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Si vous imaginez qu’acheter en ligne pollue moins, vous vous trompez lourdement
©DAVID MCNEW / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Atlantico Green

Les services de livraison en ligne, et notamment la possibilité de retourner les produits qui se satisfont pas le client, sont générateurs de gaz à effet de serre.

Christian Gollier

Christian Gollier

Christian Gollier est économiste à la Toulouse School of Economics et co-auteur des 4e et 5e rapports du GIEC.

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Atlantico : Les politiques de retour de marchandises achetées en ligne permettent plus de liberté au consommateur car il peut se faire rembourser les achats qui ne le satisfont pas. C'est un gain réel en termes de satisfaction, mais qui a un coût environnemental. Pouvez-vous nous parler de ce coût environnemental ? D'où provient-il ?

Christian Gollier : Il vient du fait que quand vous utilisez un véhicule, vous émettez des particules fines, de l'oxyde d'azote, du CO2. On sait qu'en France, 48 000 personnes meurent par an à cause de l'inhalation de nano-particules. Il y a aussi le bruit : selon Bruitparif, il y a 1000 morts par an simplement à cause du bruit. Enfin, le CO2 crée des problèmes climatiques. Le problème principal c'est que le transport paye une taxe carbone réduite, il génère des choses néfastes pour la communauté qui ne sont pas prises en compte dans le prix (l'externalité négative n'est pas internalisée). L'impact environnemental d'un achat en ligne est beaucoup plus important que celui d'une personne qui fait ses courses à pied ou en vélo. Quand je vais en ville, je n'achète pas juste un pantalon ou un livre, je rassemble tous mes achats de la semaine, alors que si j'achète sur internet, je risque de faire venir plusieurs fois le camion. Personnellement, j'achète beaucoup de livres sur internet : ils n'arrivent pas à grouper les livraisons, je reçois les ouvrages séparément, c'est terriblement inefficace.

Cette réflexion induit un sentiment de culpabilité chez les consommateurs qui ont l'impression de participer au réchauffement climatique alors qu'ils ne cherchent qu'à maximiser leur satisfaction. Cette culpabilité est-elle justifiée ?

Elle est en quelque sorte justifiée dès lors que le prix du carbone n'est pas payé par le distributeur (qui paye une taxe carbone réduite, ndlr). Le prix des achats sur internet est trop faible pour aligner la rationalité économique du consommateur avec les impératifs écologiques. Il faut garder à l'esprit que ce que les distributeurs payent en plus sera automatiquement payé par le consommateur. « There is no free lunch » (il n'y a pas de déjeuner gratuit). Quelque part c'est bien qu'il y ait une forme de culpabilité pour les consommateurs : effectivement, la pollution générée par ces livraison n'est pas payée par les distributeurs, donc pas par les consommateurs. Ce que je critique, c'est que les transporteurs payent une taxe carbone réduite, ce n'est pas normal. Il n'y a donc pas d'internalisation des externalités négatives, des coûts environnementaux, générées par cette activité.

Le développement de la politique des retours, avec la garantie de pouvoir renvoyer un article gratuitement, participe-t-il selon vous d'une diminution de l'attention portée lors de l'acte d'achat ? Lorsqu'on achète en magasin, on fait plus attention et l'on a moins envie d'aller rendre un article.

A priori, cela ne pose pas de problème économique particulier. Le vendeur sur internet, anticipant le risque de retour, va intégrer ce coût supplémentaire dans le prix de vente. Ce surcoût permettra aux consommateurs de tenir compte de ce coût dans leur décision d’acheter sur internet ou de se rendre en ville pour acheter en connaissance de cause. Cela incitera aussi le marchand sur internet de réduire ce risque de retour. Le système d’incitation global est préservé pour cette question spécifique, contrairement à l’analyse des pollutions induites par le commerce en ligne.

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