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Festival d'Angoulême : 
la BD est-elle un truc de vieux ?
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De 7 à 77 ans

Festival de BD d'Angoulême de ce jeudi à dimanche. Les albums classiques restent chers et difficilement accessibles aux plus jeunes qui leurs préfèrent les mangas.

Jean-Paul Jennequin

Jean-Paul Jennequin

Auteur, dessinateur, critique, éditeur, traducteur ... Jean-Paul Jennequin a porté successivement toutes les casquettes de l'univers de la bande dessinée en France.

Il a notamment dirigé la collection Comics Culture au sein de laquelle il a publié quelques grands noms comme Frank Miller ou Stan Lee.

 

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Atlantico : Alors que démarre le festival d'Angoulême, force est de constater que le manga remporte un succès important auprès de la jeunesse français. La bande dessinée semble ne plus séduire cette génération. Partagez-vous ce constat ?

Jean-Paul Jennequin : Le public de la bande dessinée a toujours vieilli. Il y a même eu une grosse inquiétude dans les années 1980 parce que le lectorat des albums ne voyait aucune relève. C’est avec l’arrivée des mangas, dans les années 1990, qu'est apparue toute une nouvelle génération jusque là négligée par l’édition de la BD franco-belge.

Mais même si les lecteurs de BD français vieillissent, ils continuent d’acheter des albums. Ils n’arrêtent pas de lire. Actuellement, toutes les générations, depuis la première, qui a vu naître la BD, continuent d’acheter régulièrement. Il faut y ajouter tous les adolescents et enfants qui arrivent dans cet univers au fur et à mesure. Pour eux, la découverte se fait au milieu de tout un tas d’autres distractions : livres, jeux-vidéos, films. La bande dessinée, sans être majoritaire parmi leurs intérêts, en fait partie.

Les lecteurs viennent vers des styles de bande dessinée non pas à cause de leur âge mais de leur histoire personnelle. Le sociologue Bernard Lahire explique, dans La culture des individus, que la culture n’est pas qu’une question d’origines sociales, comme l’explique Bourdieu, mais aussi de ce que vivent les individus. La pratique d’un sport peut être liée à ce que l’on a fait à l’école ou à une rencontre faite par hasard. C’est la même chose pour la bande dessinée. On ne peut plus dire comme dans les années 1960 qu’un lectorat populaire se tourne vers une bd populaire.

La bande dessinée se rapproche en cela de la littérature. Ce sont des rencontres ou des transmissions familiales. Dans telle famille, on va se transmettre la BD franco-belge traditionnelle et dans telle autre, on va la découvrir via un dessin animé ou un film. La diffusion des Tintin à la télévision dans les années 1990 a par exemple donné un nouveau souffle à la série alors que la mode était à Dragon Ball Z.

Mangas et bandes dessinées traditionnelles s’inspirent-ils mutuellement ?

En France, nous avons une position privilégiée : nous avons accès à toutes les bande-dessinées, quelles que soient les origines géographiques et linguistiques. Ce n’est pas le cas partout. Les Japonais, par exemple, n’ont pas accès aux bandes dessinées occidentales. Nos BD inspirent donc assez peu les Nippons alors qu’à l’inverse, leur travail est très connu des auteurs Américains et Européens.

Les générations de jeunes auteurs revendiquent ainsi régulièrement des inspirations japonaises. Des mix se font entre les styles asiatiques, américains et européens en fonction des histoires des différents dessinateurs.

Les comics ont-ils toujours une place sur le marché européen ?

Les comics sont là depuis très longtemps. Superman est arrivé en 1938 aux Etats Unis et en 1939 en France. Toute une génération est très familière des Marvel et des DC. Aujourd’hui, l’intérêt se fait en général au travers de déclinaisons de ces bandes dessinées : les films et les jeux. La version papier reste un marché de niche.

Par contre, les albums de comics se trouvent de plus en plus dans les bibliothèques. Ce n’est plus la lecture de cours de récréation que c’était autrefois.

Connait-on déjà quelques tendances sur les lectures de la prochaine génération ?

On peut commencer, à priori, à lire des bandes dessinées à n’importe quel âge. Certains apprennent à lire avec des albums tandis que d’autres découvrent cet univers à l’âge adulte. Pour l’instant, aucune rupture majeure ne semble se dessiner. En tout cas, pas comme ce que l’on a vu avec l’apparition du manga dans le paysage éditorial français.

Il y a par contre des phénomènes nouveaux avec l’apparition de l’outil numérique. Internet ouvre de nouvelles grilles de lectures et d’écriture. Les éditeurs ne sont pas très en avance dans ce domaine mais quelques auteurs s’initient à une pratique nouvelle. Au travers de blogs, des gens comme Pénélope Bagieu par exemple, offrent un travail interactif sur lequel le lecteur peu directement réagir. La publication de ces commentaires en temps réel n’a plus rien à voir avec le courrier des lecteurs de Spirou Magazine.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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