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IBM : la centenaire innove encore
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La minute "Tech"

International Business Machines a fêté son centième anniversaire jeudi dernier. C’est la première firme, dans le monde de l’informatique, qui atteint cet âge canonique. Une semaine plus tôt, IBM avait sidéré les milieux scientifiques en réalisant le premier transistor au graphène, matériau d’avenir.

Nathalie Joannes

Nathalie Joannes

Nathalie Joannès, 45 ans, formatrice en Informatique Pédagogique à l’Education Nationale : création de sites et blogs sous différentes plates formes ;  recherche de ressources libres autour de l’éducation ;  formation auprès de public d’adultes sur des logiciels, sites ;  élaboration de projets pédagogiques. Passionnée par la veille, les réseaux sociaux, les usages du web.

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L’histoire de « Big Blue » (couleur des ordinateurs et du logo) est une saga animée par trois propulseurs : vision, pragmatisme, innovation. A toutes ses concurrentes qui peuplent le cimetière  où conduisent les erreurs industrielles, il a manqué la vision et le pragmatisme. C’est le cas de Digital Equipment Corporation dont le fondateur n’a pas cru à l’ordinateur personnel et qui s’est enfermé dans les systèmes (y compris les réseaux) propriétaires, c'est-à-dire fermés. 

De la caisse enregistreuse à l’intelligence artificielle

Quand la firme « Calculatrices Tabulatrices Enregistreuses » est créée le 16 juin 1911, sa vocation est de fabriquer des machines mécaniques à peser, à pointer et à produire des factures. Trois ans plus tard, Thomas Watson fonde une dynastie de managers visionnaires. Il fallait avoir une vision acérée de l’avenir pour se mettre à construire de grosses machines à calculer en plein milieu de la Grande Dépression des années trente. « Il est fou, il n’y a pas de marché », disait-on de Tom. Mais en 1935, le président Roosevelt active la composante «emploi et retraites » de son New Deal et il a besoin d’engins capables de traiter des millions de dossiers. IBM est la seule à pouvoir répondre à la demande.

Difficile de citer toutes les mutations décisives imputables à Big Blue, dont le patrimoine intellectuel comprend une demi-douzaine de prix Nobel, des dizaines de médailles de mathématiques et de sciences et des centaines de brevets. Il suffit de rappeler quelques temps forts. Le concept d’intelligence artificielle a été concrétisé par IBM dès 1956 avec un ordinateur programmé pour apprendre à jouer aux dames; bien avant, donc, que la machine Deep Blue se mesure aux champions du jeu d’échecs. La conquête spatiale n’aurait pas pu s’accomplir dans les années soixante sans les monstres logiques mis à la disposition de la NASA. Des dérivés de ces engins ont permis de mettre au point les premiers systèmes de réservation de billets d’avions. Le président Barack Obama a décerné la Médaille 2009 de l’Innovation aux concepteurs de Blue Gene, un superordinateur aux capacités de calcul qui dépassent l’entendement.

Erreurs et rebonds

IBM a commis des erreurs. Le fait, par exemple, de laisser à Bill Gates le soin d’imposer le système d’exploitation Windows à la presque totalité de l’univers PC. Le pragmatisme a cependant piloté la vision stratégique de la multinationale. Renoncer à la fabrication des ordinateurs familiaux pour se concentrer sur les gros calculateurs, c’était bien vu. Comme étaient  bien pensés les recentrages sur les services aux entreprises et sur les solutions et infrastructures d’hébergement et de stockage, anticipation de l’informatique dans les nuages, très à la mode en ce moment.

Le résultat de cette faculté d’adaptation, c’est une capitalisation boursière de 197 milliards de dollars. Moins qu’Apple (304 milliards) mais au même niveau que Microsoft, la « jeunette » âgée de 35 ans seulement (201 milliards). Mais il y a mieux….

Le graphène répond à la loi de Moore

La vieille dame d’Armonk (Etat de New York) a signé, peu avant son centième anniversaire, une véritable prouesse de science appliquée. La science, c’est la recherche fondamentale enclenchée en 1985 dans les nanotechnologies, un univers infiniment petit qui ne se révèle qu’aux microscopes électroniques. En 2004, deux savants, d’origine russe, reçoivent le prix Nobel de Physique pour avoir synthétisé un film incroyablement mince à base d’atomes de carbone. C’est le graphène, un matériau qui devrait se banaliser dans la vie quotidienne de vos arrière-petits enfants, en même temps que l’informatique quantique et le transport aérien individuel.

Sauf que Big Blue vient – sept ans  seulement après l’homologation de la pellicule nanométrique -  de construire le premier transistor au graphène. Cette substance est quasiment magique. D’abord c’est la matière la plus solide jamais élaborée par l’homme: une surface de graphène pas plus épaisse qu’une feuille de cellophane supporte sans se fissurer le poids d’une voiture américaine. Capable de transformer une réaction chimique en signaux électroniques, le graphène va révolutionner le monde des batteries et autres accumulateurs. Enfin et surtout, le voile de carbone est 100 à 1000 fois plus conducteur que le silicium; et en plus, il refroidit très vite.. Ce qui tombe à pic car l’ère du silicium s’achève selon la loi de Moore.

En 1965 puis en 1975, le co-fondateur d’Intel, Gordon Moore, postule que la capacité des microprocesseurs est appelée à doubler tous les deux ans. Ce qui s’est à peu près vérifié. Mais le silicium a des limites physiques. En 2007, Gordon Moore annonce que sa loi cessera de piloter la miniaturisation de l’informatique entre 2017 et 2022. Et voici qu’en 2011 une firme centenaire, rescapée des caisses enregistreuses et des cartes perforées, propose le substrat de substitution.

Il devient très délicat, à ce stade, d’extrapoler cette dimension de la saga d’IBM. On devine les ricanements cartésiens à l’idée que le graphène transistorisé permettra - simple exemple -  d’arborer des vêtements communicants et détecteurs d’explosifs. On se contentera donc de proposer une explication à la longévité d’IBM : la vieille dame d’Armonk a une passion : cultiver la matière grise dans ses neuf laboratoires de recherche et ses nombreux centres de développement.

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