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Bernard-Henri Lévy.
Bernard-Henri Lévy.
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Atlantico Lettres

Ce qu’il y a de bien avec Monsieur Lévy, c’est qu’on peut en parler sans le lire.

Christian Montaignac

Christian Montaignac

Christian Montaignac est écrivain et journaliste pour le journal Service Littéraire. Dernier ouvrage paru : “Le soir venu” au Cherche-Midi.

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Il est toujours permis, en toute immodestie, de s’en remettre au grand Oscar (Wilde) pour traiter d’un ouvrage que l’on n’a pas reçu et encore moins lu : "Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique, on se laisse tellement influencer". C’est là une pratique très répandue, surtout au moment de fêter la rentrée littéraire qui bombarde les rédactions de centaines de romans. Par bonheur, on peut tirer la quatrième de couverture à soi, en faire une synthèse forcément subtile et l’éditeur, de la sorte suivi à la lettre, sera comblé.

Pierre Bayard, psychanalyste jubilatoire, a écrit un essai qui fera toujours autorité sur les différentes manières de ne pas lire un livre et d’en parler passionnément auprès de quelqu’un qui ne l’a pas lu non plus. Il en va ainsi du dernier Lévy, non pas Marc, le cartonneur, mais l’autre, Bernard-Henri, le commandeur. Son ouvrage était annoncé le 1er septembre mais, vous connaissez la chanson, "à l’heure où nous écrivons ces lignes, celles de notre ami Bernard-Henri ne nous sont pas parvenues". Notre ami, c’est exagéré, mais à part ça, tout est vrai. Le communiqué de presse précise qu’il y a deux livres en un, “Hôtel Europe”, monologue en cinq actes, et “Nouvelles vues sur l’Europe”, un essai philosophico-politique développant ou élucidant les points les plus énigmatiques du texte théâtral.

Développant ou élucidant, les lacaniens y trouveront leur signifié et leur signifiant. A présent, et selon l’exercice convenu, il faut bien en dire un mot, ou deux. Ici, ce cher Bernard-Henri est providentiel. Il a un tel palmarès dans le look prêt-à-penser qu’il permet à quiconque de décrire plutôt que d’écrire, de délayer faute d’étayer. Suivez-nous. BHL, ses blanches chemises entrebâillées, son style flamboyant, son indéniable talent (mais de quoi ?), ses ors et ses palais, sa quarantaine (?) de livres, ses films de jour, de nuit, son réseau d’influence, sa surface médiatique, en un mot sa puissance. Et voilà. Pas lu, pas épris, mais mission accomplie. Le philosophe le plus photogénique, l’indigné le plus romantique, le penseur le plus rapide (dopé aux amphétamines, lui-même le dit), l’intellectuel le plus frénétique, les uns après les autres célébrés ou bafoués, restent, du haut d’un narcissisme exacerbé, inaccessibles à la critique. Ici comme ailleurs. Mais alors, qu’en est-il de son œuvre pleine de vent ? Elle le décoiffe juste ce qu’il faut. Chapeau l’artiste. Nous essayerons de ne pas rater votre prochaine sortie.   

Hôtel Europe, de Bernard-Henri Lévy, Grasset, 224 p., 18 €.

Source : Service Littéraire, le journal des écrivains fait par des écrivains. Le mensuel fondé par François Cérésa décortique sans langue de bois l'actualité romanesque avec de prestigieux collaborateurs comme Jean Tulard, Christian Millau, Philippe Bilger, Éric Neuhoff, Frédéric Vitoux, Serge Lentz, François Bott, Bernard Morlino, Annick Geille, Emmanuelle de Boysson, Alain Malraux, Philippe Lacoche, Arnaud Le Guern, Stéphanie des Horts, etc . Pour vous y abonner, cliquez sur ce lien.

Service Littéraire. Le mensuel de l'activité romanesque

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