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Immortalité numérique ou perte de données ? Voilà ce que deviennent nos existences (et nos possessions digitales) après notre mort
©Reuters

La vie après la mort

La Toussaint est l'occasion de célébrer ses disparus. A l'heure on nous téléchargeons et diffusons de plus en plus de contenus en ligne ou dans le Cloud, la question se pose de savoir comment gérer ces données après la disparition d'un proche.

Frédéric Mouffle

Frédéric Mouffle

Directeur général associé du groupe ASK’M / KER-MEUR. Expert en cyber sécurité. Conférencier sur les menaces émergentes, spécialisé dans la sensibilisation auprès des entreprises.

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Atlantico : La Toussaint a lieu ce mercredi et comme nous sommes de plus en plus connectés, nous téléchargeons, jouons, partageons des vidéos, des fichiers MP3, des jeux vidéo. C'est l'occasion d'aborder le problème de la gestion de ces ressources sur le "cloud" et les réseaux sociaux. Que deviennent les données numériques emmagasinées une fois que la personne est décédée ? 

Frédéric MouffleLorsqu’une personne décède, ses données stockées (mail, réseaux sociaux, plateforme Cloud…) ne sont pas systématiquement accessibles à ses héritiers. D’ici à quelques années, la majorité des personnes décédées seront dotées d’une identité numérique. Les grandes plateformes ont prévu pour certaines d’offrir à son utilisateur un paramétrage de sa possible « mort numérique ». Chez Facebook, il suffit par exemple de désigner un légataire qui gèrera votre compte après votre décès. Ce qui laisse le choix de fermer le compte ou, au contraire, de s’orienter vers un profil commémoratif. 

D’autres réseaux sociaux tels que LinkedIn ou Twitter n’ont quant à eux aucune politique de gestion ou de « transmission des droits » sur le compte, une fois le certificat de décès communiqué. Ces deux plateformes procèdent tout simplement à la fermeture du compte du défunt. Google a déjà mis en place une sorte de « testament numérique » afin d’anticiper la suppression de votre compte en cas de décès, avec une possibilité toutefois d’envoyer vos données à des tiers.

Concernant PayPal, c’est un peu plus complexe. En effet, plusieurs documents vous seront demandés. Et notamment les documents d’identité du défunt, le certificat de décès, un testament, etc… Et ceci, afin de pour pouvoir procéder à la clôture du compte et ainsi récupérer les fonds. Amazon et Apple ont une politique plus radicale mais cependant très claire : aucune possibilité ne vous est donnée de léguer votre bibliothèque personnelle (musique, série, film, etc).

Pour éviter ces désagréments, il est évidemment judicieux de communiquer ses identifiants de son vivant à une tierce personne de confiance, afin d’éviter aux proches d’avoir à rajouter une charge supplémentaire pendant le règlement d’une éventuelle succession. Des circonstances souvent douloureuses et qui obligent chacun à cheminer dans les arcanes d’un parcours administratif souvent très lourd à gérer pour les héritiers. Les vacances sont toujours un moment qui augmentent l ‘espace disque et la fréquentation des principaux fournisseurs des Cloud public et payant. 

Quels sont les usages et les codes de comportement qui se développent pour assurer la gestion de ces données numériques sur les réseaux sociaux et les cloud informatiques ? 

La règle de bonne conduite serait de laisser à ses proches les identifiants et ses mots de passe dans une enveloppe fermée. La contrainte du dispositif réside dans le fait que lors d’un changement de mot de passe intempestif, il faut évidemment mettre à jour ses informations et bien les notifier. C’est toute une chaine qu’il faut évidemment repenser.

Si vous ne donnez pas accès (par exemple) à votre téléphone mobile, les plateformes qui demandent une réauthentification lors de la connexion sur un nouveau navigateur (et si par ailleurs vous n’avez pas non plus accès au sms dans le cas d’une double authentification), vous n’aurez moyen de reprendre la main sur le compte. Les données des personnes défuntes ne sont identifiées comme telles que lorsque les plateformes sont informées du décès. Comme pour tous les comptes, lorsqu’ils ne sont pas utilisés depuis plusieurs années, ils peuvent être définitivement fermés, n’ayant pas de réponse aux mails de relance envoyés au défunt.

Sur un plan juridique, qui peut accéder aux données hébergées sur une adresse mail ou un réseau social d'une tiers personne et par quels moyens peut-elle faire cela ? 

L’identité numérique (à ne pas confondre avec l’E-réputation), n’a aucune définition juridique, car aucune autorité ne vous attribue cette E-identité. Elle est choisie par l’utilisateur, peut-être sous son propre nom à un pseudonyme. Cette identité numérique englobe toutes les traces numériques tels vos comptes de réseaux sociaux, vos adresses mail, vos commentaires, vos achats en ligne sur les plateformes, mais également toutes les données produites. Sur le plan juridique, la loi Informatique et Libertés de 1978 définit dans son article 2 : « le droit d'accès conféré aux personnes physiques par la Loi Informatique et Libertés est un droit personnel limité à la « personne concernée » et qui ne se transmet pas aux héritiers ».

La loi peut autoriser les ayants droits qui se sont fait connaître à éventuellement mettre à jour les données du défunt, mais en aucun cas à en prendre possession. Cependant, la question est d’actualité au sein de la CNIL, quand il s’agit de face dans certains cas à des conflits entre héritiers dont certains désirent effacer les données, alors que d’autres au contraire souhaitent les mettre en avant ou confier les données à des sites internet « cimetière 2.0 », ayant pour rôle essentiel de faire vivre le profil « post mortem ».

Pour conclure, une décision du conseil d’Etat rendue le 8 juin 2016 stipule que le droit d’accès aux données personnelles est réservé aux « personnes concernées ». L’héritier ne saurait donc avoir accès aux données de son proche défunt.

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