Don Giovanni à l'Opéra Bastille : mécanique et sans chair<!-- --> | Atlantico.fr
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La dernière représentation de Don Giovanni de Mozart se déroulera le 14 février à l'Opéra Bastille.
La dernière représentation de Don Giovanni de Mozart se déroulera le 14 février à l'Opéra Bastille.
©Creative Commons / besopha

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Avec Michael Haneke, ce sont la mise en scène et le décor qui prennent le pas sur la musique. Résultat, ce sont Mozart et les spectateurs qui trinquent.

OPERA 

DON GIOVANNI de Wolfang Amadeus Mozart
Livret de Lorenzo da Ponte
Direction musicale : Alain Altinoglu
Selon une mise en scène de Michael Haneke

THEME

Le Don Giovanni de Mozart, créé à Prague le 29 octobre 1787, sur un livret de Lorenzo da Ponte, inspiré du mythe de "don Juan", est un opéra en deux actes et en langue italienne.

La production actuelle est une reprise de celle de 2006, avec mise en scène de Michael Haneke, qui transpose l’opéra de Mozart dans l’univers de la finance , "l’argent permettant aujourd’hui toutes les transgressions qu’autorisait autrefois la naissance". Don Giovanni devient un "golden boy" ; Donna Anna, "la fille du patron" ; Zerline, "une technicienne de surface" …

POINTS FORTS

  • Le livret : Wagner disait de cette oeuvre, c'est "l’opéra des opéras". Des 3 opéras écrits avec da Ponte, Don Giovanni est sans doute le plus noir, le plus désespéré. Mozart a créé là sa musique la plus ombrageuse, la plus extrême, la plus parfaite aussi.
  • La direction musicale : Alain Altinoglu, chef français parmi les plus prestigieux du moment, dirige la production et, musicalement, c’est une réussite convaincante.
  • La distribution est d’un très bon niveau: 

- Don Juan est interprété par l'uruguayen Erwin Schrott, qui restitue parfaitement le côté macho pervers de son rôle. Don Giovanni est, dans cette interprétation, plus méchant homme que grand seigneur.

- Tatiana Lisnic est une Donna Anna à toute épreuve, sonore et précise, capable d’exécuter toutes les acrobaties vocales.

- Zerline bénéficie du timbre chaud de la mezzo Serena Malfi.

Les talents de la mozartienne Marie Adeline Henry sont salués par des applaudissements mérités .

Le Leporello d’Adrian Sampetrean est peut-être un peu trop effacé, mais sans doute est-ce dû à la difficulté d’exister à coté d’Erwan Schrott , acteur qui en fait « des tonnes » .

Alexandre Duhamel, solide Masetto, semble un peu souffrir du tempo rapide imposé par le chef .

Seul, Stefan Pop ne semble pas à l’aise dans le rôle d’Ottavio. Il manque de puissance.

POINTS FAIBLES

  • La mise en scène est perturbante : elle ne semble pas être au service de la musique. Pour Michel Haneke, le jeu théâtral est aussi important que le chant, voire certaines fois plus. Il fait tout reposer sur le jeu des acteurs, qui sont déshumanisés, sans nuances et réduits à une seule caractéristique : Don Giovanni, la recherche frénétique du plaisir en oubliant le charme ; Donna Elvira, l’amoureuse éplorée, bafouée, qui en devient "pleurnicharde" ;  Leporello, la soumission à son maître mais sans clairvoyance ni humour...

  • Cette mise en scène est sérieusement handicapée par un dispositif à décor unique qui est non seulement glacial et laid  mais, aussi, compliqué ; les effets de lumière le faisant apparaître tantôt, quand il est très éclairé, comme un couloir de la Sécurité sociale, tantôt, quand il est faiblement éclairé, comme un coupe gorges des bas quartiers. Les costumes n’ajoutent rien : Donna Anna sanglée dans son imperméable, façon vinyle blanc, n’a rien d’une grande dame ; Donna Elvira, avec sa jupe qui lui bat les talons et ses lunettes, ferait fuir n’importe quel mâle, sans parler des "techniciens de surface"...  On comprendra, que dans ce contexte, pour les chanteurs, c’est une véritable gageure de parvenir à nous faire goûter les grands airs de ce merveilleux opéra

  • Qu’un metteur en scène nous livre son interprétation d’une oeuvre en la modernisant par le décor, les costumes… c'est une chose mais qu’il la modifie, cela c’est insupportable. Don Giovanni est tué par "les techniciens de surface" qui se vengent et le passent par la fenêtre pendant que Donna Anna et Don Ottavio manipulent comme une marionnette le cadavre du commandeur... On est bien loin de la solennité du souper entre le commandeur et Don Giovanni, à la fin duquel don Giovanni est foudroyé par une force divine. L’atterrissage est dur, la déception est grande...

EN DEUX MOTS

Comment avec un parti pris intéressant (la transposition du pouvoir de l’aristocratie à celui de l’argent) et une bonne réalisation musicale, faire d'une oeuvre magnifique, une production ennuyeuse, dépassionnée et laborieuse ?

RECOMMANDATION

BOF !    Bof
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INFORMATION

Opéra Bastille, place de la Bastille
Réservation: 08 92 89 90 90 
ATTENTION: dernière, le 14 février 

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