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On nous l&rsquo;aura répété à satiété sur tant de médias, et pas seulement gouvernementaux : le Président(candidat) a fait un &quot;beau discours&quot; à la salle Wagram : formules ciselées, images frappantes, questions rhétoriques et, bien sûr, anaphores, le tout accompagné d&rsquo;un vrai engagement corporel de l&rsquo;orateur. Etait-ce enfin le retour du François Hollande inspiré, celui du Bourget, que l&rsquo;on n&rsquo;avait entendu qu&rsquo;une seule fois depuis 2012, devant le Congrès réuni en janvier dernier ?&nbsp;Pourtant l&rsquo;impression l&rsquo;a emporté très vite que l&rsquo;intervention présidentielle était restée loin du compte, c&rsquo;est-à-dire de la question posée qui n&rsquo;avait rien d&rsquo;anecdotique : &quot;la démocratie face au terrorisme&quot;.&nbsp;Voilà qui aurait demandé une argumentation solide et d&rsquo;abord des définitions précises des termes clés : &quot;démocratie&quot;, &quot;république&quot; &quot;islamisme&quot;, &quot;Etat de droit&quot;, &quot;France&quot; (une &quot;idée&quot;, mais laquelle ?). Et une thèse claire : a-t-on, oui ou non, tout fait contre le terrorisme dans le cadre de cet Etat de droit ? Rien de tout cela. Ce qui est un peu ennuyeux pour un discours, supposé de fond, prononcé devant deux distingués &quot;think-tanks&quot;&hellip;Ah ! C&rsquo;est vrai, il y a eu ce très beau moment sur &quot;les arguties juridiques&quot;, véritable feu d&rsquo;artifice oratoire. Le procédé s&rsquo;appelle la &quot;rétorsion&quot; : elle consiste à reprendre l&rsquo;expression de l&rsquo;adversaire (devinez qui ?) pour la retourner contre lui afin d&rsquo;en monter l&rsquo;absurdité et/ou le danger.&nbsp;Mais la manœuvre est des plus risquées car elle invite à la contre-rétorsion. Appliquons-la à F. Hollande sur son propre totem, &quot;l&rsquo;Etat de droit&quot; :&quot;Etat de droit, un Etat où la justice n&rsquo;est pas un Pouvoir mais, aux termes mêmes de la Constitution, une simple &quot;autorité&quot; ?Etat de droit, une justice où le parquet reste soumis à la Chancellerie, comme nous en fait régulièrement grief la Cour européenne des droits de l&rsquo;homme ?Etat de droit, où le même parquet dresse des réquisitions plus étendues que celles de l&rsquo;instruction contre un adversaire majeur du Pouvoir ? Et les publie par &quot;pur hasard&quot; (sic) le jour même où s&rsquo;ouvre le procès d&rsquo;un ancien dignitaire dudit Pouvoir ?Etat de droit, quand 100 000 peines de prison sont en attente d&rsquo;exécution ?Etat de droit, quand les dépenses de justice par habitant sont parmi les plus faibles de l&rsquo;OCDE ?Etat de droit, quand des individus, dont la dangerosité n&rsquo;est pas &quot;supposée&quot; mais avérée, sont laissés en liberté ou en semi-liberté ?Etat de droit, quand la surpopulation carcérale atteint un sommet historique parce que l&rsquo;on a refusé délibérément la construction des places nécessaires ?Etat de droit, quand la jungle des migrants de Calais grossit de jour en jour dans l&rsquo;illégalité et la misère absolues ?Etat de droit, quand des dizaines de décision de justice demeurent inexécutées à Notre Dame des Landes ?Etat de droit, quand la loi sur la Burqa n&rsquo;est plus appliquée de peur de soulever les &quot;quartiers&quot; ?Etat de droit, quand &quot;la liberté d&rsquo;aller et venir&quot;, si chère au Président, est réduite à néant par des groupuscules politiques ou syndicaux ?&nbsp;Etat de droit, quand l&rsquo;inégalité des droits sociaux est sans cesse accrue entre secteur public et secteur privé ?Etat de droit, quand l&rsquo;Etat s&rsquo;exonère des règles, normes et contrôles en tout genre, dont il accable les entreprises ? &nbsp;&nbsp;Etat de droit, quand l&rsquo;on a soi-même fait adopter l&rsquo;une des lois les plus liberticides de la Vème République, celle sur le Renseignement ?Etat de droit, quand l&rsquo;on a, soi-même encore, proposé de constitutionnaliser l&rsquo;état d&rsquo;urgence qui est bel et bien l&rsquo;un de ces &quot;états d&rsquo;exception&quot; que l&rsquo;on prétend honnir ?&quot;Nous voilà, sauf erreur, à 15 termes pour l&rsquo;anaphore&hellip; Comme pour un certain &quot;Moi, Président&quot;.Mais que le lecteur n&rsquo;attende pas que la droite réponde du tac au tac, ni à l&rsquo;anaphore par l&rsquo;anaphore. Comme Nicolas Sarkozy en 2012, tétanisé par le &quot;Moi-Président&quot;, elle laisse passer la charge.Et ce, pour deux (tristes) raisons :La première, de fond, est que la tradition majoritaire de la droite française est au moins aussi liberticide que celle de la gauche. On l&rsquo;a bien vu lors du vote massif de la loi sur le Renseignement.La seconde, de forme, tient à sa faiblesse rhétorique ; pire, à son désintérêt pour la rhétorique dont elle a, sauf en 2007, laissé le monopole à la gauche depuis la victoire de F. Mitterrand en 1981.Quand viendra donc, et par qui, son grand réveil oratoire ?&nbsp;

Après le "Moi, Président", petit exercice d’anaphore sur "l’Etat de droit"

Rhétorico-laser

<ul><li>En fin de discours, François Hollande a évoqué l&#39;élection présidentielle de 2017 : &quot;les Français auront à décider de leur avenir et de celui de notre pays&quot;</li><li>La laïcité &quot;n&rsquo;est pas la religion d&rsquo;État contre les religions&quot;, a-t-il affirmé plus tôt&nbsp;</li><li>Sur la question du burkini, le chef de l&#39;État refuse toute &quot;législation de circonstance, aussi inapplicable qu&rsquo;inconstitutionnelle&quot;</li></ul>​<a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/discours-wagram-essentiel-reactions-au-discours-francois-hollande-2814936.html" target="_blank">&gt;&gt;&gt;&gt; À lire aussi : L&#39;essentiel des réactions au discours de François Hollande</a>&nbsp;C&#39;était l&#39;heure du grand oral pour François Hollande.&nbsp;Le chef de l&#39;Etat a prononcé un discours très attendu lors du colloque &quot;La Démocratie face au terrorisme&quot;, salle Wagram, à Paris. &nbsp;Selon le site de FranceInfo, c&#39;est après les attentats de Nice que les stratèges de l&#39;Elysée ont eu l&#39;idée de ce discours, car le terrorisme est le sujet qui va &quot;structurer la campagne à venir&quot; selon eux.<a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/discours-wagram-francois-hollande-entend-clairement-qu-sera-candidat-2814789.html" style="font-size: 12px;" target="_blank">&gt;&gt;&gt;&gt; À lire aussi : Discours de Wagram : François Hollande sous-entend clairement qu&#39;il sera candidat</a>En présence d&#39;une bonne partie du gouvernement (Najat Vallaud-Belkacem et Bernard Cazeneuve notamment), le locataire de l&#39;Elysée a débuté son discours par une ode à la démocratie.&nbsp;&quot;Malgré la peur, malgré la souffrance, nous vaincrons&quot;, a-t-il lancé. &quot;La démocratie sera toujours plus forte que la barbarie qui lui a déclaré la guerre.&nbsp;Au terme de la lutte, la démocratie triomphera&quot;.<blockquote class="twitter-tweet" data-lang="fr">Ce qu&rsquo;en revanche, je peux garantir aux Français, c&rsquo;est que toute la puissance de l&rsquo;État sera engagée pour venir à bout de l&rsquo;ennemi <a href="https://twitter.com/hashtag/Wagram?src=hash">#Wagram</a>&mdash; François Hollande (@fhollande) <a href="https://twitter.com/fhollande/status/773824615873413120">8 septembre 2016</a></blockquote><blockquote class="twitter-tweet" data-lang="fr">&nbsp;</blockquote>S&#39;il a parlé d&#39;un &quot;combat long et éprouvant&quot;, François Hollande estime que les démocraties gagnent toujours. &quot; Je fais tout pour protéger les Français mais je leur dois aussi la vérité. La menace, elle est là, et elle va durer.&nbsp;Le terrorisme islamiste a l&#39;illusion de croire que la démocratie est faible. Mais les démocraties gagnent toujours les guerres. Elles ont vaincu le fascisme, le nazisme. Les terroristes seront traqués et, au bout du compte, annihilés&quot;.Rapidement, le chef de l&#39;Etat s&#39;est attaqué à la droite. Volontiers offensif, il a condamné la &quot;surenchère&quot; de propositions issues de la droite et l&#39;extrême-droite face au terrorisme, qui oublient selon lui que &quot;le seul camp qui vaille, c&#39;est la République&quot;. Ces reniements seraient autant de renoncements sans nullement assurer la sécurité des Français&quot;, tranche-t-il. &quot;Est-ce que l&#39;adoption du Patriot Act ou le camp de Guantanamo ont protégé les Etats-Unis ? Non&quot; déclare-t-il.<a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/discours-wagram-quand-francois-hollande-tacle-sechement-nicolas-sarkozy-2814771.html" target="_blank">Visant directement Nicolas Sarkozy </a>qui avait parlé cet été d&#39;&quot;arguties juridiques&quot; lorsque le gouvernement a rejeté sa proposition de centres de rétention préventive, le président a répliqué : &quot;Les principes constitutionnels ne sont pas des arguties juridiques&quot;.Faisant référence à Alain Juppé et à Alain Finkielkraut, il a estimé que &quot;l&#39;identité, elle n&#39;est ni heureuse, ni malheureuse. La France est bien plus qu&#39;une identité, c&#39;est une idée, qui fait de la France un pays singulier&quot;.François Hollande a également listé les mesures prises par l&#39;exécutif durant son mandat, notamment la fin de la réduction des effectifs militaires. &quot;Qui peut dire avec un peu de sincérité que nous n&#39;avons pas tout fait pour protéger nos policiers, nos gendarmes et nos militaires ?&quot; a-t-il demandé.<a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/discours-wagram-quand-francois-hollande-tacle-sechement-nicolas-sarkozy-2814771.html" style="font-size: 12px;" target="_blank">&gt;&gt;&gt;&gt; À lire aussi : Discours de Wagram : quand François Hollande tacle sèchement Nicolas Sarkozy</a>Concernant l&#39;islam, le chef de l&#39;Etat a déclaré vouloir réussir &quot;la construction&nbsp;de l&#39;islam de France&quot;. Sans citer le burkini, il annonce qu&#39;il n&#39;y aura pas de législation de circonstance, aussi inapplicable qu&#39;inconstitutionnelle&quot;. A la question &quot;l&#39;islam est-il compatible avec la République&quot; : &quot;Ma réponse est oui, clairement oui&quot; a-t-il tranché.<blockquote class="twitter-tweet" data-lang="fr">Je l&rsquo;affirme, tant que je suis Président, il n&rsquo;y aura pas de législation de circonstance, aussi inapplicable qu&rsquo;inconstitutionnelle <a href="https://twitter.com/hashtag/Wagram?src=hash">#Wagram</a>&mdash; François Hollande (@fhollande) <a href="https://twitter.com/fhollande/status/773826879765741568">8 septembre 2016</a></blockquote><blockquote class="twitter-tweet" data-lang="fr">&nbsp;</blockquote><blockquote class="twitter-tweet" data-lang="fr">François Hollande a également fait référence aux prochaines échéances électorales.&nbsp;&quot;Ce n&#39;est pas facile l&#39;élection...,&quot; a-t-il confié. &quot;Il faut la mériter. Il faut s&#39;y préparer. Et il faut respecter les citoyens.&quot;&nbsp;Il a par ailleurs détaillé les enjeux à venir ce ces prochaines présidentielles : &quot;la protection des Français, la cohésion nationale, le modèle social, la conception de la démocratie, la place de la France en Europe et dans le monde.&quot;</blockquote>Alors que certains attendaient que le président donne des pistes concernant une <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepites/discours-wagram-francois-hollande-entend-clairement-qu-sera-candidat-2814789.html" target="_blank">éventuelle candidature à la présidentielle</a>, il est resté sibyllin mais a laissé entendre qu&#39;il n&#39;en resterait pas là. &#39;Quand le danger est là, nous devons nous retrouver. Je ne me détournerai pas de cet objectif qui m&#39;a animé tout au long du quinquennat. Je ne laisserai pas la France être abîmée, réduite, son état de droit contesté, son éducation réduite et sa culture amputée. C&#39;est le combat d&#39;une vie.&quot;Puis de conclure :&quot;Nous sommes la France et je vous l&#39;assure, la démocratie est notre arme et notre âme, et c&#39;est ainsi que nous vaincrons le terrorisme. Vive la République et vive la France&quot;.

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Avec son discours de Wagram, François Hollande se pose en rempart contre le terr

À suivre 

Avec son discours de Wagram, François Hollande se pose en rempart contre le terrorisme et entrevoit 2017

On se souvient de &quot;l&rsquo;incident Ronaldo&quot; lors de l&rsquo;euro de football : l&rsquo;attaquant portugais, à entendre les commentaires de la quasi-totalité des médias français, semblait être tombé tout seul sur la pelouse du stade de France. Les jeux de Rio qui viennent de s&rsquo;achever ont confirmé que notre art rhétorique national était décidément dans une forme olympique. Quitte à se faire à nouveau agonir d&rsquo;injures par certains internautes, l&rsquo;on ne peut donc se dérober à l&rsquo;obligation d&rsquo;une petite analyse du discours dominant, servi pendant 15 jours sur toutes nos antennes.Les choses ont commencé très tôt avec l&rsquo;épreuve de cyclisme féminin où la pauvre Annemiek van Neulen, a été victime d&rsquo;une chute effroyable, tête la première, sur les pentes glissantes des collines brésiliennes. Et, tout de suite, la même phrase que lors de l&rsquo;affaire Ronaldo, véritable formule magique quand un sportif connaît un malheur : &quot;elle (ou il) le sait bien : CA FAIT PARTIE DU SPORT&quot;. A la condition bien sûr que le sportif en question soit étranger. Toute infortune touchant un compatriote, comme la terrible défaillance de Yohann Diniz au 50 kms marche (qui finira septième), connaît un tout autre traitement : &quot;injustice du sort&quot;, &quot;héroïque jusqu&rsquo;au bout&quot;, &quot;immenses efforts non récompensés&quot;, etc.&nbsp;J&rsquo;entends déjà les protestations qui diront que cela est bien normal ; qu&rsquo;une compétition fondée sur la rivalité entre pays (cf. le tableau des médailles égrené chaque jour) ne peut qu&rsquo;exciter un nationalisme qui vaut tout de même mieux que la guerre pure et simple. Après tout, l&rsquo;olympisme antique signifiait bien, par la trêve sacrée qui l&rsquo;entourait, qu&rsquo;il était déjà une alternative pacifique au conflit perpétuel entre cités grecques.J&rsquo;entends aussi l&rsquo;indignation de ceux qui à juste titre feront la comparaison avec <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/decryptage/jo-rio-2016-mais-laissez-donc-bresiliens-applaudir-ou-siffler-qui-veulent-2787531.html" target="_blank">le déchaînement du public brésilien dès qu&rsquo;un maillot jaune et vert était sur le terrain. A coup sûr les habitants de Rio méritent la médaille d&rsquo;or du &quot;chauvinisme</a>&quot;, sous réserve que l&rsquo;on accepte de leur transmettre ainsi la flamme de ce vrai trésor national.&nbsp;Mais les commentateurs brésiliens ont su déployer une habileté rhétorique admirable pour apaiser les observateurs étrangers. De Kuerten à Raj, ils ont reconnu d&rsquo;emblée le problème avec un sourire désarmant, fidèles à l&rsquo;enseignement des anciens orateurs, résumé par le grand spécialiste de rhétorique Chaïm Perelman : &quot;Quand une objection grave peut peser sur tout le déroulement du discours, il ne sert à rien d&rsquo;avancer des arguments qui seraient tous interprétés en fonction de cette objection. Il faut d&rsquo;abord réfuter celle-ci pour laisser le champ libre à des interprétations plus favorables&quot;. Et nos amis brésiliens de mettre les réactions trop vives de leurs compatriotes sur le compte d&rsquo;un enthousiasme encore &quot;naïf&quot; (sic). Nulle agressivité encore moins de méchanceté chez un peuple habitué aux seuls codes de la &quot;football mania&quot;. Et voilà la cause brésilienne plaidée avec un talent qui, lui, n&rsquo;avait rien de &quot;naïf&quot;&hellip;Il est vrai que parmi nos commentateurs français, le discours a été fort différent entre les sportifs ou anciens sportifs d&rsquo;une part et certains journalistes de l&rsquo;autre : les premiers ont osé rappeler les exigences (et parfois les règles élémentaires) de la discipline, l&rsquo;énormité de la concurrence et la nécessité de ne pas vendre trop tôt la peau de l&rsquo;ours. Quand nos commentateurs comprendront-ils que le wishful thinking et les hurlements précipités du &quot;c&rsquo;est déjà gagné&quot; mettent une pression contre-productive sur nos athlètes ? Voir les résultats du saut à la perche et du handball masculin&hellip;Mais le talent rhétorique (dans le bon sens du terme) a été surtout la marque de nos champions, dont les leçons d&rsquo;humilité, de grandeur d&rsquo;âme et -osons le terrible mot anglo-saxon &ndash; le fair play ont été impressionnants. Hormis le cas <a class="Colorbox" href="http://www.atlantico.fr/pepitesvideo/renaud-lavillenie-immense-deception-cette-ambiance-merde-2793962.html" target="_blank">Lavillenie</a>, les déclarations des athlètes français ont été à la hauteur de leur qualité sportive. Loi qui se vérifie presque toujours chez les grands champions quel que soit le sport, de Drut à Federer, d&rsquo;Estanguet à Bolt. Qualité de la formulation, vérité du sentiment, altruisme des remerciements, voire distance de l&rsquo;humour. Aussi bien chez le coureur Pierre-Ambroise Bosse, chez les kayakistes et canoïstes multi-médaillés, que chez nos superbes cavaliers et autres escrimeurs qui ont la langue aussi fine que la lame. On pense aussi à la modestie en or de la judokate Emilie Andéol, avec ses larmes de joie, étonnée devant un triomphe que rien n&rsquo;annonçait dans un parcours chaotique.Mais la palme du fair play revient sans doute à la boxeuse Sarah Ourahmoune qui, après un combat final incertain jusqu&rsquo;au bout, a déclaré que &quot;la décision du jury était juste&quot;, nous invitant tout simplement à partager le bonheur d&rsquo;une magnifique médaille d&rsquo;argent, joyau ultime d&rsquo;une carrière exemplaire.

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La médaille d’or française oubliée à Rio : celle de la rhétorique

Forme olympique

Mais plus qu&rsquo;un conflit généralisé, c&rsquo;est un grand et beau duel que souhaitent les médias, car dans toute bonne dramaturgie, il faut deux protagonistes, et deux seulement&nbsp;: Alain Juppé et Nicolas Sarkozy en l&rsquo;occurrence. Est-ce l&rsquo;explication des tentatives faites pour discréditer le &quot;troisième homme&quot; annoncé, Bruno Le Maire&nbsp;? Comme cette rumeur, répandue de tweet en tweet, sur sa prétendue déclaration sur &quot;NOS femmes&quot;, alors même que le verbatim de son discours est sans ambiguïté : &quot;en France, LES femmes sont visibles&quot;&hellip;Mais passons. Pour en revenir au fameux &quot;duel au sommet&quot; (des sondages), il est vrai que les deux protagonistes s&rsquo;exposent au petit jeu des médias&nbsp;: allusions négatives d&rsquo;Alain Juppé à Nicolas Sarkozy (&quot;je refuse d&rsquo;instrumentaliser les peurs&quot;). Et réciproquement&nbsp;: &quot;il n&rsquo;y a pas d&rsquo;identité heureuse&quot;. Sans oublier la polémique sur &quot;le code de conduite&quot;, le traitement &quot;humain/inhumain&quot; de l&rsquo;immigration etc.Même si chacun proteste de sa volonté &quot;d&rsquo;unité&quot;, de &quot;débat de fond&quot;, de son refus du &quot;pugilat&quot;, le naturel risque fort de revenir au galop&nbsp;: l&rsquo;impétuosité de l&rsquo;ancien Président tout comme la susceptibilité de l&rsquo;ancien premier ministre. D&#39;ailleurs, même en l&rsquo;absence de déclaration publique, l&rsquo;appétit médiatique trouvera à se nourrir des rubriques &quot;confidentielles&quot; et des révélations du Canard enchaîné.Mais au-delà des petites phrases, d&rsquo;ailleurs très sollicitées par des commentateurs qui veulent à tout prix leur &quot;déchirement de la droite&quot;, il importe de voir que les deux hommes ont fait des choix rhétoriques fondamentaux et mûrement réfléchis.Plus exactement, ils ont procédé tous deux, en cette rentrée capitale, à des REFORMULATIONS de leurs positions.Reformulation des ENJEUX chez Nicolas Sarkozy. Plus sensibles à la &quot;com&#39; &raquo; qu&rsquo;à l&rsquo;argumentation, beaucoup d&rsquo;observateurs se sont polarisés sur le &quot;carpet bombing&quot; de l&rsquo;ancien président et à son fameux effet de &quot;blast&quot;. En fait, son but profond est de déterminer l&rsquo;agenda des primaires (et même des présidentielles). C&rsquo;est l&rsquo;application de la &quot;loi de Fabius&quot;&nbsp;: celui qui fixe l&rsquo;agenda gagne l&rsquo;élection. Et c&rsquo;est bien pourquoi Nicolas Sarkozy prend soin d&rsquo;organiser tout son argumentaire autour d&rsquo;un triptyque clair et simple &quot;autorité, sécurité, identité&quot;. Mais le risque demeure pour lui toujours le même&nbsp;: se voir renvoyer, même sur ces questions de prédilection, à son bilan mitigé et à ses revirements (droit du sol, double peine etc.)De son côté, Alain Juppé se livre à une reformulation de son POSITIONNEMENT. Face à l&rsquo;offensive et à la remontée de son rival, deux solutions s&rsquo;offraient à lui&nbsp;: durcir son discours mais au péril de paraître &quot;à la remorque&quot; de Nicolas Sarkozy et de lui donner ainsi raison. Il a donc préféré à juste titre &quot;enfoncer le clou&quot; en maintenant ces positions quitte à les préciser. Son &quot;identité heureuse&quot; si décriée&nbsp;? &quot;C&rsquo;est un objectif, évidemment pas un constat&quot;. Sa fameuse &quot;modération&quot;&nbsp;? Elle est tout sauf &quot;une solution de facilité&quot; ; d&rsquo;ailleurs c&rsquo;est l&rsquo;obsession de &quot;l&rsquo;autorité qui est la vraie faiblesse&quot;. Le procédé rhétorique à l&rsquo;oeuvre dans tous ces exemples s&rsquo;appelle un anthorisme&nbsp;: c&rsquo;est-à-dire le renversement du sens des termes utilisés par l&rsquo;adversaire. Mais le message reste flou&nbsp;: vouloir concilier &quot;diversité et unité&quot;, n&rsquo;est-ce pas encore ménager la chèvre et le chou&nbsp;? Refuser une loi sur le burkini, certes, et non sans raison, mais alors que fait-on pratiquement&nbsp;?D&#39;où le risque encouru par un tel discours. Sans doute un pays déchiré recherchera tôt ou tard le &quot;rassemblement&quot;&nbsp;: mais par &quot;l&rsquo;harmonie&quot; ou par la poigne&nbsp;? Et la question se pose-t-elle dans les mêmes termes dans l&rsquo;électorat de la primaire&nbsp;? D&#39;où le caractère évidemment crucial de sa composition. Pour ne rien dire des aléas redoutables de la période qui s&rsquo;ouvre, entre attentats menaçants et incertitudes économiques.Une chose reste sûre et plus que jamais déterminante en un temps de discrédit abyssal de la classe politique. On le souligne à l&#39;envi pour Nicolas Sarkozy, mais cela vaut aussi pour Alain Juppé&nbsp;: leur CREDIBILITE pour la primaire est encore loin d&rsquo;être établie.Ce qui laisse autant d&rsquo;espace aux autres candidats pour affirmer la leur&hellip;

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Juppé/Sarkozy : "Ô duel tant désiré"… par les médias. Mais la route est longue

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Juppé/Sarkozy : "Ô duel tant désiré"… par les médias. Mais la route est encore longue pour les deux protagonistes

France

Politique

Terrorisme

Des mots, des mots, des mots... Quand François Hollande part à la reconquête de l'Elysée avec une obsession rhétorique qui pourrait vite se retourner contre lui 

Le discours d&rsquo;Hillary Clinton à la convention démocrate était très attendu. Comment allait elle répliquer à l&rsquo;artillerie lourde de son adversaire républicain qui l&rsquo;avait accusée rien moins que de crimes la semaine précédente. Comment allait elle contrer les tentatives de séduction de Trump à l&rsquo;égard de son propre électorat femmes, latinos, noirs, LGBT ? Et surtout comment allait elle offrir une autre image, positive et convaincante, d&rsquo;une Amérique peinte en noir par Trump ?&nbsp;La réponse est venue dans un discours brillantissime, où l&rsquo;excellence de speechwriters démocrates a encore fait merveille et où Hillary elle-même a su surmonter ses faiblesses oratoires. Habillée dans un tailleur-pantalon blanc proclamant à la fois son leadership et son innocence, la tête droite et le regard inspiré, la voix bien posée, les pauses bien marquées, la gestuelle ouverte et inclusive, la candidate démocrate a fait un sans-faute dans l&rsquo;attitude : digne mais non arrogante, ferme mais non cassante, résolue mais non butée.Les thèmes du discours ont eux aussi été bien choisis : pour rétablir une image très négative dans l&rsquo;opinion, Hillary a longuement développé son ethos, sa personnalité et ses valeurs, à travers un long storytelling personnel. Celle que l&rsquo;on présente comme le symbole de l&rsquo;establishment a rappelé ses origines très modestes et son parcours typique de la méritocratie à l&rsquo;américaine conjuguée au féminin. Celle que l&rsquo;on qualifie de dure et d&rsquo;indifférente, a rappelé son engagement précoce en faveur de l&rsquo;enfance handicapée et multiplié les témoignages d&rsquo;empathie. L&rsquo;éthos et le pathos ont d&rsquo;ailleurs été les registres dominants, à travers l&rsquo;appel aux valeurs américaines d&rsquo;égalité des chances de courage et de solidarité : le vivre ensemble et le faire ensemble ont été les leitmotivs de son message avec le martèlement de together !&nbsp;Et, par un recours systématique à l&rsquo;antithèse, la charge contre Trump toute trouvée et déployée avec gourmandise au prix d&rsquo;une grosse mauvaise foi : brodant sur la fameuse phrase de son adversaire, I alone can fix it, (&laquo; c&rsquo;est moi seul qui peut régler le problème &raquo;), Hillary force la syntaxe et lui fait dire &laquo; je peux régler le problème tout seul &raquo; (I can fix it alone). Le procédé annonce une offensive tous azimuths contre la crédibilité du candidat républicain : &nbsp;incompétent dans les affaires, ignorant les réalités du monde, incapable de se maîtriser ; et plus encore cynique doublé d&rsquo;un menteur qui fait fabriquer ses produits en Chine (et au Mexique !) tout en pleurant sur les ruines de l&rsquo;industrie américaine. Rien de plus efficace que de souligner les contradictions de l&rsquo;adversaire pour le disqualifier. Le tout servi par un arsenal impressionnant d&rsquo;images, d&rsquo;allitérations, de questions rhétoriques et de formules tirées au cordeau : there is no other Donald Trump. This is it. &nbsp; &nbsp;&nbsp;Le contraste était net avec la prestation de son adversaire bien moins réussie techniquement. Et quand celui-ci qualifie le discours d&rsquo;Hillary de &laquo; hurlement très moyen &raquo; (so average scream), il n&rsquo;est pas fair play et risque fort d&rsquo;aggraver son propre cas. On comprend la satisfaction du camp démocrate et des médias &laquo; libéraux &raquo;, y compris chez la plupart des commentateurs français, très pro-Hillary. &nbsp;Mais l&rsquo;insatisfaction demeure quant au fond de ce discours, d&rsquo;une légèreté inquiétante. Quasiment aucun chiffre et passage bien rapide sur les faits, surtout ceux qui fâchent (criminalité, immigration illégale, menaces extérieures). L&rsquo;Amérique qu&rsquo;elle décrit est un monde de Bisounours où la bonne volonté congénitale d&rsquo;un peuple d&rsquo;exception suffira à résoudre tous les problèmes. Le wishful thinking d&rsquo;un beau rêve bipartisan remplace l&rsquo;analyse politique. Les propositions concrètes restent aussi vagues que coûteuses : grand plan d&rsquo;investissement, large exonération des droits universitaires, hausse des salaires etc. Avec en face pour toute solution, &laquo; faire payer les riches &raquo;. On connaît la chanson, notamment en France. Et on mesure le poids du ralliement de Bernie Sanders...&nbsp;Certes, Hillary a retenu les impératifs de tout discours politique gagnant : être aussi inclusif que possible et opposer l&rsquo;espoir et l&rsquo;unité à la peur et à la division. Encore faut-il que deux conditions soient réunies pour que le message soit crédible : une solide argumentation qui fasse honnêtement la part des difficultés ; et la conformité du réel au discours. Tant que l&rsquo;économie américaine va bien, la candidate démocrate pourra bénéficier de la loi édictée par son mari : it&rsquo;s the economy stupid (&laquo; ce qui compte, c&rsquo;est l&rsquo;économie, idiot ! &raquo;). Mais au moindre fléchissement de la conjoncture d&rsquo;ici les élections, la version sombre peinte par Trump gagnera en crédibilité. Surtout si des faits divers tragiques et plus encore des attentats viennent encore alourdir le climat de la campagne.Dans tous les cas, le registre de l&rsquo;attaque personnelle dans laquelle celle-ci s&rsquo;est installée n&rsquo;augure rien de bon, ouvrant la triste perspective d&rsquo;un choix final entre le moins détesté des deux candidats.&nbsp;

Hillary contre Donald ou la réponse de la bergère au berger

International

Hillary contre Donald ou la réponse de la bergère au berger. La guerre (pas très propre) ne fait que commencer

Comme l&rsquo;a très justement rappelé Dominique de Villepin, &quot;nous sommes dans une période où les mots doivent avoir du sens&quot;... Quel dommage qu&rsquo;il ne se soit pas d&rsquo;abord appliqué le conseil à lui-même&nbsp;! Toujours soucieux de faire entendre sa différence, l&rsquo;ancien Premier ministre a été l&rsquo;un des rares responsables politiques (nous ne parlerons pas des irresponsables d&rsquo;extrême gauche et d&rsquo;ultra-droite) à détonner dans les réactions aux attentats par son refus d&rsquo;adhérer au consensus sur l&rsquo;état de &quot;guerre&quot;. Car &quot;une guerre&quot;, dit-il, &quot;c&rsquo;est deux Etats qui se confrontent&quot;. Faut-il donc à l&rsquo;ancien diplomate qu&rsquo;un ambassadeur vienne, en jaquette et gants blancs, remettre au Quai d&rsquo;Orsay une déclaration en bonne et due forme&nbsp;? A ce compte, il n&rsquo;y aurait eu ni guerre d&rsquo;Algérie, ni guerre de Bosnie&hellip; ni, aujourd&rsquo;hui, guerre de Syrie&nbsp;!Consensus donc sur la guerre, à commencer par le président de la République, qui longtemps après son Premier ministre, s&rsquo;y est enfin résolu&nbsp;: et sur l&rsquo;ennemi lui-même,que là encore, François Hollande a fini par qualifier&nbsp;: le &quot;terrorisme djihadiste&quot;. Et, contrairement à son attentisme habituel, avant même la revendication de Daesh.Mais voilà, comme il arrive souvent, l&rsquo;on passe vite d&rsquo;un extrême à l&rsquo;autre&nbsp;: l&rsquo;on entend désormais que ce sera une &quot;guerre longue&quot;, de &quot;20 ans&quot;, &quot;d&rsquo;une génération&quot;&hellip; Guerre difficile, guerre mondialisée, guerre à fronts multiples, et notamment intérieur, sans aucun doute. Mais enfin il n&rsquo;aura fallu que 5 ans et demi pour vaincre Hitler qui disposait tout de même d&rsquo;autres forces que celles de &quot;l&rsquo;Etat islamique&quot; et d&rsquo;une volonté destructrice plutôt féroce&hellip; Tout dépend de la volonté et de la taille de la coalition adverse. Or &quot;L&rsquo;Etat islamique&quot; dans sa spirale mortifère ne fait-il pas exactement comme Hitler&nbsp;? C&rsquo;est-à-dire tout ce qu&rsquo;il faut pour s&rsquo;aliéner tout le monde.Consensus aussi sur la nécessaire &quot;union nationale&quot;&hellip; mais déjà avec quelques doutes et soupçons. Et les nouveaux gardiens de l&rsquo;union sacrée de critiquer les leaders des Républicains qui demandent des &quot;inflexions&quot; sérieuses dans notre politique étrangère et intérieure. Or depuis quand l&rsquo;union nationale signifie-t-elle la fin du débat démocratique&nbsp;? En quoi faire des propositions concrètes pour parvenir au but commun serait-il illégitime&nbsp;? Se souvient-on que les débats au sein de &quot;l&rsquo;union sacrée&quot; de 14-18, précisément sur la conduite de la guerre, furent des plus vifs&nbsp;? Mais il faudra être vigilant sur les postures, les petits et grands calculs électoraux, à droite comme à gauche.Et puis, demeurent les vieux réflexes qui ont décidément la vie dure. De façon encore discrète (mais pour combien de temps&nbsp;?) l&rsquo;épouvantail de &quot;l&rsquo;islamophobie&quot; et la &quot;stigmatisation&quot; refait surface.Quand s&rsquo;avisera-t-on que l&rsquo;expression de &quot;phobie&quot;, appliquée à une doctrine, est un non-sens&nbsp;: parle-t-on de &quot;marxophobie&quot;, de &quot;libéralophobie&quot; ? Pourquoi pas alors, comme le revendique une Christine Boutin, de &quot;christianophobie&quot; ? L&rsquo;hostilité à une croyance, &quot;même religieuse&quot; comme le dit la Déclaration des droits de l&rsquo;homme, est, en démocratie, parfaitement légitime. Tout autre chose est l&rsquo;agression contre les adeptes de cette doctrine&nbsp;: distinction sans laquelle il n&rsquo;est pas de liberté.Sur le fond, quand entendrons-nous enfin les analyses de tant de Musulmanset de tant de spécialistes de l&rsquo;Islam qui attestent bel et bien la présence en son sein de ce radicalisme&nbsp;violent? Evidemment pas comme sa nature profondemais comme l&rsquo;une de ses possibilités historiquement bien documentée, dont les racines remontent au moins au XIIIème siècle et à Ibn Taymiyya, la référence phare du djihadisme. Et surtout un radicalisme qui gagne du terrain, y compris en Europe, depuis 30ans. Quand comprendra-t-on aussi que l&rsquo;&laquo;&nbsp;islamophobie&nbsp;&raquo; est un paravent derrière lequel ces mêmes radicaux se cachent pour interdire toute critique à leur endroit et souderl&rsquo;&nbsp;Oumma derrière eux &nbsp;? Quand aidera-t-on donc la très grande majorité des Musulmans à se libérer du chantage, des pressions et des amalgames que leur imposent, non la République Française, mais les Islamistes eux-mêmes, leurs commanditaires et leurs séides stipendiés&nbsp;?Pour cela, il faut bel et bien &quot;stigmatiser&quot; les Islamistes radicaux&nbsp;!Car c&rsquo;est en définitive toujours la liberté, la liberté de tous, qui est visée, d&rsquo;attentat en attentat&nbsp;: liberté d&rsquo;expression, de confession, d&rsquo;interprétation, de fréquentation, liberté tout simplement de &laquo;&nbsp;vivre sa propre vie, parce qu&rsquo;elle est la sienne&nbsp;&raquo;, comme disait John Stuart Mill. Sans doute les cibles changent, les modes opératoires diffèrent, la violence s&rsquo;emballe et se démultiplie&nbsp;: mais, contrairement là aussi à ce que l&rsquo;on entend, la violence du 13 novembre est certes totale mais non &quot;aveugle&quot;, pas plus que ce déchaînement d&rsquo;atrocités n&rsquo;est &quot;incompréhensible&quot;. Comme l&rsquo;avait bien vu Hannah Arendt, ce totalitarisme, hanté comme ceux qui l&rsquo;ont précédé par le fantasme de la &quot;pureté&quot; absolue, vise à détruire la &quot;pluralité humaine&quot;. Exterminateurs parce que purificateurs. Il suffit de lire la prose de Daesh contre nos &quot;perversions&quot;. Tout comme les destructions de Palmyre, l&rsquo;arabo-romaine, ou auparavant, celles des bouddhas de Bamyan, antéislamiques et trop hellénisés, c&rsquo;est encore et toujours le même rejet viscéral et haineux du mélange, de la rencontre des êtres et de la synthèse des cultures. D&rsquo;où le stade de France, au public et aux joueurs&nbsp;de toutes origines communiant dans le même jeu; d&rsquo;où les Xème et XIème arrondissements, cœur vivant du melting pot parisien. Et non pas, svp, du &quot;multiculturalisme&quot; (qui lui aussi repointe son nez&nbsp;!),concept trop ambigu où, dans le meilleur des cas, le couscous cohabite pacifiquement avec la choucroute&nbsp;; et où, dans le pire, chacun se voit assigné à et consigné dans sa &quot;communauté&nbsp; d&rsquo;origine&quot;. Paris est tout simplement, et glorieusement, cosmopolite&nbsp;!On le voit&nbsp;: la &quot;guerre des mots&quot; est loin d&rsquo;être gagnée&nbsp;; pourtant, il le faudra bien, si l&rsquo;on veut que la guerre tout court le soit.

Après le basculement dans la violence totale, le grand changement rhétorique ?

Il n&rsquo;y a pas de honte à pleurer. Ceux qui font pleurer, en revanche, sont une honte. Mais eux n&rsquo;ont pas honte. Ils sont fiers de renier ce qui alimente la source de l&rsquo;humanité. On pourrait rappeler que le respect de la vie, est ce qui sépare l&rsquo;animal de l&rsquo;être humain. Mais les animaux sont plus respectueux de la vie que ces barbares fanatisés. La compassion, l&rsquo;amour, l&rsquo;incapacité à atteindre d&rsquo;autres êtres humains sont notre signe distinctif. Ces malades ne sont pas des être humains. Ils sont le négatif de l&rsquo;empreinte humaine, les déchets d&rsquo;une société malade, la honte qui met en perspective ceux qui continueront à considérer la vie comme l&rsquo;objectif ultime de toute civilisation.Le 11 septembre 2001, j&rsquo;étais dans la capitale suédoise pour discuter un partenariat avec l&rsquo;un des leaders de la formation digitale. Dans le hall d&rsquo;entrée de leur immeuble trônaient d&rsquo;immenses écrans TV. Alors que je sortais du RV, et de l&rsquo;immeuble, pour attraper le taxi qui allait me ramener à l&rsquo;aéroport, mon œil fut attiré par une image impossible. L&rsquo;une des tours du world Trade Center était frappé de plein fouet par un avion lancé à pleine vitesse. Pendant quelques secondes, je crois même, quelques minutes, parce que le son des écrans n&rsquo;était pas actif, toutes les personnes arrêtées comme moi devant ces images, se mirent à les commenter, incrédules. Nous avons tous pensé que nous assistions à la bande annonce d&rsquo;un film à gros budget. Personne ne pouvait accepter l&rsquo;idée que nous assistions à une scène réelle. A aucun moment. Il aura fallu que le son soit activé et que nous écoutions en boucle, éberlué, les commentaires de la journaliste de CNN, pour accepter que l&rsquo;impensable s&rsquo;était produit. Donnant une nouvelle lumière à cette expression qu&rsquo;aiment tant les entrepreneurs &laquo;&nbsp;comme il ne savait que c&rsquo;était impossible, il l&rsquo;a fait&nbsp;&raquo;. Malheureusement cette maxime fut utilisée par cette secte barbare qui se révélait avec éclat au monde, en s&rsquo;attaquant à un symbole de la puissance américaine, pour y faire un maximum de morts.La mobilisation des gouvernements, l&rsquo;effroi qui s&rsquo;en suivi, la solidarité mondiale qui s&rsquo;organisa et la volonté affichée de mettre fin à ces agissements, nous laissa à penser que nous vivrions assez longtemps pour voir la fin de ces fous fanatiques. Si nous avions su&nbsp;!En 2002, installé au Maroc, pour développer mon entreprise à l&rsquo;étranger, je prends l&rsquo;avion, encore, pour Oujda. Cette ville frontière entre le Maroc et l&rsquo;Algérie. Arrivé à Oujda, mais encore dans l&rsquo;avion, je bavardais quelques minutes avec le Ministre Marocain de l&rsquo;économie de l&rsquo;époque. Un brillant homme. Et au moment de nous lever, et de quitter l&rsquo;avion, son aide de camp l&rsquo;arrête et lui parle à l&rsquo;oreille. Il me regarde, me salue et m&rsquo;indique qu&rsquo;il vient de se produire un attentant à Casablanca et qu&rsquo;il doit immédiatement repartir. Une bombe venait de tuer dans un restaurant juif de Casablanca. Dans un pays, où traditionnellement, les juifs avaient été respectés et préservés, sur un fonds de culture commune et de traditions croisées. Arrivé à mon hôtel, je voyais les images à l&rsquo;écran. Moins impressionnant que New York, mais tout aussi inquiétant. L&rsquo;accident unique prenait une allure de suite et allait se reproduire avec une tragique continuité ensuite. Jusqu&rsquo;à vendredi soir. D&rsquo;année en année, de mois en mois, chaque pays est devenu la cible de ces attentats aveugles, qui tuent sans discernement, non plus des symboles, mais n&rsquo;importe quelle personne qui se trouve sur son trajet meurtrier.Et nous voilà, presque 15 ans après 9/11, plus en larmes que jamais, avec autant de morts que de questions posées. Pourquoi&nbsp;? Pourquoi n&rsquo;avons nous pas appris de nos erreurs ? Commises en Irak, nous les avons reproduites en Lybie et en Syrie. Armant ceux qui les retournaient contre nous le lendemain. Pourquoi avons nous la sensation qu&rsquo;on pardonne moins à un conducteur sans permis, qu&rsquo;à un récidiviste fiché et radicalisé&nbsp;? Pourquoi sous prétexte maintenir un &laquo;&nbsp;dictateur&nbsp;&raquo;, souvent mis en place par l&rsquo;occident, comme el Assad, préférons nous laisser un Etat islamiste gangréner le Moyen-Orient, trafiquer armes, drogue et pétrole, se dotant ainsi de moyens sophistiqués pour attirer des extrémistes du monde entier et tuer massivement partout où leur folie les guide ?Beaucoup de questions et peu de réponses et d&rsquo;actions, pendant ces 15 années. Mais le prix payé augmente et ces séries, nous le savons, vont continuer et s&rsquo;enchaîner sans fin. Sauf si nous y mettons les moyens. Des moyens que nous connaissons. La stupeur et l&rsquo;horreur que ces attentats provoquent chez les êtres humains que nous sommes constituent le carburant de ces meurtriers. Il faut donc les stopper. A tous prix.Nous sommes, comme tous les Français, en deuil. Mais comme tous les Français, nous attendons des décisions. Des actes. Forts. Décisifs. Exactement ce que nous pensions avoir en Janvier après l&rsquo;émouvant et combatif discours du maître des prestations scéniques de choc, Manuel Valls, à l&rsquo;Assemblée nationale, et que nous attendons encore.La mémoire des 300 victimes et blessés de vendredi, exige d&rsquo;être à la hauteur, à la hauteur du bien le plus précieux de l&rsquo;humanité. La vie.

Les entrepreneurs pleurent avec les Français

Les entrepreneurs parlent aux Français

Attaques terroristes de Paris : les entrepreneurs pleurent avec les Français



Les mots de l’horreur : après le basculement dans la violence totale, le grand changement rhétorique ?

Voilà une comparaison qui, assurément, ne plaira ni à l&rsquo;un ni à l&rsquo;autre&nbsp;: Christiane Taubira partage avec Nicolas Sarkozy plus d&rsquo;un point commun&nbsp;et notamment le fait d&rsquo;être tous deux excellents orateurs et débatteurs (qualité reconnue par leurs propres adversaires). Ils disposent d&rsquo;un impressionnant arsenal rhétorique, où là encore les similitudes sont frappantes&nbsp;: mise en avant constante de leur ethos (&quot;personnalité passionnée qui assume&quot; ;&quot;valeurs sacrées sur lesquelles on ne transige pas&quot;), recours à des figures de style identiques comme l&rsquo;anaphore et la question rhétorique, large palette expressive (parfois trop&nbsp;!) de la gestuelle et du visage.Et tous deux cibles privilégiées du débat média-politique. Après la semaine &quot;anti-Sarko&quot;, nous avons eu une longue semaine anti-Taubira, mais cette fois dans la rue&nbsp;: policiers, avocats et personnels pénitentiaires sont venus tour à tour assiéger la chancellerie pour clouer au pilori sa politique pénale. Rudes journées d&rsquo;octobre qui rappellent celles d&rsquo;un autre octobre (1789) lorsque le peuple venait conspuer Marie-Antoinette jusque sous son balcon&nbsp;: la place Vendôme n&rsquo;a-t-elle pas un petit air de Versailles&nbsp;?Heureusement, au terme de cette séquence désastreuse, Christiane Taubira a eu la &quot;chance&quot; (l&rsquo;on ne parle pas ici de morale mais d&rsquo;impact médiatique) de se voir insultée par une élue d&rsquo;opposition, dans l&rsquo;une de ces sorties où l&rsquo;abjection raciste le dispute à la sottise politique&nbsp;: nouveau rappel que &quot;la droite la plus bête du monde&quot; n&rsquo;a pas disparu... En un clin d&rsquo;œil, voilà ChristianeTaubira passée du statut d&rsquo;accusée à celui de victime. Basculement très opportun dans son cas, vu la polémique autour de la ministre de la Justice, sur le thème de la &quot;protectrice- des- délinquants- qui- ne- se- soucie- pas- des- victimes&quot;&hellip;Mais l&rsquo;intéressée sait aussi opérer elle-même ces retournements de situation rhétorique (sinon politique). Parce que souvent attaquée, cette escrimeuse hors pair est en effet une championne de l&rsquo;esquive et de la contre-attaque. Les techniques défensives de la rhétorique n&rsquo;ont aucun secret pour elle,&nbsp;quitte à dire tout et son contraire:passage du général au particulier (&quot;il y a récidive et récidive&nbsp;: un défaut répété de permis de conduire n&rsquo;est pas un viol répété&quot;)&nbsp;; du particulier au général (&quot;les cas concrets sont contradictoires, prenons de la hauteur&nbsp;!&quot;)&nbsp;; de la forme au fond (&quot;s&rsquo;il vous plaît, c&rsquo;est un débat sérieux&nbsp;!&quot;)&nbsp;; du fond à la forme (&quot; ce sujet n&rsquo;est pas abordé dans mon projet de loi&quot;)&nbsp;; voire de la forme à la forme (&quot;un procès se fait dans un prétoire, pas à la télévision&nbsp;!&quot;). Comme le furet du jeu enfantin, Christiane Taubira &quot;est passée par ici, elle repassera par là&quot;&hellip; Elle n&rsquo;est jamais là où on l&rsquo;attend. Puisqu&rsquo;on veut en faire une cible, elle sera une cible mouvante&nbsp;! Et si cela ne suffit pas, elle recourra à l&rsquo;interpellation et à la disqualification de l&lsquo;interlocuteur, y compris des journalistes (&quot;Pourquoi êtes-vous si désagréable ?&quot; ; &quot;Votre question manque de rigueur&quot; ; &quot;Ce n&rsquo;est pas digne de vous&quot; etc&hellip;).Sa marque de fabrique fondamentale est, comme dans un tour de magie, la substitution. Substitution de position, de sujet et de niveau&nbsp;: l&rsquo;interviewée devient intervieweuse&nbsp;; la question de la réforme pénale se transforme en débat sur l&rsquo;état des prisons&nbsp;; le débat sur le fond est éclipsé par l&rsquo;attaque ad hominem.En d&rsquo;autres termes, la rhétorique de Christiane Taubira est une série detours de passe-passe. Magie de sa rhétorique, si universellement admirée&nbsp;? Oui, au sens premier du mot&nbsp;: un illusionnisme de haute volée. Et qui, comme l&rsquo;art du magicien, repose sur une technique centrale&nbsp;: détourner l&rsquo;attention de l&rsquo;auditoire de l&rsquo;objet qui doit disparaître. Le foulard devient lapin, le lapin devient colombe et la colombe devient fumée. De même, c&rsquo;est avec une véritable maestria que Christiane Taubira sait escamoter&nbsp;l&rsquo;enjeu central du débat: une récidive gravissime pose-t-il le problème de l&rsquo;application des peines et de la responsabilité des juges? Pour Christiane Taubira le &quot;vrai problème&quot; est ailleurs&nbsp;: la non préparation de la sortie (Ah&nbsp;! les &quot;sorties sèches&quot;)&nbsp;; la surpopulation carcérale; la confusion pénale léguée par la droite, etc.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;Et si la question se fait trop pressante ou l&rsquo;émotion trop forte, elle dégaine l&rsquo;arme absolue&nbsp;: &quot;devant la douleur des victimes, je fais silence&quot;. Voilà qu&rsquo;au nom même de l&rsquo;empathie, du pathos, l&rsquo;argumentation rationnelle, le logos, est évacué et, avec lui, la question posée&hellip;&nbsp;Chapeau bas (de Harry Potter)&nbsp;!Mais son stratagème le plus efficace est d&rsquo;une toute autre portée&nbsp;: il concerne le fond du débat à travers le tour de passe-passe logique. Plus &quot;sophistiqué&quot; de fait car bien proche du&hellip;sophisme&nbsp;! Le dispositif est simple et connu depuis Aristote&nbsp;: une prémisse majeure indiscutable comme &quot;les prisons françaises sont surpeuplées et délabrées&quot; ; une conclusion qui semble logique&nbsp;: &quot;donc il faut trouver un autre système de sanction ne passant pas par la prison (la contrainte pénale)&quot;. Pourtant une autre conclusion pourrait venir à l&rsquo;esprit : &quot;donc il faut construire d&rsquo;urgence de nouvelles prisons et rénover les anciennes&quot;. Car, pour arriver à la conclusion de Christiane Taubira, une autre prémisse (appelée &quot;mineure&quot; dans le syllogisme) est indispensable, à savoir &quot;la prison esten soi criminogène&quot;. Mais cette prémisse est cachée car inaudible par l&rsquo;opinion publique qui persiste à penser que c&rsquo;est le crime qui conduit à la prison et non la prison au crime&hellip;Or cette pratique bien connue en rhétorique de la prémisse cachée est au cœur de tous les raisonnements de la garde des sceaux&nbsp;: priorité au suivi et à la réinsertion&nbsp;? Cela suppose que des moyens considérables soient mobilisés et que tous les délinquants, en tout cas les plus dangereux, soient réinsérables&nbsp;; liberté d&rsquo;appréciation laissé aux seuls juges&nbsp;? Cela suppose que les juges ne se trompent jamais, au moins pour les cas graves&nbsp;; amende préférable à la prison pour les petits délits&nbsp;? Cela suppose que les délinquants potentiels ne fassent aucun calcul du risque encouru avant de passer à l&rsquo;acte. Autant de conditions bien fragiles que la magicienne Taubira escamote avec dextérité. Comme elle escamote deux faits majeurs qui sapent la base même de sa politique pénale : un taux d&rsquo;incarcération inférieur en France à la moyenne européenne et une massive inexécution des peines prononcées par une justice prétendument &quot;sévère&quot;. Ce qui renvoie de nouveau à la rénovation impérative de nos prisons scandaleuses&hellip;On mesure en tout cas l&rsquo;expertise et la présence d&rsquo;esprit nécessaires pour contrer un tel arsenal rhétorique. Combien d&rsquo;hommes politiques et de journalistes s&rsquo;y sont frottés sans préparation suffisante etl&rsquo;ont appris à leurs dépens&nbsp;! Et si, tout simplement, ils dissipaient en les nommant ces tours de magie rhétorique&nbsp;? L&rsquo;illusion ne résiste jamais à la révélation des &quot;trucs&quot;&hellip;

Christiane Taubira : magie de la rhétorique ou rhétorique de magicienne ?

Se pencher sur le profil rhétorique de Bruno Le Maire parmi les ténors de l&rsquo;opposition est justifié par l&rsquo;irruption du &laquo;&nbsp;cadet de la droite&nbsp;&raquo; dans le jeu de la future primaire présidentielle, où il fait désormais quasiment jeu égal avec François Fillon.Irruption qui n&rsquo;avait rien d&rsquo;évident pour celui qui fut longtemps un &laquo;&nbsp;collaborateur&nbsp;&raquo; des grands puis un &laquo;&nbsp;ministre technique&nbsp;&raquo;, haut fonctionnaire d&rsquo;origine et de style, comme il en est tant dans notre république énarchique. Celui que tout désignait comme un &laquo;&nbsp;commis du Cardinal&nbsp;&raquo; serait-il donc devenu un nouveau d&rsquo;Artagnan&nbsp;? Nul doute qu&rsquo;il a été inspiré par la longue fréquentation de Dominique de Villepin, bretteur infatigable (pour le meilleur comme pour le pire) qui détonnait dans le chiraquisme finissant&nbsp;; mais il se pourrait bien qu&rsquo;en disciple qui se respecte, il soit en train de dépasser le maître.La mutation, préparée dès 2012 s&rsquo;est cristallisée dans l&rsquo;opinion lors de la candidature à la présidence de l&rsquo;UMP l&rsquo;an dernier, où Bruno Le Maire n&rsquo;a pas hésité à braver son ancien chef avec bien plus qu&rsquo;un succès d&rsquo;estime&nbsp;: près de 30% des voix.Preuve tangible d&rsquo;une qualité peu cultivée dans nos élites&nbsp;: le culot, toujours apprécié par un peuple frondeur. Culot qui donne d&rsquo;entrée de jeu la clef de la rhétorique de BLM. L&rsquo;ethos personnel est son registre favori&nbsp;: énergie de la jeunesse, volonté réformatrice, parler vrai, accord des actes et des paroles&nbsp;; tels sont les 4 piliers de son discours prenant point par point l&rsquo;exact contrepied de l&rsquo;habitus des élites politiques&nbsp;que ne supporte plus l&rsquo;opinion : éternel retour des mêmes, conservatisme pusillanime, langue de bois et surtout &laquo;&nbsp;faites ce que je dis, pas ce que je fais&nbsp;!&nbsp;&raquo;.D&rsquo;où l&rsquo;argument de l&rsquo;âge (&laquo; les&nbsp;nouveaux visages &raquo;), la démission de la fonction publique et le refus du cumul des mandats appliqués à lui-même, gages sans cesse rappelés par l&rsquo;intéressé de sa crédibilité. D&rsquo;où un maniement parfait du logos où la thèse est toujours forte et claire. Nul balancement entre tout et son contraire à la Hollande (et désormais à la Valls), qui est encore trop présent chez Alain Juppé. Pour BLM, pas de doute : &laquo;&nbsp;notre modèle est à bout de souffle&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;le RSI est un scandale&nbsp;&raquo; etc. D&rsquo;où, dans le champ programmatique la multiplication de propositions concrètes&nbsp;: sur le collège, sur réforme du RSI, sur l&rsquo;intervention en Syrie. Il partage avec François Fillon une nette avance dans ce domaine, mais, utilisant à fond son mandat parlementaire, BLM a choisi, lui, la voie de l&rsquo;action directe plutôt que du livre-programme&nbsp;: questions au gouvernement, demande de commissions d&rsquo;enquête et propositions de loi. Le message est là aussi très clair&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;agis là où je suis&nbsp;&raquo;.Et ce &laquo;&nbsp;là où il est&nbsp;&raquo; est fort pertinent dans le marché hyperconcurrentiel de la droite&nbsp;: ni la &laquo;&nbsp;droite de la droite&nbsp;&raquo; ni le centre-droit mais le centre de la droite&nbsp;qui le placera idéalement en position d&rsquo;arbitre voire de rassembleur, le moment venu. On l&rsquo;a bien vu lors des débats sur le mariage pour tous, où après s&rsquo;être abstenu sur le texte il en a exclu le retrait devant les militants &laquo;&nbsp;ultra-anti&nbsp;&raquo;- du &laquo;&nbsp;Sens commun&nbsp;&raquo;, faisant ainsi d&rsquo;une pierre deux coups&nbsp;: cohérence et courage, qui sont toujours des marqueurs positifs dans l&rsquo;opinion même chez les adversaires.Mais alors, malgré toutes ces qualités si en phase avec la demande politique, malgré les excellents réseaux sociaux d&rsquo;un politique new age et les relais de terrain qu&rsquo;il laboure avec le savoir-faire d&rsquo;un ancien ministre de l&rsquo;agriculture, pourquoi Bruno Le Maire ne parvient-il pas à faire de véritable percée en tant que présidentiable&nbsp;? En d&rsquo;autres termes, pourquoi Matignon lui semble-t-il acquis, alors que l&rsquo;Elysée demeure encore un &laquo;&nbsp;inattingible lointain&nbsp;&raquo;, pour citer son cher Proust&nbsp;?En dehors des considérations politiques stricto sensu et d&rsquo;abord de l&rsquo;activisme de ses principaux concurrents comme Alain Juppé et François Fillon (en attendant l&rsquo;entrée en scène de Nicolas Sarkozy&nbsp;!), Bruno Le Maire présente encore des signes de faiblesse rhétorique. Si sa crédibilité progresse, l&rsquo;autre déterminant indispensable de l&rsquo;élection en démocratie, sa représentativité reste limitée.Son physique de &laquo;&nbsp;gendre idéal&nbsp;&raquo;, don discours trop rationnel, ce sérieux trop constant l&rsquo;enferment dans un rapport trop cérébral et trop vertical à son propos et à son auditoire. Non qu&rsquo;il ignore le registre émotionnel&nbsp;; l&rsquo;un de ses thèmes favoris (et pertinents) est &laquo;&nbsp;l&rsquo;exaspération de nos compatriotes&nbsp;&raquo;&nbsp;: mais l&rsquo;exaspération qu&rsquo;il exprime est celle de la raison contrariée par l&rsquo;absurdité des choses ou celle de la &laquo;&nbsp;valeur travail&nbsp;&raquo; malmenée par l&rsquo;abus des charges. Il manque une véritable empathie, que seul peut transmettre le storytelling et non des généralités sur &laquo;&nbsp;les agriculteurs&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;les commerçants&nbsp;&raquo;, ou &laquo;&nbsp;les Français&nbsp;&raquo;. Et il lui arrive encore de dire &laquo;&nbsp;ce pays&nbsp;&raquo; pour parler de la France : signature immanquable du haut fonctionnaire, qui coupe le lien symbolique avec le peuple ainsi &laquo;&nbsp;objectivé&nbsp;&raquo; et mis à distance.<div> Autre faiblesse&nbsp;: l&rsquo;abus du registre négatif pour dénoncer le camp adverse sans faire assez valoir la promesse que l&rsquo;on prétend incarner, point cardinal du message politique. Sur ce point Alain Juppé et François Fillon lui sont supérieurs. Il ne suffit pas de dire que &laquo;&nbsp;le pays est plein d&rsquo;atouts&nbsp;&raquo; et les énumérer&nbsp;; il faut peindre le paysage d&rsquo;une France libérée. Comme il fallait peindre le visage d&rsquo;une &laquo;&nbsp;école libérée&nbsp;&raquo;, lors du débat avec Najat Vallaud-Belkacem, où les assauts rhétoriques de Bruno Le Maire se brisèrent sur l&rsquo;inexpugnable sourire de la Ministre, donnant l&rsquo;impression d&rsquo;un boxeur s&rsquo;épuisant à l&rsquo;attaque face à une judoka s&rsquo;appuyant sur l&rsquo;énergie de son adversaire pour le déstabiliser. D&rsquo;où chez lui une frustration croissante et visible, alors même qu&rsquo;il avait un boulevard devant lui.&nbsp;Et qu&rsquo;il disposait d&rsquo;une supériorité culturelle écrasante qui pouvait être utile sur le sujet&hellip; Son talent littéraire et son humanité attestés par ses Jours de pouvoir, sa sensibilité artistique sont autant de marqueurs rares dans une élite monochrome et formatée. Pourquoi en fait-il si peu usage dans ses discours publics&nbsp;? Pourquoi ce débit si mécanique et cette voix si monocorde&nbsp;? Pourquoi si peu de formules, de citations, de références&nbsp;? Et pourquoi si peu d&rsquo;humour chez un homme qui est un bon imitateur de ses pairs&nbsp;? Toutes qualités qu&rsquo;il a su pourtant montrer dans l&rsquo;ambiance (confidentielle) des mardis de l&rsquo;ESSEC. Comme s&rsquo;il y avait deux Bruno le Maire, le politique public et le sensible secret, réservant la meilleure part de lui-même pour d&rsquo;autres exercices, d&rsquo;autres moments et d&rsquo;autres interlocuteurs. Au risque évident de perdre, par ce dédoublement, en densité et en épaisseur. L&rsquo;on sait à quel point Pompidou, Mitterrand et de Gaulle lui-même surent tirer parti de la richesse d&rsquo;une personnalité multidimensionnelle.Référence à de Gaulle qui nous conduit au dernier handicap de Bruno Le Maire&nbsp;: le rapport à un (grand) corps qu&rsquo;il ne donne pas l&rsquo;impression d&rsquo;habiter, où la raideur l&rsquo;emporte dans une projection crispée de la tête vers l&rsquo;avant, posture permanente qui n&rsquo;est pas sans rappeler le même défaut chez Jacques Chirac. L&rsquo;intéressé en semble conscient puisqu&rsquo;il a reconnu prendre des cours d&rsquo;un acteur de théâtre pour régler notamment le ballet de ses grands bras &laquo;&nbsp;embarrassants&nbsp;&raquo;.Il y pourtant bien des atouts à exploiter dans le physique saint-cyrien (Ah&nbsp;! ces yeux bleu-horizon) de notre normalien-énarque, comme le montre l&rsquo;exemple du Général lui-même. Les premières prises caméra de la BBC sur l&rsquo;homme du 18 juin montrent un géant gêné par sa taille et figé dans un garde à vous militaire&nbsp;: l&rsquo;on sait ce que de Gaulle a su, par la suite, faire de la &laquo;&nbsp;télé&nbsp;&raquo;&nbsp;!</div>&nbsp;

Bruno Le Maire : après le "grand serviteur de l’Etat", le nouveau d’Artagnan ?

"L'insoumis"

Bruno Le Maire : après le "grand serviteur de l’Etat", le nouveau d’Artagnan ?

&quot;rhétorique&quot; des ténors de la droite proposé dans cette chronique ne peut se conclure que sur Nicolas Sarkozy. Non que la semaine passée ait été marquée par une prise de parole importante de l&rsquo;intéressé. Mais parce qu&rsquo;elle a été hautement significative du danger qui le guette, le pire qui soit pour tout orateur&nbsp;: devenir inaudible.D&rsquo;abord en raison du tir de barrage rhétorique impressionnant qui lui est opposé, même lorsqu&lsquo;il ne dit rien. L&rsquo;on aura assisté ces derniers jours à l&rsquo;un des exercices favoris des médias français&nbsp;: un déchaînement d&rsquo;anti-sarkozysme tous azimuths. Des déclarations de Jérôme Lavrilleux sur un &quot;homme qui n&rsquo;assume pas&quot; au &quot;crétin arrogant&quot; envoyé par Berlusconi (devenu subitement une référence en crédibilité&nbsp;!) et, bien plus grave, au sondage sceptique des Français sur sa candidature en 2017, la charge a été rude, y compris à droite. La gauche, quant à elle,reprend sur tous les sujets brûlants sa bonne vieille recette de &quot;l&rsquo;héritage&quot;,du chômage à la dette, de l&rsquo;immigration à la fiscalité, du RSI à la délinquance&nbsp;; et dès que l&rsquo;on dit &quot;Syrie&quot;, elle répond &quot;Libye&quot; ! A vrai dire, quel que soit le sujet, tôt ou tard, le nom de l&rsquo;ancien Président revient sur la table et toujours comme synonyme de l&rsquo;abomination de la désolation. Après la reductio ad Hitlerum voici le temps de la reductio ad Sarkozium, nouveau &quot;point Godwin&quot; de la politique française&hellip; Et dans une telle ambiance, l&rsquo;auteur de cet article sait combien il s&rsquo;expose aux feux croisés des sarkophobes et des sarkolâtres&nbsp;!&quot;A tout seigneur tout honneur&quot;, dira-t-on, non sans raison&nbsp;: Nicolas Sarkozy ne fait que récolter ce qu&rsquo;il a semé. Quand on a exercé l&rsquo;hyper-présidence, comment échapper à l&rsquo;hyper-critique&nbsp;? Quand on a tant exposé son ego, comment s&rsquo;étonner qu&rsquo;il vous revienne en boomerang&nbsp;?Concrètement trois enjeux capitaux se dressent devant lui: sa personnalité transgressive et clivante&nbsp;; son bilan supposé &quot;désastreux&quot; ; les affaires dans lesquelles il s&rsquo;est lui-même &quot;pris les pieds&quot;. La question n&rsquo;est pas de savoir si tout cela est juste&nbsp;; elle est de comprendre que tout cela crée une situation redoutable pour l&rsquo;intéressé en sapant les deux piliers du leadership en démocratie&nbsp;: la crédibilité et la représentativité. En rhétorique, le doute ne profite jamais à l&rsquo;accusé&nbsp;: la réception de sa parolepasse d&rsquo;un coup du positif au négatif. Parce qu&rsquo;ils s&rsquo;adressent à l&rsquo;imaginaire, les registres les plus opposés du discours sont en effet, comme ceux du rêve, des registres contigus&nbsp;: l&rsquo;impression d&rsquo;énergie glisse bien vite à celle d&rsquo;hystérie, celle de l&rsquo;ambition laisse place à l&rsquo;accusation d&rsquo;arrivisme, et sous la sainte colère pointe le soupçon du ressentiment et de la revanche personnelle&hellip;Mais alors, au terme d&rsquo;un tel catalogue à charge, la messe (de funérailles) est-elle dite&nbsp;? Ne répète-t-on pasurbi et orbi que l&rsquo;actuel président ne rêve que d&rsquo;une chose&nbsp;: affronter en 2017 son rival de 2012&nbsp;?Eh bien, voilà qui reste à voir&nbsp;! L&rsquo;on sait que François Hollande est le champion du ballon d&rsquo;essai et de la fausse confidence&nbsp;; d&rsquo;ailleurs une rumeur exactement contraire a aussi filtré des arcanes de l&rsquo;Elysée. Son occupant est le premier à savoir que rien ne lui garantit la réédition du même succès face au même adversaire. Et ce pour plusieurs raisons : d&rsquo;abord parce que Nicolas Sarkozy reste un animal politique qu&rsquo;il ne faut jamais sous-estimer. Mais - ce qui est le sujet ici- il demeure aussi&nbsp;un exceptionnel animal rhétorique&nbsp;: même sans la redoutable (mais non irréprochable) plume d&rsquo;Henri Guaino, Nicolas Sarkozy est, de loin, le meilleur orateur de la droite républicaine. Il suffit pour s&rsquo;en convaincre de comparer son discours lors du congrès fondateur des Républicains à ceux des trois autres mousquetaires de son camp&nbsp;: hommage initial et habile à ses rivaux, appel au groupe le plus fort car le plus intime(&quot;notre&nbsp;famille&quot;), sens de la formule, questions rhétoriques percutantes et anaphores martelées qui sont ses grandes marques de fabrique&nbsp;; enfin, parfait équilibre entre dénonciation techniquement parfaite de l&rsquo;adversaire (&quot;la gauche a trahi ses propres idéaux et sa propre histoire&quot;) et déclinaison détaillée de sa propre promesse (&quot;la République de la confiance&quot;). L&rsquo;a-t-on assez remarqué&nbsp;?C&rsquo;est exactement le même schéma qu&rsquo;en 2007, appuyé sur les mêmes figures rhétoriques, qui a donné l&rsquo;excellent discours de la porte de Versailles. A quoi Nicolas Sarkozy ajoute une nouvelle thématique, dévastatrice pour le pouvoir en place&nbsp;: celle du &quot;mensonge&quot;, qu&rsquo;il est le premier à avoir pressentie (mais trop peu et trop tard), dès la campagne de 2012. Il en fait désormais un vrai leitmotiv qui sera, n&rsquo;en doutons pas, au cœur de l&rsquo;argumentaire de la droite en 2017, quel que soit le candidatLe succès&nbsp;est-il pour autant garanti ? Nullement. Justement parce que le temps a passé, dont 5 ans de pouvoir présidentiel, et que c&rsquo;est la crédibilité même de ce discours qui est aujourd&rsquo;hui en jeu.Et d&rsquo;abord sur la question centrale du bilan de son quinquennat. Mal inspiré sur ce sujet comme sur tant d&rsquo;autres par Patrick Buisson, Nicolas Sarkozy s&rsquo;y est jusqu&rsquo;ici refusé. Ce n&rsquo;est pas la concession de quelques &quot;regrets&quot;, très vagues d&rsquo;ailleurs, et qui portent plus sur le style que sur le fond, qui suffiront.Or cebilan s&rsquo;impose pour deux raisons. L&rsquo;une, tactique&nbsp;: si l&rsquo;ancien Président ne le fait pas lui-même, les autres - à gauche comme à droite - le feront, et le font déjà, à sa place&nbsp;! L&rsquo;autre, stratégique&nbsp;: il dispose là d&rsquo;un véritable boulevard&nbsp;autour d&rsquo;une question rhétorique centrale, comme il les affectionne&nbsp;: la France va-t-elle vraiment mieux aujourd&rsquo;hui qu&rsquo;en mai 2012&nbsp;?Dès lors, l&rsquo;on comprend mal un tel évitement. Application de l&rsquo;adage cynique mitterrando-chiraquien selon lequel &quot;faute inavouée est à moitié pardonnée&quot; ? Peur d&rsquo;un effet contre-productifen ouvrant la boîte de Pandore de &quot;l&rsquo;inventaire&quot;? Ou tout simplement résistance psychologique d&rsquo;un &quot;ego sans surmoi&quot; qui se refuse à toute concession&nbsp;?Et l&rsquo;on retombe ainsi sur l&rsquo;enjeu décidément central de l&rsquo;éthos de l&rsquo;orateur.Or pour le restaurer, il ne suffit pas d&rsquo;entamer un énième &quot;J&rsquo;ai changé&quot;. Les Français finissent par avoir le tournis devant ces changements qui s&rsquo;empilent et donc se contredisent. Et tant de proposoff (immédiatement rapportés), tant d&rsquo;attitudes &quot;instinctives&quot; et surtout une gestuelle et des mimiques de moins en moins contrôlées, montrent qu&rsquo;il n&rsquo;en est rien. La règle des spécialistes de speechwriting, pour qu&rsquo;un récit soit crédible,est bien connue&nbsp;: &quot;Show, don&rsquo;t tell&nbsp;!&quot; (&quot;montrer, ne pas dire&quot;). Autrement dit, le changement, c&rsquo;est comme l&rsquo;amour (y compris celui de la France dont Nicolas Sarkozy fait tant état), ne se proclame pas&nbsp;: il se prouve.Or, pour le prouver, le leader des Républicains dispose d&rsquo;une qualité maîtresse qui lui a permis de rendre possible l&rsquo;impossible destinée d&rsquo;un homme que rien ne prédisposait au pouvoir suprême : la surprise. Pour reconquérir les Français, et d&rsquo;abord ceux de droite, primaire oblige, Nicolas Sarkozy doit à nouveau les surprendre.Le peut-il encore et surtout le veut-il encore&nbsp;? &quot;That is the question&quot;&nbsp;!

laser

Nicolas Sarkozy ou comment redevenir audible 

Rhétorico-laser  

Il y a décidément un &quot;mystère Fillon&quot; : pourquoi cet homme dont l&rsquo;expérience est unanimement reconnue, dont la compétence est partout saluée et dont les réseaux parlementaires et sociaux sont très actifs n&rsquo;arrive pas à décoller dans la course aux primaires&nbsp;à droite ? Et cela même alors qu&rsquo;il vient de bénéficier d&rsquo;une forte couverture médiatique lui offrant une palette complète des modes d&rsquo;expression, de l&rsquo;interview au discours en passant par le débat (et pas des moindres, comme le face à face avec Manuel Valls). Tout cela en relation avec la parution de son bon livre&nbsp;Faire, qui détonne dans la &quot;littérature des politiques&quot;, par le sérieux du travail accompli et la qualité de l&rsquo;écriture. Et pourtant&hellip; Le sondage Odoxa qui vient de tomber ne laisse guère de doute&nbsp;: 72% des Français ne lui trouvent pas une &quot;carrure présidentielle&quot;.La réponse pourrait bien se trouver, pour une bonne part, dans son mauvais positionnement rhétorique. Non que François Fillon soit un mauvais orateur. Il est l&rsquo;homme d&rsquo;excellents discours, en particulier à l&rsquo;Assemblée, aussi bien comme Premier ministre et comme opposant&nbsp;: son intervention dans le débat sur le &quot;mariage pour tous&quot; en 2013 était un chef d&rsquo;œuvre d&rsquo;argumentation. Davantage, il s&rsquo;est montré, lors du congrès fondateur des Républicains cette année, capable de retourner une salle à la fois dissipée et hostile qui est passée, en 15 minutes, des sifflets aux applaudissements.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;De fait, dans ces discours, il a fait preuve d&rsquo;une stratégie rhétorique efficace et constante : l&rsquo;argumentation rationnelle (logos) au service d&rsquo;un homme posé, cohérent et responsable (ethos). François Fillon est notamment un orfèvre du raisonnement par contradiction, le plus efficace pour détruire la position adverse. Il débusque les contradictions entre les faits et les discours, entre les discours eux-mêmes, mais plus encore au sein d&rsquo;un même discours&nbsp;: il sait ainsi pousser la déduction jusqu&rsquo;à l&rsquo;absurde pour démontrer l&rsquo;inconséquence des prémices de l&rsquo;autre camp. Ainsi, lors du débat sur le mariage pour tous, il prouve que l&rsquo;impératif d&rsquo;égalité ne peut que conduire, malgré les assurances du gouvernement, à l&rsquo;acceptation de fait puis de droit de la GPA et de la PMA (que cela soit un bien ou un mal n&rsquo;est pas la question ici). Même recours à la contradiction, mais cette fois à l&rsquo;égard de son propre camp, lors du congrès fondateur des Républicains&nbsp;: François Fillon a axé toute son argumentation sur l&rsquo;idée que le rêve d&rsquo;une&nbsp;alternance facile et molle serait contradictoire avec les valeurs historique du parti, son changement de nom et les défis du pays.Sans surprise, l&rsquo;on retrouve le même positionnement dans le débat avec Manuel Valls, avec l&rsquo;excellente ouverture sur &quot;où est donc passé le Manuel Valls qui disait que&hellip;&nbsp;?&quot;.Mais voilà, l&rsquo;élan a vite tourné court&nbsp;: après cette entrée en matière, François Fillon s&rsquo;est comme absenté du débat, laissant le Premier ministre dérouler sa propre rhétorique. Pire, son body language a été très contreproductif&nbsp;: repli dans le fauteuil, tête basse, parfois même signes d&rsquo;acquiescement. Quelques sursauts et une bonne fin, toujours sur le thème de la contradiction (notamment entre le Premier ministre et sa majorité) ont sauvé l&rsquo;exercice. Mais les résultats montrent que François Fillon n&rsquo;a pas vraiment gagné en crédibilité&nbsp;: 36% de messages favorables sur les réseaux sociaux contre 51%&nbsp;de négatifs (source&nbsp;: Vigiglobe) ; si Manuel Valls a fait pire encore (27% pour, 60% contre), c&rsquo;est avant tout du fait de ses propres failles rhétoriques qui le rendent de plus en plus inaudible.Et pourtant quel boulevard s&rsquo;offrait au challenger ! Non pas qu&rsquo;il s&rsquo;agissait &quot;d&rsquo;étriller&quot; le Premier ministre mais l&rsquo;occasion était rêvée de le décrédibiliser pour de bon : hausse sensible et inhabituelle du chômage en août, gestion de la crise des migrants, réformes a minima et inappliquées etc. Plus encore, Manuel Valls lui offrait sur un plateau les armes pour se faire battre&nbsp;: l&rsquo;utilisation, suicidaire dans son cas, du titre de l&rsquo;émission des &quot;paroles et des actes&quot;, les &quot;approximations&quot; sur la fiscalité et le CICE, la comparaison périlleuse des bilans entre les quinquennats Hollande et Sarkozy etc&hellip;François Fillon a totalement manqué de réactivité, alors même que les séquences précédentes où son interlocuteur était en difficulté manifeste lui auraient permis de pousser son avantage. Et pourquoi avoir repris si tard et si timidement son excellent &quot;le sang et les larmes, c&rsquo;est maintenant&quot;, renversement parfait du slogan &quot;hollandais&quot; de 2012 (toujours la contradiction&nbsp;!) qu&rsquo;il avait martelé avec bonheur lors son discours devant les Républicains&nbsp;?Nous tombons là sur un fait décisif&nbsp;: François Fillon est bien meilleur orateur que débatteur. Homme bien élevé, soucieux de la nuance, respectueux de l&rsquo;autre et sensible aux titres et aux positions, il lâche trop vite prise&nbsp;: en témoigne le titre de &quot;M. Le Premier ministre&quot; qu&rsquo;il donne d&rsquo;entrée de jeu à Manuel Valls&nbsp;: erreur de débutant qui vous place tout de suite en position d&rsquo;infériorité. Et erreur déjà commise par Philippe Seguin (le maître en politique de François Fillon) lors du débat de Maastricht, où son respectueux &quot;Monsieur le président de la République&quot; adressé à François Mitterrand avait réglé d&rsquo;emblée l&rsquo;issue du débat&hellip;.De là, l&rsquo;idée ancrée dans l&rsquo;opinion que François Fillon ne s&rsquo;affirme pas assez, qu&rsquo;il évite le conflit (avec Nicolas Sarkozy comme avec Manuel Valls) ou s&rsquo;y épuise (avec Copé); bref qu&rsquo;il est un excellent &quot;second de la classe&quot; mais n&rsquo;a pas &quot;la carrure présidentielle&quot;. A quoi s&rsquo;ajoutent un sourire trop rare (alors qu&rsquo;il peut être rayonnant), une empathie trop mesurée (alors qu&rsquo;il sait en faire preuve), des images et des formules trop comptées (alors qu&rsquo;il les maitrise parfaitement à l&rsquo;écrit). Enfin l&lsquo;usage d&rsquo;un registre où il y a forte concurrence à droite&nbsp;: le logos est aussi la spécialité d&rsquo;Alain Juppé et de Bruno Le Maire&hellip;Il faut donc que François Fillon s&rsquo;en distingue. La valeur de liberté, qu&rsquo;il a choisie de mettre en avant, avec courage dans un pays ultraconservateur, lui en donne l&rsquo;occasion rêvée. Mais encore faut-il qu&rsquo;il résolve le conflit entre cette valeur et le logiciel de la droite française (&quot;ordre et autorité&quot;), qu&rsquo;il incarne aussi bien par sa personnalité que par ses références dominantes. C&rsquo;est à ce prix qu&rsquo;il pourra vraiment libérer sa propre rhétorique.

François Fillon ou l’urgence de la "rupture"…rhétorique !

Une chose est sûre&nbsp;: la chemise (dé)trempée de la Rochelle n&rsquo;a pas fini de coller à la peau de Manuel Valls. A son avantage&nbsp;? Oui, dans la mesure où cette image met en valeur la sveltesse d&rsquo;un beau quinqua qui, malgré &laquo;&nbsp;l&rsquo;enfer de Matignon&nbsp;&raquo;, persiste à faire bien moins que son âge. Oui encore, parce qu&rsquo;elle est en parfaite adéquation avec l&rsquo;énergie sans limite d&rsquo;un homme qui, comme dit l&rsquo;adage, n&rsquo;hésite pas à &nbsp;&laquo;&nbsp;mouiller sa chemise&nbsp;&raquo;&nbsp;!Mais voilà, rien n&rsquo;est jamais sûr dans l&rsquo;art de la parole publique&nbsp;: l&rsquo;image pourrait aussi bien s&rsquo;inverser et évoquer une autre expression populaire à la connotation négative&nbsp;: &laquo; Eh bien, on peut dire qu&rsquo;il a eu chaud, celui-là&nbsp;!&nbsp;&raquo;. Une experte en la matière ne s&rsquo;y est pas trompée&nbsp;: Marine le Pen, qui a précisément tenté de tirer la chemise du Premier ministre vers l&rsquo;interprétation à charge, en dénonçant &laquo;&nbsp;l&rsquo;hystérie quotidienne et visible qui transpire d&rsquo;un Manuel Valls&nbsp;&raquo;.Invitation, en tout cas, à examiner le &laquo;&nbsp;non verbal&nbsp;&raquo; dans ses discours, avec ses forces et ses faiblesses&nbsp;: voix grave et bien posée mais qui ignore la modulation du timbre et ne varie que dans l&rsquo;intensité. Intensité qui demeure longtemps, trop longtemps, à un niveau maximal, au risque de saboter l&rsquo;effet recherché&nbsp;: non pas la force tranquille mais la débauche d&rsquo;énergie sans but et sans maîtrise, l&rsquo;impression d&rsquo;être constamment en &laquo;&nbsp;surrégime&nbsp;&raquo;, l&rsquo;hystérie comme l&rsquo;insinue Marine Le Pen. Mot qui est généralement accolé à Nicolas Sarkozy, avec lequel Manuel Valls est souvent comparé. A tort ou à raison dans les deux cas, mais peu importe&nbsp;: l&rsquo;impression de l&rsquo;auditoire est le seul juge de la réussite de la parole publique.Plus ennuyeux, le débit bien trop saccadé dans les moments &laquo;&nbsp;calmes&nbsp;&raquo; du discours, notamment au début, où Manuel Valls égrène chaque mot en négligeant de les grouper en unités de sens&nbsp;: erreur de débutant ou signe de fatigue&nbsp;? Heureusement à son avantage, la posture du corps, bien ancré dans le sol, l&rsquo;appui plein d&rsquo;autorité sur le pupitre, les mains démonstratives aux moments clefs et le regard qui sait passer de la braise au velours. Regard trop souvent absorbé par le déchiffrement de trop nombreux discours, et dont il devrait jouer davantage lors de ses interventions cruciales.Ces qualités sont au service d&rsquo;un ethos ultra présent&nbsp;: le discours de Manuel Valls est toujours un manifeste de valeurs collectives et d&rsquo;auto-affirmation. Son champ lexical est véritablement saturé d&rsquo;exigences morales&nbsp;: &laquo;&nbsp;lucidité&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;fermeté&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;humanité&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;autorité&nbsp;&raquo;, et surtout cette sacro-sainte &laquo;&nbsp;responsabilité&nbsp;&raquo;, le mot fétiche du Premier ministre, qu&rsquo;il oppose tout à tour aux frondeurs, à l&rsquo;opposition, au terrorisme, à la dureté des temps et au difficile exercice du pouvoir (&laquo;&nbsp;rien n&rsquo;est facile&nbsp;&raquo;, rappelle-t-il à l&rsquo;envi). Bien plus rare dans ce long catalogue de valeurs,&nbsp;la liberté, toujours minimisée, soit au profit de l&rsquo;égalité, soit de l&rsquo;autorité&nbsp;: préférences qui font de Manuel Valls un homme de la gauche autoritaire, dans la lignée revendiquée de Clémenceau.Proclamations assurément bien en phase avec son image d&rsquo;homme de caractère, de champion du &laquo;&nbsp;parler vrai&nbsp;&raquo; et de l&rsquo;apôtre de la sécurité et de l&rsquo;ordre, dans un camp politique qui a déserté ces thèmes depuis des décennies. On a loué avec raison la belle adresse à l&rsquo;Assemblée du 13 janvier en hommage aux victimes des attentats&nbsp;: les point forts en ont été la nomination du danger (&laquo;&nbsp;le terrorisme djihadiste&nbsp;&raquo;), à laquelle se refuse toujours le Président&nbsp;; le passage sur le &laquo;&nbsp;nouvel antisémitisme&nbsp;&raquo;, celui qui se propage sous l&rsquo;effet de l&rsquo;islamisme radical&nbsp;: rupture bienvenue avec la langue de bois habituelle à gauche selon laquelle l&rsquo;antisémitisme ne peut être que le fils du bon vieux maurrasisme/ lepénisme. A la question centrale &laquo;&nbsp;sommes-nous en guerre&nbsp;?&nbsp;&raquo;, le Premier ministre finit par donner une réponse claire&nbsp;: &laquo;Oui, la France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l&#39;islamisme radical&nbsp;&raquo; (mais réponse justement nuancée&nbsp;: pas en guerre contre les Musulmans).&nbsp;Enfin, la conclusion sur la &laquo;&nbsp;fierté d&rsquo;être Français&nbsp;&raquo; sonnait très juste, car venu d&rsquo;un jeune Catalan qui a &laquo;&nbsp;choisi la France&nbsp;&raquo;&nbsp;: adéquation parfaite (et émue) du message et de la personnalité.Ses vraies réussites oratoires correspondent à autant de moments de vérité personnelle, comme son premier discours de politique générale en avril 2014 où &laquo;&nbsp;il a fait du Valls&nbsp;&raquo;, comme l&rsquo;ont noté les observateurs&nbsp;: propos rassembleur bien au-delà de la gauche (&laquo;&nbsp;France&nbsp;&raquo; est le mot le plus cité) et résolument réformateur. Autre grande réussite, son intervention lors de la dernière motion de censure où ce grand fan de football a renvoyé dans leurs buts, aussi bien la gauche de la gauche que l&rsquo;opposition, en les plaçant systématiquement (le must de l&rsquo;argumentation&nbsp;!) devant leurs propres contradictions. Avec en filigrane, la création audacieuse d&rsquo;un nouveau groupe du &laquo;&nbsp;nous&nbsp;&raquo;&nbsp;: les réformateurs, contre &laquo;&nbsp;les autres&nbsp;&raquo;, les conservateurs de tout poil et de tout bord. Appel subliminal à la recomposition politique qui est, à l&rsquo;évidence, le fond de sa pensée.Mais voilà&nbsp;: lorsqu&rsquo;on est le premier ministre de François Hollande, &laquo;&nbsp;rien n&rsquo;est facile&nbsp;&raquo;, en effet&hellip; Comment s&rsquo;affirmer dans sa singularité de tempérament et de positionnement sous l&rsquo;œil d&rsquo;un président toujours soucieux de ménager la chèvre et le chou&nbsp;? Comment faire valoir son énergie lorsque l&rsquo;on est sans cesse retenu&nbsp;? Et comment surtout rendre crédible cette mâle assurance, lorsque ni les moyens, ni les résultats ne sont là&nbsp;?Eh bien, en faisant justement du &laquo;&nbsp;hollandisme&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est-à-dire en reprenant les trucs et tics rhétoriques chers au Président. D&rsquo;où les contradictions, comme cette &laquo;&nbsp;fermeté bienveillante&nbsp;&raquo; prônée dans les banlieues, tout en refusant tout &laquo;&nbsp;paternalisme&nbsp;&raquo;&hellip; dont cette &laquo;&nbsp;fermeté bienveillante&nbsp;&raquo; est précisément la définition&nbsp;! D&rsquo;où le balancement constant entre une proposition et son contraire (cf. le tout récent statut intangible de la fonction publique et le soutien à Emmanuel Macron), ce &laquo;&nbsp;d&rsquo;un côté de l&rsquo;autre&nbsp;&raquo;, ce &laquo;&nbsp;ceci sans oublier cela&nbsp;&raquo;, qui est la marque de fabrique de la rhétorique présidentielle.Cette contamination&laquo;&nbsp;hollandaise&nbsp;&raquo; explique la rareté d&rsquo;une thèse indiscutable (&laquo;&nbsp;où en sommes-nous&nbsp;?&nbsp;&raquo;) et d&rsquo;un message univoque (&laquo;&nbsp;que devons-nous faire&nbsp;&raquo;&nbsp;?). Ainsi du calamiteux discours de politique générale du 16 septembre 2014, uniquement destiné à rassurer les frondeurs, dont le message était en substance&nbsp;: &laquo;&nbsp;nous allons réformer sans cesse et sans hésitation&hellip; sans toucher à rien&nbsp;!&nbsp;&raquo;Trop de décalages, de retards et de fausses habiletés risquent fort à la longue d&rsquo;user l&rsquo;image de&nbsp; Manuel Valls, entre un volontarisme proclamé urbi et orbi et la plate réalité des demi-mesures adoptées (crise migratoire), leur inconséquence (&laquo;&nbsp;nous sommes en guerre&nbsp;&raquo; mais ne la faisons pas vraiment) voire leur contradiction patente (politique économique). Dans l&rsquo;immédiat, ils sont sans doute la raison, en dehors d&rsquo;un &laquo;&nbsp;sang chaud&nbsp;&raquo; naturel, de ces poussées de sueur qui pourraient bien traduire un conflit intérieur entre pensée et dire.Sa réussite politique dépend donc de changements rhétoriques majeurs : d&rsquo;abord la rupture avec la langue technocratique et le désastreux système des &laquo;&nbsp;fiches&nbsp;&raquo; fournies par les cabinets ministériels&nbsp;; ensuite un plus grand recours aux images, au storytelling et à la synthèse du propos qui se perd trop souvent dans le détail analytique. Enfin et surtout, une thèse claire et pertinente appuyant un message fort et crédible.Autrement dit, Manuel Valls ne sera un grand orateur que lorsqu&rsquo;il sera en accord avec lui-même. En 2022, comme il vient de le confirmer au détour d&rsquo;une (fausse) blague&nbsp;? Qui sait, peut-être avant?

Manuel Valls ou la sueur du conflit intérieur

Au risque de se faire traiter de néo-fasciste, l&rsquo;on affirmera d&rsquo;emblée que Marine Le Pen est une excellente oratrice. En témoigne, s&rsquo;il en était besoin, son véritable tour de force rhétorique de dimanche dernier aux universités du FN&nbsp;: un long discours d&rsquo;une heure et quart, où elle a tenu la distance sans fléchir, tout en étant à son meilleur au début et à la fin&nbsp;: toujours soigner la première et la dernière impression !Commençons par le &quot;non verbal&quot;, langage du corps et usage de la voix. Non pas, comme l&rsquo;affirme à tort un vrai mythe de la &laquo;&nbsp;com&rsquo;&nbsp;&raquo;, parce que ces éléments seraient bien plus importants que le propos lui-même&nbsp;; mais parce que leur congruence avec le discours est absolument décisive pour la délivrance du message. En la matière, sans avoir les ressources d&rsquo;un Obama, Marine Le Pen est efficace&nbsp;: bien ancrée dans le sol, elle englobe l&rsquo;ensemble de l&rsquo;auditoire (pourtant considérable) par l&rsquo;aller et retour constant du regard. Corps bien droit mais qu&rsquo;elle fléchit souvent avant de le redresser vivement, incarnant une sorte d&rsquo;énergie féline, prête à bondir sur l&rsquo;adversaire. Les mains sont utilisées à bon escient et (à la différence de Nicolas Sarkozy) avec économie&nbsp;: index levé pour demander l&rsquo;attention ou souligner le propos&nbsp;; doigts qui comptent les arguments en même temps que l&rsquo;orateur les énumère&nbsp;; poings qui se referment pour marteler une assertion&nbsp;; mains qui balaient l&rsquo;objection ou moulinent l&rsquo;air pour mimer le vide de la parole adverse. Puis qui s&rsquo;ouvrent, paumes vers le haut et bras écartés, en signe d&rsquo;accueil, d&rsquo;appel adressé au public et, au-delà, au &laquo;&nbsp;peuple&nbsp;&raquo;. Invitation accompagnée d&rsquo;un large sourire&nbsp;: sourire qui se fait grinçant dans les nombreux moments de sarcasme accablant l&rsquo;adversaire.La voix est naturellement grave et ne dérape jamais dans l&rsquo;aigu un rien éraillée par la cigarette sans doute, mais cela convient parfaitement au registre de la&nbsp;gouaille populaire &ndash;ou populiste- dont elle use si volontiers. Contrairement à la &laquo;&nbsp;conversation naturelle&nbsp;&raquo; (et aux mauvais orateurs&nbsp;!), aucune baisse du niveau sonore en fin de phrase, car s&rsquo;y trouve souvent le mot-clef. Aucun &laquo;&nbsp;euh&nbsp;&raquo;, non plus, contrairement à François Hollande et un usage très maîtrisé du silence et de ses multiples usages&nbsp;: respiration, interpellation, attente des applaudissements etc&hellip;; D&rsquo;où une certaine lenteur de la diction, en moyenne autour de 150 mots/ minute, mais qui n&rsquo;est jamais uniforme et qui, là encore, convient très bien à la tonalité générale choisie&nbsp;: la solennité.La richesse du non verbal a pour symétrique la véritable encyclopédie du discours mise au service du propos&nbsp;: questions rhétoriques, images populaires (&laquo;&nbsp;roulés dans la farine&nbsp;&raquo;), sentences, oxymores (&laquo;&nbsp;belle âmes molles&nbsp;&raquo;), rythmes ternaires&hellip;La figure dominante reste celle de l&rsquo;accumulation&nbsp;: accumulation des défis, des dangers, des fautes, des contradictions, des scandales de l&rsquo;adversaire. Accumulation accentuée par le martèlement des anaphores et organisée en gradation pour assurer la montée de l&rsquo;indignation. L&rsquo;argumentation vise sans détour les trois ressentiments les plus puissants dans l&rsquo;être humain: ressentiments&nbsp;devant la menace, devant l&rsquo;injustice et devant l&rsquo;absurde. Car la thèse centrale est elle aussi sans détour&nbsp;: le &laquo;&nbsp;laxisme&nbsp;&raquo; dans tous les domaines du PS et de l&rsquo;UMP (jamais Marine Le Pen n&rsquo;emploie la nouvelle appellation des &laquo;&nbsp;Républicains&nbsp;&raquo;) met en péril la survie même de la France. Le message est tout aussi limpide, décliné&nbsp;à volonté à travers la métaphore filée de la protection: &laquo;&nbsp;Nous serons le bouclier des Français&nbsp;&raquo;.De là un discours littéralement hystérisant, chauffant la salle à blanc dans l&rsquo;attente impatiente de la délivrance&hellip; que l&rsquo;orateur va, à intervalles réguliers, offrir par son ethos (désintéressement, lucidité, et dévouement) et tel élément de son programme politique. Avant de repartir dans une nouvelle séquence d&rsquo;hystérisation, ponctuée par un nouveau message de réassurance&hellip;Le procédé central est celui de l&rsquo;inversion de la charge,&nbsp;selon l&rsquo;adage, lui aussi populaire, du &quot;c&rsquo;est celui qui le dit qui l&rsquo;est&nbsp;!&quot; : partant de l&rsquo;implicite (&quot;on nous accuse de&hellip;&quot;) Marine Le Pen renverse systématiquement l&rsquo;accusation&nbsp;: on nous dit brutaux et inhumains, mais &quot;où est la cruauté, où est l&rsquo;inhumanité au final ?&quot; Par une triangulation systématique (l&rsquo;apport de Florian Philippot) les services publics, la défense des faibles, la justice (leitmotiv du discours) sont arrachées à la gauche et captées par le FN. Ce qui rend au passage totalement dérisoire la sempiternelle illusion qu&rsquo;il ne menace que la droite...L&rsquo;antithèse structure donc logiquement le discours, à travers une mise en scène des plus simples et de plus efficaces. Les &quot;forces agissantes&quot; de cette dramaturgie sont clairement identifiées&nbsp;: face à &quot;eux&quot; (l&rsquo;UMPS, l&rsquo;Europe, l&rsquo;Allemagne, les mondialistes les multiculturalistes, les &laquo;&nbsp;pédagogistes&nbsp;&raquo; la finance, les islamistes etc&hellip;) le &quot;nous&quot; se construit, aussi rassembleur que possible, dans une vaste opération d&rsquo;attrape-tout électoraliste&nbsp;: paysans, retraités, salariés, médecins, enseignants et même &quot;musulmans&quot; soigneusement distingués des &quot;islamistes&quot;. Bref &quot;la majorité silencieuse&quot; qui doit sortir de son silence: Marine, nouvelle Jeanne d&rsquo;Arc, ne lui offre-t-elle pas sa voix&nbsp;?Mais voilà&nbsp;: la pente de l&rsquo;imaginaire collectif est fatale et la thématique glisse de l&rsquo;accusation de &laquo;&nbsp;laxisme&nbsp;&raquo; (première partie) à celle de &laquo;&nbsp;crime&nbsp;&raquo; (2ème partie). Non plus seulement incompétence, impuissance et illusion, mais volonté de &quot;destruction&quot;, application de &quot;sinistres projets&quot;, &quot;instrumentalisation de la mort&quot;. La bonne vieille &laquo;&nbsp;théorie de la conspiration&nbsp;&raquo; émerge au fil du discours. Avec tous ses marqueurs, si bien identifiés par Raoul Girardet dans ses Mythes et mythologies politiques. Cet ennemi est toujours &laquo;&nbsp;sans visage&nbsp;&raquo;&nbsp;: finance &laquo;&nbsp;sans visage&nbsp;&raquo; dit Marine Le Pen reprenant à dessein les mots de François Hollande en 2012 (nouvelle triangulation&nbsp;!). Donc aux cent visages, que l&rsquo;orateur-sauveur doit &laquo;&nbsp;démasquer&nbsp;&raquo; sans relâche auprès du peuple abusé. Visages évidemment des &quot;étrangers&quot; amalgamés, dans, un raccourci très parlant, avec les &quot;clandestins&quot;. Etrangers &quot;disséminés jusque dans les plus petits villages de France&quot; par &quot;la politique de peuplement de Manuel Valls, clin d&rsquo;œil évident au mythe du &quot;Grand Remplacement&quot;.&quot;Votre nom c&rsquo;est l&rsquo;étranger&quot; disait Michelet, aussi grand républicain que grand conspirationniste&nbsp;: et Marine Le Pen d&rsquo;égrener, avec une gourmandise suspecte, ces noms étrangers, des terroristes de 2015 à&hellip; Najat Vallaud-Belkacem&nbsp;! Sans manquer de jouer sur ces noms en faisant d&rsquo;Alain Juppé un &quot;Alain Vallaud Belkacem&quot;, la Ministre de l&rsquo;éducation devenant elle&hellip; &quot;Najat&nbsp;Juppé&quot; : immigrés et &laquo;&nbsp;immigrationnistes&nbsp;&raquo;, même combat&nbsp;!Marine Le Pen renoue ainsi avec les attaques ad hominem et ad nominem typiques de son père comme avec son thème fondamental&nbsp;: l&rsquo;immigration, qui occupe l&rsquo;essentiel de son propos et qui offre, dans la plus pure veine paternelle, la providentielle synthèse de tous les problèmes des Français&nbsp;: école, santé, chômage, délinquance, déficits, malaise identitaire etc&hellip;.Un expert qui n&rsquo;est autre que Jean-Marie Le Pen lui-même ne s&rsquo;y est pas trompé, en saluant un discours &quot;100% lepéniste&quot; (à quelques résidus &quot;philippiens&quot; près, corrigerons-nous). Lepéniste, il l&rsquo;est en effet par sa thématique dominante et son talent&nbsp;incontestable!De quoi sonner le tocsin rhétorique auprès de tous les opposants au FN&nbsp;: Cessez de tergiverser, de contourner ou de diaboliser. Cessez de bafouiller par peur de &quot;parler&nbsp;comme Marine le Pen&quot;. Commencez, pour la contrer, par parler aussi bien qu&rsquo;elle&nbsp;!Aux armes, Orateurs&nbsp;!

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Marine Le Pen ou la rhétorique du mythe

Les chiffres sont tombés et comme souvent, ils ne sont pas glorieux. Selon &nbsp;le baromètre mensuel Ifop-JDD, la cote de popularité de François Hollande a chuté d&#39;un point : 23% d&#39;opinions favorables, soit 16 points de moins que Manuel Valls qui en perd tout de même 4 d&#39;opinions favorables sur le mois de septembre. &nbsp;Ainsi, 77% des personnes interrogées se disent insatisfaites des dernières actions du chef de l&#39;Etat.Comme le souligne le JDD, deux dossiers brûlants handicapent le président : la baisse des impôts à laquelle les Français ne croient pas véritablement et l&#39;accueil des migrants. &quot;Est-ce qu&#39;on peut en accueillir tant alors qu&#39;il y a tant de pauvres en France?&quot; s&#39;est interrogée l&#39;une des personnes sollicité par l&#39;Ifop. Et une autre d&#39;ajouter : &quot;On va leur donner des subventions alors qu&#39;on ne cesse de dérembourser des médicaments.&quot;&nbsp;Manuel Valls affiche toujours une cote de popularité supérieure à François Hollande (39%) et se voit faire les mêmes reproches au sujet de la crise migratoire. Selon le JDD, &quot;les plus forts soutiens de Manuel Valls sont les professions libérales et cadres supérieurs (44%)&quot; et &quot;les 18-24 ans (48%)&quot;. &nbsp;