Quand la centenaire épouse un sexagénaire et quand le cœur tourne comme un moteur : c’est l’actualité pré-solsticiale des montres<!-- --> | Atlantico.fr
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Les profondeurs célestes d’un cadran qui invite au voyage (Bell & Ross).
Les profondeurs célestes d’un cadran qui invite au voyage (Bell & Ross).
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Atlantic-Tac

Mais aussi l’indice tendanciel d’un nouveau dandysme horloger, les étoiles qui ont du vague à l’âme, les godrons de la Parisienne, le bleu du ciel comme compagnon de voyage et l’horloger qui fait tout à la main…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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ROLEX : Révérée comme une icône…

L’univers automobile a constitué un des principaux aiguillons de la créativité horlogère au XXe siècle : c’est notamment aux pilotes automobiles qu’ont été proposés les plus célèbres chronographes de l’âge d’or des montres mécaniques – on peut penser ici à la Daytona de Rolex, à la Speedmaster d’Omega ou à la Carrera de (TAG) Heuer, mais on pourrait en citer bien d’autres. Cette Daytona, ou plus exactement la Rolex Oyster Perpetual Cosmograph Daytona, est même devenue l’icône absolue de la collection horlogère : la montre est désormais à peu près introuvable en boutique (sinon après une longue attente, qui peut se chiffrer en années), alors son prix réel sur le marché secondaire est, depuis une trentaine d’années, pour une montre neuve, systématiquement supérieur au prix boutique – deux fois, trois fois ou même quatre fois plus cher ! C’est la rançon de la gloire : Rolex, qui ne tient pas non plus à galvauder sa « pépite » commerciale, calme cet emballement en maintenant sagement sa capacité de production et en n’abusant pas des nouvelles propositions. Tout de même, pour célébrer le centenaire des Vingt-Quatre Heures du Mans (courues pour la première fois en 1923), Rolex a usé de son privilège de chronométreur officiel de l’épreuve pour dégainer une nouvelle série de Daytona – un chronographe qui fête lui-même cette année ses soixante ans. Soit un double défi au temps, exercice dans lequel Rolex excelle. Il faut savourer les subtiles améliorations de détail de cette nouvelle génération de Daytona pour comprendre l’idée que Rolex se fait de la qualité d’une montre. On travaille ici en mode plus-que-parfait : le cadran présente un nouvel équilibre qui le rend un tantinet plus harmonieux, avec un meilleur contraste des compteurs, tandis que le boîtier a été restylé – toujours très subtilement : on travaille ici au scalpel, pas à la hache – en même temps que les cornes et la lunette. Le mouvement de ce chronographe a été amélioré (nouvel échappement de précision) et redécoré, si bien que la version platine se permet un fond transparent, rarissime chez Rolex, à travers lequel on admire le nouveau rotor de ce calibre 4131, qui propose 72 heures de réserve de marche. Comme toujours chez Rolex, c’est à cette version en platine (ci-dessous) de 40 mm qu’on réserve le cadran bleu glacier, assorti à une lunette en céramique marron. Un tel concentré d’excellence vous coûtera, chez Rolex, dans les 77 000 euros… si, par le plus grand des hasards, vous arriviez à trouver la montre en boutique – sinon, ce sera le double sur le marché gris !

LOUIS PION : Tentante comme un fruit d’été…

Attention, tendance horlogère ! Si les designers de Louis Pion (une marque française particulièrement sympathique et délurée) ont pensé à un boîtier cambré, pas tout-à-fait tonneau, pas franchement coussin et pas vraiment rectangulaire, c’est qu’il y a dans l’air du temps un frémissement en faveur de cette esthétique au parfum rétro qui nous change du tout-rond et du tout-carré. Si cette nouvelle montre a été baptisée « Arsène », c’est qu’il y a un nouveau dandysme de la forme qui semble à l’œuvre autour des poignets. C’est rituel dans les périodes de crise : les temps sont durs, donc les lignes se font plus douces, les angles s’arrondissent et les galbes s’assouplissent. Les heures s’écoulent avec une grande sobriété sur ce cadran dépouillé et matifié par son soleillage discret. Le seul luxe de cette montre, c’est la rigueur de la date qu’on peut lire dans son guichet à six heures. Quelle que soit votre option pour le choix du bracelet (cuir marron ou noir, sinon métal acier ou doré) ou la couleur du cadran (blanc, bleu, argent), le prix de cette Arsène au cœur électronique n’oscillera qu’entre 110 euros et 140 euros – ce qui est très tentant, mais surtout très sympathique de la part de Louis Pion, maison française qui a toujours tenu à maintenir une passerelle entre la mode et l’horlogerie…

SAINT HONORÉ : Élégante comme une Parisienne…

Il y a quelque chose d’un peu étrange dans cette montre Palais-Royal proposée par Saint Honoré, maison autrefois familiale et tricolore, dont les nouveaux actionnaires se cherchent maintenant un destin international en misant sur les racines françaises et la légende parisienne attachée au nom de la marque. L’esprit Palais-Royal se repère dans la géométrie très carrée de cette montre féminine disponible en deux tailles (26 mm et 18 mm), avec différents bracelets en maille milanaise et en différentes couleurs de boîtier (acier, traitement or rose) ou de cadran (nacre blanche, nacre verte). Le tout avec seize diamants qui encadrent le boîtier godronné et, selon les versions, douze autres diamants en guide d’index sur le cadran. Chez Saint Honoré, on aime le changement, comme on aime rester à des niveaux de prix accessibles pour une montre électronique Made in France (entre 700 euros et 1 000 euros selon les versions). Cette Palais-Royal sait être à la fois un bijou sage et une montre précieuse, capable de se donner des allures contemporaines tout en affichant des codes intemporels. Une vraie Parisienne, donc – c’est marqué sur le cadran pour ceux qui auraient un doute : Saint Honoré Paris !

DE BETHUNE : Fascinante comme les vagues…

Quand vous vous penchez sur le bleu profond de ce cadran pas comme les autres, vous admirez en fait une première mondiale : la manufacture De Bethune vient d’inventer le « guillochage aléatoire », une nouvelle discipline dans cet art de graver des lignes et des courbes géométriques entrelacées à la surface d’un cadran. Les « vagues » dont on admire ici l’inlassable mouvement sont nées d’un bleuissement très particulier du titane dont De Bethune maitrise le secret exclusif, qui se joue au degré près dans la chaleur d’un four. Ces fascinantes ondulations ne se ressembleront jamais exactement d’une montre à l’autre, d’autant que la constellation d’étoiles d’or qui s’inscrit dans ces orbes peut elle aussi évoluer d’une montre à l’autre : que diriez-vous du ciel étoilé qui était celui du jour de votre naissance ou de votre mariage ? Cette DB28 XS Starry Seas est d’un format un peu plus modeste (39 mm, d’où le XS de son nom) que les montres De Bethune habituelles, ce qui ne la rend que plus légère et plus agréable à porter : ce confort est renforcé par les attaches flexibles du bracelet, qui permettent d’adapter la montre à toutes les tailles de poignet. Il faudra compter dans les 85 000 euros pour s’en offrir une montre aussi essentielle dans son ostensible simplicité existentielle. C’est la montre de l’extrême maturité, celle de l’amateur qui saura en apprécier la substance comme celle de l’horloger qui a su y exprimer la quintessence des beautés du monde – le bleu de la vie, les vagues de la mer, l’or des étoiles, la magie du temps…

BELL & ROSS : Bleue comme la planète…

Vue de l’espace, la planète que nous avons baptisée Terre est bleue. Vus de la Terre, le ciel et l’espace sont bleus. Vue de n’importe quel continent, la mer est bleue. Autant dire que le bleu – couleur spirituelle par nature – reste une couleur symbolique liée aux grands espaces et aux voyages, d’où l’impact symbolique plus que subliminal du cadran bleu de cette BR 05 GMT Sky Blue que la maison Bell & Ross a voulu dédier à ceux qui arpentent les cieux et les continents. En plus de l’heure classique indiquée par les trois aiguilles traditionnelles (heures, minutes, secondes), une quatrième aiguille à pointe blanche fait le tour du cadran en vingt-quatre heures pour indiquer un second fuseau horaire (repère sur le rehaut), calé sur n’importe quelle autre heure officielle de cette planète. Cette aiguille « GMT » se règle par la couronne. De jour comme de nuit, la précision du mouvement automatique de cette montre Swiss Made permet au voyageur de se repérer dans le temps et de « lire » aisément cette seconde heure de référence. Pour varier les plaisirs, cette BR 05 GMT Sky Blue vous propose deux bracelets : les maillons métalliques du premier le rendent très agréable à porter, mais le caoutchouc bleu en rajoutera avec élégance dans la symbolique de cette montre « céleste » – étanche à cent mètres au cas où vous souhaiteriez la confronter au « grand bleu ». Selon le choix du bracelet, l’addition se situera entre 5 400 euros et 5 700 euros, ce qui demeure ultra-raisonnable pour une montre de cette qualité, qui n’a rien à envier aux plus célèbres des icônes suisses [les BR ne sont-elles pas, d’ailleurs, des vraies icônes du XXIe siècle horloger ?]

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

•••• HERVÉ SCHLÜCHTER : si vous ne connaissez pas son nom, c’est normal [ce quadra horloger est souvent resté dans l’ombre, derrière les marques pour lesquelles il inventait des mécaniques très avancées], mais apprenez au moins à le prononcer correctement en disant « Chlurrterre » – l’accent suisse n’est indispensable ! Vous ne connaissez sans doute pas non plus ses montres : c’est également normal, il ne devrait présenter officiellement la première pièce entièrement faite de ses mains que dans quelques jours. En revanche, retenez bien son nom, en attendant de bien regarder bien sa montre, que nous vous présenterons la semaine prochaine, puisque ce sera sans doute la montre-événement du prochain solstice d’été : Hervé Schlüchter est un horloger suisse, génération quadra, que les initiés – alertés dans le monde entier par un mystérieux bouche-à-oreilles – considèrent comme l’héritier spirituel du légendaire Philippe Dufour, tant pour son goût du dépouillement stylistique que pour l’extraordinaire bienfacture de ses mouvements (finitions, décoration, précision, etc.). On pourrait même le considérer comme un intégriste de la tradition horlogère s’il n’avait pas en lui une forme de bienveillance et de générosité immédiatement sensibles. Il s’est établi à Bienne, capitale horlogère du canton de Berne, dans un atelier « à l’ancienne » où il fait tout à la main, avec la seule assistance de ses tours à l’ancienne et d’outils élémentaires comme en utilisaient les grands anciens du temps de Breguet, de Berthoud ou de Janvier. Vivement la semaine prochaine qu’on vous présente tout ça en détail… •••• MONTRE M (Silmach) : la semaine dernière, AtlanticTac vous dévoilait l’imminence d’une nouvelle révolution du silicium » – comparable à la disruption du quartz dans les années 1970. On pourra découvrir ce week-end, à Besançon, au cours des neuvièmes Vingt-Quatre Heures du Temps, la nouvelle Montre M qui est le premier coup de canon de cette révolution siliciumisiaque. Dévoilons-en les secrets pour les lecteurs d’Atlantic-Tac. Cette montre (ci-dessous) a été créée par l’équipe bisontine de Silmach (Silicium Machinery) pour démontrer l’utilité horlogère des micromoteurs à « cœur silicium » qu’on peut loger dans une montre pour en mouvoir les aiguilles avec une facilité déconcertant. Avec, aussi et certains diront surtout, un gain d’espace et d’énergie considérables. Sur cette première Montre M (qui ne sera réalisée qu’en 1 088 exemplaires), on découvre une heure déportée vers six heures et un « tour » des minutes qui occupe le fond du cadran. Un micromoteur anime chaque aiguille, avec des raffinements inconnus des mouvements mécaniques traditionnels : à l’heure pile (soixantième minute de l’heure qui se termine, l’aiguille des minutes recule tout autour du cadran pour reprendre sa position au premier repère des minutes, tandis que l’aiguille de l’heure se synchronise sur sa nouvelle position. En jouant avec les poussoirs, on peut lancer différentes fonctions cachées, dont un amusant accélérateur de temps qui passe : le temps va soudain plus vite, les heures deviennent des minutes et les minutes s’écoulent comme des secondes [on découvrira de plus amples détails techniques dans une chronique sur « La belle histoire du silicium qui a du cœur », Business Montres du 14 juin]. Cette avancée révolutionnaire est française et elle a réclamé une vingtaine d’années de R&D : elle a été conçue et réalisée en France et elle pourrait bien ébranler les colonnes du temple horloger suisse. Ces micromoteurs travaillent à quelques microns près : chaque aiguille obéit avec 20 millisecondes de délai de réponse aux sollicitations d’un micromoteur en silicium dont le pas de déplacement n’est que de trente microns ! Avec un tel concept, on peut imaginer de nombreuses complications inédites, capable de rendre aux montres classiques une capacité d’attraction perdue dans le tsunami des montres connectées…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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