Le mode navigation privée protège-t-il vraiment vos données personnelles ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Une lycéenne fait ses devoirs via le site du CNED (Centre national d'éducation à distance) à son domicile.
Une lycéenne fait ses devoirs via le site du CNED (Centre national d'éducation à distance) à son domicile.
©ALAIN JOCARD / AFP

La Minute Tech

La question se pose d’autant plus que Google vient d’être contraint de détruire des milliards d’historiques de navigation lors d’un procès outre-Atlantique dans lequel il lui était reproché d’avoir enregistré les données de ses utilisateurs en prétendant ne pas le faire.

Sébastien Gavois

Sébastien Gavois

Sébastien Gavois est rédacteur en chef de Next.ink (anciennement Next INpact), un site d'actualité traitant du numérique et des nouvelles technologies.

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Atlantico : Google a fait l’objet d’un recours collectif au sujet de l’utilisation du mode incognito. Qu’est-ce qui est reproché au moteur de recherche ?

Sébastien Gavois : Le recours collectif remonte à juin 2020. Un groupe d’internautes reprochait à Google d’avoir permis à des entreprises de les tracer, quand bien même ils utilisaient le mode navigation privée, aussi appelé « incognito ». De son côté, Google affirmait que « le mode Incognito de Chrome donne le choix de parcourir Internet sans que votre activité soit sauvegardée dans votre navigateur ou appareil », rien de plus. Pour le géant d’Internet, les utilisateurs auraient mal compris le message… qui n’était pas réellement clair sur la question de la vie privée. 

Mais c’est quoi la navigation privée exactement ? C’est un mode de fonctionnement dans lequel l’historique, les cookies, les données des sites et les autres informations ne sont pas enregistrés dans le navigateur (ni dans son cache). En navigation privée, on n’est connecté à aucun site par défaut. Pratique pour tester un site sans authentification ni cookies, ou bien pour prêter sa machine à une personne, qui peut l’utiliser sans laisser de trace dans le navigateur. 

L’action du mode incognito est donc locale, uniquement. Elle ne peut strictement rien contre le pistage en ligne. Le problème de fond vient surtout de la compréhension qu’en a le public et de la présentation faite par Google. Pour les plaignants, pas de doute : Google tromperait les internautes en leur faisant croire que ce mode « incognito » permettait de ne pas être pisté par Google.

Dans un accord annoncé récemment (et qui doit encore être validé par un juge), Google s’est engagé à détruire les données de plus de 136 millions d'Américains ayant utilisé le mode incognito. La société s’est aussi engagée à reformuler sa notice sur la page d’accueil de la navigation privée afin d’« informer les utilisateurs qu’il collecte des données de navigation privée ». 

Au début de l’année, Google a déjà changé le message affiché dans son navigateur Chrome. Désormais, il est bien précisé que le mode incognito ne change rien à la manière dont les sites et les services, « y compris Google, collectent les données ».

Quelle est la réalité de la protection de nos données quand nous utilisons le navigateur privé de Google ?

On peut déjà répondre à cette question par un rappel important du modèle économique et du fonctionnement de Google : avant d’être un moteur de recherche ou un développeur de navigateur, c’est un annonceur. Le tracking des utilisateurs est donc un point très important pour Google, afin de personnaliser et de cibler toujours plus les publicités. 

Tout est bon ou presque pour récolter des données sur les utilisateurs. Par exemple, vous vous connectez à Gmail depuis un onglet sur Chrome, alors le navigateur dans son ensemble se relie et se synchronise automatiquement à votre compte Google. 

Le mode navigation privée se résume en trois points. Il n’enregistre pas votre historique de navigation. Il ne sauvegarde pas les cookies et les données des sites. Enfin, les informations saisies dans les formulaires ne sont pas enregistrées. Pour être exact, ces informations disparaissent au moment de fermer la fenêtre de navigation privée. Pour le reste, rien ne change. 

D’ailleurs Google l’écrit noir sur blanc dans sa politique de confidentialité : « Même si le mode navigation privée vous permet d'utiliser votre appareil de façon confidentielle au niveau local, il n'a aucune incidence sur la façon dont Google collecte les données lorsque vous utilisez d'autres produits et services ».

Google précise aussi que la navigation privée n’empêche pas « les sites Web que vous consultez de diffuser des annonces basées sur votre activité au cours d'une session de navigation privée ». Bref, voyez la navigation privée de Google comme une navigation sans historique et sans être connecté au moindre site par défaut, rien de plus.

Est-ce que d’autres moteurs de recherche garantissent plus de sécurité en navigation privée ?

Oui… et ce n’est pas bien difficile. Les paramètre de Chrome pour se protéger du suivi en ligne sont quasiment inexistants par défaut, que ce soit en navigation classique ou privée. 

La solution est alors de passer par des extensions, comme à Privacy Badger qui bloque les dispositifs de suivi et publicités-espionnes et des bloqueurs de publicité.

D’autres font mieux, y compris dans les navigateurs ayant pignon sur rue. Edge de Microsoft par exemple (qui est basé sur Chromium, comme Chrome) propose trois niveaux de protection contre le suivi, dont un palier strict. Edge propose aussi de toujours activer le niveau strict en navigation privée (baptisée InPrivate) qui porte donc un peu mieux son nom qu’avec Chrome. 

Citons évidemment Firefox de Mozilla, un navigateur qui a fait du respect de la vie privée son cheval de bataille depuis des années. Il propose lui aussi une protection renforcée contre le pistage, avec un niveau strict, mais également la possibilité de personnaliser les scripts et traqueurs à bloquer. Contrairement à Edge, il n’est pas basé sur Chromium. 

Moins connu du grand public, mais misant lui aussi sur la confidentialité et le respect de la vie privée, il y a Brave. Le navigateur propose, par exemple, de passer par le réseau Tor pour les onglets en navigation privée. 

Chacun à ses forces et ses faiblesses, mais ils font mieux que Chrome sur la confidentialité et le respect de la vie privée. 

Sébastien Gavois 

Rédac’ chef Next.ink (anciennement Next INpact)

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