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On peut d&rsquo;abord espérer que de solides clichés encore entendus ces dernières semaines vont commencer à prendre l&rsquo;eau : ainsi de cette droite prétendument rétive aux primaires en raison de &quot;sa culture du chef&quot;. Réponse : plus de 4 millions de votants à chaque tour. Voilà qui montre que la droite adore sans doute son chef mais à condition de le choisir. Ainsi encore de cette forte participation qui &quot;mathématiquement&quot; devait favoriser Alain Juppé. Réponse : l&rsquo;intéressé s&rsquo;est retrouvé lointain second aux deux tours. Ainsi enfin de cette ambiguïté dont, paraît-il &quot;on ne sort qu&rsquo;à ses dépens&quot;. Réponse : c&rsquo;est le candidat le plus radical qui l&rsquo;a emporté haut la main contre celui du balancement perpétuel &quot;entre d&rsquo;un côté et de l&rsquo;autre&quot;.&nbsp;La défaite de N. Sarkozy ne fait que confirmer ce point : outre la conjugaison de l&rsquo;anti-sarkozysme passionnel de gauche et de droite, il a été victime de ses propres ambiguïtés : nombreux changements de pied (sur le mariage pour tous, sur le référendum, sur la double peine etc.) ; et plus encore, contraste entre déclarations martiales de la campagne et bilan en demi-teinte. Cette chronique a souligné à maintes reprises combien l&rsquo;absence d&rsquo;une évaluation équilibrée de son quinquennat était une erreur majeure. &nbsp;Que François Fillon n&rsquo;a pas commise. Les commentateurs s&rsquo;étonnent que le vainqueur ait réussi à faire &quot;oublier&quot; qu&rsquo;il avait été pendant 5 ans le premier ministre de Nicolas Sarkozy. Double erreur d&rsquo;analyse : c&rsquo;est négliger d&rsquo;une part la grande et constante popularité de F. Fillon à Matignon ; et d&rsquo;autre part, son &quot;pouvait mieux faire&quot; sans reniement du précédent quinquennat. Position qui lui a permis de passer à autre chose.Et c&rsquo;est dans cette autre chose qu&rsquo;il a excellé : tout l&rsquo;enjeu était de briser le duel programmé &quot;Juppé/Sarko&quot;. Le problème était aussi simple théoriquement que difficile à résoudre dans la pratique (d&rsquo;où le très long retard à l&rsquo;allumage de sa campagne) : &nbsp;comment apparaître comme une alternative crédible aux deux favoris ? Fillon a compris que le duel était non seulement gonflé à &quot;l&rsquo;hélium médiatique&quot; mais à un vrai et double rejet qui traversait l&rsquo;électorat de droite : anti-sarkozysme d&rsquo;un côté, anti-&quot;droite molle&quot; de l&rsquo;autre.Le tour de force de F. Fillon aura été de rendre explicite ce dilemme avec une formule lumineuse : &quot;voter Juppé pour ne pas avoir Sarkozy ; voter Sarkozy pour ne pas avoir Bayrou&quot;. Du coup, il pouvait se présenter comme la solution dudit dilemme : voter Fillon, n&rsquo;était-ce pas éviter à la fois Sarkozy et Bayrou ? D&rsquo;une pierre, deux coups.Or cette formulation, il l&rsquo;a trouvée en fin de campagne ; et la lumière se fit subitement dans l&rsquo;esprit d&rsquo;innombrables électeurs&hellip; Le processus de siphonage des voix de Bruno Le Maire qui était l&rsquo;autre alternative possible au &quot;duel&quot;, mais qui n&rsquo;avait pas trouvé la solution de l&rsquo;équation, était dès lors enclenché.Mais voilà qui ne suffit pas à expliquer les scores aussi larges de F. Fillon aux deux tours de la primaire. Etre une alternative au duel Juppé/Sarkozy est une chose ; l&rsquo;emporter nettement sur Sarkozy ET Juppé en est une autre.Pour ce faire, il fallait à la fois un positionnement et un discours convaincants. L&rsquo;on a suffisamment noté la justesse du premier : précisément au cœur de la droite, libérale en économie et conservatrice en matière sociétale. L&rsquo;on a moins relevé l&rsquo;efficacité de sa rhétorique.Certes, l&rsquo;on avait déjà remarqué que F. Fillon était, à la différence d&rsquo;Alain Juppé, un bon orateur. Mais, contrairement à son concurrent, il a longtemps été un débatteur très moyen, baissant trop vite la tête (&quot;cf. son Monsieur le Premier ministre&quot; face à Manuel Valls dans &quot;DPDA&quot;). Tel n&rsquo;est plus le cas : le succès de F. Fillon à tous les débats de la primaire tient d&rsquo;un part à la limpidité de sa thèse centrale : &quot;la France est au bord de la révolte&quot; ; et donc l&rsquo;évidence de son message &quot;il faut une rupture radicale&quot; ; et d&rsquo;autre part à sa résolution de ne plus céder un pouce, ni à ses concurrents, ni aux journalistes. Et voilà comment &quot;l&rsquo;éternel second&quot; s&rsquo;est imposé comme &quot;le patron&quot;. La droite a donc son chef.Ce qui ne veut pas dire, comme on l&rsquo;entend partout, que la France a déjà son prochain Président. Face aux feux nourris et croisés de la gauche, du Front National, et sans doute de l&rsquo;autre François (Bayrou), il lui faudra aussi de nouvelles et puissantes armes rhétoriques.

Primaire de la droite : et si c'était le meilleur orateur qui avait gagné ? 

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Les atouts d&rsquo;Emmanuel Macron ne sont pas minces : jeunesse, charme certain (plutôt que charisme) et surtout courage d&rsquo;une démission et d&rsquo;une candidature sans attendre la permission et encore moins la propre annonce du &quot;Père&quot;. Et sans que cela ne lui nuise, car Emmanuel Macron, quoi qu&rsquo;on en dise, n&rsquo;est pas Brutus pour la bonne raison que César-Hollande est déjà mort (politiquement). Quant à son espace politique, il s&rsquo;est largement ouvert avec la perspective d&rsquo;une défaite probable d&rsquo;Alain Juppé à la primaire de la droite. Face à un François Fillon, clairement (et cette clarté aura été sa force dans la primaire) positionné à droite, tant sur le plan économique que sociétal, Emmanuel Macron pourrait rassembler une gauche modérée et un centre en déshérence. &nbsp;Son habileté n&rsquo;est pas davantage en cause : le timing de son annonce est excellent, prenant de court Valls et Hollande et perturbant sans doute la primaire de la droite, en rendant moins pressant pour le centre gauche un vote pour Juppé.Son discours de Bobigny, très proche de la longueur idéale des &quot;TED talks&quot; à l&rsquo;américaine (18 minutes), ne manque pas non plus de qualités rhétoriques et la double patte d&rsquo;une ancien khâgneux et d&rsquo;une épouse professeur de lettres se voient à chaque ligne : structure claire, usage du rythme ternaire, vocabulaire relevé.Peut-être un peu trop relevé d&rsquo;ailleurs pour un homme &quot;anti-système&quot;. Voire ambigu, comme ce choix d&rsquo;un centre d&rsquo;apprentissage pour faire son annonce, choix, qui, dit-il, &quot;n&rsquo;a rien d&rsquo;innocent&quot;Rien d&rsquo;innocent ? &nbsp;Le mot confine au lapsus lorsque l&rsquo;on sait que les apprentis en question ont été exclus de la cérémonie. Voilà une bien grosse &quot;erreur de com&#39;&quot; quand on se présente comme le candidat de la jeunesse et de la société civile. Il est vrai que l&rsquo;adresse à l&rsquo;auditoire commençait par un passe-partout &quot;Bonjour à toutes et tous, Mesdames et Messieurs&quot;. Pas de quoi susciter d&rsquo;entrée l&rsquo;enthousiasme.Pour le reste, ce discours est rempli de généralités et de clichés que tout candidat pourrait reprendre à son compte : appel au &quot;rassemblement&quot;, hommage à &quot;l&rsquo;histoire millénaire&quot; à &quot;la culture&quot; et aux &quot;paysages&quot; français (emprunt à BLM) etc. L&rsquo;héritage de F. Hollande (et/ou de l&#39;ENA ) reste encore trop présent avec cet éternel balancement entre &quot;liberté&quot; et &quot;protection&quot;, &quot;passé&quot; et &quot;avenir&quot; : jusqu&#39;à cette manie du double sujet, typiquement hollandienne : &quot;la solution, elle est en nous&quot;.La thèse centrale est convenue : le divorce entre les Français et le système politique ? Certes, mais qui ne le dit pas ?Tout comme le message : &quot;rassembler les Français&quot; dans une &quot;révolution démocratique&quot; qui reste bien obscure.Il manque encore un diagnostic précis et illustré de ce qui &quot;coince&quot; en France. Et un projet clair, identifiant les grands axes de l&#39;action et des soutiens possibles, allant bien au-delà du monde des start-ups et de BFM (la &quot;Bande des Fans de Macron&quot; ?)Mais surtout l&#39;ensemble a été desservi par une médiocre prestation orale chez un homme visiblement tendu par l&#39;enjeu : pauses au mauvais endroit, accents mal placés, baisse systématique de la voix en fin de phrase et monotonie générale. Tout cela rendait le discours ennuyeux, le pire risque que son auteur puisse courir.<div>Bref, Emmanuel Macron, excellent &quot;débateur&quot; comme il l&#39;a montré récemment dans une interview d&#39;anthologie avec Mediapart, n&#39;est pas encore un bon orateur.</div>Pour le devenir, il doit tirer la leçon de l&#39;échec de Bruno Le Maire, avec qui il partage un profil commun, et qui n&rsquo;est pas parvenu à asseoir sa crédibilité comme l&rsquo;homme du &quot;Renouveau&quot;. Et pour cela, se concentrer sur l&rsquo;adéquation de son message non seulement à l&rsquo;auditoire (comme s&rsquo;en contente la com&#39;) mais aussi à sa personnalité authentique (comme le veut la vraie rhétorique depuis Aristote). Jamais Emmanuel Macron ne passera pour l&rsquo;homme de &quot;l&rsquo;anti-système&quot;. La place est déjà prise par Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Et ce n&rsquo;est pas grave, comme en témoigne le succès de François Fillon.

Comment trop de com' pourrait compromettre une opportunité politique pour Macron

Macron candidat : comment "trop de com'" pourrait compromettre une réelle opportunité politique 

Même ses adversaires en conviennent&nbsp;: Bruno Le Maire a réussi son entrée média-politique dans la grande aventure de la primaire. Grâce à un carpet bombing&nbsp;(Europe 1) impressionnant, le candidat désormais déclaré aura surfé avec aisance sur une semaine pourtant riche en grands et en gros mots, entre colère paysanne et déchirements socialistes. Il est vrai que d&rsquo;un strict point de vue rhétorique la concurrence d&rsquo;une Martine Aubry n&rsquo;était pas des plus redoutables&hellip;La tonalité générale des commentaires a d&rsquo;ailleurs été plutôt favorable, malgré le scepticisme attendu et entendu chez les plus blasés, ceux &laquo;&nbsp;à qui on ne la fait pas&nbsp;&raquo;, les revenus de tout qui ne jurent que par le &laquo;&nbsp;changement de la vie politique&nbsp;&raquo;&nbsp;: tout en misant sur un duel Juppé-Sarkozy&hellip;Mais il est vrai aussi que le sel de la surprise n&rsquo;est jamais à négliger dans une cuisine menacée par la fadeur des haines trop recuites. Bruno Le Maire aura su jouer à fond de cet effet de surprise, même si l&rsquo;annonce de sa candidature n&rsquo;avait rien d&rsquo;un suspense hitchcockien.Sa maîtrise rhétorique qu&rsquo;il doit à sa formation de normalien et surtout à son goût amoureux de la langue, y est pour beaucoup. Son livre &laquo;&nbsp;Ne vous résignez pas&nbsp;!&nbsp;&raquo; en témoigne largement. C&rsquo;est-à-dire très exactement aux TROIS-QUARTS.La surprise, les militaires comme les speechwriters le savent, cela s&rsquo;organise&nbsp;: en renversant par exemple l&rsquo;ordre classique du discours. Ainsi, dès la première phrase, la thèse centrale du livre est assénée&nbsp;: &laquo;&nbsp;le monde change et la France ne change plus&nbsp;&raquo;. Et ne cherchons pas de boucs émissaires, globalisation, Europe ou immigrés&nbsp;: le corrélat, implacable, est donné dès la page 2&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le problème est en France. La solution aussi.&nbsp;&raquo; Suit une vingtaine de chapitres, mêlant avec fluidité exemples, storytelling et propositions, où l&rsquo;auteur, de voyages en rencontres, se contente d&rsquo;être le grand témoin des Français. Et où, loin de se cantonner au logos du fort en thème, il sait manier tous les registres du discours, y compris le pathos, comme dans cette description magistrale et poignante d&rsquo;une rencontre avec deux jeunes malades de la mucoviscidose.Tout comme il sait - le point le plus fort du livre - constituer son groupe-cible avec virtuosité&nbsp;: cette création du &laquo;&nbsp;we-group&nbsp;&raquo; du &laquo;&nbsp;Nous collectif&nbsp;&raquo;, enjeu de tout discours, est acquise dès la première page et sera le leitmotiv&nbsp;:nous sommes tous dans le même &laquo;&nbsp;paquebot France&nbsp;&raquo;, pour lemeilleur (&laquo;&nbsp;nous Français, nous avons tout pour réussir&nbsp;&raquo;) et pour le pire&nbsp;: &laquo;&nbsp;Qui porte la responsabilité de cet affaiblissement&nbsp;? Nous tous&nbsp;&raquo;. Avec un courage rare dans un genre si souvent démagogique, Bruno Le Maire nous place en effet devant nos propres contradictions, tout comme il assume les siennes. Et, puisque la France est sens dessus-dessous, cul par-dessus tête, le chiasme en sera latraduction rhétorique adéquate&nbsp;: &laquo;&nbsp;une administration au service de ses agents ou des agents au service de leur administration&nbsp;?&nbsp;&raquo;.La thèse (&laquo;&nbsp;la France va mal mais elle a des atouts colossaux&nbsp;&raquo;) et le message (&laquo;&nbsp;ne vous résignez pas&nbsp;!&nbsp;&raquo;) sont d&rsquo;une clarté limpide et s&rsquo;enchaînent parfaitement&hellip; Jusqu&rsquo;à la page 135, où l&rsquo;on a l&rsquo;impression d&rsquo;un grand basculement thématique.Voilà un livre qui détaille (sans doute trop) les souffrances des Français et leurs talents (sans doute pas assez) et qui dénonce explicitement &laquo;&nbsp;l&rsquo;illusion de la toute-puissance publique&nbsp;&raquo;, bref qui démontre à chaque page que la France, C&rsquo;EST D&rsquo;ABORD LES FRANCAIS&nbsp;: et pourtant, soudainement, comme tombée du ciel, une bien étrange assertion&nbsp;: &laquo;&nbsp;notre nation est son Etat&nbsp;&raquo;. Héritage gaulliste sans doute, tout comme ce registre de la VOLONTE omniprésent dans le livre. Mais plus sûrement encore reliquat rhétorique de Dominique de Villepin, dont l&rsquo;auteur fut si proche&nbsp;: ainsi de toutes ces invocations convenues de la &laquo;&nbsp;grandeur de la France&nbsp;&raquo;, de la francophonie à la Polynésie, ces hymnes au volontarisme politique tous azimuts, au risque de l&rsquo;accumulation incantatoire.Etrange final en vérité, avec quelques beaux moments d&rsquo;écriture (comme dans la description si proustienne de sa tante Odette ou les réflexions sur la mort du père et la mort de soi) mais aussi avec une réserve qui laisse l&rsquo;auteur dans une demi-pénombre, comme s&rsquo;il hésitait encore à fendre l&rsquo;armure. Et, sans surprise, le style se met en &laquo;&nbsp;pilotage automatique&nbsp;&raquo;, celui appris à l&rsquo;ENA, analytique, assertif et redondant.Au demeurant, pourquoi malgré la constance et la pertinence du &laquo;&nbsp;NOUS&nbsp;&raquo; collectif, ce titre en &laquo;&nbsp;VOUS&nbsp;&raquo; (&laquo;&nbsp;Ne VOUS résignez pas&nbsp;!&nbsp;&raquo;) qui d&rsquo;emblée instaure une distance renforcée par la négation&nbsp;? &laquo;&nbsp;RELEVONS-NOUS&nbsp;!&nbsp;&raquo;, par exemple, eût été rhétoriquement plus cohérent.&nbsp; Et, psychologiquement, porteur de ce qui manque le plus aux Français&nbsp;: l&rsquo;ESPOIR.A total, un livre coup de poing, où le puzzle d&rsquo;une VISION juste et ambitieuse se met en place, mais qui semble reculer encore devant les conséquences ultimes de sa propre audace.

Comment le chevalier Le Maire a ouvert une brèche rhétorique dans la primaire… 

<h3 class="s2">Atlantico&nbsp;: le 18 février, l&#39;hebdomadaire Le point titrait &quot;Le Maire, l&#39;homme qui secoue la droite&quot;.&nbsp; En quoi la candidature de Bruno Le Maire aux primaires des Républicains représente-t-elle une véritable &quot;secousse&quot; au sein de la droite&nbsp;? Et si secousse il y a, atteint-elle les électeurs, ou simplement les autres candidats ?</h3>Jean Garrigues&nbsp;: Il faut bien reconnaître que la situation politique est telle que nous sommes dans une incertitude historiquement exceptionnelle. Le jeu a rarement été aussi ouvert qu&rsquo;aujourd&rsquo;hui, car dans la tradition de la droite française, le candidat potentiel est soit le président sortant, soit le chef de parti. Et comme Nicolas Sarkozy ne fait pas l&rsquo;unanimité, ce rejet partiel fait porter l&rsquo;attention sur le renouveau, et aussi le déjà-vu, ce qui explique en partie l&rsquo;image et la construction médiatique de Bruno Le Maire.Il faut reconnaître aussi que la campagne qu&rsquo;il avait faite pour l&rsquo;élection du président de l&rsquo;UMP est une réussite car il s&rsquo;était installé comme une figure de l&rsquo;UMP.Maintenant sur le fond des choses, il n&rsquo;y a rien dans les idées ou le programme qu&rsquo;il propose qui serait de l&rsquo;ordre de la &quot;révolution copernicienne&quot; de la droite. Quand on regarde quelles ont été les étapes clés de la droite au cours de la Vème République, il y a d&rsquo;abord le renouvellement incarné par le général de Gaulle. A sa manière, Valéry Giscard d&rsquo;Estaing a aussi fait bouger les lignes. Enfin, le tournant néo-libéral de la droite dans les années 80 a aussi été une étape importante&hellip; C&rsquo;est dans des moments comme ceux-ci que l&rsquo;on a senti qu&rsquo;une nouvelle époque commençait. Avec Bruno Le Maire, il est plus difficile de parler de renouvellement. A cet égard, celui qui a le programme qui pourrait incarner un véritable renouveau néolibéral, c&rsquo;est plutôt François Fillon.Côté charisme, si Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy ont renouvelé la droite non par leurs idées mais par leur charisme et leur capacité à susciter une dynamique politique, on ne peut non plus dire que Bruno Le Maire soit à la hauteur de ses prédécesseurs. Car il a un déficit de charisme, un côté &quot;gendre idéal&quot; un peu tiède, qui n&rsquo;est pas à la hauteur de ce que sa famille politique a pu connaître.On est en réalité davantage dans une sorte de jeu de rôle, d&rsquo;apparence, plutôt que d&rsquo;incarnation du changement.<h3 class="s2">Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire général du PS, le décrit ainsi&nbsp;: &quot;Bruno Le Maire est le candidat le plus dangereux parce qu&#39;il allie à la fois une position très, très à droite, quand on regarde et quand on l&#39;écoute. Et en même temps, il se présente comme un centriste bon teint&quot;. En quoi Bruno Le Maire pourrait représenter une menace pour les autres candidats ? Comment définir son positionnement politique ?</h3>Ce qui est sûr c&rsquo;est qu&rsquo;effectivement s&rsquo;il devait y avoir une ligne de partage entre les droites aujourd&rsquo;hui, elle laisserait sans doute voir une tripartition. François Fillon y incarnerait le porteur de la clarification libérale avec un programme de rénovation économique, axé sur la libération des énergies productives. Son programme est bien identifiable. Nicolas Sarkozy quant à lui mise sur l&rsquo;ordre, l&rsquo;autorité et la sécurité que certains peuvent interpréter comme un clin d&rsquo;œil au populisme. Enfin, il y a une autre droite plus conforme à la tradition chiraquienne représentée par Alain Juppé, une droite humaniste, sociale, plus modérée&hellip;Dans ces trois directions, on ne voit pas très bien quelle est la position de Bruno Le Maire, il n&rsquo;est pas identifié à un corpus d&rsquo;idées ou de valeurs qui le distinguent vraiment des autres.Dans cette conjoncture, il peut donc mordre sur l&rsquo;électorat d&rsquo;Alain Juppé, qui se méfie du populisme et des dérives identitaires ou autoritaires...Mais il est aussi possible qu&rsquo;il prenne des voix à l&rsquo;électorat potentiel de Nicolas Sarkozy car sur les questions régaliennes, sur l&rsquo;immigration et l&rsquo;identité il est sur une ligne assez à droite lui-aussi. Sur les questions économiques, et sous réserve d&rsquo;un inventaire plus précis, il n&rsquo;est pas très éloigné de François Fillon.Laurent Wauquiez a quant à lui souffert de sa candidature, que ce soit lorsqu&rsquo;il était ministre avec son projet de droite sociale en 2011, de renouvellement de la classe politique, mais aussi plus récemment. Sur ce terrain du renouvellement, Bruno Le Maire a une longueur d&rsquo;avance et un capital crédibilité, une image de cohérence, de serviteur de l&rsquo;Etat, que n&rsquo;a sans doute pas Laurent Wauquiez.Cette position peut ainsi faire sa force comme sa faiblesse. Si l&rsquo;envie de renouveau est l&rsquo;élément prioritaire des électeurs pendant la primaire, et comme il a réussi cet effet d&rsquo;image, son âge et son expérience politique moins longue que les autres pourront provoquer des secousses chez les autres candidats et lui en faire bénéficier. Mais si les électeurs sont dans l&rsquo;attente de plus, et faute d&rsquo;identité politique propre, cette position lui portera préjudice.<h3 class="s2">Parmi les candidats actuels, quelles sont les personnalités qui pourraient profiter de sa candidature, de l&rsquo;élan qu&rsquo;il semble incarner ?</h3>Selon moi personne. Précisément, il a mieux réussi que Laurent Wauquiez sur l&rsquo;incarnation du renouveau, sur l&rsquo;élan moderniste. Mais la campagne de la présidence de l&rsquo;UMP a été un choix gagnant et lui a permis de s&rsquo;installer sur ce créneau sans réelle concurrence.

Bruno Le Maire

Bruno Le Maire secoue t-il vraiment toute la droite ?

Qui s’en soucie ?

Et un nouveau candidat à la primaire : Bruno Le Maire secoue-t-il la droite ou uniquement ses concurrents ? 

Cette fois c&#39;est fait, Bruno Le Maire est candidat. Un acte de naissance officialisé mardi soir, à Vesoul, loin de Paris et de ses beaux quartiers dans lesquels est né l&#39;ancien ministre. Le choix de la préfecture de Haute Saône est hautement symbolique. Le candidat et son équipe ont voulu honorer &quot;cette France discrète et laborieuse&quot;, cette ville industrieuse où la droite et la gauche arrivent encore à damer le pion au FN. Ils ont aussi voulu montrer que Bruno Le Maire a résolument tourné le dos à Paris et son entre-soi, ses beaux quartiers et ses lieux de pouvoir. Alors qu&#39;Alain Juppé joue à séduire les jeunes, que Nicolas Sarkozy a du mal à sortir de son bureau de la rue de Vaugirard, il sera le candidat du terrain, le candidat de la province et de la banlieue. Son premier grand discours, il a d&#39;ailleurs prévu de le prononcer à Aubervilliers, à quelques encablures du périphérique. Encore un symbole.&nbsp;Depuis 2012, Bruno Le Maire a fait beaucoup d&#39;efforts pour casser son image, ne plus être cet énarque un peu lisse, un peu triste, à qui personne n&#39;aurait donné un avenir présidentiel. A l&#39;époque, l&#39;un de ses conseillers lui dit: &quot;Bruno, changer ça ne peut pas se faire en surface sinon ça sonne faux. Or pour changer en profondeur, il faut que tu te confrontes à la réalité, au terrain, à la vie quotidienne des Français&quot;. Une vie quotidienne que cet énarque, passé rapidement du cabinet de Dominique de Villepin à son propre ministère, ne connaît guère. Il a donc pris la route ou le train, dormant dans de petits hôtels, et a serré des mains et des mains, échangé des heures et des heures avec des agriculteurs, des médecins, des instituteurs, des ouvriers, des vignerons, des pécheurs, des postiers, des chefs d&#39;entreprises, des commerciaux et bien d&#39;autres encore. Au fil du temps le cuir s&#39;est patiné, le discours s&#39;est adapté. &quot;J&#39;ai toujours un petit carnet et je note ce que me disent les gens, j&#39;y réfléchis, je me demande comment apporter des réponses, parfois je réutilise des formules&quot;, expliquait-il récemment en revenant de Perpignan. Son livre, qui sort aujourd&#39;hui, est d&#39;ailleurs truffé de ces témoignages de Français, rencontrés au fil des routes.&nbsp;<a name="_GoBack"></a>Et si Bruno Le Maire a mis tant d&#39;énergie à se confronter au terrain c&#39;est parce qu&#39;il est persuadé que la primaire se jouera sur la personnalité des candidats et non sur le programme. C&#39;est pourtant un livre programme qui sort demain. Un livre dans lequel le candidat fait quelques propositions qu&#39;il espère séduisantes: pour lutter contre les fraudes aux aides sociales, il propose que les maires aient accès à la liste des allocataires du RSA de leur commune, il souhaite limiter les compétences de l&#39;inspection du travail, privatiser Pole Emploi, diminuer la durée de l&#39;indemnisation chômage car &quot;c&#39;est une incitation à reprendre plus vite une activité&quot;. Il entend aussi plafonner les aides sociales à 75% du SMIC, augmenter les droits de succession et supprimer les prélèvements sur les donations, diminution des charges sur le travail, stabiliser le montant de l&#39;impôt sur les sociétés et enfin, il affirme: &quot;Nous ne voulons plus que les infractions routières soient méthodiquement punies&quot;. Un programme certes parfois osé, très ancré à droite, mais qui ne révolutionne pas les clivages politiques. Sa personnalité, son envie, devront donc suffire à séduire les électeurs. Un pari compliqué <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/florilege-citations-plus-extravagantes-bruno-maire-fait-rire-internet-2602290.html" target="_blank">car déjà Twitter se moque de quelques citations extraites de son livre.</a>&quot;Que c&#39;est bon de se lever le matin et de vouloir diriger le pays&quot;, écrit l&#39;ancien ministre ou encore&nbsp;: &quot;Mon problème c&#39;est que j&#39;ai les yeux trop bleus pour la télévision&quot; et&nbsp;&quot;Mon intelligence est un obstacle&quot; . Les réseaux sociaux rigolent aussi de son&nbsp;: &quot;Je suis dans une démarche d&#39;humilité&quot; qui n&#39;a rien pourtant à envier à un Juppé, un Sarkozy ou un Valls. Pas facile d&#39;être l&#39;outsider. &nbsp;

Bruno Le Maire a fait un effort pour casser son image mais cela suffira-t-il ?

Le renouveau, c‘est Bruno

Si le projet de réforme du Code du travail ne passe décidemment pas à gauche, Bruno Le Maire, lui, l&rsquo;affirme : il voterait en faveur de ce texte. &quot;En l&rsquo;état, ou, je voterai ce texte&quot;, a-t-il commenté <a class="Colorbox" href="http://www.bfmtv.com/politique/bruno-le-maire-954312.html" target="_blank">au micro de RMC et BFMTV</a>.&nbsp; &quot;Il faut qu&#39;on libère le marché du travail. Des licenciements économiques plus faciles, pourquoi pas, mais cette réforme doit être accompagnée d&#39;autres changements&quot;, a-t-il estimé, citant notamment le devoir pour un employeur de proposer une formation professionnelle à ses salariés pour pouvoir lutter plus efficacement contre le chômage.Après s&rsquo;être déclaré <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/decryptage/et-nouveau-candidat-primaire-bruno-maire-secoue-t-droite-ou-uniquement-concurrents-jean-garrigues-2600766.html" target="_blank">officiellement candidat ce mardi à la primaire de la droite et du centre</a>, le député de l&rsquo;Eure n&rsquo;a pas caché ses ambitions. &quot;Je veux devenir président de la République, mais ce sont les Français qui décideront&quot;, précise-t-il. L&rsquo;élu Les Républicains est également revenu sur la phrase &quot;Mon intelligence est un obstacle&quot;, qu&rsquo;il avait déclarée dans Le Point du 18 février dernier, <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/florilege-citations-plus-extravagantes-bruno-maire-fait-rire-internet-2602290.html" target="_blank">et qui a provoqué la moquerie des réseaux sociaux.</a> &quot;Je considère aujourd&#39;hui, après des années de travail politique, après avoir sillonné le pays, que c&#39;est une erreur que de considérer que l&#39;intelligence seule suffit à résoudre le problème des gens&quot;, a-t-il jugé, soulignant que &quot;c&#39;est le cœur qui permet de comprendre les gens&quot;.<a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/decryptage/bruno-maire-fait-effort-pour-casser-image-mais-cela-suffira-t-christelle-bertrand-2602401.html" target="_blank">A LIRE AUSSI : Bruno Le Maire a fait un effort pour casser son image mais cela suffira-t-il ?</a>

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Réforme du Code du travail : Bruno Le Maire affirme qu'il "voterait le texte"

A contre-courant

Réforme du Code du travail : Bruno Le Maire affirme qu'il "voterait le texte, en l'état"

Comment le chevalier Le Maire a ouvert une brèche rhétorique dans la primaire… mais le chemin est encore long jusqu'au donjon désiré !

&quot;rhétorique&quot; des ténors de la droite proposé dans cette chronique ne peut se conclure que sur Nicolas Sarkozy. Non que la semaine passée ait été marquée par une prise de parole importante de l&rsquo;intéressé. Mais parce qu&rsquo;elle a été hautement significative du danger qui le guette, le pire qui soit pour tout orateur&nbsp;: devenir inaudible.D&rsquo;abord en raison du tir de barrage rhétorique impressionnant qui lui est opposé, même lorsqu&lsquo;il ne dit rien. L&rsquo;on aura assisté ces derniers jours à l&rsquo;un des exercices favoris des médias français&nbsp;: un déchaînement d&rsquo;anti-sarkozysme tous azimuths. Des déclarations de Jérôme Lavrilleux sur un &quot;homme qui n&rsquo;assume pas&quot; au &quot;crétin arrogant&quot; envoyé par Berlusconi (devenu subitement une référence en crédibilité&nbsp;!) et, bien plus grave, au sondage sceptique des Français sur sa candidature en 2017, la charge a été rude, y compris à droite. La gauche, quant à elle,reprend sur tous les sujets brûlants sa bonne vieille recette de &quot;l&rsquo;héritage&quot;,du chômage à la dette, de l&rsquo;immigration à la fiscalité, du RSI à la délinquance&nbsp;; et dès que l&rsquo;on dit &quot;Syrie&quot;, elle répond &quot;Libye&quot; ! A vrai dire, quel que soit le sujet, tôt ou tard, le nom de l&rsquo;ancien Président revient sur la table et toujours comme synonyme de l&rsquo;abomination de la désolation. Après la reductio ad Hitlerum voici le temps de la reductio ad Sarkozium, nouveau &quot;point Godwin&quot; de la politique française&hellip; Et dans une telle ambiance, l&rsquo;auteur de cet article sait combien il s&rsquo;expose aux feux croisés des sarkophobes et des sarkolâtres&nbsp;!&quot;A tout seigneur tout honneur&quot;, dira-t-on, non sans raison&nbsp;: Nicolas Sarkozy ne fait que récolter ce qu&rsquo;il a semé. Quand on a exercé l&rsquo;hyper-présidence, comment échapper à l&rsquo;hyper-critique&nbsp;? Quand on a tant exposé son ego, comment s&rsquo;étonner qu&rsquo;il vous revienne en boomerang&nbsp;?Concrètement trois enjeux capitaux se dressent devant lui: sa personnalité transgressive et clivante&nbsp;; son bilan supposé &quot;désastreux&quot; ; les affaires dans lesquelles il s&rsquo;est lui-même &quot;pris les pieds&quot;. La question n&rsquo;est pas de savoir si tout cela est juste&nbsp;; elle est de comprendre que tout cela crée une situation redoutable pour l&rsquo;intéressé en sapant les deux piliers du leadership en démocratie&nbsp;: la crédibilité et la représentativité. En rhétorique, le doute ne profite jamais à l&rsquo;accusé&nbsp;: la réception de sa parolepasse d&rsquo;un coup du positif au négatif. Parce qu&rsquo;ils s&rsquo;adressent à l&rsquo;imaginaire, les registres les plus opposés du discours sont en effet, comme ceux du rêve, des registres contigus&nbsp;: l&rsquo;impression d&rsquo;énergie glisse bien vite à celle d&rsquo;hystérie, celle de l&rsquo;ambition laisse place à l&rsquo;accusation d&rsquo;arrivisme, et sous la sainte colère pointe le soupçon du ressentiment et de la revanche personnelle&hellip;Mais alors, au terme d&rsquo;un tel catalogue à charge, la messe (de funérailles) est-elle dite&nbsp;? Ne répète-t-on pasurbi et orbi que l&rsquo;actuel président ne rêve que d&rsquo;une chose&nbsp;: affronter en 2017 son rival de 2012&nbsp;?Eh bien, voilà qui reste à voir&nbsp;! L&rsquo;on sait que François Hollande est le champion du ballon d&rsquo;essai et de la fausse confidence&nbsp;; d&rsquo;ailleurs une rumeur exactement contraire a aussi filtré des arcanes de l&rsquo;Elysée. Son occupant est le premier à savoir que rien ne lui garantit la réédition du même succès face au même adversaire. Et ce pour plusieurs raisons : d&rsquo;abord parce que Nicolas Sarkozy reste un animal politique qu&rsquo;il ne faut jamais sous-estimer. Mais - ce qui est le sujet ici- il demeure aussi&nbsp;un exceptionnel animal rhétorique&nbsp;: même sans la redoutable (mais non irréprochable) plume d&rsquo;Henri Guaino, Nicolas Sarkozy est, de loin, le meilleur orateur de la droite républicaine. Il suffit pour s&rsquo;en convaincre de comparer son discours lors du congrès fondateur des Républicains à ceux des trois autres mousquetaires de son camp&nbsp;: hommage initial et habile à ses rivaux, appel au groupe le plus fort car le plus intime(&quot;notre&nbsp;famille&quot;), sens de la formule, questions rhétoriques percutantes et anaphores martelées qui sont ses grandes marques de fabrique&nbsp;; enfin, parfait équilibre entre dénonciation techniquement parfaite de l&rsquo;adversaire (&quot;la gauche a trahi ses propres idéaux et sa propre histoire&quot;) et déclinaison détaillée de sa propre promesse (&quot;la République de la confiance&quot;). L&rsquo;a-t-on assez remarqué&nbsp;?C&rsquo;est exactement le même schéma qu&rsquo;en 2007, appuyé sur les mêmes figures rhétoriques, qui a donné l&rsquo;excellent discours de la porte de Versailles. A quoi Nicolas Sarkozy ajoute une nouvelle thématique, dévastatrice pour le pouvoir en place&nbsp;: celle du &quot;mensonge&quot;, qu&rsquo;il est le premier à avoir pressentie (mais trop peu et trop tard), dès la campagne de 2012. Il en fait désormais un vrai leitmotiv qui sera, n&rsquo;en doutons pas, au cœur de l&rsquo;argumentaire de la droite en 2017, quel que soit le candidatLe succès&nbsp;est-il pour autant garanti ? Nullement. Justement parce que le temps a passé, dont 5 ans de pouvoir présidentiel, et que c&rsquo;est la crédibilité même de ce discours qui est aujourd&rsquo;hui en jeu.Et d&rsquo;abord sur la question centrale du bilan de son quinquennat. Mal inspiré sur ce sujet comme sur tant d&rsquo;autres par Patrick Buisson, Nicolas Sarkozy s&rsquo;y est jusqu&rsquo;ici refusé. Ce n&rsquo;est pas la concession de quelques &quot;regrets&quot;, très vagues d&rsquo;ailleurs, et qui portent plus sur le style que sur le fond, qui suffiront.Or cebilan s&rsquo;impose pour deux raisons. L&rsquo;une, tactique&nbsp;: si l&rsquo;ancien Président ne le fait pas lui-même, les autres - à gauche comme à droite - le feront, et le font déjà, à sa place&nbsp;! L&rsquo;autre, stratégique&nbsp;: il dispose là d&rsquo;un véritable boulevard&nbsp;autour d&rsquo;une question rhétorique centrale, comme il les affectionne&nbsp;: la France va-t-elle vraiment mieux aujourd&rsquo;hui qu&rsquo;en mai 2012&nbsp;?Dès lors, l&rsquo;on comprend mal un tel évitement. Application de l&rsquo;adage cynique mitterrando-chiraquien selon lequel &quot;faute inavouée est à moitié pardonnée&quot; ? Peur d&rsquo;un effet contre-productifen ouvrant la boîte de Pandore de &quot;l&rsquo;inventaire&quot;? Ou tout simplement résistance psychologique d&rsquo;un &quot;ego sans surmoi&quot; qui se refuse à toute concession&nbsp;?Et l&rsquo;on retombe ainsi sur l&rsquo;enjeu décidément central de l&rsquo;éthos de l&rsquo;orateur.Or pour le restaurer, il ne suffit pas d&rsquo;entamer un énième &quot;J&rsquo;ai changé&quot;. Les Français finissent par avoir le tournis devant ces changements qui s&rsquo;empilent et donc se contredisent. Et tant de proposoff (immédiatement rapportés), tant d&rsquo;attitudes &quot;instinctives&quot; et surtout une gestuelle et des mimiques de moins en moins contrôlées, montrent qu&rsquo;il n&rsquo;en est rien. La règle des spécialistes de speechwriting, pour qu&rsquo;un récit soit crédible,est bien connue&nbsp;: &quot;Show, don&rsquo;t tell&nbsp;!&quot; (&quot;montrer, ne pas dire&quot;). Autrement dit, le changement, c&rsquo;est comme l&rsquo;amour (y compris celui de la France dont Nicolas Sarkozy fait tant état), ne se proclame pas&nbsp;: il se prouve.Or, pour le prouver, le leader des Républicains dispose d&rsquo;une qualité maîtresse qui lui a permis de rendre possible l&rsquo;impossible destinée d&rsquo;un homme que rien ne prédisposait au pouvoir suprême : la surprise. Pour reconquérir les Français, et d&rsquo;abord ceux de droite, primaire oblige, Nicolas Sarkozy doit à nouveau les surprendre.Le peut-il encore et surtout le veut-il encore&nbsp;? &quot;That is the question&quot;&nbsp;!

Nicolas Sarkozy ou comment redevenir audible 

<h3 class="s2">Atlantico : Les policiers ont manifesté mercredi. Vous avez récemment accusé le gouvernement de ne pas soutenir sa police, mais c&#39;est aussi l&#39;une des grandes critiques qui avait été adressée à Nicolas Sarkozy. Durant son quinquennat les effectifs ont diminué, les budgets aussi. La police peut-elle être moins coûteuse et tout aussi efficace ?</h3>Eric Ciotti : Jamais la défiance de la police à l&#39;égard d&#39;un gouvernement n&#39;a atteint ce niveau. Il faut remonter à 1983, déjà sous un gouvernement de gauche, pour voir une manifestation sous la fenêtre du garde des Sceaux place Vendôme. La colère légitime des policiers trouve sa source dans le mépris de la Garde des Sceaux à leur égard. Madame Taubira accorde davantage de considération aux droits des délinquants qu&#39;aux droits des policiers ou des victimes. N&#39;oublions pas que cette colère a éclaté après que l&#39;un des leurs a été abattu à Saint-Ouen par un détenu qui avait obtenu une permission totalement incompréhensible. Celui-ci était multirécidiviste, fiché comme étant en voie de radicalisation par nos services de renseignement et avait été condamné pour des faits très graves. S&rsquo;ajoute à ce climat de défiance un déficit de moyens pour les policiers et les gendarmes. Le gouvernement a fait des pseudos annonces sur des recrutements qui sont loin d&#39;être au rendez-vous de ses discours. Il suffit de lire le rapport d&#39;exécution budgétaire de la cours des comptes pour l&#39;exercice 2013 pour mesurer qu&#39;il y a un écart considérable entre les emplois qui devaient être créés et ceux qui l&#39;ont été réellement.Personnellement je n&rsquo;ai jamais été adepte des diminutions d&rsquo;effectifs au sein des forces de sécurité mais il convient de rappeler le contexte qui était celui d&#39;une crise internationale qui demandait des efforts sans précédent. Je veux également rappeler qu&#39;il y avait plus de policiers quand Nicolas Sarkozy a quitté le pouvoir en 2012 que lorsqu&#39;il est rentré au ministère de l&#39;Intérieur en 2002. Par ailleurs, outre les effectifs, il faut regarder l&#39;action sur le terrain des policiers&nbsp;: entre 2013 et 2014, 2&nbsp;400&nbsp;000 patrouilles ont été supprimées par rapport à 2011 ce qui signifie concrètement qu&rsquo;aujourd&#39;hui il y a moins de policiers sur le terrain.<h3 class="s2">Comment Nicolas Sarkozy pourrait-il faire, dans un hypothétique futur mandat, pour améliorer la condition des policiers alors qu&#39;il ne l&#39;a pas fait avant ?</h3>La priorité est de refonder notre chaîne pénale qui subit de nombreux dysfonctionnements aujourd&#39;hui. Je l&#39;avais démontré dans un rapport remis à Nicolas Sarkozy en juin 2010 qui avait débouché sur plusieurs lois dont une loi de programmation sur l&#39;exécution des peines. Aujourd&#39;hui, 100 000 peines de prison ferme ne sont pas exécutées, ce qui est un scandale démocratique. A cela vient s&rsquo;ajouter le recours quasi-automatique à l&#39;aménagement des peines pour toutes les condamnations de moins de deux ans de prison. Pourquoi cette inexécution et pourquoi cet aménagement systématique ? Tout simplement parce que notre pays souffre d&#39;un manque chronique de places de prison ce qui conduit vers leur non-exécution. Il est indispensable de créer 24 000 places de prison supplémentaires pour dépasser les 80 000 places dont nous avons au minimum besoin dans notre pays à l&#39;horizon 2017 comme nous l&#39;avions prévu. Mme Taubira a arrêté ce programme de construction dès 2012. Au-delà d&#39;une erreur, c&#39;est une faute dont nous payons aujourd&#39;hui un lourd tribut en matière de sécurité. Les policiers ne peuvent supporter d&#39;arrêter les mêmes délinquants à maintes reprises et de les retrouver quasi-systématiquement le lendemain dans la rue.<h3 class="s2">Au passage, où en sont vos relations avec Christiane Taubira après les vifs échanges à l&#39;Assemblée nationale ?</h3>Je considère Mme Taubira comme portant une politique dangereuse pour notre pays. Ce n&#39;est pas la personne qui est en cause, ce sont les idées, où devrais-je plutôt dire, l&rsquo;idéologie proche de l&#39;extrême gauche qu&#39;elle véhicule, animée par une culture de l&#39;excuse, qui la conduit à regarder toute forme de sanction avec suspicion. C&#39;est cette politique dangereuse que dénoncent légitimement les policiers dans la rue.<h3 class="s2">Le 5 novembre, les Républicains organisent une convention sur la sécurité à l&#39;issue de laquelle les militants seront consultés. Y participerez-vous ? Que proposerez-vous ? Quelles sont, selon vous, les attentes des Français en matière de sécurité ?</h3>Je participe activement à la préparation de cette convention qui sera amenée à faire des propositions fortes. Je travaille déjà à l&#39;Assemblée nationale sur ces questions de sécurité qui me tiennent particulièrement à cœur. Je propose notamment que l&#39;on revienne sur cette logique automatique de l&#39;aménagement des peines qui me paraît extrêmement pernicieuse et dangereuse. Je souhaite que le juge d&#39;application des peines ne puisse pas déconstruire les peines prononcées par des tribunaux souverains. C&rsquo;est pourquoi je suis personnellement favorable à la suppression du juge d&#39;application des peines pour confier toute la chaine d&#39;application des peines au parquet. Par ailleurs, je suis convaincu que la lutte contre la délinquance passe par davantage de moyens pour les forces de sécurité. La redéfinition de leur mission est essentielle alors qu&#39;ils effectuent aujourd&rsquo;hui des taches auxquelles ils n&rsquo;ont pas vocation à être affectés. Je pense en particulier aux opérations de transfert de détenus, aux gardes statiques, qui devraient être confiées à d&#39;autres corps d&#39;État voire même à des entreprises de sécurité privé. La police et la gendarmerie doivent se recentrer sur leur cœur de métier, c&rsquo;est-à-dire l&#39;investigation. Nous aurons donc toute une gamme de propositions en ce sens. Enfin, nous voulons également étendre le champ d&#39;intervention des polices municipales. L&rsquo;ensemble de ces propositions fait l&#39;objet de nos travaux mais les arbitrages internes ne sont pas encore actés. Ce sont donc pour le moment des propositions personnelles que je formule. &nbsp;<h3 class="s2">Ces consultations doivent, à terme, déboucher sur un programme commun qui, de l&#39;avis de Nicolas Sarkozy, engagera tous les candidats à la primaire. Que pensez-vous de cette idée ? Le président des Républicains n&#39;est-il pas en train de transformer les primaires en simple concours de beauté ?</h3>Je ne le pense pas. Il est important que l&#39;on ait un socle de valeurs communes qui soit défini dans une famille politique et que tout le monde s&#39;y reconnaisse. Maintenant, Nicolas Sarkozy l&#39;a dit lui-même, chaque candidat à la primaire doit avoir la faculté de présenter son propre projet. Je considère que cette liberté est essentielle.<h3 class="s2">Vous venez d&#39;être nommé par Nicolas Sarkozy secrétaire départemental de la fédération des Républicains des Alpes Maritimes, vous allez donc être chargé d&#39;organiser ces primaires au niveau local. Nicolas Sarkozy a récemment déclaré que les 10 000 bureaux de vote pourtant validés par le comité d&#39;organisation des primaires ne pourraient être mis en place. Qu&#39;en pensez-vous ?</h3>J&#39;étais présent au cours de la réunion et je peux vous dire que ce n&#39;est pas ce qu&#39;a dit Nicolas Sarkozy. C&#39;est à la Commission nationale d&rsquo;organisation des primaires et à la Haute autorité de définir l&#39;organisation de ce scrutin. Je leur fait toute confiance. Le chiffre de 10&nbsp;000 bureaux a été arrêté, je n&#39;y vois pas un dogme absolu. C&#39;est à la Commission et à la Haute Autorité de définir ce nombre. Cela peut être plus, cela peut être moins, l&#39;essentiel étant que tous ceux qui veulent voter puissent le faire dans de bonnes conditions.<h3 class="s2">Dans un sondage Atlantico/Ifop, pour la primaire des Républicains, Nadine Morano a fait une percée étant créditée de 5 points. Que cela vous inspire-t-il ? Sur cette affaire &quot;Morano&quot;, François Fillon a dénoncé &quot;un procès en sorcellerie excessif&quot;, quel est votre avis ?</h3>Nicolas Sarkozy a pris la seule décision qui s&rsquo;imposait. Il l&#39;a fait avec courage, sans démagogie. En tant que chef de notre famille politique, il a rappelé l&#39;attachement aux valeurs républicaines qui sont les nôtres. Il l&#39;a fait avec pertinence et je soutiens totalement sa décision. Le propos de Mme Morano était une faute. Il lui a donné l&#39;occasion de le retirer et elle ne l&#39;a pas fait dans une forme de provocation que je condamne. Ne nous attardons pas là-dessus, ne faisons pas de Nadine Morano le centre de la vie politique française. Chacun peut exprimer sa position mais je considère que celle de Nicolas Sarkozy était la seule possible. Nicolas Sarkozy a affirmé de manière pertinente et courageuse&nbsp;: &quot;combattre la pensée unique ce n&#39;est pas soutenir la pensée fausse&quot;. Je me retrouve totalement dans cette approche et suis persuadé que dans quelques semaines tout cela n&#39;aura plus beaucoup d&#39;intérêt.<h3 class="s2">En plus de Nadine Morano, de nouveaux fronts hostiles s&#39;ouvrent contre Nicolas Sarkozy comme Jean-François Copé ou Jérôme Lavrilleux. Le président des Républicains n&#39;a-t-il pas trop d&#39;ennemis pour espérer l&#39;emporter ?</h3>Des ennemis, il en a, mais il a surtout la capacité de les affronter. Ce que dit Monsieur Lavrilleux n&#39;a pour moi aucun fondement, aucune crédibilité. Notre famille politique a déjà eu l&#39;occasion de subir son action pernicieuse lors des élections internes de l&#39;UMP fin 2012. Il est le moins bien placé pour donner des leçons à quiconque. Dans cette affaire je suis convaincu que Nicolas Sarkozy et notre parti ont été victimes d&#39;une escroquerie de la part d&#39;une bande de malfaiteurs. La justice le démontrera et je lui fais toute confiance pour cela.Quant à Jean-François Copé, je pense que les Français n&#39;ont ni besoin ni envie de lui donner l&#39;occasion d&#39;une revanche et qu&#39;ils ont bien raison.<h3 class="s2">Dans Le Point de cette semaine, il est fait référence à certains membres de l&#39;équipe Sarkozy qui expliquent anonymement qu&#39;il manque &quot;un penseur, quelqu&#39;un qui a une colonne vertébrale&quot; à l&#39;ancien chef de l&#39;Etat. Qu&#39;en pensez-vous ?</h3>La caractéristique d&#39;un chef comme Nicolas Sarkozy est de se suffire à lui-même, de ne pas avoir besoin de personnes qui pensent à sa place. Par ailleurs, je vois une équipe autour de Nicolas Sarkozy mais également dans l&#39;ensemble de notre parti qui est tout à fait compétente.<h3 class="s2">Les régionales approchent, comment jugez-vous la campagne de Christian Estrosi, tête de liste en PACA ?</h3>Je suis certain de la victoire de Christian Estrosi. Il conduit une excellente campagne, dynamique et ancrée dans le terrain qui rassemble des personnalités de grand talent. Jeudi soir &nbsp;nous avons lancé le comité de soutien des élus départementaux à La Crau que je préside. Face à lui se présentent les responsables d&#39;une région ruinée avec 2,65 milliards de dettes, 6 000 fonctionnaires, des déficits, du clientélisme etc. De l&#39;autre côté se trouve l&#39;impasse du Front national. Donc oui, je suis convaincu de la victoire de Christian Estrosi puisqu&#39;il faut tourner la page socialiste et éviter à tout prix le drame de l&rsquo;election du Front National dans la région de France la plus connue au monde après Paris.<h3 class="s2">Jean-Marie Le Pen a demandé vendredi à ses proches de rallier Marion Maréchal-Le Pen, qu&#39;est-ce que cela vous inspire ? Cela va-t-il compliquer la tâche de Christian Estrosi ?</h3>Non, tout cela fait cuisine politicienne avec la combinaison entre la petite fille et le grand-père sous l&#39;œil de la tante. La politique n&#39;est pas une affaire de famille, d&#39;héritage et de partage. On ne se distribue pas la tunique. On y exprime des valeurs, des convictions et l&#39;envie de servir. Cette approche est loin du psychodrame de la petite entreprise familiale des &nbsp;Le Pen.<h3 class="s2">Autre dossier important : les inondations en PACA. Ou en est-on en termes d&#39;indemnisation après les intempéries qui ont ravagé le Cote d&#39;Azur ?</h3>Nulle part. Je viens d&rsquo;adresser une lettre au président de la République pour lancer un cri de colère. Quinze jours après le drame qu&#39;a subi notre département avec ses 20 morts et son milliard d&#39;euros de dégâts, rien n&#39;est fait malgré une visite très médiatisée de F. Hollande après la catastrophe. L&#39;Etat n&#39;a pas annoncé pour l&#39;instant le moindre euro d&#39;aide. Nous avons eu des visites qui relèvent plus de la communication de Mme Najat Vallaud-Belkacem et d&#39;une secrétaire au commerce et à l&#39;artisanat inconnue, qui sont venues les poches vides. Elles ont suscité la colère des élus qui désormais refuseront de voir arriver des ministres qui affichent un tel mépris.Les sinistrées, pour l&rsquo;instant réparent les dégâts. Ils bénéficient du soutien du département car pendant que l&#39;État reste inerte, le Conseil départemental que je préside a déjà aidé 2 500 familles avec près d&#39;un million d&#39;euros d&#39;aides. Nous avons voté un plan de 10 millions d&#39;euro et dès lundi matin, nous voterons un plan d&#39;urgence de subvention aux communes. Il faut également souligner que beaucoup d&#39;entreprises sont cruellement touchées, près de 2 000. Le message que je lance donc au gouvernement c&#39;est que la solidarité affichée par des mots doit maintenant passer aux actes.<h3 class="s2">Les spécialistes ont pointé du doigt des problèmes de sururbanisation et de dérèglement climatique, partagez-vous leur avis ? Que peut-on faire pour éviter le pire la prochaine fois ?</h3>Il faut tirer très lucidement toutes les conséquences de ce phénomène et pour cela il faut d&#39;abord un diagnostic très précis. Le phénomène sur le plan météorologique a été totalement inédit. Il est tombé presque 200 millimètres d&#39;eau en deux heures ce qui équivaut à un mois très pluvieux. Dans l&#39;histoire météorologique des Alpes-Maritimes, c&#39;est la plus forte pluviométrie enregistrée. Il s&rsquo;agit certes d&rsquo;un phénomène d&#39;une ampleur inédite mais il ne faut cependant pas écarter la possibilité qu&#39;il se reproduise. Nous sommes dans un département qui ne part pas d&#39;une feuille blanche. Toutes les communes touchées avait fait l&#39;objet d&#39;un plan de prévention des risques contre les inondations. 159 millions d&#39;euros de travaux ont déjà été alloués pour la prévention de futures inondations mais il faudra sans doute aller plus loin. Je récuse les leçons données par tous les professeurs nimbus de la terre.

Eric Ciotti : "Nicolas Sarkozy se suffit à lui-même"

Grand entretien

Eric Ciotti : "La caractéristique d'un chef comme Nicolas Sarkozy est de se suffire à lui-même, de ne pas avoir besoin de personnes qui pensent à sa place"

Rhétorico-laser  

L&rsquo;équation politique d&rsquo;Alain Juppé est bien connue, et d&rsquo;abord du premier intéressé&nbsp;: il a d&rsquo;ores et déjà gagné, et largement, au second tour de la présidentielle quel que soit l&rsquo;adversaire&nbsp;; maisil se trouve que nous sommes encore à plus d&rsquo;un an du premier tour&hellip; des primaires&nbsp;! Dans cette élection à quatre tours qu&rsquo;est donc désormais le scrutin suprême, la route est longue et semée d&rsquo;embûches, comme un concours hippique auquel on aurait soudainement rajouté des obstacles, et les plus redoutables en début de parcours&nbsp;: les 2 tours de la primaire&hellip;Pour les négocier au mieux, Alain Juppé vient juste de lancer ce qui lui manquait&nbsp;: des réseaux de terrain et un effort programmatique. Mais il a d&rsquo;abord réorganisé en profondeur sa &quot;cavalerie rhétorique&quot;. Depuis son fameux Des Paroles et des actes de 2014, il a mis en avant tout un nouvel arsenal, dans le but de changer son image de politique austère, compétent mais technocrate, loin du peuple, et vite arrogant&nbsp;: pour faire fondre en somme ce &quot;glaçon&quot; cruellement dépeint par Bernadette Chirac.Comme l&rsquo;a très bien décrypté l&rsquo;équipe de Nicolas Cantelou (très fin analyste de la rhétorique&nbsp;!), ce &quot;nouveau Juppé&quot; présente les traits suivants&nbsp;: humour jovial, calme imperturbable, sourire courtois, recours aux expressions populaires (&quot;tête au melon&quot;, &quot;chicayas&quot;, &quot;tentons le coup&quot;). A cet ancien austère, tout semble aujourd&rsquo;hui &quot;bonheur&quot; ! A quoi s&rsquo;ajoute, sur le fond, l&rsquo;acceptation de la critique voire l&rsquo;autocritique, reconnaissant çà et là une erreur de jugement ou de formulation et même un changement de position : autant d&rsquo;éléments pertinents pour &quot;fendre l&rsquo;armure&quot; et combattre un à un les principaux facteurs de discrédit du langage politique&nbsp;: langue de bois, déni du réel, surdité à l&rsquo;autre, éloignement du peuple, manichéisme sectaire.Dans le même temps, il simplifie son registre favori de premier de la classe, le logos, sur lequel il est fortement concurrencé par Bruno Le Maire et François Fillon. Dans ce domaine, il n&rsquo;est d&rsquo;ailleurs pas le meilleur des trois&nbsp;: il recourt à l&rsquo;excès au raisonnement analytique&nbsp; du type &quot;pour résoudre ce problème il faut&nbsp;: point 1/ point 2/ point 3/point 4/&quot; ; c&rsquo;est la marque de fabrique d&rsquo;un technocrate nourri par le système des &quot;fiches&quot; scolairement préparées par les collaborateurs. Mais lors de DPDA, il asu prendre au plus court, en sélectionnant sur chaque sujet UN enjeu essentiel, UN fait saillant, UNE proposition forte, évitant ainsi toute lassitude et favorisant la mémorisation du message.Il a su aussi manier le pathos, comme dans l&rsquo;excellent final de l&rsquo;émission, où il manifesta son émotion devant le véritable plébiscite personnel que lui adressaient les téléspectateurs. D&rsquo;autant plus efficace, comme toujours en rhétorique, qu&rsquo;elle était sincère. Idem pour les témoignages d&rsquo;admiration et de reconnaissance à l&rsquo;égard de ses propres maîtres au début de son livre sur l&rsquo;école.D&rsquo;ores et déjà sa devise - à défaut de son programme - semble trouvée&nbsp;: &quot;réformer, rassembler, apaiser&quot;.L&rsquo;on comprend dès lors que dans un pays à la fois bloqué, divisé et au bord de la crise de nerfs, il y a de quoi être attractif, comme l&rsquo;attestent des sondages de plus en plus favorables, y compris à droite, où le leadership de Nicolas Sarkozy s&rsquo;effrite, même chez les sympathisants Républicains.La messe est-elle dite pour autant&nbsp;? Nullement&nbsp;: en dehors même des aléas personnels toujours possibles et de la pertinence du positionnement politique, il demeure des failles rhétoriques au sein de son discours. A l&rsquo;inverse de François Fillon, Alain Juppé est bien meilleur débatteur qu&rsquo;orateur&nbsp;: on a vu sa réactivité dans DPDA&nbsp;; on l&rsquo;a encore vu lors du congrès fondateur des républicains où, sifflé d&rsquo;entrée, il &quot;rebondit sur l&rsquo;incident&quot; comme disent les spécialistes&nbsp;; il arrête la bronca en suscitant l&rsquo;attente du public&nbsp;: &quot;je vais vous faire une confidence&hellip;certains me sifflent&nbsp;; cela me fait de la peine (pathos)&quot; etc&hellip; Mais, après ce très bon début, le discours lui-même tourne court et, récité d&rsquo;une voix souvent monocorde, dépourvu d&rsquo;images et de formules, il lasse très vite, n&rsquo;obtenant que de maigres applaudissements et une seule ovation&nbsp;: lorsqu&rsquo;il rend hommage à&hellip; Nicolas Sarkozy&nbsp;! Tout l&rsquo;inverse de François Fillon, qui commence dans la difficulté mais triomphe à la fin. Le récent discours d&rsquo;Alain Juppé à Nogent en soutien à Valérie Pécresse fut de l&rsquo;avis général le moins bon de tous, dit avec une sorte de nonchalance monotone qui rappelle trop &quot;l&rsquo;ancien Juppé&quot;. Le doute parfois resurgit&nbsp;: ce nouveau sourire est-il vraiment radieux&nbsp;? La voix ne reste-t-elle pas encore affectée&nbsp;? Et la supériorité distante a-t-elle totalement disparu&nbsp;?Or, si Alain Juppé n&rsquo;y prend garde, toute impression de retour de cet ancien Juppé lui serait fatale&nbsp;; car elle le renverrait pour de bon à son âge, à ses échecs comme Premier ministre et surtout à son étroite association au chiraquisme, c&rsquo;est-à-dire à l&rsquo;inertie politique.Et c&rsquo;est peut-être là que le bât blesse&nbsp;: Alain Juppé a convaincu sur sa capacité de rassemblement et d&rsquo;apaisement mais au détriment de sa capacité à réformer. Il reste très distancé par Nicolas Sarkozy sur les qualités &quot;d&rsquo;énergie&quot; et de &quot;détermination&quot; et, s&rsquo;il est plus crédible en matière économique, il l&rsquo;est encore très peu sur la lutte contre l&rsquo;immigration clandestine et la sécurité. Il n&rsquo;est pas sûr en effet que le thème de &quot;l&rsquo;immigration heureuse&quot; soit un gage de succès dans la droite actuelle. Ni que des réformes étalées sur 5 ans comme pour l&rsquo;éducation paraissent crédibles&hellip; Tout dépendra donc des questions qui feront l&rsquo;agenda présidentiel en 2017.Est-il besoin d&rsquo;être grand clerc pour penser que les questions de société voire d&rsquo;identité, dans un contexte de droitisation forte de la droite et même du centre, y joueront un rôle décisif&nbsp;? D&rsquo;autant que, sur le plan économique, les grands ténors de la primaire seront largement sur la même ligne.

Alain Juppé : une nouvelle “équation rhétorique” durable et crédible ? 

La primaire de la droite et du centre se rapproche à grands pas. Bien décidé à s&#39;y imposer, Alain Juppé affine son programme, notamment en matière d&#39;économie. Un Etat fort et des décisions fortes, voilà le crédo de l&#39;ancien Premier ministre, comme il l&#39;a expliqué sur les ondes RTL. S&#39;il ne promet pas des larmes, il y aura bien de la sueur car Alain Juppé est bien décidé à faire travailler davantage les Français. L&#39;objectif : revenir aux 39h si l&#39;entreprise et les salariés se mettent d&#39;accord. Et sans accord ? Et bien, ce sera 39h quand même. &quot;Je propose que l&#39;on porte la durée légale du temps de travail de 35 à 39 heures&quot; lorsqu&#39;il n&#39;y a &quot;pas d&#39;accord&quot; a ainsi expliqué Alain Juppé, soulignant qu&#39;il &quot;n&#39;y aurait plus d&#39;heures supplémentaires&quot; mais que les bénéficiaires auront une &quot;exonération fiscale&quot;. Du côté de la retraite, il a réitéré sa volonté de la repousser à 65 ans, arguant que les &quot;Français le comprennent.&quot; <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/decryptage/recherche-nouvelles-tetes-desesperement-quand-francais-peinent-se-resigner-au-quatuor-hollande-sarkozy-juppe-pen-pour-2017-2365790.html#2k5kfdku3C2E4WPM.99" target="_blank">A LIRE AUSSI -&nbsp;Recherche nouvelles têtes désespérément : quand les Français peinent à se résigner au quatuor Hollande-Sarkozy-Juppé-Le Pen pour 2017</a> Au niveau des impôts, il promet &quot;une diminution&quot; des prélèvements et la suppression de l&#39;ISF. Quant aux allocations, il faudra &quot;les plafonner afin que l&#39;on ne vive pas mieux avec des allocations qu&#39;en travaillant.&quot; Sur le sujet des migrants, Alain Juppé s&#39;est affiché modéré. &quot;Accueillir oui, mais aussi contrôler&quot; a-t-il prévenu. &quot;Nous ne pouvons pas accueillir en France des migrants économiques trop nombreux.&quot; Ainsi il explique avoir &quot;proposé que le Parlement propose chaque année un quota.&quot; Pour autant, il refuse de diaboliser les étrangers et a vivement réagi aux propos de Nadine Morano. &quot;Ce qui est intolérable, c&#39;est de dire que la France est un pays de race blanche&quot; a-t-il martelé, tout en précisant, à l&#39;encontre de l&#39;eurodéputée, &nbsp;qu&#39;il n&#39;était &quot;pas un coupeur de tête.&quot; Quant aux intellectuels accusés de faire le jeu du Front national : &quot;une catastrophe de les entendre nous expliquer que c&#39;était mieux hier.&quot; &nbsp;

Alain Juppé

Alain Juppé souhaite imposer les 39h même en cas de désaccord dans l'entreprise

Plan de campagne

Il y a décidément un &quot;mystère Fillon&quot; : pourquoi cet homme dont l&rsquo;expérience est unanimement reconnue, dont la compétence est partout saluée et dont les réseaux parlementaires et sociaux sont très actifs n&rsquo;arrive pas à décoller dans la course aux primaires&nbsp;à droite ? Et cela même alors qu&rsquo;il vient de bénéficier d&rsquo;une forte couverture médiatique lui offrant une palette complète des modes d&rsquo;expression, de l&rsquo;interview au discours en passant par le débat (et pas des moindres, comme le face à face avec Manuel Valls). Tout cela en relation avec la parution de son bon livre&nbsp;Faire, qui détonne dans la &quot;littérature des politiques&quot;, par le sérieux du travail accompli et la qualité de l&rsquo;écriture. Et pourtant&hellip; Le sondage Odoxa qui vient de tomber ne laisse guère de doute&nbsp;: 72% des Français ne lui trouvent pas une &quot;carrure présidentielle&quot;.La réponse pourrait bien se trouver, pour une bonne part, dans son mauvais positionnement rhétorique. Non que François Fillon soit un mauvais orateur. Il est l&rsquo;homme d&rsquo;excellents discours, en particulier à l&rsquo;Assemblée, aussi bien comme Premier ministre et comme opposant&nbsp;: son intervention dans le débat sur le &quot;mariage pour tous&quot; en 2013 était un chef d&rsquo;œuvre d&rsquo;argumentation. Davantage, il s&rsquo;est montré, lors du congrès fondateur des Républicains cette année, capable de retourner une salle à la fois dissipée et hostile qui est passée, en 15 minutes, des sifflets aux applaudissements.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;De fait, dans ces discours, il a fait preuve d&rsquo;une stratégie rhétorique efficace et constante : l&rsquo;argumentation rationnelle (logos) au service d&rsquo;un homme posé, cohérent et responsable (ethos). François Fillon est notamment un orfèvre du raisonnement par contradiction, le plus efficace pour détruire la position adverse. Il débusque les contradictions entre les faits et les discours, entre les discours eux-mêmes, mais plus encore au sein d&rsquo;un même discours&nbsp;: il sait ainsi pousser la déduction jusqu&rsquo;à l&rsquo;absurde pour démontrer l&rsquo;inconséquence des prémices de l&rsquo;autre camp. Ainsi, lors du débat sur le mariage pour tous, il prouve que l&rsquo;impératif d&rsquo;égalité ne peut que conduire, malgré les assurances du gouvernement, à l&rsquo;acceptation de fait puis de droit de la GPA et de la PMA (que cela soit un bien ou un mal n&rsquo;est pas la question ici). Même recours à la contradiction, mais cette fois à l&rsquo;égard de son propre camp, lors du congrès fondateur des Républicains&nbsp;: François Fillon a axé toute son argumentation sur l&rsquo;idée que le rêve d&rsquo;une&nbsp;alternance facile et molle serait contradictoire avec les valeurs historique du parti, son changement de nom et les défis du pays.Sans surprise, l&rsquo;on retrouve le même positionnement dans le débat avec Manuel Valls, avec l&rsquo;excellente ouverture sur &quot;où est donc passé le Manuel Valls qui disait que&hellip;&nbsp;?&quot;.Mais voilà, l&rsquo;élan a vite tourné court&nbsp;: après cette entrée en matière, François Fillon s&rsquo;est comme absenté du débat, laissant le Premier ministre dérouler sa propre rhétorique. Pire, son body language a été très contreproductif&nbsp;: repli dans le fauteuil, tête basse, parfois même signes d&rsquo;acquiescement. Quelques sursauts et une bonne fin, toujours sur le thème de la contradiction (notamment entre le Premier ministre et sa majorité) ont sauvé l&rsquo;exercice. Mais les résultats montrent que François Fillon n&rsquo;a pas vraiment gagné en crédibilité&nbsp;: 36% de messages favorables sur les réseaux sociaux contre 51%&nbsp;de négatifs (source&nbsp;: Vigiglobe) ; si Manuel Valls a fait pire encore (27% pour, 60% contre), c&rsquo;est avant tout du fait de ses propres failles rhétoriques qui le rendent de plus en plus inaudible.Et pourtant quel boulevard s&rsquo;offrait au challenger ! Non pas qu&rsquo;il s&rsquo;agissait &quot;d&rsquo;étriller&quot; le Premier ministre mais l&rsquo;occasion était rêvée de le décrédibiliser pour de bon : hausse sensible et inhabituelle du chômage en août, gestion de la crise des migrants, réformes a minima et inappliquées etc. Plus encore, Manuel Valls lui offrait sur un plateau les armes pour se faire battre&nbsp;: l&rsquo;utilisation, suicidaire dans son cas, du titre de l&rsquo;émission des &quot;paroles et des actes&quot;, les &quot;approximations&quot; sur la fiscalité et le CICE, la comparaison périlleuse des bilans entre les quinquennats Hollande et Sarkozy etc&hellip;François Fillon a totalement manqué de réactivité, alors même que les séquences précédentes où son interlocuteur était en difficulté manifeste lui auraient permis de pousser son avantage. Et pourquoi avoir repris si tard et si timidement son excellent &quot;le sang et les larmes, c&rsquo;est maintenant&quot;, renversement parfait du slogan &quot;hollandais&quot; de 2012 (toujours la contradiction&nbsp;!) qu&rsquo;il avait martelé avec bonheur lors son discours devant les Républicains&nbsp;?Nous tombons là sur un fait décisif&nbsp;: François Fillon est bien meilleur orateur que débatteur. Homme bien élevé, soucieux de la nuance, respectueux de l&rsquo;autre et sensible aux titres et aux positions, il lâche trop vite prise&nbsp;: en témoigne le titre de &quot;M. Le Premier ministre&quot; qu&rsquo;il donne d&rsquo;entrée de jeu à Manuel Valls&nbsp;: erreur de débutant qui vous place tout de suite en position d&rsquo;infériorité. Et erreur déjà commise par Philippe Seguin (le maître en politique de François Fillon) lors du débat de Maastricht, où son respectueux &quot;Monsieur le président de la République&quot; adressé à François Mitterrand avait réglé d&rsquo;emblée l&rsquo;issue du débat&hellip;.De là, l&rsquo;idée ancrée dans l&rsquo;opinion que François Fillon ne s&rsquo;affirme pas assez, qu&rsquo;il évite le conflit (avec Nicolas Sarkozy comme avec Manuel Valls) ou s&rsquo;y épuise (avec Copé); bref qu&rsquo;il est un excellent &quot;second de la classe&quot; mais n&rsquo;a pas &quot;la carrure présidentielle&quot;. A quoi s&rsquo;ajoutent un sourire trop rare (alors qu&rsquo;il peut être rayonnant), une empathie trop mesurée (alors qu&rsquo;il sait en faire preuve), des images et des formules trop comptées (alors qu&rsquo;il les maitrise parfaitement à l&rsquo;écrit). Enfin l&lsquo;usage d&rsquo;un registre où il y a forte concurrence à droite&nbsp;: le logos est aussi la spécialité d&rsquo;Alain Juppé et de Bruno Le Maire&hellip;Il faut donc que François Fillon s&rsquo;en distingue. La valeur de liberté, qu&rsquo;il a choisie de mettre en avant, avec courage dans un pays ultraconservateur, lui en donne l&rsquo;occasion rêvée. Mais encore faut-il qu&rsquo;il résolve le conflit entre cette valeur et le logiciel de la droite française (&quot;ordre et autorité&quot;), qu&rsquo;il incarne aussi bien par sa personnalité que par ses références dominantes. C&rsquo;est à ce prix qu&rsquo;il pourra vraiment libérer sa propre rhétorique.

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