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La géolocalisation ou la fin
de la vie privée ?
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Attrape-moi si tu peux

Alors que Facebook retire l’outil « Find your friends », la géolocalisation arrive dans les entreprises. Eldorado pour le business, ou bombe à retardement dans nos vies privées ?

Arnaud  Pelletier

Arnaud Pelletier

Arnaud Pelletier est un entrepreneur expert en renseignement stratégique. Il est titulaire d'un Mastère spécialisé en Intelligence Economique et Stratégique à l'Ecole Internationale des Sciences du Traitement de l'Information.

Il dirige aujourd'hui l'Agence Leprivé, société d'enquêtes et d'investigations pour les particuliers et les entreprises et Stratég-IE, société de conseil en mise en place de structure d'Intelligence Economique dans les PME / TPE, stratégies et gestion des informations sensibles d'entreprises.

Il s'occupe d’un blog de l’information stratégique, une revue de web : arnaudpelletier.com

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Atlantico : Comment les entreprises peuvent-elles profiter des outils de géolocalisation ?

Arnaud Pelletier : Deux usages se distinguent dans les entreprises. D’une part, la sécurité : pour suivre des véhicules qui transportent des marchandises coûteuses, par exemple. D’autre part, la géolocalisation peut avoir usage commercial pur. Il y a eu le web 2.0 avec les réseaux sociaux, désormais, place au web 3.0 : être joignable tout le temps et partager sa localisation. Un exemple simple : vous passez devant un magasin de chaussures. Sur les réseaux sociaux, vous êtes identifié comme un grand sportif. Résultat ? Vous recevez une offre promotionnelle sur votre smartphone. Le web 3.0, c’est tout simplement l’interaction entre la localisation, les réseaux sociaux et l’entreprise.

L’utilisation de la géolocalisation par les entreprises ne risque-t-elle pas de donner lieu à des dérives ?

Bien que les usages professionnels de la géolocalisation soient très encadrés, à la fois par la loi et par la CNIL (Commission Nationale Informatique et Libertés), les risques sont immenses. Qui sont les gens qui reçoivent les informations de géolocalisation ? Des entreprises, des concurrents ? Comment garantir que les récepteurs soient bienveillants ?

Quel est l’intérêt de la géolocalisation pour les particuliers ?

Il y a les usages dits « légitimes » : suivre une personne âgée, un malade, des enfants, ou même partager sa vie avec ses amis. Il existe un grand nombre d’applications, la plus connue étant « Mes Amis » sur l’Iphone, qui permettent de partager sa localisation avec un certain nombre de personnes. Mais il y a également des usages « illégitimes » d’espionnage, qui se développent grâce à la baisse générale des coûts et la possibilité d’acheter facilement le matériel sur internet.

Quels sont les risques pour les particuliers ?

Les conséquences sur la vie privée peuvent être graves. En tant que directeur d’une société d’investigation, je suis bien placé pour constater quelles sont les dérives possibles du matériel de géolocalisation. Aujourd’hui, tout le monde peut s’équiper, car les prix ont baissé, par rapport à l’époque où seuls les services d’intelligence des Etats étaient capables de financer ce genre d’appareil. Désormais, toute personne qui souhaiterait espionner son conjoint, son salarié, peut acheter le matériel sur internet. Voire encore plus facilement, grâce à des logiciels qu’on peut acheter en ligne pour quelques centaines d’euros et installer sur le smartphone de la personne qu’on veut localiser.

Pourquoi la vente du matériel de géolocalisation à usage privé n’est-elle pas interdite ?

Parce qu’il existe des usages légitimes. Mais la géolocalisation est souvent détournée à des fins illégales. Les sites internet des sociétés qui vendent ce matériel sont souvent hébergés à l’étranger. Et quand bien même elles seraient établies en France, ces sociétés jouent sur une ambigüité : la vente du matériel est légale, mais certaines utilisations sont prohibées. Surveiller une personne à son insu, c’est au minimum un an de prison et 45 000 euros d’amende.

Ceux qui partagent leur localisation sur les réseaux sociaux ne le font-ils pas de leur plein de gré ?

C’est très subtil. L’aspect marketing est plus subi qu’accepté. Aujourd’hui, la géolocalisation est subordonnée à l’accord préalable de l’individu. Mais toutes les sociétés qui proposent des services gratuits aux internautes – Facebook, Twitter, … - recherchent un moyen de se financer. La publicité ciblée, permise par la géolocalisation, en est un. La revente d’informations sur les utilisateurs en est un autre. La CNIL règlemente l’usage professionnel de la géolocalisation, mais la législation est bien plus floue pour ce qui est de l’usage des particuliers. On va sur Facebook pour communiquer avec ses amis, et on accepte de recevoir de la publicité parce que c’est le prix à payer. Aussi n'est-il pas impossible qu’un jour, dans les conditions générales d’utilisation de Facebook, apparaisse une clause de géolocalisation.

N’en est-on qu’aux balbutiements ? Quelles sont les perspectives d’avenir ?

Nous sommes actuellement au tout début de la géolocalisation. Mais l’industrie marketing se saisit de l’outils pour en faire un usage lucratif. Pour reprendre un cliché, la situation française tend à rejoindre les Etats-Unis, où le web interactif est plus développé. Fatalement, des applications qui existent déjà là-bas ne sont pas aussi populaires en Europe, particulièrement en France, qui est peut-être le pays le plus attaché aux libertés individuelles. Nous nous trouverons donc bientôt devant un choix de société.

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