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De très bonnes choses, mais problème d'homogénéité
©TNP Villeurbanne

ATLANTI-CULTURE

Jean Ruhlmann pour Culture-Tops

Jean Ruhlmann pour Culture-Tops

Jean Ruhlmann d’abord professeur d’histoire en collège, est actuellement enseignant-chercheur en histoire contemporaine à l’université de Lille – Charles de Gaulle. Le théâtre est une passion qui remonte à sa découverte du Festival d’Avignon ; il s’intéresse également aux séries télévisées. Il est, avec Charles Edouard Aubry, co-animateur de la rubrique théâtre et membre du Comité Editorial de Culture-Tops.

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VU PAR JEAN RUHLMANN
THÉÂTRE
 L’ÉCHANGE

DE PAUL CLAUDEL

MIS EN SCÈNE: CHRISTIAN SCHIARETTI

AVEC FRANCINE BERGÉ, LOUISE CHEVILLOTTE, ROBIN RENUCCI, MARC ZINGA

INFORMATIONS

  • THÉÂTRE LES GÉMEAUX / SCEAUX/ jusqu'au  1ER DECEMBRE/RÉSERVATIONS : 01 46 61 36 67
  • TNP VILLEURBANNE/du 6 au 23DECEMBRE/RESERVATIONS: 0478033000

RECOMMANDATION

BON

THÈME

• Deux jeunes gens – Louis et Marthe – viennent de se marier : elle, très pieuse, a quitté son foyer pour suivre son bien-aimé,et le couple vit de peu dans une contrée rurale d’Amérique du Nord.

• Louis aspire bientôt à retrouver une liberté que son nouveau statut d’époux semble contrarier. Dans le même temps, il trouve à s’employer chez de riches propriétaires terriens qui vont lui proposer un curieux échange : l’homme, Thomas Pollock, lui propose une somme pour qu’il parte et lui abandonne Marthe ; la femme, avec qui Louis a une liaison, lui offre de manière un peu paradoxale ladite liberté en échange de sa jeunesse et de son attachement.

• Marthe, de son côté, se trouve prise dans ce terrible champ de forces contradictoires, mais reste fidèle à ses attachements, au prix d’une souffrance considérable.

POINTS FORTS 

• Une fois que l’on a admis que les protagonistes d’un drame se déroulant dans l’Amérique profonde pouvaient s’exprimer comme les personnages de Corneille ou Racine (que de « ô ! », que de salutations quand même…), le public se régale de la maestria des deux comédiens que sont Francine Bergé et Robin Renucci. La première est absolument éblouissante d’aisance et de présence quand elle incarne une “forme-femme“ tentatrice, caustique, diabolique et désarmée. Robin Renucci se fait l’incarnation parfaite de “l’évangile de la richesse“ et le promoteur d’un échange-marchandage douteux, non sans laisser deviner des failles considérables que le dollar-roi ne peut combler.

• La mise en lumières est remarquablement conçue, qui épouse parfaitement l’économie générale de la pièce et la baigne d’ambiances fortes et variées.

POINTS FAIBLES 

• Mettre en présence des comédiens chevronnés (Bergé et Renucci) avec de plus jeunes artistes peut avoir des effets bénéfiques, ou l’inverse. C’est plutôt le cas ici, quand on aborde un texte compliqué à interpréter, parcouru de tunnels métaphoriques (pratiquement tous les éléments naturels y passent, de la marée au soleil…), et cherchant sans relâche à accommoder la poésie au théâtre. Tout ceci met en valeur  l’aisance des premiers à surmonter les difficultés que n’évitent pas toujours les seconds.

• Si la gestuelle et la souplesse de Marc Zinga sont de véritables atouts au service de son jeu, est-il nécessaire d’écarquiller les yeux à tout propos ? De la même manière, on entend trop souvent et trop distinctement Louise Chevillotte reprendre son souffle entre deux lamentations, ce qui nuit considérablement aux sentiments qu’elle exprime, sur des registres assez peu variés. Enfin, les deux comédiens prennent vite l’habitude de crier pour un oui ou pour un non, et l’un sur l’autre, piège qu’évitent soigneusement leurs aînés.

• On sait le soin que Claudel portait à la diction, mais était-il vraiment besoin d’exiger de Louise Chevillotte et de Marc Zinga qu’ils prononcent toutes les syllabes et les lettres, si ce n’est pour aboutir à les placer dans une situation de récitation passablement handicapante ; Renucci et Bergé savent s’en émanciper pour le plus grand bonheur du texte.

EN DEUX MOTS 

Un échange qui tourne au marchandage à la fois sordide et sublime, mais un peu inégal…

UN EXTRAIT 

«  Justice ! Justice ! Mon cri est humble et mon cri ne sera point inentendu »

L’AUTEUR 

• Paul Claudel (1868-1955), issu d’un milieu aisé, se convertit au catholicisme après avoir été saisi un soir de Noël 1886 dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. Outre sa carrière de diplomate (notamment en extrême-orient), il accomplit un parcours de dramaturge, poète et essayiste, et connait la consécration avec Le partage de midi(1906), L’annonce faite à Marie (1912) et surtout Les souliers de satin (1929), désormais considérés comme des classiques du répertoire.

• Au théâtre, ses textes ont une indéniable dimension poétique et spirituelle. C’est la première version de L’échange qui nous est proposée : écrite en 1894, elle précède l’ambassade de Claudel aux Etats-Unis d’Amérique (1927-28) et donnera lieu à une seconde version, livrée sur le tard, en 1954.

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