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Quand on pourrait pousser un vigoureux cocorico, mais qu’on ne le pousse pas tellement la France ignore tout des vraies richesses de son horlogerie : c’est l’actualité des montres
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Uniquement des montres françaises, qui nous prouvent que l’horlogerie tricolore n’a pas à rougir de son offre, même si rien n’est fait pour relancer une activité qui pourrait être fortement exportatrice et générer de nombreux emplois si la France cessait de subventionner... le développement de l’horlogerie suisse !

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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PÉQUIGNET : Le meilleur du style français à des prix de dénuement post-socialiste…

D’abord, un coup d’œil sur le « Fabriqué en France » : voici quelques années, la maison Péquignet – un des fleurons de l’horlogerie française – ne jurait que par le Swiss Made : cette nouvelle French Pride est un réflexe réaliste de reconcentration sur ce qu’on sait faire de mieux – le style français, la French Touch, beaucoup plus appréciée hors de nos frontières que les bobos parisiens ne l’imaginent. Ensuite, justement, ces codes tranquilles mais efficaces d’une horlogerie française qui fait de la résistance à Morteau (Doubs), contre la Suisse, tout contre (dix kilomètres de la frontière) : un boîtier rond, en acier, des chiffres sages, un cadran bleu dont le soleillage rappelle les grandes heures de la décoration horlogère française, un mouvement mécanique qui, pour une fois, n’est pas suisse, des proportions justes, un bracelet aux maillons virils à boucle déployante, une étanchéité à 100 m pour un port quotidien sans souci. Cette Moorea Élégance renoue avec les origines de Péquignet, quand les montres françaises repartaient à la conquête du monde avec deux arguments très simples : l’esthétique et le bon rapport qualité-prix. Pour 900 euros, ce n’est pas rien, mais ce n’est pas du vol à main armée [spécialité aussi helvétique que la fondue], quoique ce soit un réarmement moral pour une manufacture qui semble repartie du bon pied…

BRM : Une montre record du monde née dans un atelier de la banlieue parisienne…

Installé avec une vingtaine d’ouvriers dans une fabrique près de Pontoise, le Bernard Richards de BRM (Bernard Richards Montres) est la seule vraie manufacture de mouvements vraiment Made in France, imaginés et développés par son équipe, puis usinés dans ses ateliers. Ici, les idées éclosent « au cul de la machine », sans R&D, ni salles blanches, juste à l’intuition. Ce qui ne l’empêche pas de battre des records du monde : cette RG-46 au boîtier en Makrolon (matériau synthétique translucide) est tout simplement la montre sportive automatique la plus légère du monde (44,1 grammes). Son mouvement automatique exclusif BRM repose sur des « amortisseurs », qui laissent percer la passion mécanique d’une marque qu’on remarque très souvent au poignet des champions automobiles. La masse oscillante (remontage) est autobloquante : elle repose sur un roulement de masse à double rangée de billes en céramique non graissable [répétez-là à un initié et il vous prendra pour un grand érudit de la montre]. Le style rugueux est volontairement assumé et n’exigez surtout pas de Swiss Made sur le cadran sous peine de vous faire incendier par Bernard Richards, mais vous verrez vite que, au poignet, l’effet disruptif est garanti !

RICHARD MILLE : Demandez-vous seulement ce qu’il fume pour en arriver là…

Si Richard Mille vous dit qu’il fait des montres suisses, demandez-lui son passeport : plus français, tu meurs. Même si ses montres sont effectivement (très bien) faites en Suisse, elles sont on ne peut plus françaises, dans leur âme et conscience comme dans leur identité mécanique substantielle. D’ailleurs, les Suisses l’imitent – sans l’égaler, d’ailleurs – dans la recherche de cette esthétique qui a révolutionné l’horlogerie des années 2000. Pour prouver la résistance de ses montres de haute complication mécanique, Richard Mille les fait torturer sur les courts de tennis, au volant d’une F1 ou pendant une partie de polo : elles résistent, quand celles des Suisses réclament des gants blancs pour être manipulées. Son ultime pied-de-nez à la bien-pensance horlogère helvétique, ce sont les prix, totalement démentiels et réservés à la crème de la crème des néo-milliardaires de cette planète, qui se suicideraient dans un MacDo plutôt que d’être vus sans une Richard Mille un peu bizarre au poignet : 600 000 euros pour une montre en nanofibres de carbone [le nom choc du plastique high-tech un peu chic], même portée par le champion de tennis Rafael Nadal, il fallait oser ! À peu près autant pour la RM 61-01 en titane, céramique et carbone (ci-dessous), une montre dédiée au sprinteur jamaïcain Yohan Blake qui la porte pour battre ses records du monde tellement elle est légère : notez les « ponts » aux couleurs du drapeau jamaïcain, demandez-vous ce qu’il faut fumer pour rhabiller ainsi une montre de luxe et dites-vous que Richard Mille, qui est né à Draguignan mais qui habite en Bretagne, est bien trop rasta– sauf pour les cadenettes – pour être suisse !

CHARLIE WATCH : Les « Pieds-Nickelés » qui ont tout compris de la montre…

Qu’est-ce qu’ils sont rigolos, ces petits jeunes qui lancent la nouvelle Charlie Watch, en la positionnant au carrefour de « l’élégance parisienne » et de la « cool attitude californienne » ! Pour trouver des sous, ils font appel aux souscripteurs sur le site spécialisé Indiegogo (financement collaboratif). Ils sont français, ils ne connaissent à peu près rien aux montres (sinon qu’ils les aiment), ils sont plus hâbleurs et menteurs que des vieux professionnels de l’horlogerie (leurs montres sont des « françaises de papier », pas de souche), mais ils ont déjà réussi à lever 25 000 euros pour un objectif de 10 000 euros annoncés – soit une offre 2,5 fois sursouscrite en moins de trente jours [ce qui fait d’eux des champions du néo-capitalisme]. À ce rythme, s’ils sont raisonnables, ils auront racheté Louis Vuitton dans dix ans. Ils ont surtout tout compris du principal défi de la nouvelle horlogerie française : la créativité accessible, qu’on pourrait expliquer comme l’art de faire des belles montres, séduisantes et de qualité, à des prix compatibles avec les temps de crise et de disette financière de la France socialiste. Les portes de leur paradis horloger s’ouvrent contre un versement de 150 euros, avec trois bracelets dont on peut choisir les couleurs. Pas belle, la vie des montres tricolores ?




SAINT-HONORÉ : Dans le Doubs, ne t’abstiens pas de faire des belles montres !

Sur le segment très disputé du sport-chic, la marque familiale Saint-Honoré – installée depuis trois siècles à Charquemont (Doubs), à portée de canon du Jura suisse – maintient haut les couleurs françaises, même si elle est plus appréciée à l’étranger comme connue en France, où ses montres sont très peu distribuées, à l’exception de sa boutique parisienne, juste en face de Colette, le temple de la branchitude. Cette Worldcode GMT sacrifie à l’usage du Swiss Made, mais la montre présente assez d’atouts pour pouvoir s’en passer : élégance du style, sobriété de l’acier avec la note de luxe de l’or rose, lisibilité impeccable du cadran, fonctionnalité du second fuseau horaire affichée par l’aiguille rouge [un tour de cadran par vingt-quatre heures, avec la lunette graduée comme repère] et mouvement à quartz suisse pour contenir le prix. Demandez-vous quel prix vous demanderaient nos amis suisses pour une montre de cette qualité et faites vos comptes…

SECRÉTARIAT D’ÉTAT À L’HORLOGERIE : Et si on essayait « Juju » ?

Toutes ses montres françaises pour en venir à une idée simple : les cinq montres ci-dessus [on aurait pu en présenter beaucoup d’autres, comme la Briston en haut de la page] prouvent que l’horlogerie française est bien vivante [qu’elle se pare ou non d’oripeaux suisses], elle est créative, impertinente, largement biodiversifiée et elle peut même se révéler très populaire. Nos amis de Belles Montres Online (groupe Le Point) ont commencé à en parler : pourquoi pas un secrétaire d’Etat à l’économie horlogère, qui ne saurait revenir qu’au député socialiste Julien Dray, grand collectionneur de belles montres et fin stratège post-trotskiste aux remarquables capacités manœuvrières ? À quand un encouragement des autorités à la relance d’une horlogerie tricolore digne de ce nom, laquelle s’est montrée capable, jusque dans les années 1970, de tailler des croupières à sa concurrente suisses ? Dans ce domaine comme dans d’autres, il faut débrancher la pompe aspirante – celle qui voit les Français payer de leur poche la prospérité des marques suisses : savez-vous que la Suisse profite directement, sans débourser un centime en budgets d’apprentissage, de tous les élèves coûteusement formés, aux frais des contribuables, dans les établissements d’enseignement horloger de toute la France ? Il n’est pas normal que des jeunes gens formés à Rennes, à Nantes, à Nice, à Bordeaux ou à Marseille soient ainsi préemptés par les marques suisses. Sans parler de la double peine : savez-vous que ces mêmes jeunes français, quand ils n’ont plus de travail en Suisse, reviennent pointer à Pôle Emploi en profitant des largesses de l’Etat-providence français ? Savez que les deux-tiers des équipes dirigeantes des grandes suisses sont françaises ? À Bercy, il doit bien rester un strapontin pour une mission horlogère en bleu-blanc-rouge : même s’il n’aime pas les montres, François (Hollande) doit bien ça à son copain « Juju » (Dray) – qui les adore (ci-dessous : deux pièces d’Alain Silberstein, génie créatif mais retraité de l’horlogerie française, dont les montres commencent à « cartonner » aux enchères)…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES
Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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