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Stadia : Google mise sur la latence négative pour s’imposer dans l’univers des jeux vidéos. Décisif ou moufte aux yeux ?
©Capture d'écran // Clubic

La minute tech

La plateforme de jeu vidéo en streaming, Stadia, de Google, cherche à développer un nouveau concept : la "latence négative" pour soutenir la vitesse de son service. Cette technique permettra de prédire les commandes des joueurs, ce qui permettra aux serveurs de Stadia d’anticiper leur actions.

Ivan Gaudé

Ivan Gaudé

Ivan Gaudé est journaliste spécialisé dans les jeux vidéo et les nouvelles technologies, ancien rédacteur en chef de "DVD Magazine" et "Humanoïde". Il est cofondateur et directeur de la publication du magazine Canard PC. (Crédit Photo) Ivan Gaudé à Arrêt sur images.

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Atlantico : La plateforme de jeu vidéo en streaming, Stadia, de Google, cherche à développer un nouveau concept : la "latence négative" pour soutenir la vitesse de son service. Cette idée a été avancée par Madj Bakar, le directeur adjoint du département de l'ingénierie de la Stadia, et se baserait sur la prédiction par la machine des commandes les plus souvent utilisées par le joueur face à certaines situations. Un tel concept vous parait-il réaliste ? Pourrait-il permettre à Google de concurrencer les consoles de salon classiques ? 

Ivan Gaudé : Tout lancement d’une nouvelle « plateforme » ou console de jeux, implique son lot de vantardises techniques à visée marketing. Phil Harrison, qui dirige le projet Stadia chez Google, est bien placé pour le savoir puisqu’il a vécu tous les lancements de Playstation chez Sony et celui de la Xbox One chez Microsoft. C’est dans cette optique d’abord marketing qu’il faut apprécier le terme de « latence négative ».

Technologiquement, je ne pense pas que Stadia va essayer littéralement de « prédire » les actions des joueurs, mais plutôt de prendre le plus d’avance possible sur les calculs à effectuer par le serveur en attendant les « inputs » du joueur. Cela implique probablement de faire « tourner » les jeux beaucoup plus vite sur le serveur que ce que recevra le joueur (par exemple calculer 100 images par seconde sur le serveur mais n’en envoyer que 60 par seconde au joueur). Mais aussi, et c’est le sens de ce qu’ils viennent d’annoncer à mon avis, essayer de mettre à profit la puissance énorme dont ils disposent pour anticiper sur les calculs à venir grâce au machine learning en fonction de ce qu’ils sauront du comportement coté utilisateur. Ce ne sont pas tant des actions du joueur (par nature peu prévisibles à moins de jouer à sa place ce qui serait désastreux pour l’expérience de jeu) qui pourraient être prises en compte que les caractéristiques du jeu, de son matériel et de sa connexion.

Pour le moment, la plateforme Stadia doit encore démontrer qu’elle peut proposer une expérience de jeu satisfaisante dans des conditions normales de connexion chez l’utilisateur. Prétendre faire mieux que les consoles classiques, ce n’est pas impossible si l’on se réfère à du 30 images seconde sur un téléviseur, mais c’est comme promettre de battre le record du cent mètre sans avoir prouvé qu’on sait marcher : on s'expose au ridicule.

Peu importe la vitesse de réaction du serveur, le risque d'une déconnexion ne reste-t-il pas un facteur indépassable qui défavorise la technologie utilisant le streaming par rapport aux consoles de salons ? Quid des disparités en fonction de la couverture internet ?

La déconnexion n’est pas réellement un risque, sauf en utilisation mobile. Le vrai défi concerne la latence ou le lag, c’est-à-dire le délai ressenti par le joueur entre la commande qu’il envoie et le résultat à l’écran. Et de ce point de vue, Stadia doit surmonter un handicap supplémentaire par rapport à une console, qui est la qualité et la vitesse de la connexion internet. Les démonstrations effectuées étaient relativement convaincantes avec des connexions équivalentes à la fibre (ultra haut débit, un tiers environ des connexions en France, beaucoup moins dans certains pays). Nous sommes beaucoup plus dubitatifs sur leur promesse que Stadia fonctionnera correctement sur de l’ADSL, même de bonne qualité, et c’est une des premières choses que les rédactions de Canard PC et Canard PC Hardware testeront.

Peut-on voir dans cette perspective une tendance de l'industrie du jeu vidéo qui viserait une dématérialisation de plus en plus importante de ses supports physiques ? Quels soucis, notamment en termes de propriété, peut-on s'attendre à voir émerger ?

La marche vers la dématérialisation des jeux est une constante depuis plusieurs années. Comme on l’a vu récemment avec le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris dans l’affaire opposant Que Choisir à Valve, le droit dans ce domaine peut évoluer vite et parfois sembler contradictoire. Je ne suis pas juriste et il faudra de toute façon voir comment est rédigé le contrat d’utilisation de Stadia, mais à partir du moment où il n’y a même plus de téléchargement, il n’y aura à mon avis aucun droit de propriété sur les jeux : l’utilisateur achètera une licence d’utilisation d’un jeu, pas le jeu lui-même.

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