Quand les tailles se retaillent et quand la mécanique entend philosopher : c’est l’actualité solsticiale des montres <!-- --> | Atlantico.fr
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Un exceptionnel « instrument mécanique philosophique » (Hervé Schlüchter)
Un exceptionnel « instrument mécanique philosophique » (Hervé Schlüchter)
©Grégory Pons

Atlantic-tac

Mais aussi l’urbaine chic de l’été, la vache des alpages suisses, le triple saut de minuit, les salons de la rentrée et le recyclage post-capitaliste…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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FRANCK MULLER : Eh bien, sautez maintenant…

Sur cette montre Master Jumper signée par la maison genevoise Franck Muller, tout se met à… sauter ! Dans leur guichet respectif, on voit défiler les heures (à chaque changement d’heure), les minutes (les unités comme les dizaines) et la date (unités et dizaines) : c’est le concept le plus abouti d’affichage numérique de ces dernières années, avec un grand spectacle garanti à minuit, quand tous les chiffres basculent en même temps. On ne peut imaginer quels trésors d’ingéniosité mécanique ont été nécessaires pour caler très précisément les « sauts » de cet affichage, surtout quand ils sont simultanés ! Logé dans un boîtier Curvex CX [emblématique de l’identité Franck Muller], ce mouvement extraordinaire – unique et sans équivalent dans l’univers de la complication horlogère – a été travaillé dans une logique d’équilibre harmonieux du cadran : on a veillé à la répartition esthétique des guichets de cet affichage numérique, disposés sur un superbe fond guilloché. Cette Master Jumper est pour l’instant une édition spéciale réservée à la maison parisienne Dubail : on pourra en découvrir les différentes interprétations (rouge, vert, bleu, argent, chocolat) dans différentes couleurs de boîtier dans les boutiques parisiennes de Dubail, place Vendôme ou sur les Champs-Élysées.

CLAUDE MEYLAN : « Oh, la vache ! »…

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Pas de Suisse sans alpages toujours verdoyants et surtout sans vaches éparses dans la prairie : c’est une affaire de principe et d’identité dans les vallées horlogères ! Et même dans les autres vallées suisses, puisque les vaches y sont parfois des « reines », voire même des « combattantes » – ces combats de reines font partie d’un folklore estival attendu avec impatience par des dizaines de milliers de spectateurs et pieusement retransmis à la télévision. Il était donc logique pour Claude Meylan, la marque indépendante de la vallée de Joux (quelque part entre Breguet et Audemars Piguet), de rendre hommage à ces « vaches sacrées » qui disent si bien le terroir, les alpages et les racines de la suissitude profonde. Amusante : la coccinelle qui joue dans les herbes du pré, pendant la vache rumine placidement sur fond de montagnes (si le Swiss Made semble à l’envers, c’est qu’il apparaît sur le fond saphir au verso de la montre !]. Intéressant : le mouvement automatique de cette montre Swiss Made qui nous invite à remonter vers la fraîcheur des alpages de l’été…

SINGER REIMAGINED : Retour vers l’âge d’or…

S’il y a une vraie mutation en cours dans l’écosystème horloger, c’est bien le retournement de tendance dans les tailles : après des années 2000 et 2010 cantonnées dans les forts volumes (en moyenne, dans les 42-44 mm pour les hommes), une décrue s’est amorcée dans les années 2020, avec un retour à des tailles situées autour des 40 mm, les jeunes marques indépendantes de nouvelle génération se situant même plutôt dans les 38 mm. C’est dans la maîtrise de cet ajustement qu’on reconnaît les maisons solides dans leur identité, quand elles parviennent à ne pas perdre leur âme quand elles perdent quelques millimètres de diamètre. Excellent exemple de cette performance esthétique : la nouvelle collection 1969 [date ô combien symbolique d’un retour à l’âge d’or] de Singer Reimagined, qui a su maintenir la séduction de son chronographe automatique à lecture centrale en passant de 43 mm à 40 mm. La montre est d’autant mieux réussie qu’elle est passée d’une lecture périphérique de l’heure et des minutes (originalité des éditions précédentes) à une lecture tout aussi digitale par disques dans un guichet à six heures. La 1969 conserve le principe des deux poussoirs en « cornes de taureau » de part et d’autre du boîtier, la couronne de remontage et de mise à l’heure étant déportée à quatre heures. Les trois aiguilles centrales sont celles du décompte des temps courts : ce chronographe enregistre les secondes (fonctions chronographique et tachymétrique), ainsi que les minutes et les heures [c’est même un des seuls au monde à pouvoir enregistrer jusqu’à soixante heures d’un temps chronographié]. Également très réussi : le bracelet métallique d’une rare élégance, parfaitement assorti aux lignes fluides, aux courbes savantes et aux volumes galbés de ce chronographe…

BRISTON : Urbaine chic pour l’été…

C’est vrai que cette chronique Atlantic-Tac aime bien Briston, une des plus sympathiques jeunes marques indépendantes françaises, toujours sur la brèche pour imaginer de nouvelles approches du temps qu’on peut savourer à son poignet ! La nouvelle série des Streamliner Urban ne se prive pas pour compiler les codes du sport chic et urbain contemporain, ceci dans le boîtier « coussin » [un peu tonneau, un peu carré cambré] de 42 mm cher à Briston, un cadran texturé aux couleurs très tendance (bleu glacier, vert olive, gris taupe), des poussoirs virils, un bracelet métallique tout-terrain et une élégance indéniable. Pour moins de 500 euros (moins de 400 euros avec un bracelet en caoutchouc tout doux), c’est forcément la montre de l’été si vous ne souhaitez pas vous faire couper le bras quand vous paraderez, manches retroussées, avec une prestigieuse icône au poignet [n’oubliez pas que les malfaisants ont désormais une imparable culture horlogère : rien ne leur échappe]. Originalité de cette Streamliner Urban : une « lunette » en acétate « écaille de tortue », autre marqueur stylistique de la marque. Ce qui n’empêche pas la montre d’être étanche à cent mètres, ce qui bien suffisant pour les rivages de l’été [cent mètres de profondeur, pas cent mètres de la plage !]…

HERVÉ SCHLÜCHTER : Rien que L’Essentiel…

Nous vous annoncions la semaine dernière l’apparition d’une nouvelle star sur la scène de l’horlogerie indépendante : Hervé Schlüchter [prononcez « Chlurterre »] a profité du solstice d’été pour nous dévoiler sa montre régulateur baptisée L’Essentiel, qui s’impose comme un manifeste contemporaine de la plus traditionnelle des horlogeries mécaniques. L’Essentiel est un pont lancé entre l‘héritage des grands maîtres horlogers de la fin du XVIIIe siècle (Breguet, Leroy, Berthoud, Janvier et les autres) et leurs continuateurs du XXIe siècle (Philippe Dufour, Denis Flageollet, Kari Voutilainen et les autres). Ancien « élève » de Philippe Dufour, qui reste son mentor horloger, sinon son père spirituel, Hervé Schlüchter a mis tout ce qu’il avait dans les tripes dans la réalisation son « instrument mécanique philosophique » : son régulateur a été conçu comme une montre régulateur « simple » qui ne le serait pas vraiment ! « Régulateur » pour sa lecture séparée des différentes unités de temps : une minute centrale, une petite seconde à six heures et une heure affichée dans un guichet à midi, grâce à un disque tournant calé sur vingt-quatre heures. Chaque détail a été travaillé à peu près exclusivement à la main, sur des outils à l’ancienne [tout au plus quelques tours énergisés, mais surtout pas de robots d’usinage] et décoré à la main avec un soin infini dont seule une toute petite poignée d’artisans horlogers sont encore capables. Ici et là, sur le cadran ou sur le mouvement visible au dos de la montre, quelques citations latines – notamment Creare Durare (« Créer pour durer ») ou Hodie et nunc (« Aujourd’hui et maintenant »). C’est probablement pour toutes ces raisons que les collectionneurs se sont précipités sans attendre sur L’Essentiel, pièce de haute culture horlogère dont la première série de 25 montres est déjà épuisée [en dépit d’un prix non négligeable : comptez un peu plus de 80 000 euros hors taxes], les séries suivantes étant elles aussi déjà précommandés. Hervé Schlüchter, lui, continue à rêver de nouvelles interprétations du temps et de complications jamais vues sur un cadran de montres : retenez bien son nom, ce quadra romantique ira loin…

Lien Atlantic-Tac : https://atlantico.fr/article/rdv/quand-la-centenaire-epouse-un-sexagenaire-et-quand-le-coeur-tourne-comme-un-moteur-c-est-l-actualite-pre-solsticiale-des-montres-rolex-louis-pion-saint-honore-de-bethune-bell-and-ross-gregory-pons

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

•••• SALONS DE RENTRÉE : l’été commence à peine, mais on songe déjà à la rentrée horlogère de septembre. Le point culminant en sera le rendez des Geneva Watch Days, qui mobiliseront à Genève une petite quarantaine de marques officielles, emmenées par Bvlgari ou Breitling (autres marques attendues : Angelus, Armin Strom, Arnold & Son, Artime, Bausele, Bianchet, Byrne, Konstantin Chaykin, Claude Meylan, Corum, Czapek & Cie, De Bethune, Doxa, Frédérique Constant Group, Girard-Perregaux, Greubel Moser & Cie., Oris, Perrelet, Phillips en association avec Bacs et Russo, Raketa, Reservoir, Ressence, Singer, Tiffany & Co, Trilobe, Ulysse Nardin et Urwerk). On estime qu’une quarantaine d’autres marques – non officielles, mais tolérées, ne serait-ce que parce qu’elles sont basées à… Genève ! – devraient organiser quelque chose pendant ce rendez-vous, qui se tiendra de façon décentralisée dans le centre de Genève. Parmi les rendez-vous suivants, la Dubai Watch Week (une quarantaine de marques y seront présentes), la grande vente aux enchères Only Watch (des pièces uniques exceptionnelles) ou le Grand Prix d’horlogerie de Genève, ainsi que les ventes aux enchères du début novembre… •••• LIP : le capitalisme parvient génialement à tout recycler, même et peut-être surtout ce qui le nie : témoin, cette montre que la nouvelle équipe française qui vient de racheter Lip lance en mémoire du plus fameux conflit horloger de l’histoire horlogère française. Le graphisme Lip est celui des affiches gauchistes de l’époque, le slogan restant celui de cette rébellion horlogère contre des actionnaires (suisses !) indélicats qui entendaient liquider Lip, fleuron de l’horlogerie française au début des années 1970. « C’est possible, on fabrique, on vend, on se paie » : le conflit avait enflammé la France, les ouvriers de Lip ayant occupé les ateliers et entendant continuer à fabriquer les montres en les vendant directement pour toucher leurs salaires. La montre « Lip c’est possible » est un clin d’œil à cette époque troublée, qui avait d’ailleurs plus sûrement tué toute l’horlogerie française que la « crise du quartz ». Heureusement, quarante ans plus tard, cette horlogerie française est en pleine renaissance : elle peut donc s’offrir le luxe de se moquer des propres tourments de son histoire…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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