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"Céline, derniers entretiens" de Géraud Bénech : Céline, abject et génial
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Atlanti-Culture

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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THEATRE
Céline, derniers entretiens

D’après Cahiers II Céline et l’Actualité Littéraire : 1957 – 1961

Mise en scène: Géraud Bénech

Interprété par Stanislas de la Tousche

INFORMATIONS

Théâtre de Poche Montparnasse

75, boulevard du Montparnasse, 75014, Paris

Le lundi à 21h, le vendredi à 19h

Jusqu’au 4 mars 

Durée : 1h15

Réservations : 01 45 44 50 21

RECOMMANDATION

          BON

THEME

Ce spectacle est réalisé à partir de cahiers qui sont la retranscription d’interviews que Céline a données sur une période de cinq ans. Interrogé par des journalistes (dont les questions n’apparaissent pas dans la pièce), il discourt sur les sujets les plus variés : son enfance, le monde des lettres et ses grands auteurs, les pédérastes (souvent les mêmes), le rejet d’une société devenue matérialiste et consumériste, jusqu’aux prédictions comico-apocalyptiques concernant l’arrivée des Chinois. 

Son discours, mélange de mauvaise foi assumée, de ringardise, de fulgurances, de ruses, d’éclairs d’enfance est porté ici par un comédien exceptionnel, Stanislas de la Tousche, qui se glisse dans la peau de « l’ermite de Meudon ».

POINTS FORTS

On a vraiment l’impression de se retrouver en face de Louis-Ferdinand Céline, grâce au travail et à la performance étonnante de mimétisme de Stanislas de la Tousche. La pièce est animée par une mise en scène inventive, bien que discrète, qui recrée l’univers des entretiens : un fauteuil pour l’écrivain, une bande son sobre et quelques images inspirées de l’époque. L’acteur rend parfaitement ce filet de voix d’un homme au crépuscule de sa vie, jusqu’à être le principal attrait du spectacle. C’est à la fois la force et la limite de l’exercice.

Que gagne-t-on à la découverte de ce Céline intime, qui n’a plus rien à attendre de la vie ? Des considérations sur son époque principalement. Pas de plaidoyer pro domo, pas de tentative d’auto justification, pas de révélation ni de testament littéraire … seuls une parole débridée et agile qui galope au rythme de ses envies d’attraper – surprendre, choquer, distraire ? – une dernière fois son lecteur – auditeur.

C’est parfois amusant (« Proust, d’accord mais 300 pages pour dire que Tutur encule Tatar »), souvent anecdotique et parfois instructif sur sa passion pour la médecine, qui l’aura passionné plus que la littérature. 

Son monologue s’entend comme une chronique en roue libre d’un génie littéraire qui tire ses dernières salves dans un format qui n’est pas le sien.

POINTS FAIBLES

On reste un peu sur sa faim sur la grande interrogation célinienne qu’est son antisémitisme : sa genèse, sa légitimation et le développement d’une obsession qui l’aura accompagné toute sa vie.

Le spectacle s’adresse surtout à ceux qui aiment Céline et souhaitent mieux le connaître intimement en vivant l’expérience que représente la découverte d’un cabinet de curiosités.

EN DEUX MOTS

Philippe Tesson, le directeur du « Poche », vient présenter la pièce. Il met surtout en avant l’éclairage que le texte apporte à l’œuvre de Céline, qui est déjà bien connue : l’oralité. Céline n’écrit pas – et l’on sait le soin qu’il apportait à ses textes – mais il se raconte : sans pouvoir se relire ni se corriger, ses paroles nous sont livrées sans filtre et apportent donc une intéressante contribution à sa vie, à son œuvre.

UN EXTRAIT

« Pour parler franc, là entre nous. J’finis encore plus mal que j’ai commencé. (…) si j’me suis mis tant de gens, l’hostilité du monde entier, je ne suis pas certain que ce ne soit pas toujours involontairement. (…) Précisément pour ne pas être populaire n’est-ce pas, j’ai donc cherché pour ainsi dire la modestie, et même la réprobation générale ».

L’AUTEUR

Céline, que dire de plus ? L’un des plus grands auteurs modernes de notre littérature et-aux yeux de beaucoup, dont je suis- l’un de ses plus abjects personnages. Plus d’un demi-siècle après sa mort, il continue de diviser. Autour de l’homme et de son œuvre, la polémique perdure, reposant inlassablement la question de la responsabilité de l’écrivain.

De son vrai nom Louis-Ferdinand Destouches, Céline est né en 1894 et mort en 1961. Il publie « Voyage au bout de la nuit » en 1932 et connaît immédiatement un grand succès, qui fera dire à Julien Gracq : « ce qui m'intéresse chez lui, c'est surtout l'usage très judicieux, efficace qu'il fait de cette langue entièrement artificielle – entièrement littéraire – qu'il a tirée de la langue parlée ».

Il a toute sa vie fait preuve d’un antisémitisme virulent, qui lui vaudra d’être condamné puis amnistié en tant qu’invalide de guerre (la première guerre mondiale).

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