Fiables ou pas ? La vérité sur les trackers de sommeil<!-- --> | Atlantico.fr
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De nombreuses personnes se tournent vers les trackers de sommeil, de petits appareils qui enregistrent et analysent plusieurs données sur la qualité supposée de notre repos
De nombreuses personnes se tournent vers les trackers de sommeil, de petits appareils qui enregistrent et analysent plusieurs données sur la qualité supposée de notre repos
©BSIP via AFP

Minute Tech

En quête d'une nuit reposante, de nombreuses personnes se tournent vers les trackers de sommeil, de petits appareils qui enregistrent et analysent plusieurs données sur la qualité supposée de notre repos. Efficace ou simple gadget ?

Jean-Paul Pinte

Jean-Paul Pinte

Jean-Paul Pinte est docteur en information scientifique et technique. Maître de conférences à l'Université Catholique de Lille et expert  en cybercriminalité, il intervient en tant qu'expert au Collège Européen de la Police (CEPOL) et dans de nombreux colloques en France et à l'International.

Titulaire d'un DEA en Veille et Intelligence Compétitive, il enseigne la veille stratégique dans plusieurs Masters depuis 2003 et est spécialiste de l'Intelligence économique.

Certifié par l'Edhec et l'Inhesj  en management des risques criminels et terroristes des entreprises en 2010, il a écrit de nombreux articles et ouvrages dans ces domaines.

Il est enfin l'auteur du blog Cybercriminalite.blog créé en 2005, Lieutenant colonel de la réserve citoyenne de la Gendarmerie Nationale et réserviste citoyen de l'Education Nationale.

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Atlantico : Les trackers de sommeil fonctionnent en surveillant et en analysant diverses mesures du sommeil. Ils peuvent être bénéfiques pour améliorer la qualité du sommeil et gérer des troubles spécifiques du sommeil. Quels sont les principaux éléments à connaître pour faire le bon choix entre les différents modèles de trackers de sommeil ? Les trackers de sommeil “classiques” sont-ils plus efficaces que les objets connectés comme une Apple Watch qui enregistrent les cycles de sommeil des utilisateurs ?

Jean-Paul Pinte : Un traqueur de sommeil est un objet connecté qui enregistre une multitude d’informations lorsqu’on dort pour les traiter à l’aide d’un logiciel.

On peut trouver d’une part le bracelet ou la montre connectée à porter au poignet, d’autre part le tracker autonome à mettre contre soi ou sous le matelas avant de se coucher. Quelques smartphones élaborés possèdent également la fonction de tracker d’activité et d'un analyseur de sommeil.

Le capteur de sommeil peut amasser un grand nombre de données. En premier lieu, la respiration et le rythme cardiaque, de même que les différents cycles du sommeil. Il prend aussi en compte les mouvements et l’agitation, tout comme une éventuelle apnée du sommeil. Certains modèles peuvent être programmés pour réveiller au moment le plus propice, en tenant compte des cycles.

Les données collectées durant la nuit sont traitées à l’aide d’une application d’analyse du sommeil accessible via une tablette ou un smartphone. Ce programme est en mesure de formuler un diagnostic afin d’informer sur la durée et la qualité du sommeil. Avec une simple notification, il a la capacité de fournir des pistes pour trouver des solutions visant à améliorer le repos.

L’analyseur de sommeil surveille le moment de l’endormissement en se basant sur le rythme cardiaque, qui ralentit lorsqu’on s’endort, la respiration et les mouvements. Durant la phase de sommeil, il continue à capter tous ces facteurs pour le renseigner sur le déroulement de la nuit du dormeur.

Tous les appareils ont des spécificités précises et ne fonctionnent pas exactement de la même manière. Il existe des modèles à activer le soir en se couchant, d’autres détectent l’endormissement à toute heure de la journée. Cela représente un avantage si on a l’habitude de piquer un roupillon à l’heure de la sieste nous signale le site https://www.sommeilapnee.fr/

Les algorithmes utilisés par les entreprises pour déterminer les scores des utilisateurs liés à leur sommeil sont souvent exclusifs et non scientifiquement vérifiés. Ces algorithmes sont-ils fiables et comment expliquer les différences entre les modèles ? 

Le site Lespecialiste.be dans un article d’août 2023 nous rappelle que  dans le cadre d’une nouvelle étude publiée dans la revue Scientific Reports, des chercheurs de l’université de Tilburg ont mis au point un algorithme plus fiable et plus performant, en collaboration avec des collègues du Centre néerlandais de médecine du sommeil Kempenhaeghe et avec Philips au sein du Centre d’innovation MedTech d’Eindhoven. Grâce au deep learning, cet algorithme est capable d’analyser plus efficacement que jamais auparavant les données relatives au sommeil (mesurées au moyen d’appareils connectés portés au poignet) de personnes souffrant de troubles du sommeil.

Cet article évoque aussi quelques problèmes et solutions que je reprends ici après.

Jusqu’à présent, les chercheurs et les médecins utilisaient des mesures des mouvements du corps pour obtenir des informations sur les cycles de sommeil et d’éveil des patients sur un plus long terme. Cependant, cette méthode appelée actigraphie présente un inconvénient majeur. « Les personnes en bonne santé bougent moins lorsqu’elles dorment. Les personnes qui souffrent d’insomnie restent parfois éveillées en étant allongées dans une position très immobile, position qui est enregistrée par actigraphie comme du sommeil, alors que ce n’est pas le cas », poursuit Sebastiaan Overeem.

Les chercheurs ont essayé de résoudre ce problème en élargissant les mesures aux variations du rythme cardiaque à l’aide de la photopléthysmographie, qui utilise la lumière pour mesurer les variations du volume de sang en circulation.

« La technologie, c’est une chose, mais nous avons aussi besoin des bons outils pour analyser de grandes quantités de données, qui peuvent ensuite être utilisées par les médecins pour affiner leurs diagnostics », ajoute Sebastiaan Overeem. « Dans des études antérieures, nous avons utilisé des algorithmes reposant sur le machine learning pour aider lors de l’analyse, mais cette approche nécessitait une très grande puissance de calcul et beaucoup de temps, sans compter le marquage manuel chronophage des caractéristiques dans les signaux de sommeil mesurés chez un patient.»

Dans le cadre d’une nouvelle étude publiée récemment dans la revue Scientific Reports, Sebastiaan Overeem et des collègues de la TU/e, du Centre néerlandais de médecine du sommeil Kempenhaeghe et de Philips ont abordé la question différemment. Merel van Gilst, coautrice et professeure assistante à la TU/e, explique : « Nous avons commencé par “alimenter” un réseau neuronal avec les données brutes relatives aux mouvements et au rythme cardiaque, ainsi que les données de références sur le sommeil de la PSG. Ensuite, nous avons laissé l’algorithme détecter automatiquement les caractéristiques intéressantes.»

Pourquoi développer un nouvel algorithme de surveillance du sommeil alors qu’il existe toute une ribambelle d’appareils destinés au grand public qui évaluent la qualité du sommeil en s’appuyant sur les variations du rythme cardiaque ? Prenez les Apple Watches et les montres de sport Garmin, pour n’en citer que deux. Merel van Gilst souligne que ces appareils présentent un inconvénient majeur pour le milieu clinique : « Les algorithmes dans les appareils grand public sont testés sur de petits groupes de personnes en bonne santé qui ne souffrent pas de troubles du sommeil. De plus, ces appareils évaluent souvent le sommeil sur de grandes fenêtres de temps pour économiser la batterie. De ce fait, on peut passer à côté de détails subtils dans les données. Par ailleurs, les performances et la précision pour les différentes phases de sommeil sont assez faibles.»

Cette approche a donné naissance à un algorithme performant qui avait besoin de beaucoup moins de puissance de calcul et de temps. « Il est maintenant possible d’implémenter cet algorithme dans des appareils et des services dans le cloud à usage clinique», conclut Merel van Gilst.

Pour développer des algorithmes fiables à des fins médicales, il faut compter des centaines de données de sommeil mesurées par PSG, associées aux données d’appareils portables. Ces données doivent provenir de personnes d’âges différents et présentant toutes sortes de troubles du sommeil. De surcroît, des experts du sommeil doivent marquer manuellement les enregistrements avant que les algorithmes de deep learning puissent enfin être développés. « Si vous sautez l’une de ces étapes, vous créerez un algorithme de moins bonne qualité», précise Sebastiaan Overeem. « Dans le cadre de la surveillance des troubles du sommeil, l’efficacité du matériel dépend des algorithmes avec lesquels les données sont analysées.»

Les nouveaux algorithmes développés par les chercheurs devraient pouvoir être utilisés dans des appareils portables de différents fabricants, à condition que les capteurs dans les appareils soient d’une qualité suffisante. 

La précision des trackers de sommeil a pourtant tendance à varier. Quelles sont les limites de ce type d’outils technologiques pour lutter plus efficacement contre les troubles du sommeil ?

Le psychophysiologiste Kerkhof est moins optimiste quant au monitoring de votre sommeil. Il pense que de simples bracelets à votre poignet ou une application à côté de votre oreiller n’ont techniquement rien à voir avec les mesures prises dans un centre du sommeil. "Ce ne sont que des capteurs de mouvement et vous ne pouvez absolument pas en déduire la structure de sommeil d’un individu." Le tracker de sommeil Beddit mentionné plus haut trouve un tout petit peu plus grâce à ses yeux. ‘’Vous pouvez dans une certaine mesure déterminer à partir du rythme cardiaque ou de la respiration si quelqu'un a vraiment dormi profondément et paisiblement ou non. Mais j'insiste : ce n'est qu'un dérivé de l'activité cérébrale. Ce n'est qu'en mesurant l'activité cérébrale d'une personne - avec un bandeau ou des électrodes spécialement conçus pour cela - que vous pouvez réellement poser un diagnostic sur les cycles et les troubles du sommeil.’’, confie Kerkhof.

Il avance également un contre-argument psychologique : fournir à quelqu'un un aperçu de son sommeil en particulier quelqu'un qui a (pas encore) des problèmes de sommeil peut entraîner de l'anxiété inutile.

"Tout le monde se réveille plusieurs fois la nuit, ce qui est tout à fait normal. Mais s'ils ne le savent pas d'eux-mêmes et qu'une application leur révèle brutalement, les gens peuvent être impressionnés et commencent à s'inquiéter d'où une première cause d'insomnie et le début d'un cercle vicieux. Sigrid Pilen acquiesce à cette explication  " Dans un certain nombre de cas, nous recevons des personnes qui viennent pour un test approfondi sur la base de leur propre mesure via un tracker ou une application, car elles sont inquiètes. Après quoi il leur est démontré que leur sommeil ne présente rien d'anormal.

Les trackers de sommeil auraient tendance à potentiellement augmenter l’anxiété liée au sommeil. Ces appareils sont-ils vraiment efficaces et ne risquent-ils pas de dérégler les cycles de sommeil des personnes qui ont besoin de récupérer des heures de sommeil ? Avoir cet appareil, qui indique à quel point vous dormez mal, peut-il aggraver les choses ?

 Les spécialistes du sommeil selon ce blog Bracelets connectés sommeil : mesurent-ils vraiment le sommeil ? (dreem.com) ont analysé les appareils de nuit portatifs, comme Fitbit et Jawbone, avec beaucoup de scepticisme. En effet, alors que ces appareils affirment gérer et améliorer notre sommeil, il n’y a pourtant aucune précision scientifique garantie. 

Les bracelets connectés sommeil actuels ne sont pas adaptés au fur et à mesure de vos nuits.

Voici pourquoi : Les capteurs sensoriels de ces appareils mesurent l’accélération, la durée, l’intensité, ainsi que la fréquence de votre rythme cardiaque et de vos mouvements. Confronter les frémissements et les rotations du corps pendant une nuit avec ce qui se passe dans nos corps ne nous donne pourtant pas beaucoup de profondeur.Les bracelets connectés sommeil du marché sont faits d’avancées technologiques et de capteurs sensoriels capables de gérer une grande partie des fonctions corporelles. Ils ne sont cependant pas adaptés à la mesure et à la détermination de vos cycles de sommeil.Pourquoi ? Les bracelets connectés sommeil utilisent la sérigraphie, qui mesure les mouvements à un très haut niveau. Traduire précisément ces mouvements en des tendances de sommeil est pourtant quelque chose de délicat. Cela est bien plus comparable à une devinette, soit quelque chose sur lequel vous ne voulez sûrement pas construire votre plan de santé.

Le matériel qui peut tracer le sommeil efficacement  principalement le lecteur Electroencéphalographe (EEG)  a longtemps été disponible dans des laboratoires de grande taille. À cause des problèmes dus au confort, à la facilité d’utilisation, et au coût, le tracking des mouvements est le moyen de base pour évaluer le sommeil, même si les résultats ne sont pas forcément convaincants.

Le choix du bon tracker de sommeil dépend-il des besoins et des préférences des différents types d’utilisateurs, entre les utilisateurs occasionnels jusqu’aux personnes souhaitant résoudre leurs troubles du sommeil avec ces outils technologiques ?

Selon le Dr Kelly Baron, psychologue clinicienne et directrice du programme de médecine comportementale du sommeil à l’Université de l’Utah, « Il y a encore tellement de choses à apprendre sur le rôle du sommeil et sur la façon dont les habitudes de sommeil et les perturbations du sommeil affectent la santé. Je pense que les appareils actuels peuvent être amusants pour les gens et fournir des informations intéressantes...... mais le sommeil ne peut pas être résumé à un ensemble de chiffres ou de scores... J’ai des patients qui viennent me voir en disant qu’ils sont inquiets parce que leur appareil leur dit qu’ils ne dorment pas assez profondément, mais je ne pourrais même pas vous dire combien de sommeil profond est optimal.

Et comme l’ont souligné le Dr Mathias Baumert et son équipe de l’Université d’Adélaïde, le mystère est exacerbé par le fait que les algorithmes utilisés par les entreprises pour déterminer ces scores sont souvent propriétaires et non scientifiquement vérifiés. 

De plus, « si vous ne dormez pas bien, avoir cet appareil qui vous indique à quel point vous dormez mal pourrait aggraver les choses ». En effet, comme nous l’avons signalé précédemment, des recherches ont montré que ces appareils peuvent stresser les gens ou augmenter leur concentration sur le sommeil, ce qui peut être délétère pour leur santé.

Enfin un lien avec le top des trackers de sommeil :

Meilleur tracker de sommeil 2023 : comparatif et guide d'achat (meilleurtest.fr)

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