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"De si tendres liens" : un petit bijou, rare, d'amour et de tendresse
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Atlanti-culture

Si vous allez faire un tour au Festival d'Avignon, allez voir la pièce de Loleh Bellon, "De si tendres liens". Rarement les relations entre une mère et sa fille n'auront été évoquées avec autant de profondeur et de délicatesse.

Philippe Jousserand pour Culture-Tops

Philippe Jousserand pour Culture-Tops

Est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam, 23 ans, en Master d'école de commerce, et grand amateur de One Man Shows.
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THEATRE

De si tendres liens

De Loleh Bellon

Mise en scène: Laurence Renn Penel

Avec Christiane Cohendy et Clotilde Mollet

INFOS & RÉSERVATIONS

Théâtre Le Petit Louvre

Chapelle des Templiers

3, rue Félix Gras 84000 Avignon

Tél. : 04 32 76 02 79

http://www.theatre-petit-louvre.fr

Jusqu' au 30 juillet, à 21h30. Relâche les 18 et 25.

RECOMMANDATION

EN PRIORITE

THEME                         

Une jeune divorcée élève seule sa fille. Les années passent, l’enfant grandit, devient une femme, s’émancipe, fonde une famille, tandis que sa mère vieillit et perd en autonomie. Entre elles, quelques petits conflits mais toujours un amour immense et une incommensurable tendresse.

POINTS FORTS

1) Qui a dit que les gens heureux n’avaient pas d’histoire ? Ici Charlotte et Jeanne, la mère et la fille, sont soudées inexorablement par un amour profond et un attachement viscéral. Ce qui n’exclut pas les petits heurts, les petites incompréhensions, certains reproches aussi. L’auteure, Loleh Bellon, ne sombre pas dans l’angélisme, elle est bien trop lucide pour cela, mais elle nous raconte, avant tout, dans ces rapports d’une mère et de sa fille, la chronique d’un bonheur. C’est délicieux… et si rare au théâtre !

2) Dans cette pièce, il existe souvent un parallèle astucieux entre certaines scènes qui se répètent à trente ou quarante ans d’intervalle, mais avec les rôles inversés par la vie. Parfois Jeanne est une enfant et sa mère, une jeune femme. Ou Jeanne est devenue une adulte tandis que sa mère est entrée dans le troisième âge. Quand l’une fait un cauchemar ou tarde à s’endormir, l’autre l’apaise ; quand l’une se prépare pour une soirée, l’autre la regarde admirativement ; quand l’une prend un train seule, l’autre pleine de recommandations l’accompagne à la gare… Et vice versa. Il arrive un jour, nous dit l’auteur, où nous devenons les parents de nos parents, et le comportement qu’ils ont eu avec nous, nous finissons par l’avoir avec eux.

3) La pièce dit aussi que les enfants et les vieillards, par leur faiblesse consubstantielle, sont dépendants des adultes et souffrent toujours un peu. Car les adultes sont absorbés par leur vie, accaparés par leur métier, leurs amours, leurs amis, et les délaissent. Ou pas… Car peut-être les enfants et les vieillards, par nature, ne sont jamais rassasiés de la présence des adultes et se trouvent dans une quête permanente de tendresse, forcément inassouvie. Qui sait ? Loleh Bellon ne tranche pas ; elle laisse la question posée.

4) La pièce est un ouvrage de dame, écrite par une dame pour deux dames. C’est du petit point, de la broderie délicate. Les scènes sont courtes, joliment construites, édifiantes : un anniversaire, l’arrivée des premières règles, un retour tardif de surprise-partie, la déclaration de guerre, l’enterrement du père… Loleh Bellon écrit avec simplicité ces petits moments, ces petits riens et, paradoxalement,  offre à ses deux interprètes un terrain de jeu immense.

5) Christiane Cohendy et Clotilde Mollet sont exceptionnelles. Avec une sensibilité frémissante et créative, elles composent ces deux femmes qui vieillissent en 1h30. Le temps que les lumières s’éteignent et se rallument, elles changent d’époque et de tranche d’âge. Toutes deux apportent une pâte humaine très dense à la moindre réplique. On ne les regarde pas jouer, on voit vivre Charlotte et Jeanne. C’est très fort et surtout très beau.

POINTS FAIBLES

Quelques partis pris de mise en scène contestables, comme cette scène de train jouée au lointain derrière un rideau pas très transparent ou ce moment, sans élégance, où les comédiennes en robe et en escarpins se retrouvent couchées par terre pour figurer un lit. Mais ce ne sont au final que des détails…

EN DEUX MOTS

Créée en 1984 par Dominique Blanchar et Nelly Borgeaud, « De si tendres liens » est reprise par deux autres magnifiques comédiennes, Christiane Cohendy et Clotilde Mollet, et se joue donc en ce moment dans le off à Avignon. A ne pas manquer. 

L’occasion de réentendre l’écriture si fine de Loleh Bellon, si riche, sans effet, mais qui tape au cœur.

UN EXTRAIT

Charlotte à sa fille Jeanne, évoquant son divorce d’avec son père : « Je n’ai jamais regretté ce mariage inutile car tu es là. »

L’AUTEURE

Formée par Julien Bertheau, Charles Dullin et Tania Balachova, Loleh Bellon (1925-1999) est avant tout une comédienne de théâtre. Elle joue Anouilh, Salacrou, Bernstein, Schiller, Genet, Claudel… sous la direction de Claude Régy, Peter Brook, Jean-Louis Barrault, Patrice Chéreau.

Au cinéma, elle tourne pour Jacques Becker, Edouard Molinaro, Nelly Kaplan ou Yannick Bellon, sa sœur aînée.

À plus de cinquante ans, elle commence une carrière d’auteur dramatique à succès avec « Les Dames du jeudi ». Suivent notamment « Le Cœur sur la main », « L’Éloignement » avec Pierre Arditi, « La Chambre d’amis »…, des pièces souvent interprétées par Suzanne Flon.

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