Une épopée foisonnante et une saga familiale profondément attachante<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
Une épopée foisonnante et une saga familiale profondément attachante
©

Atlanti-culture

Avec son premier roman, "Désorientale", sur fond d'histoire vécue, le cheminement d'une famille de l'Iran des dictatures à la France, Negar Djavadi réussit vraiment un coup de maître. Chapeau !

Marie Ruffin pour Culture-Tops

Marie Ruffin pour Culture-Tops

Marie Ruffin est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

Voir la bio »

Livre

Désorientale

de Négar Djavadi

Ed. Liana Levi

350 pages

L'auteur

Négar Djavadi est née en Iran en 1969 dans une famille d'intellectuels opposants aux régimes du Shah et de l'ayatollah Khomeiny. Elle fuit son pays à l'âge de onze ans avec sa mère et sa sœur pour s'installer à Paris.

Diplômée d'une école de cinéma bruxelloise, elle est aujourd'hui scénariste. 

"Désorientale" est son premier roman.

Thème

Kimiâ Sadr vit l'exil comme une longue mise à distance de sa culture, de sa famille, de son pays natal, l'Iran qu'elle a quitté pour la France, à l'âge de dix ans, avec sa mère et ses sœurs, pour retrouver leur père. Alors qu'elle attend, seule, à Cochin, une insémination artificielle, tous ses souvenirs remontent et la rattrapent.

Points forts

La forme choisie du monologue rend l'histoire de Kimiâ  encore plus personnelle et vibrante. Elle nous raconte l'histoire de sa famille sur trois générations; on vit près d'eux, on vit avec eux chaque moment, chaque événement au cœur de l'Iran du XXème siècle.

Culture et histoire politique s'entrecroisent. On trouve chaleur, passion, solidarité fusionnelle et exubérante,  vengeance, trahison, entre gravité, passion et humour.

Toute la kyrielle de personnages est formidable : l'arrière grand-père qui règne sur son harem, Nour, la grand-mère paternelle  autour de laquelle gravitent ses six enfants - Darius, et ses frères, chaque oncle appelé par son numéro dans la fratrie, l'oncle numéro 2 étant le plus attachant -, Emma, la grand-mère maternelle arménienne qui voit une fatalité déterminante dans la naissance de Kimiâ, puis chaque sœur de Kimiâ ; tous bouillonnent de vie, ayant des caractères plus ou moins forts ou fantasques.

Le couple emblématique de Darius et Sara est formidable d'amour, de courage, de résistance, dans le contexte d'opposition au régime en place, d'abord sous la domination du Shah et de l'impérialisme américain puis sous l'emprise et la tyrannie de Khomeiny. Luttes de pouvoir, lutte pour les libertés perdues.

Ca fuse dans tous les sens avec l'exubérance orientale et le raffinement persan,  avec le danger qui menace à chaque coin de rue où la Savak, la police secrète d'Etat, est en embuscade.

Et l'auteure conte avec un talent éblouissant les mille facettes et les failles de la famille, l'appartenance, le machisme, la maternité, l'exil, l'immigration et les difficultés d'intégration; avec, en particulier, la recherche d'identité et de reconstruction de Kimiâ dans le long chemin qu'elle parcourt pour se "désorientaliser", vivre et assumer ses différences.

Points faibles

Beaucoup d'allers et retours entre passé et présent: c'est touffu et désordonné diront certains, mais ça fait partie du charme et de l'originalité de cette histoire.

En deux mots

C'est un livre passionnant, prenant, attachant au vrai sens du mot, une épopée foisonnante et une grande saga familiale sur fond d'histoire vécue et documentée, de l'Iran des années 50/70 à la France d'aujourd'hui.

Très belle découverte pour ce premier roman qu'on ferme à regret. Allez-y, plongez...

Une phrase

Ou plutôt deux extraits :

- "Raconter, conter, fabuler, mentir dans une société où tout est embûche et corruption, c'est rester vivant. C'est déjouer la peur, prendre la consolation où elle se trouve, dans la rencontre , la reconnaissance, dans le frottement de son existence contre celle de l'autre. C'est aussi l'amadouer, la désarmer, l'empêcher de nuire. Tandis que le silence, eh bien, c'est fermer les yeux, se coucher dans sa tombe et baisser le couvercle."

- "Les êtres meurent et le temps fait son travail. Mais demeure ce regret, qui aboie parfois dans le ventre, d'avoir laissé des occasions en suspens comme des fils qui pendent d'un vêtement usé et sur lesquels pourtant il ne faut surtout pas tirer."

Recommandation

ExcellentExcellent

POUR DECOUVRIR CULTURE-TOPS, CLIQUEZ ICI : des dizaines et des dizaines de critiques sur chaque secteur de l'actualité culturelle

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !