L'Internet mobile va-t-il devenir Internet tout court ?<!-- --> | Atlantico.fr
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De plus en plus de personnes surfent sur Internet de leurs mobiles.
De plus en plus de personnes surfent sur Internet de leurs mobiles.
©Reuters

Nouvelle ère

L'an prochain, le nombre d'utilisateurs de mobiles devrait dépasser celui d'utilisateurs de PC. Selon un rapport de l'analyste Mary Meeker, les terminaux mobiles sous iOS ou Android représentent maintenant 45% du trafic.

Jean-François Pillou

Jean-François Pillou

Jean-François Pillou est le fondateur du site Comment ça marche. Il est aussi Directeur général de CCM Benchmark group.

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Atlantico : Internet est de plus en plus mobile. L'an prochain, le nombre d'utilisateurs de mobiles devrait dépasser celui d'utilisateurs de PC (voir ici). Selon un rapport de l'analyste Mary Meeker (voir ici), les terminaux mobiles sous iOS ou Android représentent maintenant 45% du trafic. Ce changement de format est-il seulement cosmétique où va-t-il transformer en profondeur le rapport des utilisateurs au web ?

Jean-François Pillou : Il ne s'agit pas tant d'un changement de format que d'un changement d'usage. Certes l'écran est plus petit, mais ce qui change c'est surtout le fait qu'on a accès à l'information de partout : en situation de mobilité (dans les transports, dans la rue, en vacances) et en simultanéité (pendant une réunion, devant la télé, etc.). Ajoutons à cela le fait que le mobile ajoute la géolocalisation et cela en fait un terminal radicalement différent.

On le voit bien : 

- les horaires de consultation ne sont pas les mêmes : l'ordinateur de bureau est plutôt utilisé pendant les heures travaillées, le mobile le reste du temps (matin, midi, soir). 

- la télévision ou la radio ont une capacité plus forte qu'avant à diriger les internautes sur le web. Pendant un discours politiques, les utilisateurs vont chercher un terme qu'ils ne connaissent pas, pendant une émission culinaire ils cherchent la recette ou encore pendant un direct d'une émission de télé-réalité ils commentent en temps réel.

Pour toutes ses raisons, le mobile doit être pensé autrement.


Le premier effet pourrait concerner la quantité d'information disponible. En raison des capacités limitées des mobiles, la densité d'information proposée sur une page internet mobile est en effet moindre. Plus petits écran, plus faible débit… Les éditeurs ne seront donc plus en mesure de proposer toutes les informations intéressantes d’un seul coup d’œil, en espérant que certaines retiennent l’attention de l’utilisateur. Cela peut aussi pousser les sites à s’adapter encore davantage à l’utilisateur et à personnaliser les contenus en fonction des profils. Les éditeurs vont-ils être de plus en plus curieux concernant votre identité numérique ? N’est-ce pas l’occasion rêvée d’assoir leur pouvoir pour les opérateurs mobiles et les Facebook, Google, Amazon, qui possèdent tant d’informations au sujet des internautes ?

Les capacités ne sont finalement pas si réduites que cela : l'écran est certe plus petites, mais avec une définition tellement élevée qu'on peut quasiment regarder une page classique. Quand au débit, il est aujourd'hui très proche de celui qu'on a sur ordinateur de bureau : le même en WiFi, un peu plus faible en 3G, mais la 4G arrive ! Par exemple une vidéo se charge quasiment à la même vitesse sur un terminal mobile que sur ordinateur fixe. 

Ce qui change véritablement c'est le fait que le terminal soit tactile, il faut donc faire une page qui s'adapte au terminal (responsive web design) afin d'être utilisable avec de gros doigts, sans souris.

Enfin, sur ce qui est des données collectées, il n'y a pas de différence notable entre un mobile et un ordinateur. Un éditeur peut savoir les mêmes choses, si ce n'est que le mobile rend plus facile la géolocalisation. Plus d'informations collectées sur l'utilisateur c'est certes un problème potentiel de confidentialité, mais l'utilisateur a le contrôle, il peut désactiver par exemple la géolocalisation, mais c'est surtout la capacité de lui offrir un service plus pertinent : les horaires de cinéma à proximité, les restaurants à proximité s'il cherche "restaurant" dans Google, etc.

L'internet mobile n'est-il pas un grand coup porté à la protection des données personnelles, en rendant quasiment impossible l'anonymat ?

Une fois de plus, il n'y a pas plus d'informations transmises depuis un mobile que depuis un terminal fixe, sauf les données de géolocalisation, si l'utilisateur les a explicitement activées.

Est-ce la mort annoncée des navigateurs tels que Firefox, Chrome, Internet Explorer ? Seront-ils remplacés par les navigateurs mobiles de plus en plus performants, et en passe d'apporter le HTML5 ?

Les navigateurs pour mobile sont aujourd'hui Chrome sous Android et iOS, Safari sur iOS, Internet Explorer sur Windows 8. Ce sont donc les mêmes que sur ordinateurs de bureau. Les nouvelles moutures des systèmes d'exploitation comme Windows 8 montrent d'ailleurs que les systèmes à venir seront les mêmes sur mobile, tablettes et ordinateur de bureau.

Certains avancent que les sites vont se replier de plus en plus sur eux-mêmes, réticents à rediriger vers d’autres sites le trafic et les potentielles recettes publicitaires. Ce processus serait déjà en route et s’accentuerait avec les mobiles qui rendent fastidieuse la navigation. La fin des hyperliens ne serait-elle pas un comble pour le réseau ?

Je ne sais pas qui avance cela mais c'est faux. Ce qui se dit c'est que les sites et services conçus avant la percée du mobile peinent à devenir mobile, car ils n'ont pas été conçus comme tel. Les nouveaux services lancés récemment (comme Instagram par exemple) sont pensés avant tout pour le mobile et ont donc une approche différente.

Concernant le fait de rediriger le traffic, ce n'est pas tellement différent entre le web mobile et desktop. Les sites qui ne font pas de lien sur leur version classique, n'en ont pas non plus sur leur version mobile. A contrario, lorsque lien externe il y a, on les retrouve sur les sites mobiles. Il est vrai que de plus en plus de sites évitent de pointer vers l'extérieur, par peur de pénalités des moteurs de recherche ou parce qu'ils craignent de favoriser leurs concurrents. Sur les sites du groupe CCM Benchmark nous faisons régulièrement des liens vers l'extérieur. Les sites CommentCaMarche, Droit-Finances et Santé-Médecine, très communautaires, sont d'ailleurs connus pour être apporteur de traffic de la plupart des sites web français. Nous n'avons aucune règle empêchant de mettre un lien vers des sites concurrents (ce qui n'est pas le cas par exemple de tous les sites de santé, qui s'auto-excluent). Nous pensons que le fait de donner la possibilité à l'utilisateur de chercher de l'information sur les autres sites est un service en soi et que c'est pour cela que que nos sites continuent de croître en audience et en notoriété.

Propos recueillis par Julie Mangematin

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