans une stase exomécanique où les heures passent autrement. Conçue par le laboratoire créatif MB&F et exécutée par l’atelier L’Épée 1839 (un de derniers penduliers de cette planète), la fusée-horloge Du haut de ses 41 cm de hauteur (pour 23 cm de diamètre), Destination Moon est une stylisation des engins qui peuplent les récits de la science-fiction classique en même temps qu’une réflexion décalée sur notre rapport à l’horlogerie : ce n’est pas le petit bonhomme qui descend de son échelle qui nous démentira – au gré de notre humeur, comme il est magnétique, on en fera la grenouille montant et descendante de nos états d’âme. Prévoir huit jours entre deux remontages manuels du mécanisme et un peu moins de vingt mille euros pour que la fusée atterrisse chez vous : une telle aventure fantastique à domicile, c’est bien la preuve qu’on vit une époque formidable !

NEUCARL : Une reconquête graphique du temps…

Le mois dernier, Atlantic-tac vous annonçait le lancement imminent d’une nouvelle référence de l’horlogerie française, Neucarl. La première montre, baptisée The Sept mai, se présentait comme une « montre de designer au carrefour d’un certain minimalisme industriel et de la tradition horlogère des beaux objets de poignet ». La campagne de souscription vient de commencer sur Kickstarter, avec une couverture en quelques heures de l’objectif affiché – il est vrai que cette montre proposée à 410 euros est plutôt attrayante avec son mouvement suisse et sa « touche française ». Ce qu’il fait en retenir, c’est justement cette rupture dans le design classique des montres contemporaines : certes, la montre est ronde (41 mm), mais elle n’est pas que ronde avec trois aiguilles et une date. On comprend en la regardant qu’elle relève d’une quête esthétique très travaillée et on ressent immédiatement qu’elle s’inscrit dans une logique d’exigence stylistique plutôt rare à une heure où l’horlogerie européenne se vautre dans les réminiscences vintage et dans le culte des icônes du passé. Ce n’est évidemment la montre du fameux « monsieur-tout-le-monde », mais ce n’est pas non plus la montre de n’importe qui : il faut une bonne dose de culture horlogère pour oser mettre cette Sept Mai à son poignet et assumer son cadran concave et ses subtilités graphiques, la moindre de ces coquetteries n’étant pas le choix d’un mouvement à remontage manuel qui oblige à percevoir le temps autrement…

ORIS : Un bronzage intégral…

Le boîtier en bronze, c’est un peu l’exercice obligatoire pour les marques horlogères qui croient se démarquer avec le choix de ce matériau qui a l’avantage de se patiner avec le temps [on obtient de beaux effets mordorés avec l’oxydation naturelle de ce bronze], mais l’inconvénient d’être salissant – le fameux « vert-de-gris » – et surtout un tantinet toxique du fait de son alliage de cuivre et d’étain, métaux susceptibles de « larguer » des particules dangereuses capables de traverser la barrière de la peau [c’est pourquoi les montres à boîtiers en bronze ont le plus souvent un fond en acier ou en titane]. La maison suisse Oris a décidé de prendre le risque d’un… bronzage intégral ! Boîtier, cadran, couronne, poussoirs et bracelet à maillons, ce qui doit être une première dans l’horlogerie bronzée. Cette Hölstein Edition reprend les caractéristiques habituelles de « plongeuses » de la marque [le style impeccable, surtout dans cette version rétro d’un chronographe Sixty-Five à deux compteurs], mais il faudra s’habituer à voir la peau du poignet marquée par des traces d’oxydation, en espérant que cette montre ne causera pas d’intoxication percutanée à l’étain (6 %) et au cuivre (64 %) dont son alliage est composé. Hölstein étant le nom du village suisse où la marque Oris est née en 1904, cet hommage bronzé à la tradition se veut « amusant ». C’est effectivement un clin d’œil en même temps qu’un pied-de-nez. Pas sûr que ce non-conformisme soit du goût d’autorités sanitaires qui se montreraient tatillonnes…

BON À SAVOIR : Un changement de génération…

••• Le Swatch Group s’offre un coup de jeune : pour affronter le « monde d’après », le Swatch Group muscle son dispositif. Plus de la moitié des marques – essentiellement celles d’entrée de gamme ou de moyenne gamme – de ce groupe pilier de l’horlogerie suisse [qui regroupe des maisons comme Swatch, mais aussi Omega, Longines, Tissot, Breguet, etc.] changent de direction. Les septuagénaires (Longines, Tissot) sont remplacés par une jeune garde de quadras formés dans les différentes marques du groupe. Une restructuration managériale qui s’accompagne d’une restructuration du réseau des boutiques un peu partout dans le monde… ••• L’horlogerie suisse recule : victimes de la crise sanitaire, qui a entraîné une désorganisation de l’économie internationale, avec une fermeture des grands marchés horlogers de la planète et la disparition des flux touristiques qui alimentaient les boutiques, les exportations horlogères suisses reculent nettement : près de 70 % de chute pour la valeur des montres exportées au mois de mai, ce qui situe le recul à près de 36 % depuis le début de l’année. Il s’agit là de montres exportées (sell-in), non de montres effectivement vendues (sell-out). L’effondrement des volumes exportés est à peu aussi spectaculaire que l’effondrement de leur valeur, mais sans doute aussi de leurs ventes sur le terrain. Par sa brutalité et sa dimension planétaire, c’est la pire crise essuyée par l’horlogerie suisse depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Beaucoup de marques semblent ne plus être en mesure d’y résister, même si on peut estimer que les courbes se redresseront légèrement d’ici à la fin de l’année…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !